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Année 2012, numéro Année 2012, numéro Année 2012, numéro Année 2012, numéro 11118888 SOMMAIRSOMMAIRSOMMAIRSOMMAIRE E E E

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Pauvres, mais honnêtes, nous paraissons quand nous pouvons, et notamment le samedi 10 novembre 2012

Année 2012, numéro Année 2012, numéro Année 2012, numéro Année 2012, numéro 1 1 1 18 8 8 8

SOMMAIR SOMMAIR SOMMAIR SOMMAIRE E E E

COLOMBIE COLOMBIE COLOMBIE COLOMBIE

La nouvelle donne qui explique les pourparlers de paix … page 1 RDC

RDC RDC RDC

Kamerhe veut sauver « le soldat Kabila » et le néolibéralisme au Congo (RD) … page 3

Algérie Algérie Algérie Algérie

Le traquenard malien”… page 5 Kenya

Kenya Kenya Kenya

CCTV Africa, la nouvelle chaîne kenyane “made in China … page 6 USA USA USA

USA

L’ardoise US … page 9 Chine

Chine Chine Chine

« Société civile » et « communautés libérales » … page 16

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COLOMBIE COLOMBIE COLOMBIE COLOMBIE

La nouvelle donne qui explique les pourparlers de paix

par Christophe Ventura

Se dirige-t-on vers la fin d’un conflit qui détient, aux côtés du Cachemire et de la Palestine, le record de longévité sur la planète ?

Depuis 1964, l’Etat colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) - nées sur les décombres de la guerre civile qui a déchiré le pays entre 1948 et 1953 - s’affrontent, en effet, aux prix de centaines de milliers de victimes et de millions de déplacés à travers le pays.

Assurément, toutes les parties ont aujourd’hui intérêt à ce que le dialogue de paix officialisé le 4 septembre par le président Juan Manuel Santos et le dirigeant des FARC Rodrigo Londono, dit « Timochenko », aboutisse à la fin de ce conflit meurtrier. Et ce, dix ans après l’échec retentissant des négociations dites « du Caguan », initiées sous la présidence d’Andrès Pastrana.

Pour quelles raisons ? Elles sont de plusieurs ordres et se combinent. Le pays est gangrené par les violences et le narcotrafic a corrompu tous les acteurs du conflit (armée, paramilitaires, guérillas, Etat). L’opinion publique est lassée. Les FARC, non anéanties mais néanmoins structurellement affaiblies, admettent ne plus être en mesure de conquérir le pouvoir d’Etat par la guérilla et ne disposent pas de perspectives politiques. L’Etat - dont 32 % du budget est englouti chaque année dans cette guerre et l’armement des 500 000 hommes environ qui composent les forces militaires et paramilitaires du pays - souhaite aujourd’hui, sous l’impulsion de Monsieur Santos - le 12ème président colombien à se retrouver aux prises avec les FARC et l’Armée de libération nationale (ELN) -, normaliser la situation intérieure.

Il s’agit ici d’organiser la restitution des terres, l’indemnisation des victimes, etc., mais aussi de garantir la sécurité des investisseurs et de l’économie en général, ainsi que d’apaiser les relations entre Bogota et les pays voisins (Equateur, Venezuela) afin d’insérer la Colombie dans le jeu de l’intégration régionale et, au delà, dans celui de la mondialisation. Le gouvernement mise pour cela sur le développement de nouvelles alliances géoéconomiques Sud/Sud dans le cadre des CIVETS (Colombie, Indonésie, Vietnam, Egypte, Turquie, Afrique du Sud)

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alors que le pays connaît une période d’embellie économique (liée notamment à l’augmentation des cours des matières premières et agricoles). Il s’est hissé, en 2012, au deuxième rang des économies d’Amérique du Sud devant l’Argentine. Et ce, malgré le handicap du conflit.

Contrairement à son prédécesseur Alvaro Uribe, Juan Manuel Santos ne s’appuie pas directement sur les secteurs les plus mafieux de l’oligarchie et les paramilitaires pour asseoir son pouvoir et

1Les analystes économiques et financiers voient dans ce regroupement de pays émergents qui connaissent une forte croissance économique et démographique et dont les rapprochements politiques, diplomatiques et économiques se multiplient, le nouveau concurrent possible des Brics dans la décennie à venir.

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développer son projet politique. Ses soutiens sont issus d’une oligarchie essentiellement urbaine, marchande, exportatrice et favorable aux traités de libre-échange internationaux. Cette oligarchie n’est plus terrienne ou latifondiaire, comme l’était celle qui, en s’opposant à toute idée de réforme agraire, avait choisi la guerre civile plutôt que de partager ses grandes propriétés avec les paysans sans terre.

Tous ces acteurs nécessitent un renouvellement significatif des rapports sociaux dans le pays afin de développer leurs intérêts et leur potentiel d’accumulation. Dans ce contexte, une évolution économique de la Colombie se profile peu à peu dans laquelle le secteur exportateur minier devrait s’inscrire au coeur du modèle de développement à venir du pays.

Ce secteur, avec celui des hydrocarbures

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, constitue un potentiel économique et stratégique majeur pour la Colombie dont les ressources inexploitées ou mal exploitées du fait du conflit sont nombreuses et diversifiées

3

. Le pays est le dixième producteur mondial de charbon et le premier pour les émeraudes dont il assure déjà 55% de la production. Gaz naturel, or, argent, nickel, fer, platine, métaux rares regorgent dans les sous-sols colombiens. Pourtant, ces richesses ne représentent encore aujourd’hui que 2,4 % du PIB national

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(elles n’en représentaient cependant que 1,5 % en 2009

5

). L’objectif affiché par le gouvernement est d’atteindre les niveaux du Pérou ou du Chili en la matière (plus de 6 % du revenu national

6

).

Le 3 août, en même temps que s’accéléraient les pourparlers devant sceller l’accord du 26 août, le gouvernement annonçait la création d’une nouvelle Agence nationale des mines dont la mission consistera à organiser la mobilisation massive des investisseurs étrangers dans le secteur. Ce dernier prépare également une nouvelle loi pour 2013 dont la fonction est d’assainir et de redéfinir le code minier du pays, de fixer les nouvelles règles d’exploitation, de réformer le statut des licences d’exploration et d’exploitation, etc.

Les objectifs poursuivis par Juan Manuel Santos, avec le soutien de la puissante oligarchie d’affaires, sont clairs : obtenir le silence des armes, dégager les vastes et riches territoires colombiens des violences, créer un nouveau climat de sécurité pour les investisseurs, développer l’exploration et l’exploitation minière et pétrolière afin de pleinement intégrer la Colombie à l’économie mondiale.

Et ce, à l’instar des autres pays latino-américains, dans le cadre d’une primarisation du modèle économique.

Dans cette perspective, le gouvernement colombien peut compter sur de nombreuses entreprises prêtes à se positionner, notamment venues des Etats-Unis et du Canada. Mais un nouvel acteur frappe à la porte et propose un débouché presque sans limites aux richesses minières et pétrolières colombiennes : la Chine.

En 2011, elle est devenue le second partenaire commercial de la Colombie après les Etats-Unis. Le pétrole représente jusqu’ici le principal produit exporté par la Colombie vers la puissance asiatique (plus de la moitié du total de ses exportations). « Je pense que nous pouvons, dans un monde de plus en plus globalisé, travailler ensemble dans de nombreux domaines »

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a ainsi confirmé le chef de l’Etat Colombien lors de sa première visite officielle à Pékin (8-12 mai 2012). Celle-ci a donné lieu à la signature de nombreux accords de coopération économique, énergétique, agricole, ainsi que dans le domaine des infrastructures. Et le président colombien d’ajouter : « Je voudrais mettre en avant l’intention d’initier un processus de négociation concernant un accord de libre-échange. »

8

2 De nouveaux gisements ont été identifiés ces dernières années dans tout le pays.

3 Sur l’ensemble de cette question minière, lire Laurence Mazure, « Ruée vers l’or en Colombie », Le Monde

diplomatique, juillet 2010, (http://www.monde-diplomatique.fr/20.... Pour une analyse globale à l’échelle de la région latino-américaine, lire Recursos naturales y la geopolitica de la integracion sudamericana, Monica Bruckmann, Instituto de investigaciones sociales perumundo, Lima, 2012.

