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Pauvres, mais honnêtes, nous sommes gratuits pour ne pas être à vendre

Année 2018 - Numéro 23 du jeudi 11 octobre

Sommaire Francophonie

Le Canada renouvelle son soutien à Michaëlle Jean et plaide pour des

valeurs démocratiques… page 1

USA

Démission de Nikki Haley: « une pause carrière », selon Donald Trump…

page 5

« La plus belle cause de l’humanité»

La contribution de Cuba à la libération de l’Afrique et à la lutte

contre l’Apartheid.

page 13.

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Francophonie

Mélanie Joly, ministre canadienne du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie

Le Canada renouvelle son soutien à Michaëlle Jean et plaide pour des valeurs démocratiques

Par Isidore KWANDJA NGEMBO1

Les délégations représentant les quatre gouvernements du Canada membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) vont au Sommet d’Erevan avec la même la détermination de promouvoir la langue française et préserver les valeurs fondamentales que se doit de défendre, à tout prix, la Francophonie.

Des valeurs cardinales telles que la primauté du droit, le respect des droits de la personne, la démocratie et la liberté d’expression, qui sont chères aux yeux des Canadiens, et que le Canada n’a cessé de promouvoir au sein de l’OIF.

Avant de s’envoler pour Erevan où elle doit participer à la Conférence ministérielle de la Francophonie (CMF), les 08 et 09 octobre, la ministre canadienne du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly, a tenue à préciser clairement l’importance de défendre, de renforcer et de promouvoir les valeurs de la Charte de la Francophonie et l’usage de la langue française à l’international : « Le Canada accorde, comme toujours, une grande importance aux valeurs de la Francophonie, dont la promotion de la paix, la démocratie et les droits de la personne […] Ces valeurs seront au cœur de nos interventions lors du Sommet de la Francophonie », a dit la ministre canadienne en charge de la Francophonie.

1Politologue et ancien conseiller à la direction Afrique du ministère des Affaires étrangères du Canada article repris au Potentiel du mardi 9 octobre 2018

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Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, qui devra, lui aussi, participer au Sommet de chefs d’État et de gouvernement, les 11 et 12 octobre à Erevan, a également indiqué que la Francophonie joue un rôle de premier plan pour défendre des valeurs communes, et que, le Canada engage à défendre les droits de la personne, la démocratie et l’Etat de droit : « Vivre ensemble dans la solidarité, le partage des valeurs humanistes et le respect de la diversité : source de paix et de prospérité pour l’espace francophone », a souligné Justin Trudeau.

L’enjeu de ce Sommet d’Erevan est donc double pour les délégations canadiennes, mais également pour tous les autres États démocratiques, qui doivent parler d’une voix ferme et sans équivoque :

Premièrement, pour défendre les valeurs fondamentales qui sont au cœur même de la raison d’être de l’OIF, constituent le socle sur lequel se construit l’action de cette Organisation et font d’elle, une institution internationale sérieuse aux yeux du monde entier et respectueuse des principes démocratiques dans le monde francophone.

Deuxièmement, pour essayer de convaincre les autres États et gouvernements membres, de la nécessité de choisir, à la tête de cette précieuse organisation, une personne respectueuse des droits de la personne humaine et des principes démocratiques. Une telle personne serait plus encline à défendre vigoureusement les principes démocratiques, le respect des droits fondamentaux de la personne, l’État de droit et les libertés individuelles dans tout l’espace francophone.

En effet, il y a une tentative très inquiétante de la part de certains États de vouloir remettre en question les fondamentaux qui, depuis de dizaines d’années, ont fait la force de la Francophonie, en plaçant à sa tête la personne qui n’a rien à voir, ni avec la défense de la langue française dans le monde, ni avec la promotion des droits de la personne et des principes démocratiques.

Le Canada des Casques bleus, le Canada qui s’insurge courageusement contre les violations des droits de la personne en Arabie Saoudite, le Canada qui lève le tabou et prend la défense des minorités LGBTQ, le Canada qui brandit les droits et les libertés sans ambages, est attendu de pied ferme à Erevan par la Francophonie des peuples, des droits et des libertés. Il ne doit donc pas céder aux pressions exercées par certains pays qui veulent se servir de l’OIF pour leurs intérêts inavoués. Il doit résister aux tentatives de chantage exercées sur lui pour sacrifier ou remettre en question les valeurs fondamentales prônées par l’OIF et qui sont chères aux yeux des Canadiens.

Le premier ministre Legault devrait clarifier sa position

C’est ici l’occasion de lancer un appel vibrant au nouveau premier ministre du Québec, François Legault, qui semble hésiter à apporter son appui ferme au renouvellement du mandat de sa concitoyenne, de clarifier, lui aussi, sa position sans ambiguïté, emboîter les pas à Justin Trudeau, se donner les coudées franches pour résister aux pressions et défendre les valeurs fondamentales chères aux yeux des Québécois.

Le Québec est un acteur majeur qui contribue beaucoup au budget de l’OIF. À ce titre, son premier ministre, nouvellement élu, a bien raison de chercher à savoir comment est dépensé l’argent du contribuable québécois, alloué chaque année à cette organisation.

En effet, il y a quelques mois, sur instruction de Michaëlle Jean, l’OIF a mis en place un Groupe de travail sur la transparence pour justement déceler les faiblesses éventuelles et les corriger rapidement afin d’assurer une gestion efficiente, efficace et économe au cours des années à venir. Et, c’est le Québec qui a été chargé de présider cette commission.

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C’est donc une opportunité que le Québec devrait saisir pour apporter son expertise, en contribuant à moderniser les politiques de l’OIF en matière de transparence, définir les règles et les normes les plus élevées de gestion et reddition de comptes, développer les bonnes pratiques et créer des conditions favorables à une saine gestion des ressources de cette organisation.

Ceci dit, il ne faut donc pas oublier, ni perdre de vue que le plus important pour l’avenir de l’OIF ce sont des valeurs fondamentales telles que la démocratie, la primauté du droit, le respect des droits de la personne, que les États membres doivent à tout prix protéger.

Michaëlle Jean

L’enjeu du XVIe Sommet de la Francophonie est beaucoup plus grand et complexe que le seul aspect de la gestion interne de l’organisation. Il est question ici de choisir entre, l’une et l’autre, de deux candidates : Michaëlle Jean, secrétaire générale sortante qui connait bien l’organisation et a fait ses preuves notamment dans la promotion de la langue française et la défense courageuse des droits de la personne et des principes démocratiques, d’une part, et Louise Mushikiwabo, ministre des Affaires étrangères du Rwanda et numéro deux d’un régime autoritaire, qui a le pire bilan en matière de respect des droits de la personne et des principes démocratiques, et a banni l’usage de la langue française dans l’enseignement et l’administration publique dans son pays : « au Rwanda, le français ne va nulle part » dit-elle, d’autre part.

