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06-08-16/ REVUE DE LA PRESSE CONGOLAISE DE CE SAMEDI (CongoForum)

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06-08-16/ REVUE DE LA PRESSE CONGOLAISE DE CE SAMEDI (CongoForum) Jeudi 4 août, au cours d’une conférence de presse conjointe avec son homologue ougandais Yoweri Kaguta Museveni, dans le district ougandais de Kasese, Joseph Kabila a annoncé la tenue des élections après l’opération d’enrôlement des électeurs, lancée le 31 juillet dernier au Nord-Ubangi par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). La rencontre sportive de football Mazembe contre Renaissance, prévue ce dimanche à Kindu est reportée sine die sur demande du club lushois qui déclare avoir un agenda très chargé.

Processus électoral

Radio Okapi nous informe de ce que Joseph Kabila, célèbre pour son mutisme, a parlé à Kasese. Mais il n’a rien dit de bien nouveau et, en tous cas, n’a toujours pas dévoilé ses intentions quant au troisième mandat qu’on le soupçonne de convoiter. Enfonçant résolument des portes ouvertes, il a indiqué qu’après l’enrôlement des électeurs, la commission électorale va procéder à la publication du calendrier électoral et enfin convoquer les élections.

«Pour le moment, nous avons débuté l’enrôlement des électeurs depuis le 31 juillet. C’est un processus qui prendra du temps jusqu’à ce que nous ayons un fichier électoral et dès que ce fichier est disponible alors un calendrier électoral sera publié. C’est comme ça que les élections sont organisées. Donc, soyez attentifs, car lorsque la date sera fixée par la CENI, je serai le premier à l’annoncer et vous en serez informés», a souligné JKK.

La CENI a lancé, fin juillet dernier, l’opération d’enrôlement des électeurs, à Gbadolite, chef-lieu du Nord-Ubangi. Elle a choisi cette nouvelle province comme province pilote pour cette opération avant de l'étendre dans le reste du pays. Le président de la CENI avait assuré que cette opération [enrôlement] marque le début du processus qui aboutira à la tenue des élections générales. En février dernier, Corneille Nangaa avait indiqué que l’opération de révision du fichier électoral pourra durer au minimum seize ou dix-sept mois.

Mais, toujours d’après Radio Okapi, « la société civile du Nord-Ubangi émet des doutes sur la poursuite de l’opération d’enrôlement des électeurs suite au mauvais état des routes de cette nouvelle province issue du démembrement de l’Equateur ».

Son président, Taylor Taima, a exprimé ses inquiétudes vendredi 5 août au cours d’une rencontre à Gbadolite avec le gouverneur du Nord-Ubangi, Marie-Thérèse Gerengbo.

L’opération d’enrôlement des électeurs a été lancée le 31 juillet dernier par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) dans cette province. Elle doit durer trois mois.

« Les routes sont en très mauvais état en cette période pluvieuse et cela risque de rendre certaines localités les plus reculées inaccessibles. Si les agents recenseurs de la CENI pourront arriver tant bien que mal aux centres d’enrôlement, il sera difficile pour un bon nombre des habitants en âge de voter de faire le déplacement pour atteindre ces centres », a estimé Taylor Taima.

Le président de la société civile du Nord-Ubangi dit craindre également que le délabrement actuel du réseau routier n’entrave l’opération d’enrôlement dans certains coins de cette province. « Tous les axes routiers du Nord-Ubangi sont en très mauvais état notamment l’axe Gbadolite-Businga avec un grand bourbier à 12 km de Businga-centre. La route de Bosobolo qui venait d’être rouverte par le HCR est redevenue peu praticable. L’axe Kotakoli-Yakoma est pratiquement coupée par des inondations sur une bonne distance», a expliqué Taylor Taima.

Pour sa part, le gouverneur du Nord-Ubangi, Marie-Thérèse Gerengbo, a promis, sans plus de détails, d’utiliser des moyens de bord pour faire face à ce problème pour permettre un enrôlement massif des électeurs dans sa province. Entre-temps, des avions cargos continuent d’acheminer des kits électoraux à Gbadolite, chef-lieu du Nord-Ubangi.

(Des difficultés de ce genre étaient presque inévitables à proximité de l’équateur, où les pluies sont presque constantes. Par contre, dans la partie de la RDC située au sud de l’équateur, les pluies se produisent majoritairement entre octobre et mai, ce qui veut dire qu’actuellement elles connaissent la saison sèche. Par contre, dans trois mois, elles connaîtront à leur tour la saison des pluies. Or, c’est alors que les routes, mauvaises en

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toutes saisons, sont changées en général en fondrières impraticables par la boue et les inondations. Ce n’est plus le calendrier du glissement, c’est celui du dérapage… meme pas contrôlé. NdlR)

Le Potentiel constate « Kabila dicte la cadence : pas de calendrier sans fichier électoral ».

Selon ce quotidien, JKK, lors de son entrevue avec son homologue Museveni, aurait déclaré que, tant que la Ceni n’aura pas terminé les opérations de révision du fichier électoral, il ne faut pas s’attendre à la publication d’un quelconque calendrier électoral. D’après l’analyse de notre confrère, pareille déclaration est de nature à renvoyer les élections aux calendes grecques.

UDPS

Sous le titre « Audience fixée au mardi 16 août 2016, UDPS : André Atundu porte plainte contre Tshisekedi à Matete », La Prospérité annonce la répétition d’un « gag » qui revient régulièrement, en particulier lors des échéances électorales : la bagarre aurour du sigle

« UDPS ».

Ce journal précise que hier c’est Lusanga Ngiele qui déniait à Etienne Tshisekedi la qualité de fondateur du parti. Et aujourd’hui, affirmant vouloir réunifier toutes les ailes de l’UDPS, c’est André Kalonza Ilunga, sous sa casquette de Président intérimaire de l’UDPS, qui déclare avoir porté plainte au tribunal de paix de Matete pour faux en écriture. IL est indiqué dans l’article que l’audience est fixée au mardi 16 août 2016.

« Dialogue »

La Prospérité titre à la Une « Décrispation du climat politique. Dialogue : le G7 exige des signaux forts ! ».

Ce quotidien fait remarquer ici que les membres du Groupe international de soutien à la Facilitation du Dialogue travaillent d’arrache-pied car, après avoir rencontré, jeudi 4 août, Etienne Tshisekedi, Président du Comité des Sages du Rassemblement des Forces Politiques et Sociales acquises au Changement, ils étaient, vendredi 5 août, au siège de l’Union Africaine à Kinshasa, pour échanger avec les dirigeants du G7.

Selon La Prospérité, la rencontre a permis à cette plateforme politique de réaffirmer, sans ambages, les préalables posés jusqu’ici, par le Rassemblement de l’Opposition. Le G7 a insisté particulièrement, sur la cessation des tracasseries judiciaires et la décrispation du climat politique, à en croire ce journal, allusion faite, comme il fallait s’y attendre, à la libération des prisonniers dits politiques et, surtout, aux démêlées judiciaires jugées saumâtres contre Katumbi, son candidat affiché pour la course à la prochaine présidentielle en RD. Congo. Somme toute, le G7 exige des signaux forts en termes d’actes de nature à désamorcer la crise politique dont les prémisses, déjà perceptibles sur l’agora politique, risquent d’atomiser, à la fois, le dialogue et les élections.

(Comme l’écrivait Le Potentiel au lendemain du retour de Tshisekedi « Rapport des forces politiques - 50.000 contre 1.000.000, il n’y a pas match ». Les événements des derniers jours de juillet constituent un poids sur la balance, dans le plateau de l’Opposition. Mais la

« partie de bras de fer » engagée à propos du « dialogue » reste la même. C’est bien l’UA qui a désigné le « complicateur » Edem Kodjo, auquel Kinshasa voudrait à présent adjoindre Sassou Nguesso. Il est permis de ne pas être ébloui par la prestation d’Edem Kodjo, et de se demander pourquoi l’UA n’a pas plutôt désigné comme « facilitateur » un ex-président africain ayant « rendu son tablier » sans problème, comme Thabo Mbeki, Jakaya Kikwete ou Goodluck Jonathan. Mais faire rentrer en scène Sassou Nguesso ! Sur le plan intérieur, c’est un spécialiste de la prolongation des mandats, des élections truquées, visiblement décidé à rester président à vie. Du point de vue rdcongolais, c’est l’organisateur de « ratonnades » et d’expulsions brutales au détriment des originaires de RDC, et le « facilitateur » - de loin et a posteriori – des « Concertations nationales » de sinistre mémoire.

Son entrée en scène va faire faire au « Dialogue un pas de plus vers le capharnaüm. La « Communauté internationale » exige que les dirigeants congolais organisent l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel. C’est-à-dire avant la fin de l’année en cours.