4 L’ensemble de ces données est tiré de l’article « Mining in Colombia – Digging deeper », The Economist, 4 août 2012 (http://www.economist.com/node/21559963).

5 Laurence Mazure, « Ruée vers l’or en Colombie », Le Monde diplomatique, juillet 2010, (http://www.monde- diplomatique.fr/20...

6 Ibid.

7 « Le président colombien souhaite renforcer les relations avec la Chine », Xinhua, 7 mai 2012 (http://french.news.cn/monde/2012-05...)

8 Propos cités par la chaîne de télévision CNTV (http://fr.cntv.cn/program/journal/2...). A ce jour, la Chine a signé trois

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Le dialogue de paix qui s’ouvre en Colombie constitue un vecteur par lequel la bourgeoisie du pays s’apprête à faire entrer ce dernier dans une nouvelle phase de modernisation capitaliste. Au travers de celle-ci, la géométrie des alliances internationales de la Colombie se modifiera. Le lien historique privilégié avec les Etats-Unis se relâchera peu à peu tandis que celui amorcé avec la Chine se renforcera. Cette dernière se verra ainsi offrir un pont supplémentaire dans la région

9

.

Accord général pour l’achèvement du conflit et la construction d’une paix stable et durable

Le 26 août 2012, les représentants du gouvernement colombien et ceux des FARC ont signé, à la Havane, un document intitulé « Accord général pour l’achèvement du conflit et la construction d’une paix stable et durable ». Celui-ci identifie cinq points qui feront l’objet d’une négociation entre les parties : la politique de développement agricole intégral, la participation politique, la fin du conflit (qui passe par l’acceptation d’un cessez-le-feu et l’abandon des armes par les FARC - qui induit un acte volontaire de leur part et non une démobilisation sous l’autorité de l’Etat -), la solution au problème des drogues illicites, la question des victimes. Les discussions – auxquelles les Etats-Unis ne seront pas associés – débuteront le 8 octobre à Oslo avant de se poursuivre à la Havane. Dans ce processus, Cuba et la Norvège tiendront le rôle de pays garants de la bonne marche des négociations

; le Chili et le Venezuela, celui de « facilitateur logistique et d’accompagnateur ».

RDC RDC RDC RDC

Kamerhe veut sauver « le soldat Kabila » et le néolibéralisme au Congo (RD)

Par Mbelu Babanya Kabudi

Le vendredi 05 octobre 2012, Monsieur Vital Kamerhe, Président de l’UNC et ex-président de l’assemblée nationale congolaise, a lu sa déclaration politique devant plusieurs compatriotes dont certaines figures connues représentant certains partis politiques congolais. Cette déclaration a été résumée et publiée par certains médias kinois sans qu’ils en décèlent les pièges.

A l’actif de Vital Kamerhe, nous reconnaissons la reconduction de certaines propositions déjà faites à Sun City et par certains compatriotes : la mise sur pied d’une Commission (Justice), Vérité et réconciliation sur la guerre de basse intensité que notre pays connaît depuis 1996, l’organisation d’un dialogue permanent entre les Congolais autour des questions d’actualité (dont cette guerre de basse intensité), la libération des prisonniers politiques, l’arrêt de la séquestration d’Etienne Tshisekedi, etc.

Cela étant, il est important de lire calmement la déclaration de Vital Kamerhe. Ce Monsieur a été démis de ses fonctions de Président de l’Assemblée nationale pour avoir dénoncé l’accord conclu entre le pouvoir (kabiliste) de Kinshasa et le Rwanda (de Paul

accords de libre-échange dans la région avec le Chili, le Pérou et le Costa-Rica.

9 Lire Christophe Ventura, « Chine-Amérique latine : au cœur des déséquilibres du nouveau commerce Sud-Sud », (http://www.medelu.org/Chine-Ameriqu...)

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Kagame) à l’insu de l’institution au sommet de laquelle il trônait. Au jour d’aujourd’hui, il est difficile de dire si les militaires Rwandais impliqués dans l’opération de traque des FDLR à l’issue de dudit accord secret sont tous rentrés dans leur pays d’origine ou pas. Certains d’entre eux, après l’interview donnée par leur Ministre de la défense à Collette Braeckman à la fin du mois d’août 2012, ont fait semblant de repartir chez eux au cours de la journée en se dépouillant de l’uniforme de l’armée congolaise. Et la nuit, selon certains témoignages des compatriotes des Kivus, ils sont revenus chez nous. Donc, la question pour laquelle Vital Kamerhe a été chassé comme un pestiféré de la présidence de l’Assemblée nationale n’a pas trouvé de réponse jusqu’à ce jour.

L’ex-président de l’Assemblée nationale devenu Président de l’UNC a été candidat de l’opposition contre Joseph Kabila aux élections de 2011. A l’issue de ces élections de novembre et décembre 2011, Vital Kamerhe fut l’un des rares politiciens à avoir récolté des preuves palpables de la fraude et de la tricherie orchestrées par le camp kabiliste et ayant profondément vicié le processus électoral. Le fait que Joseph Kabila soit le produit de cette fraude et de cette tricherie a affecté profondément sa légitimité politique et son autorité morale. Si nous ajoutons à tout ceci les différents rapports des experts de l’ONU sur la guerre de basse intensité contre notre pays, les clans Kagame et Kabila (Joseph) doivent être exclus de tout processus de paix et de justice dans les pays de la sous-région de Grands-Lacs ; ils font partie du problème de cette guerre de basse intensité orchestrée par certaines « grandes puissances » que Vital Kamerhe, dans sa restitution historique des guerres à répétition dans notre sous-région, n’arrive pas à nommer un seul instant. Et c’est triste !

La relecture de la déclaration de Vital Kamerhe pousse à poser des questions du genre :

« A partir d’où parle-t-il ? Qui parle à travers lui ? Pourquoi les solutions à cette guerre d’agression proposées par Herman Cohen et Sarkozy se retrouvent-elles sous la plume de Vital Kamerhe ? Pourquoi lui peut-il parler et resté non-inquiété là où Diomi Ndongala ne sait pas faire la même chose ?, etc. »

La relecture de la déclaration de Vital Kamerhe nous pousse à soutenir qu’il veut rester cohérent avec ses anciennes amours. Il sait « pourquoi, en 2006, il a choisi Joseph Kabila ». Ils ont les mêmes parrains. Ces derniers ont demandé à Joseph de laisser Vital s’exprimer et « feindre » de faire partie de l’opposition. Les élections sont passées.

L’amnésie aidant, Vital revient sur le devant de la scène pour sauver son ami, « le soldat Kabila ». Il feint d’oublier que ce dernier n’a plus de légitimité politique et d’autorité morale pouvant lui permettre de sauver la cohésion nationale. (Il fait comme s’il n’avait pas vu les photos de Kampala et entendu Ban Kin moon, au mini-sommet de l’ONU sur la RDC, appelé Kagame le Président de la République Démocratique du Congo.) Quand Vital Kamerhe invite les pays de la sous-région à se mettre ensemble, il fait une proposition louable. Néanmoins, il fonde cette proposition sur une matrice organisationnelle néolibérale en parlant du libre échange.