Bien plus alarmant encore pour l’OIF, il y a quelques jours passés, Louise Mushikiwabo, qui était l’invitée de Patrick Simonin, a avoué sur le plateau de la télévision TV5 que « Je ne connais pas encore assez l’organisation (OIF) pour émettre des avis… ». Cela prouve à suffisance que la Francophonie n’a jamais été parmi ses préoccupations. Sinon, comment la ministre des Affaires étrangères du Rwanda depuis bientôt dix ans, peut-elle expliquer sa méconnaissance de l’OIF, elle qui siège régulièrement à la Conférence ministérielle de la Francophone (CMF) – une des trois instances consacrées par la Charte de la Francophonie pour veiller à l’exécution des décisions de Sommets de la Francophonie -, et prétendre diriger cette organisation ?

Il n’est donc pas question pour le Canada, le Québec et de bien d’autres États

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démocratiques de cautionner, de quelque façon que ce soit, une telle candidature, simplement parce que les médias ont, à tort ou à raison, relevé quelques faiblesses dans la gestion et l’administration de la secrétaire générale sortante, qui a abattu un travail de titan en quatre ans.

Tous les États et gouvernements membres qui ont encore quelques hésitations quant à la gestion interne de l’organisation, peuvent être assurés que si Michaëlle Jean est réélue, elle sera appelée à renforcer et à mettre en place des équipes de travail dynamiques et talentueuses pour l’aider à atteindre ses objectifs d’assurer une gestion transparence et la reddition de comptes. De toute façon, Michaëlle Jean n’aura pas d’autre choix que de restructurer, renouveler son administration et renforcer ses équipes pour répondre aux préoccupations exprimées par les États membres.

Commentaire de Dialogue

L’affaire du second mandat de Michaëlle Jean et de la candidature de Louise Mushikiwabo, considérée par d’aucuns comme « scandaleuse » quoique soutenue par Emmanuel Macron sera certainement l’un des sujets vedettes en fin de semaine, quand la presse rendra compte des travaux qui vont commencer sous peu à Erevan.

Entre temps, s’y est ajouté un autre sujet, qui met lui aussi quelque peu en question la nature exacte de la Francophonie : la candidature de l’Arabie Saoudite à l’obtention d’un siège d’observateur, autre initiative que l’on dit « bien vue » du Président Macron, sur fond de gros contrats d’armement.

On n’assistera sans doute à Erevan à aucune scène exaltante, mais il sera fort intéressant de voir comment vont se dénouer les contradictions internes d’une organisation comme l’OIF, fondée au départ sur des bases parfaitement néocoloniale, puis teintée d’idéaux démocratiques au nom des « immortels principes de1789 », par la France mais dont le Canada aime à rappeler qu’il est le second contributeur, dont l’Arabie aimerait forcer la porte à coup de pétrodollars, et dont le Rwanda aimerait obtenir le Secrétariat général, à la faveur d’un mécontentement

« africain » lors de la désignation de Michaëlle Jean, devenue subitement « canadienne » en oubliant tant ses origines haïtiennes que la nuance de son épiderme. Soyons clairs, ce mécontentement, plutôt qu’africain, était « dictatorial » car c’étaient les chefs d’états de la trempe de Sasou Nguesso qui chargeaient en tête contre la candidature Jean.

La Francophonie demeurera-t-elle une organisation indépendante ou va-t-elle s’aligner comme d’autres dans le rang des auxiliaires de l’impérialisme. ?

La réponse est pour bientôt.

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USA

Démission de Nikki Haley: « une pause carrière », selon Donald Trump

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Le président Donald Trump et l’ambassadrice américaine devant les Nations unies, Nikki Haley, lors de l’annonce de sa démission à la Maison blanche, le 9 octobre. (© Olivier Douliery/AFP)

Le président des Etats-Unis a confirmé, mardi 9 octobre, la démission de Nikki Haley, ambassadrice des Etats-Unis devant l’Organisation des nations unies (ONU), « à la fin de l’année ».

Elle s’était montrée plutôt discrète lors de l’Assemblée générale des Nations unies, fin septembre. Nikki Haley, ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU, a présenté, mardi 9 octobre, sa démission au président Donald Trump, qui l’a acceptée. Ce départ – qui complète le renouvellement complet, en moins de deux ans, de l’équipe chargée de la diplomatie de la nouvelle administration, à l’exception du secrétaire à la défense, James Mattis – a manifestement pris Washington par surprise.

« Ce fut l’honneur d’une vie » de servir en tant qu’ambassadrice, a déclaré Nikki Haley depuis le bureau ovale de la Maison blanche, où elle s’est entretenue avec Donald Trump, devant plusieurs journalistes. « Non, je ne serai pas candidate en 2020 » a-t-elle ajouté, démentant toute ambition à se présenter aux prochaines élections présidentielles. Elle a déclaré vouloir soutenir la campagne de Donald Trump pour sa réélection.

Nikki Haley avait exprimé il y a six mois son souhait de « prendre une pause », a de son côté expliqué Donald Trump, sans que d’autres raisons de son départ ne soient évoquées.

« Nous avons résolu beaucoup de problèmes ensemble », a-t-il déclaré, ajoutant qu’il la considérait comme une personne « très spéciale ». Il a également annoncé qu’un remplaçant au poste d’ambassadeur devant les Nations unies serait nommé d’ici « deux à trois semaines ».

Nikki Haley aurait discuté de son départ avec Donald Trump lors d’une rencontre à la Maison Blanche la semaine dernière, selon le site d’information Axios, qui a révélé

2Sources : Le Monde / Sputnik / Le Figaro / La Tempête des Tropiques / Mediacongo.net

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l’information. Selon la rédaction de CNN, elle aurait prévenu dans la matinée de mardi son équipe qu’il « était temps de tourner la page » après deux ans au poste d’ambassadrice.

Première femme nommée dans l’administration Trump

La démission de l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU prive d’une figure féminine de premier plan une administration qui en compte peu.

Nikki Haley, née Nimrata Randhawa le 20 janvier 1972 à Bamberg (Caroline du Sud), femme politique américaine membre du Parti républicain, a été gouverneure de Caroline du Sud de 2011 à 2017 et ambassadrice, représentante permanente auprès des Nations unies depuis le 25 janvier 2017, poste dont elle démissionne le 9 octobre 2018. Née d’une famille originaire du Pendjab, en Inde, dans les années ’60 Nikki Haley a travaillé dans la petite entreprise de vêtements appartenant à l’époque à sa mère, avant de se lancer en politique, gravissant les échelons au niveau de l’Etat jusqu’au poste de gouverneur. Initialement de confession sikh, elle a adopté la religion de son mari, se définit désormais comme chrétienne et a rejoint le culte méthodiste, un mouvement religieux protestant.