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Soit, au plus tard le 20 novembre prochain. Dans leur argumentaire, ces « grands » du monde évoquent les risques d’une instabilité généralisée en RD Congo, si jamais ce scrutin tant attendu n’était pas organisé dans les échéances prévues. Mais l’instabilité brandie en cas de non-tenue de la présidentielle dans les délais pourrait tout aussi bien surgir à l’issue des scrutins mal organisés dans le timing.

Faites le total : les Congolais, qui doivent impérativement se méfier les uns des autres, sont invités à se rendre à l’invitation d’un « facilitateur » qui ne convainc personne et est donc davantage un « complicateur » et de la « communauté internationale » dont on sait qu’elle ne veut pas que du bien à la RDC et que ses membres se tirent dans les pattes, pour organiser des élections qui ne seront pas crédibles si on les organise dans les délais et qui ne seront pas acceptées si cela ne se fait pas, au cours d’un « dialogue » que chacun définit de façon différente. Etonnez-vous, après ça, que la mayonnaise ne prenne pas ! Tout ce qui est dit du « dialogue » renvoie à la partie de bras de fer engagée entre deux conceptions du « dialogue». JKK a fait étalage de sa volonté de suivre le processus programmé par la CENI, et l’opposition « conclaviste » de son soutien à Tshisekedi. Le « Dialogue » sombrera dans l’insignifiance si Kodjo ne parvient pas à y obtenir la présence au moins de l’UDPS, désormais renforcée d’une bonne partie de l’Opposition. L’UDPS persiste dans son attitude habituelle : répondre « Oui, Mais… » et développer le « mais » en une suite successive de revendications.

Ce que la MP veut par dessus tout c'est un Dialogue National similaire aux Concertations Nationales, un forum sévèrement surveillé, formaté à l’avance et dont les résolutions seront transmises au « Chef de l'Etat » qui a son tour les transmettra aux institutions nationales pour analyse, observation et exécution éventuelle. Dans ce cas, l'UDPS ne voit pas pourquoi elle participerait à un tel forum inutile.

L'UDPS veut obtenir la garantie que les Résolutions du Dialogue National seront impératives et opposables à tous et désire avoir, quant à la liberté des débats et la sécurité des participants, des garanties internationales. Dans un premier temps, il s’agissait d’en confier toute l’organisation à la MONUSCO et peut-être même de se réunir à l’étranger.

Plus récemment, il s’agit d’un « encadrement » par une brochette d’organisations qui devrait comprendre l’ONU, l’UE, l’UA, l’OIF et les USA.

En caricaturant à peine les choses, on pourrait dire que la MP a pour idéal une sorte de « Congrès du PPRD et alliés + quelques invités », axé sur la perpétuation du régime actuel, et que l’UDPS verrait volontiers une sorte de Tribunal de la Communauté Internationale se charger enfin de « régler le contentieux électoral de 2011 », c’est-à-dire, dans l’imaginaire udepsien , de proclamer Tshisekedi président.

Si un tel Tribunal existait, il commencerait par mettre équitablement aux fers tant Kabila que Tshisekedi, pour avoir l’un et l’autre tenté de prendre le pouvoir après des élections NULLES en 2011.

En effet, les élections de novembre-décembre 2011 ont donné des résultats qu'une personne avisée, réfléchie, d’esprit libre et critique devrait considérer comme nuls, donc sans gagnant. La suite aurait dû être l'annulation pure et simple, des enquêtes sérieuses pour déterminer les causes et origines des irrégularités, qu’on punisse les responsables, qu’on les écarte définitivement de toute responsabilité électorale et qu’on en tire les conséquences quant aux futures élections. Il aurait dû y avoir une protestation générale des démocrates de tous les partis, car un démocrate ne saurait accepter que son candidat gagne par la fraude, la corruption et le mensonge. Au lieu de quoi on n’a assisté qu’à des élucubrations pour défendre la victoire « officielle » de JKK, et à d’autres élucubrations pour défendre celle, tout aussi hypothétique, de Tshisekedi.

Les élections de 2011 avaient été organisées, tout comme celles de 2006, en faisant voter un « corps électoral inconnu », faute de recensement préalable de la population. Ce fait à lui seul suffirait à en « plomber » gravement la crédibilité. Elles ont, par-dessus le marché, été entachées de fraudes et de manipulations à un point tel qu’elles ont donné des résultats qui, en réalité, sont encore inconnus1. Toute autorité prétendue ne relève plus que de la

1Les fraudes les plus importantes ayant eu lieu au niveau des centres de compilation, on ne pourrait se rapprocher de la « vérité des urnes » qu’en se référant aux PV des bureaux de vote, dernière opération publique et vérifiée par des témoins. Les chiffres de la CENI ne s’accompagnaient pas de ces PV, les chiffres publiés par l’UDPS, non plus. L’Eglise n’a jamais publié les résultats partiels constatés par ses observateurs malgré cette déclaration du

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force, de l’intimidation, d’un coup d’état de fait. Le principal ressort de ce coup d’état consiste à progresser, comme si de rien n’était, dans les tâches qui suivent normalement une élection et à mettre le pays et le monde devant le fait accompli. En d’autres termes, il y a en RDC un Président, des ministres, des autorités DE FAIT. Il n’y en a plus aucune qui puisse légitimement se dire « autorité de droit ». NdlR)

Sport

La Manchette révèle : « Super coupe du Congo de football : le match Mazembe- Renaissance reporté sine die ». Ce derby qui devait se jouer dimanche à Kindu est reporté à une date non encore précisée, sur demande de team lushois noir et blanc, annonce ce journal. Les Corbeaux lushois qui doivent se déplacer pour Accra au Ghana, en prévision de leur match contre Meadema, le mardi 16 août prochain, pour le compte de la 5ème journée des quarts de finale du groupe A, n’auront pas le temps nécessaire pour se concentrer sur cette rencontre capitale, dans la mesure où il n’y a pas de vol direct entre Lubumbashi et Kindu.

Presse et documents étrangers

Etienne Tshisekedi, le sphinx de retour à Kinshasa Cyril Bensimon - LE MONDE - 28.07.2016

À 83 ans, il n’a plus la même verve, la même fougue, sa santé décline mais Etienne Tshisekedi n’a rien perdu de sa popularité. Son retour à Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo (RDC), mercredi 27 juillet, en a été une éclatante démonstration. Revenu de Belgique où il se soignait depuis deux ans, le vieil opposant a été escorté jusqu’à son domicile par des dizaines de milliers de supporters, persuadés que la réapparition du « Sphinx de Limete » sur la scène politique congolaise ouvre la voie au départ du pouvoir du président Joseph Kabila. « Sa présence donne de l’espoir à notre peuple. Avec lui, nous saurons faire comprendre à nos amis de la majorité présidentielle qu’ils doivent quitter le pouvoir pacifiquement » veut croire Augustin Kabuya, l’un des cadres de son parti, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).

Depuis près de 40 ans, Etienne Tshisekedi s’est opposé à tous les maîtres du pays. Mobutu Sese Seko qu’il a servi puis combattu, son tombeur Laurent-Désiré Kabila, puis l’héritier et successeur de ce dernier, Joseph Kabila. Sans jamais arriver à s’asseoir sur le fauteuil présidentiel dont il se considère comme le seul occupant légitime. Plus encore depuis l’élection de 2011, emportée par Joseph Kabila dans la plus totale opacité.

« Glissement » et tensions

Il y a un an, en mai 2015, l’inflexible Tshisekedi avait semblé plier devant les appels du pouvoir. Des négociations secrètes avaient été entamées entre des émissaires de la présidence et ceux de son parti. Alors que ces derniers en étaient à discuter des postes ministériels qu’ils se verraient attribuer à l’issue de ces pourparlers tenus à Venise ou Ibiza, Etienne Tshisekedi avait fait volte-face, mettant subitement un terme à ces discussions.

L’icône de l’opposition congolaise est davantage connue pour son impulsivité que pour sens politique.

Depuis, la tension n’a cessé de croître en RDC dans la perspective d’une élection présidentielle prévue en novembre mais dont tous les observateurs prévoient son report à une date inconnue. Ayant échoué à faire modifier la Constitution qui lui interdit de briguer

Cardinal Laurent Monsengwo, archevêque de Kinshasa : « Les résultats publiés ne sont conformes ni à la justice ni à la vérité “. On n’a donc que des résultats dont la crédibilité est nulle. Les législatives ont été dignes de la présidentielle, sinon pires. Mais la CSJ a entériné les résultats de la présidentielle et des législatives. Le temps s’est écoulé, les résultats des élections demeureront à jamais inconnus. C’est d’autant plus certain que la CENI a fait incinérer tous les documents relatifs aux élections de 2006 et 2013 en octobre 2014, soit, en ce qui concerne les plus récents, après un délai de trois ans seulement, anormalement court pour ce genre d’affaires

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un troisième mandat, Joseph Kabila et son entourage proche s’emploient désormais à faire

« glisser », selon l’expression en vigueur en RDC, le calendrier électoral.