Oui. Nous avons besoin de nous mettre ensemble pour organiser le panafricanisme des peuples. Mais pas sur n’importe quelles bases. Nous avons besoin de la coopération, de la solidarité, de la justice sociale comme matrice fondatrice de notre panafricanisme des peuples de la sous-région de Grands-Lacs et non du néolibéralisme ayant conduit l’Occident dans l’abîme. (Sur ce point, il est important de lire les livres de l’ex-conseiller en matière économique de Bill Clinton, le Prix Nobel de l’économie, Joseph Stiglitz. Et surtout l’un de ses derniers livres intitulés «Le prix de l’inégalité, Les liens qui libèrent, Paris, 2012, 5009 p. »

A ce point nommé, la déclaration de Vital Kamerhe nous invite à un renouvellement constant de la pensée, de notre mode d’organiser notre pensée politique, économique et culturelle. La chance de l’Occident dont le déclin se fait de plus en plus sentir est, entre autres, dans sa capacité de protéger la liberté d’expression et d’avoir des empêcheurs de penser en rond. Même s’ils ne sont pas toujours écoutés par « les cercles du pouvoir » empêtrés dans le courtermisme.

De toutes les façons, Kamerhe a eu « l’audace » de présenter un plan. Il ne doit pas être

l’unique. En déceler les limites devrait pousser à approfondir le débat. Ce dernier ne

portera des fruits que si, entre autres, l’opinion publique des pays initiateurs de la guerre

de basse intensité s’implique dans la promotion des contre-réseaux du réseau

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transnational de prédation sévissant dans notre pays. Malheureusement, la déclaration de Vital Kamerhe laisse dans l’ombre tous les acteurs pléniers de la tragédie congolaise depuis les années 60. Or, dans un pays comme la Belgique, parler de ces acteurs n’est plus un tabou. David Van Reybrouck en fait plus ou moins la démonstration dans son ouvrage intitulé « Le Congo. Une histoire, Actes Sud, 2012,711 p. ».

Espérons que d’autres plans beaucoup plus audacieux pourront être mis en œuvre chez nous et qu’ils tiendront compte du fait que Paul Kagame est « un paralytique » et que Joseph Kabila est son « cheval de Troie ». Et que leurs clans respectifs doivent répondre politiquement et juridiquement de leur implication dans la guerre de basse intensité ayant sévi dans notre pays depuis les années 90.

Algérie

Le traquenard malien

Par Ahmed Halfaoui

L’OTAN c’est les Etats-Unis plus quelques armées parmi les plus puissantes du monde. L'OTAN c'est, aussi et surtout, un gigantesque background industriel et technologique militaire de pointe. En Afghanistan, l'OTAN se casse les dents, depuis plus de 10 ans, à pourchasser les talibans qui, loin d'être affaiblis, rendent coup pour coup et gagnent en force et en initiative. En comparaison, l'Algérie est un pays qui peine à sortir du sous-développement, qui n'a pas encore résolu son équation économique, qui importe ses fusils et leurs balles, ses blindés, ses avions et leurs pièces détachées.

Malgré cela, l'Algérie est poussée à aller fourvoyer son armée au Mali. Pressions diplomatiques, actionnement de relais médiatiques (émissions, articles «analytiques» sur le non algérien…), toute la panoplie d'une propagande qui stigmatise le refus d'ingérence dans les affaires d'un autre pays. Une seule question n'est pas posée : «Pourquoi l'armée algérienne devrait-elle pouvoir faire ce qui pourrait sans grand doute embourber les forces de l'OTAN ?». Question qui en entraîne une autre :

«Et si le Mali n'était qu'un pion sacrifié de l'échiquier pour piéger l'Algérie ?». Aminata Traoré avait déclaré : «Les Maliens et les Maliennes ainsi que l'opinion publique internationale doivent savoir que si la France et les Etats-Unis n'avaient pas transformé la résolution 1973 du Conseil de sécurité de

‘’No Fly Zone’’ en mandat de renverser le régime de Mouammar Kadhafi, les rebelles et les

islamistes, qui occupent le Nord-Mali n'auraient pas pu disposer de l'arsenal qui fait leur force sur le

terrain», résumant les origines de la problématique d'ensemble de la crise, aggravée par le blocage

des armes achetées par le Mali. Sans pousser cette conclusion dans ses limites qui la laissent

raisonnablement faire douter qu'il y ait eu «négligence» de ce fait dans le plan atlantiste. Ainsi,

l'ANP ferait une promenade de santé dans le désert malien et s'en retournerait ceinte des lauriers de

la «communauté internationale», alors que, en dehors des groupes islamistes armés, les Maliens

manifestent à Bamako contre toute atteinte à leur souveraineté nationale. Leurs cibles sont clairement

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désignées. Ce sont les pouvoirs supplétifs de la néo-colonisation en cours : «A bas la Cédéao, à bas Blaise Compaoré (Burkina Faso), à bas Yayi Boni (président du Bénin), à bas Alassane Ouattara (Côte d'Ivoire), président de la Cédéao)». Les souverainistes sont organisés, principalement, dans la Coalition des patriotes maliens (Copam), née d'un accord entre 22 regroupements de partis, syndicats et associations, qui privilégie «le droit absolu du peuple malien à décider de son propre sort et ceci à Bamako». Le dernier appel de la Copam : «La lutte des démocrates et patriotes maliens et maliennes triomphera inéluctablement de toutes les manœuvres et agressions contre la concertation nationale souveraine et notre droit à libérer notre patrie par nos propres forces et l'aide des véritables amis du Mali». Le scénario occidental étant de faire en sorte que la Cédéao empêche «…la libération du Nord-Mali» par les forces maliennes et garantisse «la partition du Nord sous couvert de fédéralisme, plan soutenu par les puissances de l'OTAN». Une concertation nationale (associant, peut-être, y compris les rebelles du nord) est en train de se mettre en place, impulsée par la menace d'une intervention extérieure. Vraiment, l'ANP a autre chose à faire.

Kenya

CCTV Africa, la nouvelle chaîne kenyane “made in China”

A Nairobi vient de s'implanter une chaîne d'info ultramoderne. Elle est détenue à 100 % par l'Etat chinois. Qui, sous prétexte de révéler au monde le vrai visage de l'Afrique, soigne surtout sa propre image.

Perchée sur de hauts talons, gainée dans un petit tailleur rouge, Beatrice Marshall nous accueille avec un large sourire. A quelques minutes de l'enregistrement de son émission hebdomadaire, la coquette journaliste, star kenyane de l'info, paraît parfaitement détendue. Autour d'elle s'agitent techniciens, assistants, coiffeuse personnelle. Elle reste pro et, avec assurance, prend place dans son studio ultramoderne. Déco noire, écrans plats, prompteur... on se croirait sur CNN. A une différence près : le contenu du show politique que Beatrice Marshall va animer ce jour-là.

Au sommaire, les sanctions que Barack Obama veut imposer à l'Afrique du Sud et au Kenya pour avoir acheté du pétrole aux Iraniens. « Pourquoi les Etats-Unis se permettent-ils de choisir les alliés et les ennemis de l'Afrique ? » attaque la journaliste. En duplex et en plateau, des experts argumentent. Tous s'élèvent contre la politique de Washington. A l'écran apparaît un énorme sous- titre : « Les sanctions, un héritage impérialiste aberrant. » Une position polémique, très officiellement défendue par Pékin, qui se fournit aussi en pétrole iranien. Pas vraiment un hasard : l'émission est diffusée sur CCTV Africa, la toute nouvelle chaîne d'info africaine, à l'habillage moderne, au ton professionnel... mais détenue à 100 % par l'Etat chinois.