Elle était donc une figure de haut rang, dans une administration qui compte peu de femmes bien placées, et une figure issue de l’immigration asiatique récente qui s’est imposée dans un milieu très WASP3.

Durant son mandat de gouverneure, elle a fait retirer le drapeau confédéré du Parlement de Caroline du Sud, quelque temps après la tuerie de Charleston, lors de laquelle un suprématiste blanc assassine neuf noirs.

Ses débuts avaient été salués par des formules comme « Nikki Haley, nouvelle figure républicaine de la diversité »4

« Fille d'immigrés sikhs, jeune, Nimrata Nikki Randhawa Haley, alias Nikki Haley, n'est pas une élue républicaine typique. Mais elle représente tout un symbole. Dans un Grand Old Party souvent décrit comme un club d'hommes blancs vieillissants, le gouverneur indo- américain de Caroline du Sud incarne la nouvelle garde, démographiquement plus

3White, Anglo-Saxon Protestants = Blancs, de culture anglo-saxonne et de religion protestante.

4Par Adèle Smith envoyée spéciale à Tampa (Floride) Le Figaro du 28/08/2012

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représentative du pays. Nikki Haley fait partie d'un petit groupe s'étoffant chaque année, qui compte le nouveau venu Ted Cruz, possible premier sénateur américano-cubain du Texas s'il est élu en novembre, Susana Martinez, première femme hispanique élue gouverneur, représentant le Nouveau-Mexique, ou encore Bobby Jindal, gouverneur indo-américain de Louisiane. Le sénateur de Floride américano-cubain, Marco Rubio, «rock star» du parti républicain, figurait dans la «short-list» des candidats à la vice-présidence. Ces nouvelles personnalités du parti seront mises en avant tout au long de la convention, afin de diffuser un message de tolérance.

Fille d'immigrés indiens

Nikki Haley devait prononcer mardi soir l'un des tout premiers discours, juste avant le pilier du parti Chris Christie et l'épouse du candidat, Ann Romney. La figure du mouvement Tea Party, défendant un conservatisme fiscal pur et dur, devait jouer sur trois tableaux:

raconter son extraordinaire histoire personnelle, réconcilier Mitt Romney avec les femmes, enfin parler emploi et économie dans son État, où elle a défié le président Obama sur l'implantation d'une usine Boeing. «Vous ne trouverez pas meilleur symbole du renouveau du parti que Nikki Haley, ses parents lui ont inculqué les meilleures valeurs de l'Amérique», raconte le président du parti républicain de Caroline du Sud, Chad Conelly.

Comme tous les nouveaux venus, Nikki Haley incarne le rêve américain. Ses parents ont immigré dans les années 1960 en Caroline du Sud, où le turban du père était mal vu. Les enfants étaient les seuls Indiens dans leur l'école. Cela a forgé chez Nikki un caractère combatif. À force de travail, la famille a bientôt connu le succès, au point de devenir millionnaire. Élevée dans l'environnement conservateur de son entourage et de son État, la passionnée de politique est devenue, à 38 ans, le plus jeune gouverneur des États-Unis, en 2010. On lui prête des ambitions présidentielles. «Je n'en serais pas surpris, dit Chad Connelly, elle a un sens inouï de la politique et c'est l'un des meilleurs petits soldats du parti.» Son mari officier de la garde nationale, qui sera déployé prochainement en Afghanistan, ajoute une note patriotique, idéale, à son histoire. La grande brune aux cheveux couleur jais, toujours élégamment habillée, dégage un formidable charisme. Ce ne serait pas mal, espère le parti, si celui-ci pouvait déteindre un peu sur Mitt Romney ».

Sous l’administration Obama, Haley a été associée au mouvement Tea Party. Fin 2011, elle apporte son soutien à Mitt Romney en vue de la primaire présidentielle de 2012.

Contrairement à Trump, qui est plutôt un outsider qui, du dehors, a fini par s’imposer au parti républicain, Nikki Haley a fait carrière dans ce parti, où elle est mise en avant comme faisant partie de la nouvelle génération de personnalités politiques républicaines, à la fois talentueuse et issue de l'immigration, comme le gouverneur du Nouveau-Mexique Susana Martinez ou le sénateur de Floride Marco Rubio, qu'elle appuie lors des primaires présidentielles de 2016. À la suite du désistement de ce dernier, elle soutient Ted Cruz, sénateur du Texas faisant lui-aussi partie de la nouvelle génération de politiciens républicains conservateurs. Après l'arrêt de la campagne de Cruz, elle se range derrière le dernier candidat en lice et vainqueur des primaires, Donald Trump.

Nikki Haley a notamment pesé sur les dossiers israéliens au sein des Nations unies.

L’ancienne gouverneure de Caroline du Sud, première femme nommée dans l’administration de Donald Trump en janvier 2017 quatre jours après son investiture, s’est distinguée en portant une ligne dure notamment contre la Corée du Nord et l’Iran, les deux principaux dossiers de politique étrangère de ce gouvernement.

Cependant, elle a aussi retenu l’attention de l’Afrique, d’une part parce que l’épisode du drapeau confédéré, qui datait de son gouvernorat, lui avait valu une certaine sympathie en

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Afrique noire et d’autre part parce que sa présence aux Nations Unies comme ambassadrice des Etats-Unis reste aussi marquée par plusieurs brouilles avec Kinshasa. Fait remarquable, alors que Donald Trump semblait habité par l’idée fixe de faire en tout le contraire de ce que faisait Barrack Obama, son administration ne s’est pas départie de la ligne très critique envers le régime Kabila qui était celle de son prédécesseur, et en particulier de ses exigences de transparence et d’honnêteté du scrutin lors des prochaines élections.

Malgré ces relations difficiles entre Kinshasa et Washington, la République démocratique du Congo a réussi à se faire élire au Conseil des droits de l’homme qui a renouvelé, cette année, quatre sièges réservés au groupe africain. Et la RDC l’a emporté haut la main, malgré la campagne de certains militants congolais d’Opposition qui avaient appelé à bloquer Kinshasa. Cela n’étonnera personne, si l’on veut bien considérer combien peu nombreux sont les pays africains que l’on peut considérer comme des amis sincères de la démocratie…

Soutenant une forte position pro-israélienne devant les Nations unies, elle s’est notamment impliquée sur le dossier du transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem, sans parvenir à obtenir un soutien suffisant au sein des Nations unies. Elle a également supervisé la sortie des Etats-Unis du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, en juin 2018.