La Cour constitutionnelle est venue sans surprise appuyer la stratégie du clan présidentiel, considérant dans un arrêt rendu en mai que le Chef de l’état pourra rester en fonction jusqu’à la prestation de serment de son successeur. Mais cette hypothèse est refusée par une large partie de l’opposition qui promet de multiplier les marches, toujours à hauts risques, pour contraindre le pouvoir d’organiser le scrutin à la date du 27 novembre.

Dialogue

S’il n’a jamais montré la moindre considération pour les autres leaders de l’opposition comme pour les diplomates qui se sont succédé à Kinshasa, ce qui l’a privé de nombreux soutiens et lui a peut-être coûté la victoire en 2011, Etienne Tshisekedi a cependant joué le jeu, le mois dernier à Genval, une banlieue huppée de Bruxelles, du rassemblement avec les autres adversaires du pouvoir en place. Y compris les plus récents comme Moïse Katumbi, condamné très opportunément en juin à trois ans de prison dans une affaire de litige immobilier où l’une des juges vient de dénoncer les pressions qu’elle aurait subies pour rendre inéligible l’ancien gouverneur de la province du Katanga.

Les deux hommes que tout oppose en apparence jouent désormais la même partition : celle du refus du dialogue promu par le pouvoir et qui apparaît pour nombre d’observateurs comme une manœuvre dilatoire de la présidence.

Pourront-ils cependant faire l’économie de cette discussion souhaitée désormais par les principales chancelleries, la très influente église catholique et même des organisations de défense des droits de l’homme ?

« Le pouvoir sait qu’il est en crise de légitimité et il a un réel besoin du dialogue, analyse une source diplomatique. Contrairement à ce qu’il prétend, il n’a plus que cinq jours et demi de réserves de change dans ses caisses, selon des banquiers de la place, et il n’est pas évident que l’Angola et l’Afrique du sud soutiennent jusqu’au bout Joseph Kabila. Du côté de l’opposition, tout le monde a conscience du risque de violences et certains font monter les enchères en raison de la possibilité de formation d’un gouvernement de transition. »

L’alternative à ce dialogue qui pourrait se conclure par un grand marchandage des maroquins ministériels est une confrontation dans la rue. Pour l’heure, personne en RDC n’exclut cette seconde hypothèse.

RDC: le retour de l'opposant historique peut-il débloquer la crise politique?

AFP- le 29 juillet 2016

Kinshasa - Le retour au pays de l'opposant historique congolais Étienne Tshisekedi, 83 ans, pourrait selon des politiques locaux débloquer le processus de "dialogue national" vers des

"élections apaisées", pour lequel font pression la communauté internationale comme l'église.

M. Tshisekedi, président du "Rassemblement", coalition de forces d'opposition nouvellement créée en Belgique, est rentré à Kinshasa mercredi après deux ans d'absence, notamment pour raison médicale, accueilli chaleureusement par plusieurs centaines de milliers de partisans massés de l'aéroport jusqu'à sa résidence située 15 km plus loin.

"L'espoir de toute la classe politique est que le retour d'Étienne Tshisekedi vienne enlever le doute quant à la participation du Rassemblement" au "dialogue national" proposé par le pouvoir, a déclaré à l'AFP André-Alain Atundu, porte-parole de la Majorité présidentielle (MP).

Le "Rassemblement" a pourtant tout récemment récusé le facilitateur désigné par l'Union africaine (UA) Edem Kodjo, pour l'organisation de ce dialogue politique national, l'accusant de jouer le jeu du président congolais.

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L'opposition espère désormais que la popularité de son vieux chef de file permettra de mettre la pression pour obtenir des avancées face au président Joseph Kabila, soupçonné de vouloir demeurer au pouvoir au-delà de la fin de son mandat en décembre, au mépris de la Constitution, en commençant par retarder l'élection présidentielle.

"L'accueil délirant réservé à Tshisekedi est un message adressé au facilitateur Edem Kodjo", qui doit en tirer les conséquences politiques, souligne ainsi le député Martin Fayulu, président d'un petit parti d'opposition membre du "Rassemblement".

"Le soutien populaire à M. Tshisekedi exprime des attentes" des Congolais et devrait pousser le facilitateur à "recentrer" sa perception des forces en présence, renchérit le sénateur d'opposition Jacques Djoli.

- 'vaincre les réticences ' -

Côté majorité, le sénateur Léonard She Okitundu juge pour sa part que M. Tshisekedi doit maintenant "vaincre les réticences des anti-dialogue" de son camp.

Dans le pays comme au sein de la communauté internationale, de nombreuses voix s'élèvent pour que les parties entament vite les discussions, afin d'éviter que le pays ne plonge, à nouveau, dans le chaos, après autant d'efforts consentis pour le sortir de deux guerres de l'est (1996-1997 et 1998-2003).

Les évêques catholiques ont appelé l'opposition à amorcer le dialogue, tout en pressant la majorité d'accéder aux demandes de celle-ci en libérant davantage de prisonniers politiques et d'opinion.

L'ONU, l'Union africaine, l'Union européenne ou encore les USA ont également invité toutes les forces politiques et sociales à aller au "dialogue national".

A ce stade, M. Tshisekedi a rallié un maximum des forces de l'opposition qui boudaient le dialogue convoqué par M. Kabila, au nom de la résolution 2277 du Conseil de sécurité exigeant le respect des délais fixés dans la Constitution congolaise pour l'organisation des élections.

La majorité de la population de Kinshasa, où M. Kabila n'a jamais été populaire, est acquise à la cause de l'alternance. Et au fur et à mesure que la fin du mandat du président approche ce sentiment "se transforme en rêve", juge le politologue Bwebwa Kalala, de l'Université catholique au Congo.

Or, si cette foule était "manipulée" par les "faucons de l'opposition", "il y a risque de reproduire les émeutes de janvier 2015 contre le pouvoir dans un format plus grand", craint l'enseignant.

En janvier 2015, la répression de manifestations d'opposition contre une tentative de modification de la loi électorale avait fait plus de 40 morts selon des ONG.

Soucieux d'éviter le chaos, M. Kodjo, qui a qualifié d'"injustes" les accusations du Rassemblement, a multiplié ces derniers jours les contacts, promettant d'obtenir l'adhésion d'un "maximum de participants" au "dialogue national".

M. Tshisekedi, lui, s'adressera à ses partisans dimanche, lors d'un grand meeting avec la quasi-totalité des forces politiques opposées à tout report de la présidentielle et/ou à un troisième mandat du président Kabila.

Pourquoi la Banque internationale pour l’Afrique du Congo a frôlé la faillite Par Xavier Monnier - LE MONDE - 29.07.2016

Un long frisson a parcouru les rues, les universités, les ministères et jusqu’aux casernes militaires et aux policiers. Au cœur d’un printemps politique agité par le débat autour du glissement électoral, la pression de la communauté internationale et la baisse du cours des matières premières, la Banque internationale pour l’Afrique au Congo (Biac) a frôlé la faillite. Et ce ne sont pas les salariés des 150 agences locales réparties dans le pays qui ont tremblé, mais bien les 400 000 clients, dans un pays où l’assurance-dépôt n’existe pas.

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Fin février, la banque centrale du Congo a en effet suspendu une ligne de refinancement de 37,5 millions d’euros de l’établissement, le plongeant dans une crise profonde. Le retrait plafonné à 500 000 francs Congolais (environ 500 dollars) et la fermeture des agences pour faire face au manque de liquidités début avril ont conduit à un changement du management de la banque et de ses organes de direction.

« Un clan au pouvoir prêt à jouer avec le feu »

Sous pression, la nouvelle équipe mise en place a obtenu la réouverture d’une ligne de crédit de 50 millions de dollars. « On a frôlé la catastrophe, souffle un banquier de la place.

Si la Biac était tombée, non seulement le système bancaire dans son entier vacillait mais on allait au-devant d’émeutes sociales, voire de mutineries. »

Pilier de la bancarisation de l’économie (seuls 6 % des Congolais ont un compte en banque), l’une des « réalisations » mise en avant par le gouvernement du premier ministre Matata Ponyo, la Biac compte en effet parmi ses 400 000 déposants, la majorité des professeurs, fonctionnaires, policiers et militaires de RDC, peu disposés à voir leurs économies disparaître. « C’est dire l’état d’esprit du clan au pouvoir, analyse un diplomate occidental. Ils sont prêts à jouer avec le feu pour imposer leurs vues. »

Sous le vernis économique de la crise de la Biac - « qui a vécu pendant des années au- dessus de ses moyens et n’avait aucun process de contrôle interne » pointe un banquier - s’est joué une partie très politique.