Langue, idées, films, médias...

tout est bon pour conquérir la sphère culturelle, asseoir en douceur sa domination.

Une chaîne asiatique en terres kenyanes...

Nous connaissions l'appétit économique de la Chine, qui s'est lancée à la conquête du continent noir

et de ses matières premières il y a une quinzaine d'années (lire page suivante). Aujourd'hui, Pékin

inaugure une nouvelle stratégie. Après les chantiers boueux, place au « soft power ». Langue, idées,

films, médias..., tout est bon pour conquérir la sphère culturelle, imposer sans en avoir l'air ses

valeurs, asseoir en douceur sa domination. Ce changement de tactique, il faut en chercher le déclic

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un jour d'avril 2008. Sur sa route pour Pékin, la flamme olympique fait étape à Paris. Un fiasco.

Attaquée par des militants pro-Tibet, la torche olympique est éteinte à plusieurs reprises. Choquée, la Chine censure les images mais se décide à investir massivement pour améliorer sa réputation à l’étranger.

A Nairobi, l'opération de séduction s'est traduite par le lancement en grande pompe, en janvier dernier, du QG de la chaîne asiatique. Jusqu'alors, l'antenne internationale de CCTV News, la CNN officielle chinoise, ne disposait que de quelques correspondants en Afrique qui lui envoyaient leurs reportages quand l'actu le commandait. Désormais, le continent dispose de sa propre chaîne, de son propre centre de production – des bureaux flambant neufs dans un quartier cossu de la capitale kenyane, une soixantaine de salariés, deux studios high-tech et des régies entièrement équipées en numérique. A l'étranger, seuls les bureaux de Washington ont bénéficié de tels investissements. Pour l'instant, l'équipe africaine ne réalise qu'une heure de programmes quotidiens, diffusés en anglais sur CCTV News. Mais les perspectives sont prometteuses : en « empruntant » chaque jour l'antenne de la CCTV, la « petite » CCTV Africa touche déjà des millions de foyers en Afrique, en Asie, en Amérique... Dès l'année prochaine, elle émettra deux heures par jour. Avant, peut-être, une antenne vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Business au Bulldozer

« Sortez des frontières ! » lançait en 1995 le président Jiang Zemin aux grandes entreprises chinoises. Plus de quinze ans plus tard, le mot d'ordre a été largement suivi, notamment en Afrique.

Des juteux marchés publics au plus petit business local, les Chinois se sont implantés sur tout le continent. En Zambie, ils exploitent d'impressionnantes mines de cuivre à ciel ouvert. Au Nigeria, ils gèrent d'importantes concessions pétrolières. Au Kenya, à première vue, leur présence reste discrète.

Pas de véritable Chinatown à Nairobi. Mais il suffit de s'enfoncer dans la brousse pour s'apercevoir que la plus isolée des épiceries est tenue par des Chinois. Ou d'emprunter la toute nouvelle 2 × 8 voies qui relie la capitale à la ville de Thika pour comprendre que le réseau routier du pays a été entièrement rénové par des entreprises asiatiques. Certes, cette « Chinafrique » ne s'est pas créée sans heurts : des conflits ont éclaté pour dénoncer les conditions de travail déplorables sur les chantiers chinois et la prédation sans scrupule de Pékin. Mais les échanges entre l'empire du Milieu et l'Afrique n'en ont pas souffert. L'année dernière, ils ont dépassé les 166 milliards de dollars - ce qui fait de la Chine le premier partenaire commercial de l'Afrique, devant les Etats-Unis.

« Rétablir la vérité »

« Notre but est de révéler au monde le vrai visage du continent », annonce avec emphase Pang Xinhua, l'un des managers de la chaîne. Ce journaliste pékinois de 49 ans – le doyen de la rédaction – a quitté femme et enfant pour vivre trois ans au Kenya, un pays où il n'avait jamais mis les pieds.

Avec son gilet de reporter siglé CCTV, il nous fait visiter avec fierté la rédaction, s'arrête devant un planisphère où sont indiqués les correspondants étrangers de la holding chinoise (à Rio, Paris, New York, Moscou, Tokyo...), s'enorgueillit de l'intérêt des médias étrangers pour « sa » chaîne. A l'entendre, travailler à CCTV Africa relève de la mission d'intérêt général. « Soit les médias occidentaux ignorent l'Afrique, soit ils parlent uniquement des guerres, des famines, du sida, dit-il en se resservant du thé. Toujours ce même regard négatif ! Nous, nous souhaitons rétablir la vérité et montrer comment l'économie africaine est en plein boom, comment les ¬sociétés évoluent, comment les citoyens veulent s'en sortir. »

Le nouvel ami chinois face aux anciens colonisateurs...

A la rédaction, les journalistes adhèrent à cette vision un poil manichéenne. Les débuts ont certes été froids. Les reporters kenyans ont craint « l'autoritarisme légendaire des Chinois », les journalistes chinois envoyés à Nairobi ont critiqué « le manque de persévérance » de leurs confrères africains.

Des deux côtés, des efforts ont été consentis. De nombreux Kenyans ont été envoyés à Pékin pour

des formations accélérées et une sensibilisation à la culture asiatique. Aujourd'hui, les équipes

collaborent sans problème. Et le rendu à l'antenne soutient la comparaison avec les plus grandes

chaînes internationales. « Nous allons même les dépasser, fanfaronne la présentatrice Beatrice

Marshall, qui a fait ses premières armes en Grande-Bretagne. Car, en tant qu'Africains, nous sommes

portés par ce projet et fiers d'y participer. »

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Pour rejoindre l'équipe de CCTV Africa, des journalistes locaux se sont vu offrir deux fois leur salaire.

Pour comprendre l'enthousiasme de la journaliste, il suffit de regarder l'antenne de CCTV Africa. La chaîne a recruté une majorité de présentateurs et de journalistes noirs. Pour rejoindre l'équipe, certains se sont vu offrir deux fois leur salaire. « Ce fut l'occasion de briser un terrible plafond de verre, affirme une ex-journaliste kenyane de la BBC. Dans les grands médias internationaux, les Africains subissent le paternalisme des dirigeants occidentaux et n'accèdent jamais aux postes de responsabilités. CCTV Africa a rompu avec cette tradition. »

Face au dragon chinois, les télés locales ne font pas le poids. Même les grands médias internationaux font pâle figure. Rincée par un plan global d'économies, la BBC va peut-être devoir réduire ses effectifs. Pénalisée par son manque de réseau en Afrique anglophone, France 24 – une seule correspondante sur place – tente d'obtenir une fréquence sur la future TNT kenyane, mais le CSA local maintient le flou... Lot de consolation : la chaîne d'info française a obtenu un créneau quotidien sur la chaîne publique KBC. Ses programmes ont le privilège d'y être diffusés... de 1 heure à 5 heures du matin ! « On ne se rend pas compte à quel point les médias français sont largués », lâche une journaliste expatriée depuis quelque temps dans la capitale. Seul média à pouvoir rivaliser : la chaîne qatarie Al-Jazira et ses caisses pleines de pétrodollars. A Nairobi, l'entreprise emploie une demi- douzaine de personnes. Un temps, il s'est murmuré qu'elle projetait de se développer, en ouvrant une antenne africaine entièrement en swahili. Aux dernières nouvelles, le projet a été repoussé.

En attendant, CCTV Africa étend son emprise. Ses reporters sillonnent sans relâche le continent, partent en Ethiopie couvrir le sommet de l'Union africaine, se rendent au Rwanda illustrer le boom économique, s'envolent pour le Soudan... Aucune difficulté pour interviewer les dirigeants africains : tous connaissent la chaîne – récemment, un rédacteur en chef hospitalisé après un banal accident de voiture a même reçu la visite surprise du vice-président kenyan.