Après l’arrivée à la Maison Blanche du milliardaire, novice en relations internationales, elle avait occupé le devant de la scène diplomatique américaine, profitant de l’effacement médiatique du secrétaire d’Etat de l’époque, Rex Tillerson. Elle est apparue davantage en retrait depuis que le département d’Etat a été confié à Mike Pompeo, un responsable politique très proche de Donald Trump.

L’une des images fortes de son passage aux Nations unies restera son départ du Conseil de sécurité au moment où l’ambassadeur palestinien, Riyad Mansour, prenait la parole pour appeler à une aide internationale pour son peuple, le 15 mai 2018. Les Etats-Unis ont bloqué à plusieurs reprises, ces derniers mois, des résolutions condamnant la politique israélienne vis-à- vis des territoires palestiniens.

Nikki Haley quittant la salle du Conseil de sécurité de l’ONU au moment du discours de l’ambassadeur palestinien, Riyad Mansour, le 15 mai 2018. (© Drew Angerer/AFP)

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Dès sa nomination, Nikki Haley a su se dégager une marge de manœuvre politique face à l’omniprésence de Donald Trump sur les sujets internationaux, n’hésitant pas à rendre publics ses désaccords avec le président. « Je ne suis pas d’accord avec lui sur tout », a-t-elle écrit dans une tribune publiée dans le Washington Post, au début du mois de septembre.

En février 2016, en pleine campagne pour l’élection présidentielle, elle avait jugé que le milliardaire incarnait « tout ce qu’un gouverneur ne veut pas d’un président ». Juste avant la victoire du candidat républicain, le 8 novembre 2016, Nikki Haley se disait même « pas fan » de Donald Trump.

L’ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley était une alliée des Nations unies, appréciée de camps aussi divers que la droite dure israélienne de Benyamin Netanyahou ou les anti-Maduro. Avec le secrétaire général, Antonio Guterres, elle avait aussi noué une relation personnelle qui avait permis de maintenir un dialogue entre Washington et alors même que Trump n’a de cesse de railler l’organisation internationale. Face aux attaques permanentes du locataire de la Maison Blanche contre « le multilatéralisme », elle était un rempart efficace et compétent. Appréciée des diplomates, cet « animal politique » faisait l’unanimité. Alors pourquoi cette diplomate de talent est-elle partie ?

L’une des hypothèses avancée par la presse américaine est que cette « pause » pourrait être liée à des révélations sur des vols à bord d’un avion privé a priori payés par le contribuable pendant son mandat de gouverneure de Caroline du Sud. Un organisme de vigilance citoyenne américain (NDLR, le C.R.E.W, Citizens for Responsibility and Ethics in Washington) ayant demandé l’ouverture d’une enquête selon le Washington Post.

La tentation du privé a également été évoquée. Nikki Haley est une femme politique depuis un certain temps déjà. Avant d’être élue gouverneure en 2010, elle a été membre de la Chambre des représentants pendant six ans. Ce ne sont pas des emplois très lucratifs. Selon la déclaration financière de la ministre de l’administration Trump en 2018, ressortie par CNN, elle y fait état d’un nombre important de dettes impayées, plus de 25 000 dollars en cartes de crédit, une hypothèque de plus de 1 million de dollars et un autre crédit de plus 250 000 dollars. La brillante diplomate serait peut-être tentée par un petit tour dans le secteur privé où son nouveau CV pourrait lui valoir un salaire à 7 chiffres.

Un tombereau de fleurs qui pourrait cacher quelque chose….

Quoi qu’il en soit, le timing de l’annonce est politiquement étrange. Mardi, dans le Bureau ovale, lors de l’annonce officielle du départ de sa ministre, Donald Trump a expliqué que Nikki Haley l’avait prévenu depuis six mois qu’elle allait quitter son poste d’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU. Une déclaration qui a surpris a Washington où aucun diplomate de haut rang ne semble avoir vu venir le coup. Qui plus est, son départ effectif étant prévu pour la fin de l’année voire le début 2019, pourquoi a-t-il été choisi de l’annoncer quatre semaines avant l’échéance électorale des « mid-terms » ? Le départ de la plus populaire des membres du Cabinet Trump - la seule à avoir autant de soutien de la part des Républicains que des Démocrates - juste avant un vote aussi important fait plus qu’interroger le landerneau. Certains observateurs parlent même de « balle dans le pied de l’administration Trump ».

Trump et Haley sont apparus ensemble à la télévision pour annoncer la nouvelle et l’ont accompagnée de multiples commentaires positifs tant sur l’efficience de leur travail ensemble que sur la grande qualité de leur collaboration. Bref, cette séparation a été annoncée au milieu d’énormes jets de fleurs. Quand une équipe a de telles qualités, l’on s’attend à ce qu’elle poursuive sa collaboration. Que nenni ! Il s’agissait d’annoncer une séparation…

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Dès lors que l’on met fin à une collaboration qui nous a été décrite comme harmonieuse et féconde, nous nous attendons à une annonce du genre « Cette si belle collaboration, pourtant, nous avons décidé d’y mettre fin, pour charger Nikki Haley d’une mission encore plus essentielle : il s’agira de … »

On s’y attendait, mais rien n’est venu.

En guide d’explication, l’on n’a eu droit qu’à la « pause carrière » et à l’affirmation par Haley qu’elle n’avait pas d’autre projet pour 2020 que de soutenir Trump pour l’obtention d’un second mandat.

Lorsque l’on regarde la politique américaine avec quelque hauteur, et uniquement sous l’angle du genre, il apparaît assez vite que, depuis plusieurs années, les états-majors politiques sont très tentés par l’idée de réussir une Grande Première. Il y en avait deux possibles : le premier Président « de couleur » ou la première femme Présidente. En 2008, les Démocrates qui, à la primaire de leur parti, ont choisi Obama plutôt que Clinton, ont décidé de casser la barrière des couleurs de peau plutôt que le « plafond de verre ».

Pour le Parti Républicain, qui est surtout un club d'hommes blancs vieillissants, briser cette image en présentant une candidate tout aussi exotique que l’était Obama, pourrait être un moyen d’égaliser son score face aux Démocrates. Et Nikki Haley pourrait faire très bonne figure dans le rôle de cette candidate.

Nikki Haley a-t-elle un œil sur la Maison-Blanche ? Plusieurs analystes américains semblent le penser malgré son démenti sous forme de rire ce mardi en conférence de presse.

Elle a clairement indiqué qu’elle prévoyait de faire campagne pour Trump dans deux ans…

Mais les analystes politiques US penchent plutôt pour un scénario à étapes. L’ancienne gouverneure de Caroline du Sud ne prendrait pas le risque d’affronter Trump dans une primaire en 2020, au regard de la popularité du président républicain auprès de la base du parti. En revanche tout est ouvert en 2024, ou la candidature éventuelle de Mike Pence, ne constitue pas un épouvantail suffisant pour ne pas tenter le coup. Nikki Haley a en tout cas le soutien de nombreux Républicains et un bien plus conséquent réseau d’amis à travers le monde… Alors tout est possible.