Appelé au secours de la banque, déjà mal en point en 2013, Michel Losembe ne présente pas seulement le CV d’un brillant financier, passé par Londres et Washington au sein de Citigroup. Ce fils d’ambassadeur a la particularité d’être un ami d’enfance de Jean-Pierre Bemba et d’Olivier Kamitatu, ancien rouage essentiel de la majorité présidentielle passé dans l’opposition et désormais pilier du G7.

La Biac doit être vendue dans les six mois

A mesure que s’est structuré le front anti-Kabila, notamment le rapprochement avec l’ancien gouverneur du Katanga Moïse Katumbi, l’étoile de Losembe a commencé à pâlir auprès du sommet de l’Etat. Jusqu’à l’ordre donné, selon les informations du Monde Afrique, par le président lui-même au gouvernement Matata, de faire bloquer les ligner de crédits par la banque centrale.

« La manœuvre a permis d’éjecter Losembe et d’envoyer un message aux actionnaires, les Blattner, qui commençaient à discuter avec l’opposition. Et cela devrait décourager d’autres initiatives identiques », estime un financier kinois.

Pour faire le poids, le gouverneur de la banque centrale a même déposé plainte auprès du procureur général de Kinshasa contre les actionnaires, administrateurs et ancien dirigeants pour « des actes de mégestion ayant suscité la banqueroute de la Biac avec, pour conséquence, la dilapidation de l’épargne du public collectée au sein de cet établissement bancaire », selon la lettre envoyée le 31 mai et largement relayée par la presse congolaise.

Le 6 juin, les avoirs de la famille Blattner ont même été gelés sur demande de la justice congolaise. Une mesure qui n’a duré que neuf jours comme l’a révélé Jeune Afrique.

Présent dans l’exploitation minière, l’aviation, le transport, la famille Blattner emploie 15000 personnes en RDC. Le maintien du séquestre des avoirs de ces sociétés aurait plongé le pays dans une nouvelle crise.

« Personne au gouvernement comme à la présidence n’a trop intérêt à ce qu’une enquête pénale vienne triturer les comptes de la Biac, estime un diplomate occidental. On tomberait dans un enchevêtrement de dossiers de crédits, de financements étranges. »

Désormais sous administration provisoire de la Banque Centrale du Congo, la Biac doit être vendue dans les 6 mois. Une façon de passer l’éponge et solder les comptes ?

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L’opposant Tshisekedi exige la présidentielle et le départ de Kabila avant fin 2016

AFP - 31 juillet 2016 à 19h48)

L'opposant historique en République démocratique du Congo Étienne Tshisekedi a exigé dimanche la tenue de la présidentielle d'ici la fin de l'année et le départ du président Joseph Kabila le 20 décembre, lors d'un meeting populaire à Kinshasa.

« Le 19 septembre 2016 est la première ligne rouge à ne pas franchir. Le corps électoral doit être convoqué (à cette date, ndlr) pour l’élection présidentielle. Au cas contraire, la haute trahison sera attestée dans le chef de M. Kabila qui endosse la responsabilité du malheur des Congolais », a déclaré le président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), de retour au pays après deux ans d’absence.

« Dès cet instant, le décompte de son préavis de trois mois de locataire au palais présidentiel commence », a-t-il ajouté, concluant : « le 20 décembre, la maison doit être libre ».

M. Tshisekedi s’exprimait devant des dizaines de milliers de personnes venues assister à son premier meeting, alors que le climat politique est tendu dans le pays à mesure qu’approche l’échéance du mandat de M. Kabila.

Ce dernier a convoqué, fin novembre, un dialogue afin de permettre l’organisation d’élections apaisées dans le pays, mais plusieurs forces d’opposition avait d’abord boudé un forum perçu comme un piège. Rassemblées autour de M. Tshisekedi, plusieurs d’entre elles ont finalement donné un avis favorable à ces pourparlers, moyennant des préalables dont la libération des prisonniers politiques et d’opinion.

Ainsi, M. Tshisekedi a également exigé la cessation des procédures arbitraires judiciaires ou autre à l’encontre des leaders de l’opposition comme c’est le cas de Moïse Katumbi et Martin Fayulu.

Le vieil opposant a par ailleurs récusé de nouveau l’ex-Premier ministre togolais Edem Kodjo, facilitateur désigné par l’Union africaine (UA) pour ce dialogue, qu’il a accusé de prendre parti pour M. Kabila.

M. Kodjo avait déjà rejeté cette accusation, la qualifiant d’injuste.

« En tout état de cause, le 20 décembre 2016 (…) nous dirons tous au revoir à M. Kabila et nous inaugurerons une nouvelle ère, telle que nous la déciderons au cours d’un vrai dialogue politique inclusif sans Kabila », a lancé M. Tshisekedi.

M. Kabila est au pouvoir depuis 2001 et la Constitution lui interdit de se représenter.

Après deux décennies noires, Goma retrouve la prospérité AFP - 31.07.2016

Assise devant une poignée de tilapias du lac Kivu protégés du soleil par une couche de feuillages, Chantal Nabintu, poissonnière ambulante à Goma, regarde les engins de chantier terrasser la rue de terre et de rocaille et se prend à rêver d’un trajet sans secousses.

Comme tant d’autres habitants de la capitale du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, elle se réjouit de la transformation récente d’une ville que les tourments de l’histoire n’ont pas épargnée.

"Nous autres, habitants du quartier Kyeshero sommes très contents de voir ces travaux parce que les conducteurs de taxis-bus se plaignent de venir du centre jusque chez nous à cause du mauvais état de la route", dit-elle. Et dans l’autre sens, "il y a tant de secousses qu’on arrive vermoulus".

Lorsque le Congo obtient son indépendance de la Belgique, en 1960, Goma est une ville d’importance secondaire de la grande province du Kivu, sur la rive nord du lac éponyme.

A l’image du reste du pays, elle voit les infrastructures laissées par les Belges se dégrader sous l’effet de la longue incurie du régime du dictateur Mobutu Sese Seko.

Après le génocide de 1994 au Rwanda, la ville, frontalière de ce pays (et qui compte aujourd’hui plus d’un million d’habitants), voit sa population plus que doubler avec l’afflux

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de centaines de milliers de réfugiés hutu rwandais. Pendant la deuxième guerre du Congo (1998-2003), elle passera sous la coupe de rebelles soutenus par l’Ouganda et le Rwanda et sera dévastée en 2002 par l’éruption du volcan Nyiragongo qui la domine.

Assiégée à plusieurs reprises pendant les guerres provoquées par les rébellions à dominante tutsi dans l’Est congolais après 2006, Goma tombe fin 2012 pendant plusieurs jours aux mains de la dernière d’entre elles, le Mouvement du 23 Mars (M23), après la débandade des Casques bleus et soldats congolais commis à sa défense.

Depuis la chute du M23, en novembre 2013, ses habitants, les Gomatraciens, rêvent d’une paix enfin durable et du développement d’une région au fort potentiel agricole, touristique et minier, dans un des pays les moins avancés au monde.

La rénovation de la piste de l’aéroport et l’ouverture, en 2015, d’une liaison aérienne régulière avec Addis Abeba exploitée par Ethiopian Airlines a contribué à désenclaver la ville, et en l’espace d’un an, son centre a radicalement changé de visage en déroulant désormais des kilomètres de rues asphaltées. Jour et nuit, engins et ouvrier s’activent.

De petits trottoirs proprets bordent désormais des murets en pierre de lave délimitant des parcelles de particuliers.

Le gouvernement local, les entreprises pétrolières, la mission de l'ONU au Congo (Monusco) et l'Union européenne ont financé les différents travaux.

- Baisse des accidents -

Les grands axes routiers du centre de la ville sont goudronnés grâce à des fonds de l’UE et du gouvernement central; les axes secondaires le sont grâce à une taxe récemment perçue par les autorités locales sur le prix de vente de l’essence.

"Le prix du carburant a augmenté à cause de (cette) contribution, reconnaît Fabrice, taxi- moto de 27 ans, mais nous ne nous plaignons pas pour ça."

Désormais, quand "je rentre chez moi après avoir roulé toute la journée, je ne sens pas beaucoup la fatigue et la douleur parce que je roule sur une bonne route", et aussi, "je rentre le soir en étant propre".

L’asphaltage des rues a réduit en effet considérablement la poussière qui nimbe les quartiers ou le goudron n’est pas encore arrivé.

"La ville commence à devenir propre et les accidents de la circulation diminuent", remarque Héritier, jeune de 26 ans désoeuvré au rond-point Vie-Sportive.

La modernisation du tissu routier a également permis une baisse de 40% du coût du transport, bienvenue pour une population largement très pauvre : il n’en coûte désormais plus que 300 francs congolais (0,3 dollar) pour rallier le centre à partir d’un bout de la ville.