Traitement pro-Pékin

A quelques mois des très attendues élections générales, et alors que le précédent scrutin a donné lieu à des émeutes meurtrières, l'appétit féroce de CCTV Africa inquiète. Quelle sera la couverture de la campagne ? Les candidats seront-ils traités équitablement ? Equivalent de Reporters sans frontières, le CPJ (Committee to Protect Journalists) s'est déjà alarmé du traitement pro-Pékin des informations de la maison. Pas question, par exemple, de critiquer les investissements chinois en Afrique. De gêner la collaboration politique de Pékin avec le Soudan. De rappeler la mauvaise réputation de - Robert Mugabe, dictateur zimbabwéen honni par les capitales occidentales mais ami de la Chine. Si la censure est moins vive que sur les chaînes nationales, le Parti garde un œil sur les contenus de la filiale africaine. « Et alors ?, se moque l'ambitieux Mark Masai, journaliste kenyan de 26 ans et déjà présentateur du journal sur CCTV Africa. Vous dites que notre chaîne est le bras armé de Pékin, mais qu'est-ce que CNN par rapport au pouvoir américain ? Qu'est-ce qu'Al-Jazira par rapport au Qatar ? Qu'est-ce que France 24 vis-à-vis de la France ? Tous les médias ont leur propre manière de voir le monde, leurs propres conflits d'intérêt. Nous n'avons fait qu'échanger un parti pris pour un autre ! »

Dans son immense bureau du ministère de l'Information et de la Communication, au dixième étage

des Teleposta Towers de Nairobi, Bitange Ndemo n'est pas loin de partager cet avis. Pour l'heure, il

contemple avec fierté les maquettes de la Konza Technology City, une future ville nouvelle 100 %

high-tech, dont les travaux viennent de débuter aux portes de la capitale kenyane. Cet impassible

adjoint du ministre a beaucoup œuvré pour la modernisation numérique de son pays. Aujourd'hui, il

se réjouit que le Kenya soit devenu « the place to be » pour les grands médias internationaux. « La

plupart des pays africains combattent les médias, nous, nous les soutenons », affirme-t-il, oubliant au

passage les atteintes régulières à la liberté de la presse. L'ancien businessman n'est pas tendre avec

ses hôtes médiatiques. Al-Jazira ? « Une chaîne sensationnaliste. » La BBC ? « Une couverture

tronquée de l'actualité. » Seule CCTV Africa trouve grâce à ses yeux. La belle Beatrice Marshall, le

jeune Mark Masai..., il connaît les présentateurs vedettes de la chaîne, regarde leurs JT et émissions,

comme beaucoup d'autres membres du gouvernement, dit-on. Mais l'enthousiasme ne parvient pas

longtemps à cacher une certaine résignation, révélatrice aussi de la réalité des relations sino-

africaines : « Si CCTV Africa est diffusée chez nous, je ne vois pas pourquoi l'une de nos chaînes

(10)

nationales ne pourrait pas émettre en Chine. Ce principe de réciprocité ne serait que justice. J'ai fait une demande en ce sens aux autorités de Pékin. Mais vous savez quoi, j'attends toujours une réponse... ».

Confucius court le monde

A Nairobi, l'expansion culturelle chinoise passe aussi par l'Institut Confucius. Créé en 2005, ce centre culturel - équivalent de l'Alliance française ou du Goethe Institut allemand - occupe tout un étage de l'université. Labo de langues, salles de cours, bibliothèque... Des centaines d'étudiants kenyans y sont inscrits, contre seulement vingt-neuf à ses débuts. Durant l'année, une dizaine de professeurs les initient au mandarin, à l'histoire de l'empire du Milieu, à la cuisine asiatique... Tout pour parfaire leur connaissance de la civilisation chinoise... et faciliter de futures relations commerciales. Une stratégie parfaitement planifiée par Pékin : depuis 2004, il s'ouvre dans le monde quasiment un Institut Confucius par semaine ! Aujourd'hui, ils sont près de trois cent cinquante, répartis dans une centaine de pays (l'Afrique en compte vingt-cinq). Régulièrement menacé par les plans d'économies, le puissant réseau de centres culturels français a toutefois tenté de contrecarrer le raz-de-marée. En Chine, il a quasiment doublé le nombre de ses Alliances françaises. Pas de chance ! Il s'avère que la plupart des Chinois viennent y apprendre la langue de Molière non pas dans le but d'étendre l'influence française en Chine, mais dans celui de mieux pénétrer l'Afrique francophone...

USA USA USA USA

L'ardoise US

LA DETTE AMÉRICAINE IMAGÉE ... Impeccable pour en comprendre l'énormité.

Tu le reconnais : voici le billet de 100 dollars.

Ce billet est sans doute le plus populaire, le billet préféré dans le monde entier. Ce sont ces billets

que nous utiliserons pour bâtir les "pyramides" décrites dans cette présentation. Et ça, c'est une liasse

de 10 milles dollars:

(11)

Cette somme permet de passer de bonnes vacances au bord de la mer ou de s'acheter une petite voiture d'occasion. Un Terrien moyen doit bosser un an pour la gagner. Et voici 1 million de dollars.

Finalement, ce n'est pas aussi impressionnant qu'on pourrait croire, n'est-ce pas ?

La plupart des habitants de notre planète ne gagneront jamais cette somme de leur vie. C'est peut-être pour cela que l'expression "Devenir millionnaire" est le rêve de tout petit-bourgeois.

Passons à 100 millions de dollars

(12)

Comme tu le vois, ce montant tient sur une palette classique facilitant sa manutention. On voit à côté, pour comparaison, une liasse de 1 million et une autre de 10 mille dollars.

Ouf ! Nous arrivons au milliard de dollars...

Tu as compris: si tu souhaites faire une casse dans une banque pour t’emparer de 1 milliard de

dollars, il te faudra un camion.

(13)

Et voici à quoi ressemble 1 trillion de dollars

Note qu'il s'agit de deux étages de palettes de 100millions de dollars chacune, soit l'équivalent d'un terrain de foot ou d'un Boing-747-400 (toujours pour comparaison)

Nous en sommes maintenant à 15 trillions de dollars

(14)

Comme tu le vois, le Boeing s'est caché derrière cette montagne de dollars, alors que la Statue de la Liberté commence à s'inquiéter car ce montant est inférieur à la dette des États-Unis, qui constitue - tiens-toi bien...114.5 trillions de dollars.

La voici, la dette : elle est à droite sur la photo qui figure à la page suivante

(15)

14

(16)

Tu sautes de cette hauteur sur n'importe quel gratte-ciel américain, tu seras transformé en crêpe.

Et si tu sautes sur la Statue de la Liberté, tu risques de passer à côté.

Ces 114,5 trillions de dollars, c'est la somme qui manque aux États-Unis pour payer la médecine, les médicaments, les retraites,les frais de Sécurité sociale, la police et toutes sortes de projets militaires que tous les présidents des États-unis adorent. Or, pour ce procurer cette somme, il n'y a que deux options soit que le gouvernement imprime ces trillions (!) ou que les habitants des États-Unis sortent l'argent de leurs poches.

"ÉPOUSTOUFLANT" !

Et pendant ce temps là, les agences de notation AMERICAINES

se donnent le droit de donner un jugement sur l'économie

européenne !!!

On croit rêver,

non ?

(17)

L

’idée qui sous-tend ce numéro de Perspectives chinoises est qu’il existe, au sein de la société chinoise, un certain nombre de commu- nautés – ou groupes, ou champs – dont on a toutes les raisons de croire qu’elles promeuvent le renforcement des valeurs universelles servant de fondements aux droits de l’homme. Ces valeurs incluent la liberté de conscience et d’expression, la liberté d’association et le droit à la partici- pation à la vie politique, ainsi que la liberté de la personne. Il s’agit, pour le dire autrement, des libertés fondamentales(1).