Ce sont cependant là des plans tirés sur la comète. Trois ans nous séparent encore de la prochaine présidentielle et, si l’on s’arrête à l’hypothèse que Trump a bien des plans électoraux pour Haley, l’on pourrait même penser que ce peut être vrai, mais qu’ils concernent sans doute les très proches élections de la mi-mandat plutôt que des échéances lointaines.

Il se pourrait que Haley se voie chargée pour le compte de Trump de certaines missions à l’intérieur du Parti républicain ou parmi ses élus.

D’autre part, Donald Trump peut songer à l’employer comme « envoyée personnelle » dans certaines affaires internationales délicates, qu’il a jusqu’ici traitées lui-même, comme les relations avec la Corée du Nord, l’Iran ou la Chine. Il se peut qu’il estime avoir fait suffisamment de bruit et d’éclats personnels et désir à présent prendre une courbe rentrante vers des méthodes diplomatiques plus « classiques ».

En fin, comme toujours avec Trump, s’il est logique de penser que s’il laisse sa meilleure diplomate se retirer de son poste à l’ONU, c’est qu’il a besoin d’elle ailleurs, il faut aussi penser que ses actes ne sont pas forcément logiques, puisque cet homme est fou.

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Retombées congolaises : La démission de Nikki Haley compromet l’enquête sur la mort des experts onusiens au Kasaï :!

Très informée sur les violences meurtrières survenues dans la région du Kasaï, l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU faisait pression sur les dirigeants de la RDC, pour qu’ils livrent les personnalités suspectées d’être impliquées dans le meurtre des deux experts de l’ONU

L’enquête initiée par l’ONU sur les violences meurtrières survenues dans la région congolaise du Kasaï entre août 2016 et mars 2017 et qui ont coûté aussi la vie à deux experts de l’ONU risque de ne pas livrer toute la vérité, suite à la démission surprise de l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU, Mme Nikki Haley.

La diplomate américaine a démissionné hier mardi de son poste, alors qu’elle suivait de très près le dossier du meurtre des experts onusiens au Kasaï et ne cessait de faire pression sur les dirigeants de la RDC, pour convaincre ces derniers à livrer la justice quelques personnalités congolaises soupçonnées d’être impliquées dans ce double assassinat.

La démission surprise de Mme Nikki Haley de son poste d’ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU est très mal accueillie par certains observateurs qui craignent que ce départ et non de moindre enregistré par l’administration Trump en vienne à porter préjudice aux conclusions de l’enquête sur les circonstances réelles de la mort des deux experts onusiens.

L’information de la démission de Mme Nikki Haley, Ambassadeur des USA auprès de l’ONU, a surpris tout le monde hier à Kinshasa où cette femme de caractère et diplomate de talent avait effectué une visite officielle en 2017 pour donner le message du président américain à son homologue congolais, Joseph Kabila sur le déroulement du processus démocratique en RDC.

Cette démission, apprend-on, a été acceptée par le président Donal Trump. Mais en RDC, nombreux sont ceux qui veulent savoir les raisons ayant amené la diplomate américaine à démissionner. Départ du reste confirmé sur le site d’information Axios et relayée par plusieurs médias occidentaux.

D’après Associat Press, une des grandes agences de presse américaine, Mme Nikky Haley va assurer les affaires courantes jusqu’à la fin de l’année, en attendant que le président Donald Trump nomme son remplaçant.

La presse américaine n’exclut pas de voir Mme Nikki Haley prendre le poste au Département d’Etat, étant donné qu’elle a une grande maitrise sur le secteur international.

Interrogée par Reuters, Nikky Haley qui a été reçue hier à la Maison Blanche, a refusé de faire le moindre commentaire sur son départ. Mais, elle devait être reçue par le président Donald Trump à la Maison Blanche à 10h30 (14h30 GMT) dans le bureau Ovale. Dans un tweet, le président américain Donald Trump a indiqué qu’une «annonce importante avec mon amie l’Ambassadrice Nikki Haley» sera faite à l’issue de cet entretien.

Cette femme au franc –parler s’était opposée ouvertement à l’élection de la RDC au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, au regard des violations systématiques des droits de l’homme sur terrain, avec comme dernières preuves en date les violences au Kasaï.

Pour elle, un soutien à la candidature de la RDC était « un manquement inexcusable » à la promotion des droits de l’homme par les pays africains.

« Quand des pays du groupe Afrique avancent la candidature d’un pays comme la République démocratique du Congo pour qu’il devienne membre du Conseil des droits de l’homme, cela n’affaiblit pas seulement cette institution – mais alimente également le conflit qui provoque tant de souffrances sur ce continent », déclarait Mme Haley à Genève.

Le Conseil des droits de l’homme peut être un atout pour le continent si les pays africains proposent des candidats « crédibles », avait encore déclaré Mme Haley. Lors de sa visite à

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Kinshasa, Mme Nikky Haley, alors représentante de l’administration américaine aux Nations Unies, avait été directe à l’endroit du président Kabila.

A Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, Nikky Haley était accueillie par une journée ville morte organisée par le mouvement citoyen Lutte pour le Changement (LUCHA) pour lui montrer l’indifférence du gouvernement américain face aux massacres des populations civiles dans cette région instable de la RDC surtout à Beni.

Après Kinshasa, l’ambassadrice américaine auprès des Nations uniesNikki Haley, avait interpellé le chef de la diplomatie congolaise, lui demandant ce que le président Joseph Kabila avait fait de sa liste de suspects auteurs de meurtre des deux experts des Nations Unies tués au Kasaï sur l’axe Bukonde-Tshimbulu, Zaida Catalan et Michael Sharp, sans donner plus de précisions.

Ivanka Trump exclue de la liste des remplaçants

Le Président américain a par ailleurs répondu mardi aux journalistes qui voulaient savoir si sa fille Ivanka pourrait remplacer Nikki Haley à l'ONU lorsque cette dernière quittera son poste à la fin de l'année.

Considérant « incroyable » la candidature de sa fille au poste d'ambassadeur américain à l'ONU, Donald Trump a pour autant exclu cette possibilité, puisqu'il reconnait que s'il la choisissait, il serait accusé de népotisme.

« Nous avons plusieurs noms. J'ai entendu le nom d'Ivanka. Est-ce qu'Ivanka serait une bonne ambassadrice ? Je pense qu'Ivanka qu'elle serait incroyable, mais cela ne signifie pas que je vais la choisir, car je serais accusé de népotisme si je le faisais. Bien que je sois persuadé qu'il n'y ai personne de plus compétent au monde », a-t-il déclaré.