Il reste encore beaucoup à faire, certes : le goudron est encore loin d’avoir recouvert toutes les rues de la ville et seule une petite minorité de la population dispose d’un accès à l’eau courante et à l’électricité.

Mais dans un pays réputé pour sa mauvaise gouvernance, ces travaux d’amélioration donnent à Héritier "l’espoir d’autres réalisations concrètes" pour le bien-être de la population.

Qui est ce mystérieux Grec qui a réussi à traîner Katumbi et Muyambo devant la justice ?

Pierre Boisselet – Jeune Afrique - le 01 août 2016

Emmanouil Stoupis a permis, en quelques mois seulement, de mener devant la justice deux figures de l’opposition katangaise.

Une arrestation et une condamnation. En moins d’un an et demi, le mystérieux Grec Emmanouil Stoupis a réussi à accrocher deux opposants congolais à son tableau de chasse judiciaire. Il y a d’abord eu Jean-Claude Muyambo, l’ancien bâtonnier de Lubumbashi, détenu depuis janvier 2015. Puis l’ancien gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, condamné à trois ans de prison et à 1 million de dollars (907 millions d’euros) de dommages et intérêts le 20 juin.

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Le départ pour la Grèce

Avant de devenir aussi procédurier, ce quinquagénaire était largement inconnu au Congo, son pays de naissance. Arrivé du temps de la colonisation belge, son père, Alexandros, fut un collaborateur de l’Union minière du Haut-Katanga. Après l’indépendance, en 1960, ce dernier se constitue un patrimoine immobilier à Lubumbashi, Kolwezi, Mushasa et Kasaji notamment.

La famille quitte le pays en 1974, alors qu’Emmanouil est encore enfant. Les Stoupis ont d’abord conservé des immeubles au Katanga, mais ils seront saisis dans le cadre de la politique de « zaïrianisation » voulue par Mobutu. C’est ainsi que Raphaël Katebe Katoto, le demi-frère de Moïse Katumbi, récupère l’immeuble de Lubumbashi en 1976. Selon les avocats de Stoupis, Katebe aurait dû le restituer une décennie plus tard, lorsque Mobutu a fait machine arrière. Mais les Stoupis ne s’en sont pas inquiétés avant 2002.

Récupération des biens immobiliers familiaux

Cette année-là, Emmanouil, qui réside désormais en Grèce et ne parle quasiment plus français ni swahili, recrute Jean-Claude Muyambo, alors bien vu du gouvernement, pour remettre la main sur les immeubles.

En 2014, il change subitement de conseil et recrute Me Ambroise Kamukuny. Ce nouvel avocat n’est pas n’importe qui : député de la Majorité présidentielle, élu en 2011 à Kazumba (Kasaï-Central), il est aussi l’avocat de Kalev Mutond, le chef de l’Agence nationale de renseignement (ANR) – autrement dit l’un des hommes les plus influents du pays, très proche du président Kabila.

Comment Stoupis en est-il arrivé à faire appel à lui ? « Un ami nous a mis en contact », répond l’avocat. Il ne dit pas qui, mais précise que son client « n’a pas de motivation politique » : « C’est un homme sans emploi à ma connaissance et qui a peu de moyens.

D’ailleurs, il ne me paie pas. Nous sommes convenus que je me rémunérerai sur une partie des indemnisations. »

Troublante coïncidence

Toujours est-il que le nouveau duo se retourne contre Muyambo, accusé d’avoir profité des mandats de recouvrement confiés par Stoupis pour vendre ses biens à son propre compte.

Hasard ? Les ennuis de Muyambo coïncident aussi avec le début des tensions entre l’entourage du président et les Katangais qui s’opposent à son maintien au pouvoir au-delà de la fin de 2016.

Muyambo est arrêté à Kinshasa, le 20 janvier 2015, alors que les manifestations anti- Kabila qu’il est venu soutenir battent leur plein. Le 10 juin 2016, Stoupis attaque ensuite Moïse Katumbi pour spoliation devant le tribunal de Lubumbashi. Fait troublant : les avocats de Stoupis ne se sont pas contentés de demander des dommages et intérêts. Ils ont aussi réclamé une peine d’inéligibilité à l’encontre de Katumbi.

Moïse Katumbi : « Kabila peut encore sortir par la grande porte » Marwane Ben Yahmed et Pierre Boisselet – Jeune Afrique - le 01 août 2016

On aurait pu le croire affaibli, découragé, mais l’ancien gouverneur du Katanga ne veut rien lâcher. Oui, promet-il, il rentrera bientôt et entend toujours succéder au président sortant.

Un mois et demi de silence. Après son départ de Lubumbashi par avion médicalisé, le 20 mai, l’ancien flamboyant gouverneur du Katanga, passé à l’opposition et devenu candidat à la présidentielle, s’était fait discret. La rumeur s’était déchaînée, jusque dans les rangs de ses supporters. Quel était réellement son état de santé ? Avait-il négocié avec le pouvoir ? Avait-il vraiment la carrure et la détermination d’un homme d’État ?

L’homme qui nous reçoit, en ce mois de juillet, dans son hôtel parisien paraît en tout cas confiant. Dans sa bouche souriante, si longtemps astreinte au silence, idées et arguments

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se bousculent. Peut-être ses récents ennuis respiratoires – encore décelables pour le visiteur averti – ne lui permettent-ils pas de courir un sprint. Pas maintenant, pas tout de suite.

Mais c’est de toute façon à une autre discipline qu’il se prépare : la course d’obstacles. Il le sait, lui qui a déjà été inculpé dans une affaire de mercenariat et condamné dans une autre affaire, immobilière cette fois-ci. Quant à la présidentielle, elle paraît bien mal engagée : le président de la commission électorale, Corneille Nangaa, a confirmé qu’elle ne pourrait pas se tenir dans les délais et, à dire vrai, personne n’y croyait plus vraiment.

Malgré tout, Moïse Katumbi n’a renoncé à rien. Catholique fervent, il se croit toujours promis aux plus hautes destinées.

Jeune Afrique : Comment allez-vous ? Moïse Katumbi : Je vais bien.

De quoi souffrez-vous exactement ?

Ce que je sais, c’est qu’en mai j’ai été convoqué à trois reprises pour être entendu au palais de justice de Lubumbashi. Les deux premières fois, j’étais bien portant. Mais, à l’issue de la troisième audition, j’ai été agressé par des policiers cagoulés qui m’ont piqué dans le dos avec une seringue infectée. Suite à cela, j’ai eu de très graves problèmes respiratoires et j’ai été hospitalisé pendant près d’une semaine.

Les médecins ne trouvaient pas l’origine du problème faute de laboratoire spécialisé chez nous. Ils ont demandé mon évacuation par avion médicalisé. Le gouvernement a voulu vérifier en envoyant ses médecins légistes, qui sont arrivés aux mêmes conclusions.

La substance qui vous a été injectée a-t-elle été identifiée ?

J’ai passé des examens en Allemagne et en Angleterre. J’en publierai les résultats pour montrer que nous avons affaire à des assassins. Sans cette agression, je serais toujours au pays. Mais j’étais malade, et la santé passe avant tout : il fallait que je me rétablisse pour pouvoir continuer le combat.

Vous avez été inculpé dans une affaire de mercenariat. Avez-vous passé un accord avec le pouvoir pour obtenir cette autorisation de sortie du territoire ?

Je n’ai pas négocié. J’étais prêt à affronter la justice. Je savais que leur dossier était bidon.

C’était un montage, très mal ficelé d’ailleurs. Ils ont d’abord parlé de plus de 600 mercenaires, puis le ministre de la Justice a ramené ce chiffre à 458. Et puis finalement, on n’a plus parlé que de 12 hommes !

Depuis, vous avez été condamné dans une affaire de spoliation de bien immobilier à une amende de 1 million de dollars et, surtout, à trois ans de prison. Comment y avez-vous réagi ?

Là encore, c’est un montage. Il ne s’agit pas de ma maison mais de celle de mon grand frère, Raphaël Katebe Katoto. Il l’a achetée quand j’avais 12 ans. Depuis, il a toujours eu le titre de propriété. Cette maison est connue de tous au Katanga, mais ils sont allés chercher un Grec, M. Stoupis, qui, comme par hasard, opère avec le même avocat que le directeur de l’Agence nationale de renseignement, Kalev Mutond.

Et il a demandé mon inéligibilité, vous vous rendez compte ? Ils affirment que je l’aurais spolié en 1998 et ils ont sorti un document daté de 2002. Mais je n’étais même pas au pays entre 1997 et 2003 ! Par la suite, mes avocats ont été empêchés de plaider. Un des juges a été écarté parce qu’il a refusé de signer la condamnation… C’est bien la preuve que tout cela est totalement politique.

Maintenez-vous malgré tout votre candidature ?