Société civile et valeurs démocratiques libérales

Les communautés de journalistes, de défenseurs des droits de l’homme, en particulier les avocats, les communautés religieuses et les organisations non gouvernementales (ONG) impliquées dans les services sociaux ou dans la défense des droits (weiquan 维权) peuvent être –  de différentes manières – d’une grande importance pour la promotion de telles valeurs.

Les communautés de journalistes, les groupes religieux et les ONG ont tous besoin de la liberté de parole(2), de conscience(3)et d’association(4), tandis que les avocats des droits de l’homme défendent le droit à une pro- cédure régulière, à un procès équitable, et à l’accès à la justice(5). Par ail- leurs, dans les systèmes politiques non libéraux et non démocratiques, le soutien de la société civile internationale ou transnationale à ces groupes est aussi un aspect important. Les contributions à ce numéro traitent donc ces différents domaines et aspects.

Un tel projet soulève un certain nombre de problèmes, à commencer par celui de savoir si – supposant que l’idée même de « société civile » ait un sens – une société civile peut exister dans une Chine (post-)autoritaire. La présente introduction plaide en faveur d’une conception libérale de la so- ciété civile, sur la base de laquelle elle examine l’apport des différents sec- teurs de la société civile chinoise abordés dans ce numéro. Une conclusion émerge de toutes les contributions : la pression politique exercée sur la so- ciété civile, voire la répression, provoque le renforcement et la diversifica- tion des ressources mobilisée pour lui résister, accélérant ainsi la prise de conscience des garanties institutionnelles indispensables à l’existence d’une véritable société civile.

Questions conceptuelles : la société civile en Chine entre « gongmin » et « minjian »

Il n’existe pas de définition universellement acceptée de la « société ci- vile » parce que dire qu’une société civile existe revient à poser un juge- ment de valeur. Différentes interprétations de la notion conduisent à diffé- rentes conceptions allant du sociologique au politique (ces dernières étant plus explicitement normatives)(6). Chacune d’entre elle possède ses propres

vertus. La classique conception politique libérale est souvent rattachée aux considérations formulées au XVIIIesiècle par Tocqueville sur la société amé- ricaine. Dans cette perspective, la société civile se caractérise par le rôle important d’un grand nombre d’associations formées de façon libre et vo- lontaire, sans but lucratif, et destinées à servir un aspect particulier du bien commun. Elles se constituent ainsi dans l’esprit civique ou « civil » que l’on trouve dans les systèmes politiques démocratiques(7). Dans la perspective de Tocqueville, et de ceux qui s’inscrivent dans son sillage, l’existence de la société civile est clairement liée à la présence d’une organisation politique démocratique. Dans une telle conception le renforcement de la société ci- vile est susceptible d’engendrer un renforcement de la demande pour des changements démocratiques. Mais, a contrario, cette approche peut éga- lement suggérer que la société civile ne peut pas émerger dans des condi- tions politiques hostiles.

« Vers une société civile » d’Adam Michnik demeure une réflexion impor- tante, influente en Chine, sur le raisonnement politique optimiste suscité

2 p e r s p e c t i v e s c h i n o i s e s • No 2 0 1 2 / 3

1. Une conception des « libertés fondamentales » est développée par exemple dans le libéralisme de John Rawls. Selon lui, on compte parmi ces libertés : le droit de vote, le droit d’accès aux charges électives, la liberté de parole et de réunion, la liberté de conscience, le droit à la propriété indivi- duelle et la liberté de ne pas être arrêté arbitrairement (A Theory of Justice, Cambridge, Belknap Press of Harvard University Press, 1971, p. 53). Pour une critique de cette énumération « parci- monieuse », voir par exemple l’entrée « Human rights » de John Tasioulas dans Routledge Com- panion to the Philosophy of Law, Londres, Routledge, 2012.

2. Les formulations correspondantes peuvent être trouvées dans l’article 35 de la constitution de la RPC de 1982 (révisée pour la dernière fois en 2004, « La constitution de la RPC »), l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), et l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) par exemple. (La RPC a signé le PIDCP mais ne l’a pas ratifié.)

3. Le droit à la liberté religieuse est reconnu par l’article 36 de la constitution de la RPC. Voir égale- ment l’article 18 du PIDCP et l’article 18 de la DUDH sur la liberté de pensée, de conscience et de religion.

4. Article 35 de la Constitution de la RPC, articles 21 et 22 du PIDCP, et article 20 de la DUDH.

5. Concernant le sujet plus vaste de l’accès à la justice en Chine, voir Jayshree Bajoria, « Access to Justice in China », www.cfr.org/china/access-justice-china/p15745; Fu Hualing, « Access to Justice in China: Potentials, Limits, and Alternatives », document provisoire (septembre 2009), http://pa- pers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1474073(sites consultés le 20 août 2012). Le droit international ne protège pas explicitement un droit abstrait à l’accès à la justice, mais ce droit est implicite dans les garanties des droits substantifs et procéduraux (voir par exemple l’article 2 du PIDCP, l’article 8 de la DUDH). Les dispositions relatives à ces questions au plan national se trouvent dans les articles 33, 37et 41 de la constitution de la RPC.

6. Pour une analyse excellente et plus complète des origines intellectuelles du discours sur la société civile, analyse portant sur des approches aussi diverses que celles de Hannah Arendt, Juergen Ha- bermas, Amitai Eztioni, Robert Nisbet et Jonathan Unger, on se reportera à Chan Kinman, Zou xiang gongmin shehui (Vers une société civile),Hong Kong, UP Publications Limited, 2010, cha- pitre 1.

7. Alexis de Tocqueville, De la Démocratie en Amérique, 1835, accessible à l’adresse www.ecole-al- sacienne.org/CDI/pdf/1400-0107/14096_TOCQ1.pdfet www.ecole-alsacienne.org/CDI/pdf/

1400-0107/14097_TOCQ2.pdf(sites consultés le 20 août 2012); par exemple p. 391 (Partie I) :

« La Providence a donné à chaque individu, quel qu’il soit, le degré de raison nécessaire pour qu’il puisse se diriger lui-même dans les choses qui l’intéressent exclusivement. Telle est la grande maxime sur laquelle, aux États-Unis, repose la société civile et politique : le père de famille en fait l’application à ses enfants, le maître à ses serviteurs, la commune à ses administrés, la province aux communes, l’État aux provinces, l’Union aux États. Étendue à l’ensemble de la nation, elle de- vient le dogme de la souveraineté du Peuple. »

perspectives c h i n o i s e s D o s s i e r

Introduction

« Société civile » et « communautés libérales » en Chine

E VA PIL S

(18)

par Tocqueville chez les activistes démocratiques en Europe de l’Est(8). Sous la pression des systèmes dans lesquels ils vivaient, une opposition directe et « politique » au sens étroit – à travers la formation d’un parti politique ou d’un mouvement souterrain destiné à accéder au pouvoir ou à renverser le système – était moins envisageable qu’une stratégie plus diffuse, moins directe, plus large et non violente. En même temps, dans la mesure où ces systèmes étaient totalitaires (au moins aux yeux de ceux qui s’y oppo- saient) la formation de communautés résistant à la domination par l’État était forcément suivie d’effet même si celles-ci ne s’engageaient pas direc- tement dans des luttes pour le pouvoir politique. « Le chemin d’une lutte acharnée pour la réforme, le chemin vers des droits civils et humains plus larges est le seul chemin pour les dissidents en Europe de l’Est ». À la ques- tion de savoir comment le concept de « société civile », « ce terme vieux jeu du XVIIIesiècle  », pouvait s’appliquer à la Pologne des années 1980, Michnik répondit :

Dans l’ordre totalitaire, l’État est le professeur et la société est l’élève dans une salle de classe qui est parfois transformée en prison ou en camp militaire. Dans une société civile, en revanche, les gens ne veulent pas êtres des élèves, des soldats ou des esclaves. Ils agis- sent en tant que citoyens. […] Le fait est que, en tant que citoyens, nous, au sein de l’opposition démocratique, nous ne voulons pas être traités plus longtemps comme des enfants ou des esclaves. Le principe de base du mouvement contre la féodalité réside dans les droits de l’homme, dans l’idée que chacun possédait des droits égaux à ceux du roi. C’est également ce que nous voulons. Nous voulons que chacun jouisse des mêmes droits que Jaruzelski, droits garantis par l’État de droit(9).