En même temps, il a précisé qu'en tant que candidature pour succéder à Nikki Haley comme ambassadeur des États-Unis à l'ONU, il considérait l'ancienne dirigeante de Goldman Sachs et conseillère à la Maison-Blanche, Dina Powell. Son ou sa remplaçante sera désignée dans les prochaines semaines.

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« La plus belle cause de l’humanité »

La contribution de Cuba à la libération de l’Afrique et à la lutte contre l’Apartheid.

«Madiba» poing levé aux côtés de Fidel Castro (d), salue les Cubains, le 26 juillet 1991, à Matanzas.

© OMAR TORRES / AFP FILES / AFP

Par Salim Lamrani, université de La Réunion.5

Depuis l’avènement de la Révolution en 1959, Cuba a fait de la solidarité avec les peuples en lutte pour leur émancipation un pilier de sa politique étrangère. Dès les premiers instants, en dépit de l’hostilité des Etats-Unis et des innombrables difficultés internes liées au processus de transformation sociale, Fidel Castro a converti Cuba en une terre d’asile pour tous les groupes révolutionnaires et mouvements de libération nationale d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie. Cuba a joué un rôle majeur dans les différents processus de libération nationale en Afrique, en offrant aide et ressources.

En l’espace de trente ans, près d’un demi-million de Cubains, femmes et hommes, ont participé aux guerres anticoloniales en Afrique, faisant de la petite île de la Caraïbe l’égale des grandes puissances. Quelles raisons ont motivé La Havane, assiégée par Washington, pour soutenir un engagement d’une telle ampleur à plus de 10 000 kilomètres de son territoire national ? Comment l’action cubaine a-t-elle changé le destin des pays de l’Afrique australe et contribué de manière décisive à la chute du régime raciste de Pretoria ? Pourquoi Nelson Mandela a-t-il réservé sa première visite hors d’Afrique à la Cuba de Fidel Castro ?

5Docteur ès Etudes Ibériques et Latino-américaines de l’Université Paris IV-Sorbonne, Salim Lamrani est Maître de conférences à l’Université de La Réunion, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis. Son dernier ouvrage s’intitule Fidel Castro, héros des déshérités, Paris, Editions Estrella, 2016. Préface d’Ignacio Ramonet.

Contact : lamranisalim@yahoo.fr ;Salim.Lamrani@univ-reunion.fr Page Facebook :https://www.facebook.com/SalimLamraniOfficiel

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Cuba a d’abord soutenu l’Algérie dans sa lutte anticoloniale contre la France et a contribué à préserver son indépendance conquise en 1962. Par la suite, La Havane a répondu favorablement à la demande d’aide faite par le mouvement Lumumbiste du Congo belge, tout en contribuant, entre autres, aux épopées indépendantistes de la Guinée Bissau, du Cap Vert et en défendant la souveraineté de l’Ethiopie. Enfin, Cuba a apporté un concours décisif pour préserver l’indépendance de l’Angola suite à l’agression du régime suprématiste de Pretoria, sonnant ainsi le glas de l’Apartheid et ouvrant la voie à l’indépendance des nations de l’Afrique australe.

1. Soutien à l’indépendance de l’Algérie

Le premier pays africain à bénéficier de l’internationalisme cubain fut l’Algérie. Les Cubains avaient suivi un grand intérêt la lutte des indépendantistes du Front de Libération nationale (FLN) contre le colonialisme français. Dès 1961, le gouvernement de Fidel Castro établit les premiers contacts avec la direction du FLN, principale force politique algérienne dans le combat contre l’oppression coloniale 6. Ainsi, le 27 juin 1961, Cuba fut le seul pays de l’Hémisphère occidental à reconnaître le gouvernement algérien en exil7.

La Havane ne se contenta pas d’exprimer son soutien politique à la lutte pour la liberté.

Dès janvier 1962, Cuba décida de fournir une aide matérielle et militaire aux révolutionnaires algériens qui menaient une lutte depuis 1954. Les autorités cubaines expédièrent une cargaison de 1 500 armes par bateau à destination du camp du FLN à Oujda, près de la frontière algérienne. Le navire « Bahía de Nipe » rentra à Cuba avec 78 maquisards algériens blessés et 20 enfants réfugiés, pour la plupart orphelins de guerre8.

Ainsi, malgré un contexte géopolitique extrêmement complexe, face à l’hostilité croissante des Etats-Unis qui avaient imposé des sanctions économiques, organisé l’invasion de la Baie des Cochons et qui multipliaient les attentats terroristes à travers l’île, Fidel Castro n’hésita pas à mettre en danger la relation de Cuba avec la France du Général de Gaulle, au nom du principe de solidarité internationaliste avec les peuples en lutte pour leur émancipation.

L’Algérie n’oublia pas cette expression de solidarité de la part de La Havane. En octobre 1962, après avoir réalisé une visite officielle aux Etats-Unis, Ahmed Ben Bella choisit de se rendre directement à La Havane depuis Washington, malgré les avertissements de Kennedy9. Fidel Castro exprima sa gratitude le 16 octobre 1962 en présence du Premier ministre algérien :

« Venir à Cuba quand le riche et puissant empire yankee redouble d’hostilité et de haine à notre égard […], venir à Cuba quand les impérialistes yankees menacent également d’attaquer notre pays […], est, Monsieur le Premier ministre, un acte de courage et de résolution […] et un geste d’amitié que nous n’oublierons jamais. C’est également un acte qui honore la nation algérienne aux yeux des peuples du monde10. »

6Jorge Risquet Valdés, « Las profundas raíces del internacionalismo de los cubanos », Revista Tricontinental, 6 novembre 2018.

7Alger Républicain, « Les révolutionnaires cubains étaient en Algérie pendant la guerre de Libération », 6 mai 2015.

8Fidel Castro Ruz, « Discurso pronunciado por Fidel Castro Ruz, Presidente de los Consejos de Estado y de Ministros de la República de Cuba, en la cena oficial ofrecida por el Presidente de la República Argelina

Democrática y Popular », República de Cuba, 6 mai 2001.

http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/2001/esp/c060501e.html (site consulté le 14 avril 2018).

9 John F. Kennedy Presidencial Library and Museum, “Ben Bella Visit”, 15 octobre 1962.

https://www.jfklibrary.org/Asset-Viewer/Archives/JFKWHF-WHS26.aspx (site consulté le 3 avril 2018).

10Piero Gleijeses, « La primera experiencia cubana en África: Argelia (1961-1965), Temas, n°16-17, octubre 1998, p. 63.