Oui, je suis candidat. D’une certaine manière, en s’acharnant contre moi, ils font ma campagne !

Mais puisque cette peine vous rend inéligible, quelle stratégie allez-vous adopter ? J’ai demandé à mes avocats de faire appel. Ceux qui utilisent des méthodes dictatoriales doivent faire très attention : le 19 décembre 2016 [date de la fin du dernier mandat constitutionnel de Joseph Kabila], nous aurons de nouveau un État de droit, et ce sont eux qui seront poursuivis.

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Si vous considérez que la justice est instrumentalisée, comment espérez-vous faire annuler la condamnation ?

Je sais qu’il sera difficile de l’emporter en appel dans le contexte actuel. Mais l’essentiel est que je puisse poursuivre la procédure en attendant le retour de l’État de droit.

Pour se battre, il faut être sur le terrain. Allez-vous rentrer en RD Congo ?

Bien sûr que le combat doit être mené chez nous, et je veux rentrer le plus vite possible.

Les médecins doivent encore faire des examens, mais j’aurais voulu être là pour accueillir Étienne Tshisekedi, le président du Rassemblement [une structure créée début juin qui rassemble la majeure partie de l’opposition], lorsqu’il rentrera fin juillet.

Ne craignez-vous pas d’être arrêté ou que l’on porte atteinte à votre intégrité physique ? J’ai été faussement condamné. J’ai la conscience tranquille et je ne me laisserai pas intimider. Je rentrerai. Mais avant j’écrirai aux membres de la communauté internationale, à l’ONU, à l’UE et à l’Union africaine pour dénoncer ce qui se passe dans notre pays. Il n’y a plus de justice. Nous sommes en 2016 et ce n’est pas acceptable.

Vous avez longtemps travaillé avec le président Kabila. Vous avez dirigé ce qui s’appelait à l’époque le Katanga, la province dont il est originaire. On peut supposer que vous avez des informations sur lui. Comptez-vous riposter sur ce terrain ?

Mon combat est pacifique. Nous ne sommes pas des ennemis, seulement des adversaires politiques. J’ai démissionné de la majorité car j’ai senti que le peuple ne serait pas d’accord avec la direction que nous prenions. Au sein de la majorité, je disais : « Le président a prêté serment. Il faut qu’il le respecte. » Je n’ai pas été écouté.

Nous avons obtenu cette Constitution par consensus après des millions de morts dans une guerre que personne n’a gagnée. Nous ne voulons plus de troubles dans le pays. Si le président Kabila aime son pays, il doit organiser ces élections. Il en a encore le temps. Son départ doit marquer la première alternance de notre histoire. S’il fait cela, ce sera une grande fête ; il gagnera le respect du monde entier et pourra rester au pays.

Le problème vient-il de son entourage ?

Les membres de son entourage sont très conscients du rejet de la population. Mais ils ont peur pour leur avenir : ils veulent continuer à bénéficier de l’argent des Congolais. Alors ces menteurs paient de petites foules pour lui faire plaisir et chanter : « Monsieur le président, restez. » Mais, demain, ces mêmes personnes se retourneront contre lui, comme ils l’ont fait contre Mobutu après l’avoir soutenu. Ils diront alors : « Je n’ai rien fait : c’était Kabila ! »

Comment pensez-vous contraindre le pouvoir à organiser l’élection dans les délais ? Si la commission électorale ne convoque pas les élections en septembre comme prévu, les problèmes commenceront. Joseph Kabila sera chassé du pouvoir par des marches pacifiques. Les Congolais sont prêts, ils sont très mûrs. Ils l’ont montré en janvier 2015 en manifestant contre la loi électorale alors qu’on leur tirait dessus. Ensuite, il y aura des poursuites judiciaires contre ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir.

L’appel à manifester du 26 mai a été peu suivi, y compris dans votre fief de Lubumbashi.

Comment l’expliquez-vous ?

C’est à cause de la répression. Ève Bazaiba, la secrétaire générale du MLC [Mouvement de libération du Congo], qui avait organisé la manifestation à Kinshasa, a été blessée. Les médias sont fermés, il n’y a plus de liberté d’expression ni de justice. Pourquoi refuse-t-on aux opposants de voyager librement ? Parce que le pouvoir sait qu’il a perdu le soutien de la base !

Pensez-vous que la communauté internationale joue son rôle ?

Elle aide beaucoup le peuple congolais. Elle contribue chaque année à notre budget.

J’entends dire que nous sommes un État souverain. Oui, c’est vrai, mais nous avons aussi des partenaires que nous devons respecter. Mais je veux insister sur le fait que ce sont les Congolais qui livreront la vraie bataille.

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L’UE paraît plus encline au compromis que les États-Unis, qui ont gelé les avoirs du chef de la police de Kinshasa, Célestin Kanyama. Le déplorez-vous ?

Le président Barack Obama a aussi écrit à Joseph Kabila que l’alternance était imminente…

Je remercie les États-Unis, tout comme je remercie l’UE, dont le Parlement a voté une résolution qui prévoit de nouvelles sanctions.

L’opposition s’est réunie à Genval, près de Bruxelles, début juin. Quel rôle avez-vous joué ? J’avais communiqué avec de nombreuses personnes en amont pour que ce rassemblement soit une réussite, et c’est la première fois dans l’histoire du Congo que des opposants signent ensemble un tel document. J’ai été représenté, mais si je n’avais pas été malade, je m’y serais rendu personnellement aux côtés du président Tshisekedi.

Avez-vous contribué au financement de ce rassemblement ?

Non. Mais, grâce à mes contacts, j’ai fait en sorte que tout le monde participe. Cela dit, il est intéressant de constater que l’on voit la main de Moïse Katumbi partout… C’est que je dois faire peur ! Et puis se demande-t-on qui a financé les discussions qu’ont eues le gouvernement congolais et l’UDPS [l’Union pour la démocratie et le progrès social, d’Étienne Tshisekedi] il y a quelques mois, à Ibiza et à Venise ? Et qui finance à chaque fois les grands rassemblements de la majorité présidentielle ? Je vais vous le dire : c’est le Trésor public. Autrement dit, le peuple congolais.

Plus vous vous rapprochez d’Étienne Tshisekedi, plus vous vous éloignez d’un autre opposant, Vital Kamerhe, dont vous étiez naguère proche. Quelles sont aujourd’hui vos relations avec l’ancien président de l’Assemblée nationale ?

Elles sont toujours bonnes. Vital Kamerhe fait partie de la plateforme de la Dynamique de l’opposition, qui était représentée à Genval. C’est encore un opposant, à ce que je sache ! Mais il n’était pas présent physiquement. Il était à Paris, alors qu’il aurait pu facilement faire une apparition. N’est-ce pas un signe ?

Il avait peut-être un empêchement. Moi-même, j’étais en Europe et je n’ai pas pu y aller.

Et avec le MLC de Jean-Pierre Bemba, qui vient d’être condamné par la Cour pénale internationale ?

Lui aussi fait partie de la Dynamique de l’opposition et il était donc représenté. Toute l’opposition est unie derrière un même message : Joseph Kabila doit partir le 19 décembre 2016. Je conseille d’ailleurs aux Congolais de dire : « Au revoir, monsieur le président » et

« Au revoir, monsieur le ministre » dès aujourd’hui, chaque fois qu’ils en auront l’occasion.

Une candidature commune de l’opposition est-elle possible ? Accepteriez-vous de vous désister si cela devait mener à la victoire ?

Nous nous battons pour une candidature commune, et c’est d’ailleurs ce qui a fait si peur au pouvoir, à Genval. Lors de la présidentielle de 2011, j’étais dans la majorité, mais l’opposition avait remporté plus de voix que nous. Ce sont ses divisions qui l’ont empêchée de gagner. Cette fois-ci, nous allons nous réunir, étudier le profil de chacun, sa popularité, sa capacité à amener le changement, et, si l’on ne me choisit pas, je me retirerai.

Il paraît de moins en moins probable qu’une élection sera organisée dans les délais. Que se passera-t-il le 20 décembre, à l’expiration du dernier mandat de Joseph Kabila ? Je ne suis pas d’accord : je pense qu’il est encore possible de respecter les délais constitutionnels. Michaëlle Jean, la secrétaire générale de l’OIF [Organisation internationale de la francophonie] l’a dit, après avoir pris connaissance du rapport de ses experts : l’enrôlement des nouveaux majeurs peut avoir lieu en trois mois. Ce n’est pas une élection si compliquée.

Mais s’il n’y a pas de volonté politique pour y arriver ? Alors le peuple récupérera son pouvoir.

Il y a donc un risque de dérapage…

Cela ne dérapera pas. Tout le monde a besoin de changement, même l’armée et la police.