Avec d’autres de ses essais, « Vers une société civile » de Michnik a été traduit en chinois par Cui Weiping, une intellectuelle importante dans la Chine d’aujourd’hui(10).

D’un autre côté, comme le souligne Anthony Spires dans son analyse des ONG en Chine(11), et comme cela est corroboré en particulier par la contri- bution de Carsten Vala sur les communautés religieuses(12), la « société ci- vile  » peut également être interprétée comme un soutien plutôt que comme un défi à ordre politique autoritaire. Spires met en opposition les approches « tocquevillienne » et « corporatiste » de la société civile. Il fait ressortir que, dans un environnement politique autoritaire, l’organisation corporatiste de la vie sociale qui, dans la démocratie tocquevillienne relè- verait de la sphère des responsabilités civiques, est le fait d’organisations qui peuvent devenir elles-mêmes des instruments de contrôle entre les mains de l’État autoritaire(13). S’agissant de la Chine, on ne doit pas seule- ment songer à la Fédération chinoise des femmes, à la Fédération chinoise des handicapés ou à la Fédération chinoise des syndicats mais également aux nombreuses organisations non gouvernementales organisées par le gouvernement (Government organised NGOs, GONGO) qui ont été créées récemment(14). S’il existait une conception normative de la « société ci- vile » en contexte autoritaire, elle serait forcément corporatiste et défierait la conception démocratique.

C’est la réalité de contraintes corporatistes autoritaires dans la société chinoise d’aujourd’hui qui conduit des sociologues aussi éminents que Sun Liping de l’université Tsinghua à exprimer des doutes persistants quant à l’existence même d’une société civile en Chine. De façon caractéristique, la compréhension de la « société civile » par Sun, tout comme celle de nom-

breux universitaires chinois intégrant cette notion, a une dimension nor- mative marquée par Tocqueville et Michnik, tout en s’appuyant sur des cri- tères qui devraient être satisfaits empiriquement par la société civile chi- noise. S’inscrivant dans le sillage de Xiao Gongqin(15), Sun distingue trois ni- veaux de profondeur normative. Tout d’abord, dans la société civile – c’est- à-dire dans une « société de citoyens » ou gongmin shehui (公民社会) – il y a des citoyens individuels libres. Le concept de citoyen individuel, ou gongmin (公民), coexiste avec renmin (人民), « le peuple », un mot pluriel dont la connotation est collective et qui n’admet pas d’énumération indi- viduelle. Renmin a, bien évidemment, les faveurs du langage traditionnel du PCC. Deuxième niveau : les citoyens ont, dans la société civile, des res- ponsabilités civiques. Troisième niveau : les citoyens ont des droits indivi- duels(16). Manifestement, dans la perspective de Sun, la Chine ne possède pas « encore » une telle société. Il y a trois ans, Sun notait déjà qu’il était fatigué de demander aux jeunes universitaires de son institut de recherche travaillant dans le domaine des « études sur la société civile » quand la so- ciété civile chinoise allait finalement « arriver ».

Cherchant une position intermédiaire, d’autres universitaires, parmi les- quels Xiao Gongqin, suggèrent que la société civile pourrait être pensée moins en opposition avec l’État (ce que Xiao nomme le « modèle anglo- américain » de la société civile) qu’en coopération avec lui dans l’esprit de la social-démocratie d’Europe continentale. À l’évidence, comme le re- marque Xiao, la Chine a considérablement changé depuis l’ère de Mao Ze- dong, où, dans un certain sens, il n’existait même pas de « société », pour ne rien dire d’une « société civile ». C’était une époque où l’idéologie de l’État omnipotent (quanneng guojia zhuyi 全能国家主义) excluait l’exis- tence d’une société comme quelque chose de distinct et potentiellement indépendant de l’État(17).

Peut-être parce que l’expression « gongmin shehui » ne reflète pas la réalité de leur société actuelle, certains de ceux qui mettent en garde contre l’application de l’expression à la Chine optent plutôt pour minjian shehui (民间社会), expression moins chargée d’un point de vue normatif.

Dans sa traduction la plus littérale, minjian signifie simplement « parmi le

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8. Adam Michnik, « Towards a Civil Society: Hopes for Polish Democracy: Interview with Erica Blair (John Keane) », p. 104 sq, inAdam Michnik, Letters from Freedom: Post-Cold War Realities and Perspectives, Berkeley, University of California Press, 1998, p. 96-113.

9. Adam Michnik, « Toward a Civil Society », inAdam Michnik, Letters from Freedom, op. cit. Dans ce même texte, Michnik relève l’incapacité des observateurs occidentaux à voir l’Europe de l’Est de l’époque comme « totalitaire » parce que, dit-il, le concept de « totalitarisme » renvoie, dans les sociétés occidentales, aux images de Hitler et de Staline.

10. Voir la traduction de Cui Weiping, Tongwang gongmin shehui, 1996, accessible à l’adresse www.marxists.org/chinese/PDF/06/112101.pdf(consulté le 20 août 2012).

11. Anthony Spires, « Contingent Symbiosis and Civil Society in an Authoritarian State: Understanding the Survival of China’s Grassroots NGOs », American Journal of Sociology, vol. 117, n° 1, juillet 2011, p. 1-45.

12. Voir l’article de Carsten Vala dans ce numéro : « Protestantisme et société civile dans la Chine autoritaire des années 2000 ».

13. Anthony Spires, art. cit., p. 2 sq.

14. Pour une discussion sur les chiffres pertinents, voir les contributions de Kin-man Chan et Fengshi Wu et de Thomas Kellogg dans ce numéro.

15. Sun se réfère au travail de Xiao Gongqin, mais sans le citer.

16. Sun Liping, « Zhongguo you mei you gongmin shehui?» (La China possède t-elle une société ci- vile ?), 18 août 2009, http://sun-liping.i.sohu.com/blog/view/129843127.htm(consulté le 20 août 2012).

17. Xiao Gongqin, « Fazhan gongmin shehui zhi Zhongguo lujing »(Le chemin pour un développement de la société civile chinoise), 28 juillet 2012,www.chinese-thought.org/zwsx/010039.htm (consulté le 20 août 2012). Pour une analyse critique, voir par exemple Joseph Fewsmith, « “Social Management” as a Way of Coping with Heightened Social Tensions », China Leadership Monitor, n° 36, hiver 2012. L’auteur y souligne que l’expression « gestion sociale », fut utilisée pour la pre- mière fois de façon appuyée par le Secrétaire général du PCC Hu Jintao en septembre 2010 lors d’une session d’étude du Bureau politique.