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L’Algérie eut rapidement besoin du concours de Cuba. En septembre 1963, le Maroc du roi Hassan II décida de profiter de la faiblesse du nouvel Etat indépendant depuis le 5 juillet 1962 pour lancer une conquête territoriale, s’emparant de la zone frontalière algérienne riche en ressources naturelles. Affaiblie par huit années de guerre qui avaient ravagé le pays, l’Algérie ne disposait pas d’une structure de défense organisée ni des armes nécessaires pour protéger son intégrité territoriale. Ahmed Ben Bella sollicita alors l’aide urgente de Cuba pour faire face à cette agression armée et préserver l’indépendance du pays. En octobre 1962, le gouvernement de La Havane dépêcha une division blindée et près de 700 combattants dirigés par le commandant Efijenio Ameijeras, disposant des armements soviétiques les plus modernes11.

Face à ce déploiement de forces, le Maroc fut contraint de signer un cessez-le feu le 30 octobre 1963 et d’abandonner les territoires occupés quelques semaines plus tard, sans même que les troupes cubaines aient eu à combattre. A la fin de sa première mission internationaliste, Cuba offrit l’intégralité des armements à l’Algérie et forma l’armée locale à son utilisation12. Cuba paya le prix de sa solidarité active avec l’Algérie. En effet, Rabat décida de rompre ses relations diplomatiques avec La Havane, lesquelles ne seraient rétablies qu’en 201713.

L’aide cubaine à l’Algérie n’a pas été uniquement politique, matérielle et militaire. Elle a également été d’ordre médical. En effet, le pays était confronté à une grave crise sanitaire suite au départ de la plupart des médecins français, avec seulement 200 médecins pour 4 millions d’habitants (9). Ainsi, l’Algérie avait obtenu en mai 1963 le soutien d’une brigade médicale de 55 professionnels de la santé. Cuba se trouvait pourtant face à une situation nationale extrêmement sévère. En effet, en plus de la grave crise sanitaire qui frappait l’ensemble de la population cubaine en 1959 dans une île qui ne comptait que 6 000 médecins pour 6 millions d’habitants, près de la moitié du personnel cubain avait choisi d’émigrer vers les Etats-Unis dans les premiers mois de l’année 1959, attirés par de meilleures opportunités professionnelles. En dépit des difficultés sérieuses auxquelles faisait face Cuba et de l’exode du personnel de santé, La Havane offrit son aide médicale à l’Algérie14.

Le Front de Libération nationale rappelle que « dès les premières heures de son indépendance, l'Algérie trouvera en Cuba un appui de taille dans ses efforts de reconstruction nationale, notamment dans le domaine de la santé15. » A ce jour, plusieurs dizaines de médecins cubains et autre personnel de santé travaillent dans les différentes régions de l’Algérie16.

Pour toutes ces raisons, Abdelaziz Bouteflika, Président de la République algérienne, décréta huit jours de deuil national suite au décès de Fidel Castro le 25 novembre 2016. Dans son message de condoléances au peuple cubain, il exprima la gratitude de l’Algérie pour le soutien indéfectible de La Havane :

11Ibid.

12Gabriel Molina, « Para Argelia cualquier ayuda que necesite », Granma, 22 octobre 2015.

13Ministère de la Culture et de la Communication, « Rétablissement des relations diplomatiques entre le Royaume du Maroc et la République de Cuba », Royaume du Maroc, 21 avril 2017.

http://www.maroc.ma/fr/actualites/retablissement-des-relations-diplomatiques-entre-le-royaume-du-maroc-et-la- republique-de (site consulté le 2 avril 2018).

14Fidel Castro Ruz, « Discurso pronunciado por Fidel Castro Ruz, Presidente de los Consejos de Estado y de Ministros de la República de Cuba, en la cena oficial ofrecida por el Presidente de la República Argelina Democrática y Popular », op. cit.

15Gabriel Molina, « Para Argelia cualquier ayuda que necesite », op. cit.

16El Moujahid, « Décès de Fidel Castro, le président Abdelaziz Bouteflika : ‘Une perte’ pour le peuple algérien», 27 novembre 2016.http://www.elmoudjahid.com/fr/actualites/102165 (site consulté le 1er avril 2018).

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« C'est aussi une grande perte pour le peuple algérien qui entretient une relation particulière avec El Commandante, faite de respect, d'admiration et d'affection mutuels. Une relation qui trouve aussi sa singularité dans le partage de quelques pages de l'histoire de la glorieuse lutte de Libération nationale et dans lesquelles El Lider Maximo avait joué un rôle de premier plan aux côtés du peuple algérien. Ce compagnonnage de lutte trouvera son prolongement après l'accession de l'Algérie à l'indépendance et se manifesta par une solidarité et un soutien à la reconstruction de notre pays ruiné par une guerre coloniale dévastatrice.

[…] Je salue en lui un authentique défenseur des valeurs de paix, de respect de la souveraineté nationale et de son combat intransigeant en faveur du droit des peuples à disposer d'eux- mêmes17. »

La mission internationaliste cubaine en Algérie serait la première d’une longue série qui verrait La Havane apporter son concours au Congo, à la Guinée Bissau et au Cap-Vert et à l’Ethiopie.

2. Aide à la lutte armée au Congo et en Guinée Bissau et défense de la souveraineté de l’Ethiopie

Congo

En 1961, les Etats-Unis commanditèrent l’assassinat de Patrice Lumumba, leader indépendantiste du Congo belge. Lauwrence Devlin, Chef du Bureau de la CIA dans le pays, reconnut la responsabilité de Washington : « Je devais procéder à une élimination physique, c’est-à-dire assassiner Lumumba. J’ai immédiatement demandé qui avait donné ces instructions et la réponse a été qu’elles venaient du Président Eisenhower18) ». Avec la complicité de la Belgique et des troupes des Nations unies, le Premier Ministre congolais fut assassiné par Mobutu, lequel instaura une dictature qui durerait jusqu’en 1997, avec le soutien des Etats-Unis19.

Les forces lumumbistes déclenchèrent alors un mouvement insurrectionnel à travers le pays sous le leadership de Laurent-Désiré Kabila, chef de la rébellion congolaise. Kabila sollicita alors l’aide de Cuba pour lutter contre le régime de Mobutu soutenu par les nations occidentales. En avril 1965, Che Guevara, à la tête d’une colonne de 120 combattants cubains, arriva au Congo pour soutenir la guérilla. Sa présence dura huit mois et six internationalistes cubains tombèrent au combat20.

Mais le combat était inégal entre une rébellion affaiblie et un régime disposant du soutien militaire des Etats-Unis et des mercenaires blancs payés par Washington. Cléophas Kamitatu, alors Ministre de l’Intérieur de Mobutu, fut chargé de mater les insurgés : « Nous avons organisé une opération de récupération du pays en utilisant l’armée [et] les mercenaires […] payés par les Etats-Unis21.