Ils bénéficieront eux aussi de l’État de droit et de l’amélioration des conditions de vie et des salaires. Nous organiserons des manifestations pacifiques. Si des gens tirent sur la

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population, ils devront en répondre. Kanyama a été sanctionné par les États-Unis. Ce ne sera pas le dernier.

Au sein de l’opposition, on évoque souvent la possibilité d’une transition, qui serait présidée par Étienne Tshisekedi. Qu’en pensez-vous ?

Il ne faut pas réfléchir à une transition, mais à organiser la présidentielle.

Mais vous êtes obligé de vous y préparer…

Si le président Kabila ne partait pas pacifiquement, il ferait une grave erreur. Il a déjà eu deux mandats, il doit partir. Il y a une vie après la présidence de la République.

Que pensez-vous de son offre de dialogue ?

Le Rassemblement, dont je fais partie, a refusé le dialogue convoqué par le président Kabila. Nous voulons l’application de la résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations unies. S’il doit y avoir un dialogue, ce sera celui convoqué par le président entrant. M.

Kabila y sera aussi convié en tant qu’ancien président.

Qu’auriez-vous à lui dire aujourd’hui ?

S’il aime son pays, il doit respecter la Constitution. Il ne faut pas qu’il sorte par la petite porte, il ne faut pas qu’il cherche à dribbler les Congolais et il ne faut pas qu’il oublie que, nous aussi, nous sommes de grands dribbleurs.

Tshisekedi, sphinx ou phénix ?

Christophe Boisbouvier – Jeune Afrique - le 01 août 2016

De retour au pays après un long exil à Bruxelles pour raisons de santé, le leader de l’opposition Étienne Tshisekedi a été accueilli triomphalement. Le début d’une nouvelle ère, selon certains.

Le 16 août 2014, quand Étienne Tshisekedi a été pris d’un malaise et évacué de Kinshasa vers Bruxelles par un avion médicalisé, beaucoup ont pensé que la fin du vieux lion était proche. « Bon débarras », se sont dit tout bas plusieurs membres de l’entourage de Joseph Kabila, le chef de l’État congolais, que l’opposant Tshisekedi avait failli battre à la présidentielle de novembre 2011 – « les résultats officiels ne sont pas crédibles », avait même conclu la mission des observateurs de l’Union européenne. Mais, depuis ce 27 juillet, tout a changé.

Ce matin-là, malgré ses 83 ans, c’est un Tshisekedi ragaillardi qui monte à bord d’un jet privé de douze places, sur l’aéroport de Bruxelles, à Zaventem. À bord du Falcon, sa femme, Marthe, son fils Félix, son secrétaire particulier, l’abbé Théodore Tshilumba, un médecin et l’homme d’affaires Raphaël Katebe Katoto – le frère aîné de l’opposant Moïse Katumbi.

Un important comité d’accueil

En début d’après-midi, l’avion se pose à Kinshasa-Ndjili. Coiffé de sa casquette légendaire, le chef historique de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) descend lentement la passerelle en s’appuyant sur l’épaule de son fils. Une jeune fille en blanc avec un bouquet de fleurs, une cinquantaine de leaders de l’opposition… Le comité d’accueil est là, en présence du chef de la police de Kinshasa, le général Célestin Kanyama – l’homme que les États-Unis ont placé sous sanctions financières, le 23 juin, pour « violence contre des civils ».

Surtout, à l’extérieur de l’aéroport, une foule immense l’attend. Des militants de l’UDPS, bien sûr, mais aussi de nombreux sympathisants d’autres partis. « Nous avons quitté nos maisons très tôt, sans manger, pour recevoir le président Étienne Tshisekedi, parce que nous voulons un changement dans ce pays », lance un manifestant. En lingala, les slogans fusent : « Kabila, ton mandat est fini » ; « Kabila, tu n’es qu’un locataire, le propriétaire est de retour ».

Combien sont-ils sur les 17 km qui séparent l’aéroport de sa maison du quartier de Limete ? Sans doute des centaines de milliers. Debout, émergeant du toit de sa voiture, le « líder máximo » salue ses partisans avec son air boudeur, le regard brillant.

Comme il faut s’arrêter tous les deux kilomètres pour répondre aux vivats de la foule, le

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cortège met cinq heures à arriver à destination. Visiblement transporté par la liesse, le vieil opposant ne montre aucun signe de fatigue. Sur les derniers kilomètres, il fait nuit, et l’électricité est coupée. Des deux côtés de la route, comme dans une procession, les Kinois allument briquets et bougies. Un militant s’exclame : « Malgré la lumière de la nuit, le jour finit par apparaître ! »

Le pouvoir est-il déstabilisé par ce « triomphe » à la romaine ? « Pas du tout, répond Lambert Mende, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement.

D’abord, il faut saluer le professionnalisme du gouverneur de Kinshasa, André Kimbuta, et celui de Célestin Kanyama. En concertation avec l’UDPS, ils ont permis que ce retour se passe correctement, sans heurts.

Une partie de l’opposition demeure invisibilisée

Ensuite, nous ne sommes pas surpris. Étienne Tshisekedi a toujours été très populaire à Kinshasa et au Kasaï [sa province natale]. Mais rameuter 100 000 personnes dans la capitale est une chose, mobiliser le Congo profond en est une autre. Kinshasa ne représente que 10 % de la population. En plus, il manquait quelques figures de l’opposition.

Ni les dirigeants du MLC [le Mouvement de libération du Congo], de Jean-Pierre Bemba, ni ceux de l’UNC [l’Union pour la nation congolaise], de Vital Kamerhe, n’étaient là. »

Mende n’a pas tort. Ce 27 juillet, à Ndjili, les lieutenants de Jean-Pierre Bemba ont brillé par leur absence. « Le 26 mai, l’UDPS ne s’est pas associée à la marche du MLC, explique Fidèle Babala, le secrétaire général adjoint du parti de Jean-Pierre Bemba. Nos deux formations sont partenaires, mais l’opposition n’est pas une église où tout le monde doit dire amen à Tshisekedi ! »

Il reste que, depuis le conclave des 8 et 9 juin au château de Genval, près de Bruxelles, tous les autres partis de l’opposition se sont ralliés à la bannière de Tshisekedi, nommé président du Rassemblement pour la défense des valeurs de la République.

Tshisekedi, figure emblématique de l’opposition

« Moi, je fais de la politique. Lui, il est la politique », lance un étudiant qui a ovationné « Ya Tshitshi » à son retour. La force du « père de la démocratie », comme l’appellent les Kinois, c’est qu’il est intouchable et que sa popularité, acquise par trente-quatre ans de lutte inlassable contre les régimes de Mobutu, de Kabila père et de Kabila fils, transcende tous les clivages politiques.

Tshisekedi, c’est l’opposant hors catégorie, et, la magie du « revenant » aidant, de nombreuses figures politiques, comme Moïse Katumbi, Delly Sesanga, Martin Fayulu, Joseph Olenghakoy et Olivier Kamitatu, se placent dans son sillage pour bénéficier de son aspiration. Même le sulfureux leader katangais Kyungu wa Kumwanza, accusé d’avoir inspiré les pogroms anti-Kasaïens de 1992 à Lubumbashi, a accepté en juin de se ranger derrière le « Sphinx de Limete » !

Quel est l’objectif de Tshisekedi et de ses alliés ? Depuis la rencontre de Genval, leur cap est fixé : obliger Joseph Kabila à quitter le palais au plus tard le 19 décembre, comme le prévoit la Constitution. Pour dialoguer avec le pouvoir, trois préalables : le respect du calendrier constitutionnel, la libération des prisonniers politiques et l’arrêt des poursuites judiciaires contre les dirigeants de l’opposition. Jusqu’à présent, ces opposants peinaient à mobiliser la rue en leur faveur. Depuis ce 27 juillet, ils se sentent pousser des ailes.

Départ de Kabila, sa santé, Moïse Katumbi…

« Le retour de Tshisekedi représente le début du départ de Kabila », affirme le député Martin Fayulu, du parti Engagement pour la citoyenneté et le développement (Ecidé). « Nous sommes tout près de la victoire », renchérit le leader lui-même. L’espoir de beaucoup de militants, c’est que Kabila parte et que Tshisekedi préside une transition jusqu’à l’organisation de la présidentielle – le temps de mettre à jour les listes électorales. Va-t- on vers le « grand soir » ? « Oh, il y a loin de l’assiette à la bouche ! » réplique Lambert Mende, qui veut croire que cette journée n’a été qu’un feu de paille.

Reste une question. Si le vieux Tshisekedi s’est refait une santé politique, où en est sa santé physique ? Certains proches parlent à demi-mot de problèmes de concentration et de mémoire. « Vous le voyez assumer des responsabilités étatiques ? lâche un député proche de l’opposition. On quitterait un roi fainéant pour un autre ! » Dans une récente

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interview accordée au quotidien français Le Monde, le « Sphinx » formule des réponses très brèves, mais calibrées. « Moïse Katumbi ferait-il un bon président ? – Je me réserve.