Eva Pils – « Société civile » et « communautés libérales » en Chine

(19)

peuple » et, à la différence de gongmin (« citoyen »), ne possède aucune connotation libérale. Minjian shehui pourrait être traduit, avec une mala- dresse délibérée, par la «  société populaire  » (folk society). Ce terme évoque aussi l’opposition traditionnelle entre fonctionnaires (guan 官) et petit peuple (min 民). Il suggère en outre un dualisme opposé au pluralisme complexe de la « société de citoyens » dans laquelle les citoyens ont le droit de s’organiser et de contester le gouvernement de multiples façons.

Une autre raison pour un changement tacite en faveur de minjian shehui dans les médias grand public réside dans le fait qu’au cours des derniers mois et des dernières années, l’aile dure de la direction politique chinoise a choisi de rejeter le concept de « société civile / gongmin shehui ». Cer- tains font remonter ce rejet explicite à un article de Zhou Benshun daté du mois de mai 2011. Zhou Benshun, membre du Comité des Affaires poli- tiques et juridiques, organisme (à l’époque) puissant dirigé par Zhou Yong- kang, proposa l’expression « gestion sociale à caractéristiques chinoises » (Zhongguo tese shehui guanli 中国特色社会管理), écho des notions auto- ritaires et corporatistes que nous avons examinées plus haut. Un des pas- sages centraux du discours de Zhou Benshun mérite d’être cité.

Pour innover en matière de gestion sociale, nos avantages politiques et institutionnels doivent être pleinement mis à profit. La structure de la gestion sociale dans laquelle les comités du Parti guident, le gouvernement porte la responsabilité, la société coordonne et les masses participent donne une expression concrète à notre avantage politique et institutionnel et constitue la racine du renforcement et de l’innovation en matière de gestion sociale et doit être énergique- ment amélioré. Nous devons insister sur la consolidation du pouvoir du Parti, garant de la stabilité du pays et d’une paix durable, qui per- met aux gens de vivre et de travailler dans la paix et le contente- ment. Les problèmes de non-conformité entre la gestion sociale et la nouvelle situation doivent être réglés de façon réaliste, en évitant les croyances fausses et les représentations erronées qui finiraient par nous faire tomber dans le piège de la prétendue « société ci- vile » tendu par certains pays occidentaux […](18).

Depuis, on a observé un tournant contre la « société civile », au moins au niveau de la rhétorique politique du Parti. À la fin du mois de juillet 2012, un éditorial largement remarqué de l’édition étrangère du Quotidien du peuple était consacré aux groupes potentiellement hostiles à l’État- Parti – désignés par des commentateurs comme les « cinq nouvelles caté- gories noires (xin hei wu lei 新黑五类) »(19). Après avoir critiqué l’Occident, et en particulier les efforts américains pour miner la stabilité de la Chine, l’éditorialiste poursuit :

Avec la liberté d’internet comme slogan, ils attaquent la gouvernance

« descendante » (top down) afin de promouvoir le modèle tradition- nel de la démocratie libérale. En recourant à des « avocats de défense des droits  », à la religion souterraine, aux dissidents, aux meneurs d’internet et aux groupes sociaux défavorisés comme forces cen- trales, ils vont exercer des pressions en faveur d’une approche « as- cendante » (bottom up) de la gouvernance en Chine, et ce à partir de la base, afin de poser des jalons pour changer la Chine(20).

Le glissement rhétorique apparu dans l’article de Zhou Benshun et dans l’éditorial récent menace, d’une certaine façon, de masquer les nuances et

de mettre temporairement un terme à des discussions plus subtiles visant à comprendre si et comment la société civile se développe en Chine et quelle direction elle doit prendre. D’un point de vue rhétorique autant que conceptuel, il semblerait presque que la « société civile » doive désormais accepter son nouveau statut d’objet d’une persécution officielle(21).

Il ne faut pas traiter à la légère cette rhétorique et ses implications pour l’attitude officielle à l’égard de la société civile chinoise au cours des pro- chaines années. Mais il convient également d’évaluer ce que cette nouvelle rhétorique autoritaire peut changer ou a déjà changé sur le terrain. Les contributions à ce numéro traitent principalement de la question de savoir comment des personnes réelles, des communautés et des organisations appartenant au champ du journalisme, de la défense des droits de l’homme et de la religion (avec une attention toute particulière aux églises non enregistrées) ont évolué, et comment les ONG sont traitées dans le système actuel tant au plan interne qu’au niveau international. La rhéto- rique répressive et antilibérale de Zhou Benshun (et d’autres) ne nous ren- seigne pas sur ce point mais elle souligne qu’il faut s’en informer.

Le développement des communautés

libérales et des communautés dépendant de valeurs libérales

Les contributions à ce numéro abordent toutes le thème des conditions de survie de la société civile au sein d’un environnement autoritaire. Elles brossent un tableau remarquable des entités de la société civile qui luttent et, souvent, tentent de survivre ou de ré-émerger même après avoir subi de violentes attaques de la part de l’État. Elles traitent de la façon dont de telles luttes affectent d’autres activités et d’autres objectifs des groupes en question.

Les champs de la société civile analysés ici sont peuplés, certes de façon non exclusive, par des communautés que l’on peut utilement qualifier de

« libérales » en référence aux orientations qui sont les leurs en matière de valeurs. Même s’il existe des tensions entre leurs propres valeurs et (cer- taines) valeurs libérales, comme dans le cas des communautés religieuses, il n’en demeure pas moins que leur existence même dépend de valeurs qui contestent l’autoritarisme et qu’elles sont en retour particulièrement me- nacées par une « gestion » illibérale et par la répression.

Pour l’État-Parti, les communautés libérales, dans ce sens extensif, repré- sentent et concentrent les défis que lui pose la société, entendue au sens large. Dans le cadre social plus large, elles sont impliquées dans divers ef-

4 p e r s p e c t i v e s c h i n o i s e s • No 2 0 1 2 / 3

18. Zhou Benshun, « Zou Zhongguo tese shehui guanli chuangxin zhi lu » (Le chemin vers de l’inno- vation dans la gestion sociale aux caractéristiques chinoises), 16 mai 2011, www.qstheory.cn/zxdk/2011/2011010/201105/t20110513_80501.htm(consulté le 20 août 2012). La présente traduction est fondée sur celle de Flora Sapio sur son blog Forgotten Archipe- lagoes, 6 juillet 2001 à http://florasapio.blogspot.hk/2011/06/belated-translation-zhou-benshun- road.html(consulté le 20 août 2012). Voir aussi par exemple Xiao Gongqin (ci-dessus note 15).

19. China Digital Times, http://chinadigitaltimes.net/2012/08/word-of-the-week-the-new-five-black- categories (consulté le 20 août 2012). Les « Cinq éléments noirs » ou « Cinq catégories d’éléments noirs » (hei wu lei) d’origine incluaient les propriétaires terriens, les paysans riches, les contre-ré- volutionnaires, les mauvais éléments et les droitiers. Gucheng Li, A Glossary of Political Terms of the People’s Republic of China, Hong Kong, The Chinese University Press, 1995, p. 150.

20. Le Quotidien du Peuple, « Zhongguo zhenzheng de tiaozhan shi weilai 5-10 nian » (Le vrai défi qui attend la Chine est dans les 5-10 prochaines années), 1er juillet 2012, http://ccnews.people .com.cn/n/2012/0731/c141677-18636091.html(consulté le 20 août 2012); traduit en anglais par Scott Harold http://chinadigitaltimes.net/2012/08/peoples-daily-chinas-real-challenge-is- the-next-5-10-years(consulté le 20 août 2012).

21. Voir Zhu Jianguo, « Weihe pan “gongmin shehui” sixing » (Pourquoi condamner la « société civile » à la peine de mort ?), Zhengming, juin 2011, pour une version en ligne voir www.peacehall.com/

news/gb/pubvp/2011/06/201106060051.shtml(consulté le 20 août 2012).

D o s s i e r

Referenties

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