C’est une question pour le futur. » Le vieux lion a toujours son coup de patte.

Donnant-donnant

En échange de leur participation à un dialogue avec Joseph Kabila, Étienne Tshisekedi et ses alliés réclament notamment la libération de 113 détenus, qui, à leurs yeux, sont des prisonniers politiques. Parmi eux figurent deux leaders de l’opposition. Eugène Diomi Ndongala, le chef de la Démocratie chrétienne, a été condamné en mars 2014 à dix ans de prison pour une affaire de mœurs.

Selon Tshisekedi, il s’agit d’un pur montage. L’avocat Jean-Claude Muyambo, fondateur de la Solidarité congolaise pour la démocratie et le développement (Scode), est en prison depuis dix-huit mois à la suite d’un litige immobilier qui n’est toujours pas jugé. L’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et ses partenaires demandent aussi l’arrêt des poursuites judiciaires contre Moïse Katumbi, condamné en juin à trois ans de prison dans une affaire de spoliation immobilière.

Dans une lettre, la présidente du tribunal ayant prononcé la sentence dénonce les pressions subies : « J’ai été obligée de condamner M. Katumbi. » Le gouvernement dément et parle de « machination ».

Polémique sur le retour avorté de Moïse Katumbi Christophe RIGAUD – Afrikarabia - 02 Août 2016

En exil médical en Europe, l’ancien gouverneur affirme que son avion n’a pas été autorisé à atterrir à Kinshasa alors que les autorités expliquent que les documents de vols étaient

« incomplets ». Récit d’une controverse.

Retour raté pour le candidat à la présidentielle, Moïse Katumbi, en République démocratique du Congo (RDC). L’homme d’affaires avait promis de rentrer à Kinshasa pour le grand meeting de l’opposition piloté par Etienne Tshisekedi, dimanche 31 juillet. Mais l’ancien gouverneur du Katanga était au abonné absent. Un nouveau coup dur pour Katumbi qui se serait bien vu sur la photo aux côtés du doyen de l’opposition devant le rassemblement monstre de Kinshasa. Une question d’image pour le tycoon katangais, fraîchement passé de la majorité à l’opposition avant de se déclarer candidat à la prochaine présidentielle. Depuis son départ du PPRD (le parti du président Joseph Kabila) en septembre 2015, Katumbi est devenu l’homme à abattre. Harcelé par la justice, accusé d’avoir recruté des mercenaires et condamné à trois ans de prison dans une obscure affaire immobilière, le patron du TP Mazembe a pourtant été autorisé à quitter le Congo pour se faire soigner à l’étranger après une mystérieuse « tentative d’empoisonnement ». Un exil médical qui aura le double avantage d’éviter à Katumbi la prison et au pouvoir de se débarrasser d’un adversaire politique.

Le risque de la prison

Pour ne pas compromettre le dessein politique de l’homme d’affaires, cet exil forcé ne doit pas s’éterniser. Eloigné du terrain, le candidat à la présidentielle risque de se marginaliser, lui qui se voit en chef de file d’une opposition recomposée. Avec son nouvel allié de circonstance, l’opposant historique Etienne Tshisekedi, opportunément remis en selle pour l’occasion après le Conclave de l’opposition de Genval, Moïse Katumbi avait promis de revenir au pays pour le retour de Tshisekedi et le grand meeting qui devait suivre. Avec un risque majeur : celui de se retrouver derrière les barreaux de la prison de Makala. Le ministre de la justice congolais, Alexis Thambwe Mwamba, avait d’ailleurs confirmé que l’ancien gouverneur serait interpelé dès sa descente d’avion pour purger sa peine.

« Katumbi menteur » ?

Pourtant, ce dimanche, alors que plusieurs dizaine de milliers de manifestants étaient venus acclamer Etienne Tshisekedi devant le stade des Martyrs, Moïse Katumbi brillait par son absence. Ce n’est que dans la soirée, que par un court communiqué, Katumbi explique que les autorités congolaises ne l’ont pas autorisé à survoler et atterrir à Kinshasa. Une

« entrave illégale qui reflète l’état des libertés individuelles dans notre pays », dénonce

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l’ancien gouverneur. Très rapidement (trop rapidement ?) le porte-parole du gouvernement réagit via le site Politico.cd accusant Katumbi d’être « un menteur ». « Personne n’a bloqué son avion. Au contraire, la justice le recherche. C’est un menteur qui veut attirer l’attention sur lui » expliquait Lambert Mende.

Refus « technique et non politique »

Deuxième acte. Les proches de Katumbi diffusent un extrait de la demande d’autorisation faite par l’homme d’affaires, prouvant ainsi que le vol était bien programmé par Katumbi.

Sur le document, le vol de l’avion privé devait se poser à Kinshasa le 31 juillet 2016 à 5h40 avec 9 passagers et 3 membres d’équipage. Troisième acte, mardi 2 août au matin, le Ministre des transports congolais contredit son collègue Lambert Mende en déclarant qu’une demande avait bien été faite pour le « survol et atterrissage du jet de type Global Express XRS/GLEX, immatriculé LX-AMG, opéré par LUXAVIATION Luxembourg », censé ramener Moïse Katumbi à Kinshasa. Mais selon le communiqué du ministère, « la demande d’autorisation était incomplète, notamment en termes d’éléments administratifs préalables à son examen ». Des éléments que les autorités « n’auraient pas obtenus à ce jour ». Il s’agirait donc d’un refus « technique » et non « politique » selon le Ministre Kaluma.

Un refus qui arrange tout le monde ?

Qui dit vrai ? Qui manipule qui ? Peut-être qu’encore une fois, comme lorsque les autorités congolaises ont autorisé Moïse Katumbi à quitter le sol congolais pour se faire soigner alors qu’il était accusé de « haute trahison » dans l’affaire des mercenaires, ce refus d’autorisation d’atterrir arrange tout le monde. Pour Moïse Katumbi, ce refus lui permet de ne pas être accusé d’avoir peur de retourner en RDC au risque de se retrouver en prison.

Quant au pouvoir en place à Kinshasa, il continue de maintenir à distance un concurrent politique gênant. Evidemment, rien ne permet pour le moment de certifier une telle hypothèse, tant les manipulations sont légions dans la politique congolaise (majorité et opposition confondues).

Pas encore de solution pour éviter la case prison

Ce que nous apprend ce nouvel épisode de la guerre que se livre Kabila et Katumbi, c’est que Moise Katumbi n’a visiblement pas encore trouvé la parade juridique pour revenir en RDC sans passer par la case prison. Il y a quelques mois, l’homme politique avait recruté le célèbre avocat français Dupont-Moratti pour venir renforcer l’équipe de ses conseils congolais. Apparemment, « acquittator », comme il se fait appeler, n’a pas encore réussi à garantir la liberté de mouvement à son client lorsqu’il remettra les pieds au Congo. De même, les multiples pressions diplomatiques, ainsi que les visites aux Etats-unis et au Ministère des affaires étrangères à Paris n’ont pas suffi à rassurer l’ex-gouverneur du Katanga. Les geôles congolaises ont cette particularité que l’on sait lorsqu’on y rentre, mais pas lorsqu’on en sort. Un risque que Moïse Katumbi n’est pas aujourd’hui prêt à tenter.

RDC: un partisan de l'opposition tué, heurts avec la police Belga - le 02 août 2016

KINSHASA (COD) - Un partisan de l'opposition a été tué mardi par un militaire en République démocratique du Congo, et des heurts s'en sont suivis avec la police, a-t-on appris de l'opposition et de la police. "Mon collègue Guy Mpiana a été tué par un militaire de l'armée parce qu'il portait un t-shirt à l'effigie du président Tshisekedi", a déclaré à l'AFP Justin Kabongo, militant de l'UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social). L'UDPS est le parti de l'opposant historique Étienne Tshisekedi, récemment rentré en RDC. "Un combattant a été tué par balle par un militaire", a confirmé à l'AFP Bruno Tshibala, porte- parole de l'UDPS. Le chef de la police de Kinshasa, le général Célestin Kanyama, a indiqué de son côté qu'"un militaire" avait "tiré sur un motard". Mais selon le colonel Ézéchiel Mwanamputu, porte-parole de la police, "ils ont habillé ce motard d'une trentaine d'années d'habits portant l'effigie de l'UDPS et de M. Tshisekedi pour politiser l'incident". Des incidents ont suivis entre partisans de l'UDPS et forces de l'ordre, notamment atour du siège de la formation. Radio Okapi rapporte mardi soir que les forces de l'ordre ont jeté des gaz lacrymogènes pour disperser les partisans de l'opposition. Les militants de l'UDPS

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