Face à l’offensive de l’armée de Mobutu, la Tanzanie, qui soutenait la guérilla, demanda le départ de Guevara et de ses hommes, lesquels durent s’exécuter en novembre 1965.

17Ernesto J. Gómez Figueredo, « Cuba y Argelia firman acuerdo para continuar cooperación bilateral », Granma, 30 janvier 2018.

18El Moujahid, « Décès de Fidel Castro, le président Abdelaziz Bouteflika : ‘Une perte’ pour le peuple algérien

», 27 novembre 2016.http://www.elmoudjahid.com/fr/actualites/102165(site consulté le 1er avril 2018).

19Jihan Al Tahri, « Cuba, une odyssée africaine », Temps Noir/ Arte, 2007.

20Scott Chain, « Laurence R. Devlin, 86, C.I.A Officer Who Balked on a Congo Plot, Is Dead », The New York Times, 11 décembre 2008, p. B10.²

21Che Guevara, Pasajes de la guerra revolucionaria: Congo, Barcelone, Editorial Mondadori, 1999.

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L’expérience congolaise fut un « échec » selon le Che, en raison des luttes internes, du manque de discipline au sein des insurgés et de la décision unilatérale de la Tanzanie de cesser d’approvisionner les rebelles22.

Dans une lettre, Guevara exprima son incompréhension et sa colère :

« Cuba a offert une aide sujette à l’approbation de la Tanzanie. Vous avez accepté et l’aide est devenue effective. Elle était sans conditions ni limites dans le temps. Nous comprenons les difficultés de la Tanzanie aujourd’hui, mais nous ne partageons pas votre point de vue. Cuba ne recule pas face à ses engagements et ne peut pas accepter une fuite honteuse en abandonnant son frère dans le malheur à la merci des mercenaires23».

Guinée-Bissau et Cap-Vert

La même année, en 1965, Amilcar Cabral, leader révolutionnaire du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée Bissau et du Cap-Vert (PAIGCV), reçut une aide militaire de Cuba pour ses guérilleros dans leur lutte contre le colonialisme portugais. Dès 1966, suite à la Conférence tricontinentale qui eut lieu à Cuba et qui réunit les mouvements révolutionnaires du Tiers-monde, La Havane dépêcha plusieurs dizaines d’instructeurs, de techniciens et de médecins auprès de la guérilla du PAIGCV, afin de former et de soigner les combattants guinéens. La guerre d’usure lancée par Cabral contre l’occupation portugaise déclencha la Révolution des Œillets en avril 1974 contre la dictature de Salazar, orchestrée par d’anciens capitaines ayant servi en Guinée Bissau. Elle sonna le glas de la présence coloniale du Portugal en Afrique, contribuant ainsi à l’indépendance de la Guinée Bissau en 1974, ouvrant la voie à la libération du Mozambique et de l’Angola24.

Pedro Pires, Président du Cap-Vert de 2001 à 2011, a exprimé l’hommage de son peuple pour les Cubains :

« Durant notre lutte de Libération nationale, nous avons bénéficié de la solidarité indéfectible de Cuba. Personne ne peut rester indifférent face à la contribution cubaine, et particulièrement de Fidel Castro, pour la libération de l’Afrique. Je me suis moi-même formé à Cuba et j’ai fait ma formation militaire là-bas. Les Africains ont une dette morale et une dette d’honneur vis-à-vis de Cuba, de Fidel et de ses combattants internationalistes25».

Pour sa part, Maneca Santos, membre du Comité central du PAIGC, souligna l’apport décisif de Cuba « durant la lutte de libération nationale ». La Havane a joué un rôle prépondérant « dans les luttes dans les anciennes colonies portugaises, particulièrement en Guinée Bissau et au Cap-Vert26. »

De son côté, Iva Cabral, fille d’Amilcar Cabral, exprima le sentiment de son peuple vis- à-vis de Cuba:

« Fidel Castro a soutenu nos luttes de libération nationale sans aucune restriction. Il a joué un rôle fondamental dans l’indépendance de l’Angola et dans la Chute de l’Apartheid en Afrique du Sud. Il On ne peut pas parler de l’Histoire du XXe siècle sans parler de Fidel Castro.

[…] C’est une figure incontournable de l’Histoire mondiale du XXe siècle et particulièrement

22Jihan Al, « Cuba, une odyssée africaine », op. cit.

23Che Guevara, Pasajes de la guerra revolucionaria: Congo, op. cit.

24Ramón Pérez Cabrera, La historia cubana en Africa 1963-1991, p. 115.

25Jorge Risquet Valdés, « Las profundas raíces del internacionalismo de los cubanos », op. cit.

26Alvaro Lidgero Andrade, « Pedro Pires: ‘Africa tem uma dívida moral e de honra para com Fidel Castro’”, Voice of America, 27 novembre 2016. https://www.voaportugues.com/a/pedro-pirs-africa-divida-moral-fidel- castro/3613197.html (site consulté le 1er avril 2018).

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du Tiers-Monde. Comme Africaine, j’ai du respect et une admiration profonde pour Fidel Castro27»

Ethiopie

En juin 1977, la Somalie, soutenue par les Etats-Unis, lança une guerre de conquête territoriale contre l’Ethiopie, dans le but de s’emparer de la région de l’Ogaden de près de 300 000 kilomètres carrés, soit un tiers du pays. L’armée somalienne réalisa une percée de près de 1 000 kilomètres à l’intérieur du territoire éthiopien, atteignant les villes de Hara et Dire Dawa.

En décembre 1977, le gouvernement éthiopien de Mengistu Haile Marian sollicita l’aide de Cuba pour repousser l’invasion. La Havane lança alors l’Opération Protesta de Baraguá en janvier 1978, dépêchant ses troupes dans le pays. Après d’âpres combats, les Ethiopiens et les soldats internationalistes cubains repoussèrent l’armée somalienne hors des frontières en mars 197828. Mulatu Teshome, Président de la République d’Ethiopie, souligna la contribution de Cuba « dans notre lutte pour défendre notre intégrité territoriale » ainsi que « son soutien durant les temps difficiles29».

1. L’Angola, l’Afrique australe et « la plus belle cause de l’Humanité »

La Révolution des œillets et la chute de la dictature de Salazar mirent fin à la présence coloniale portugaise en Afrique. Après la Guinée-Bissau et le Cap-Vert en 1974, le Mozambique et l’Angola obtinrent leur indépendance en 1975. En Angola, plusieurs organisations s’affrontèrent pour prendre le pouvoir : le Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA) d’Agostino Neto, soutenu par Cuba et l’Union soviétique ; le Front national de libération de l’Angola (FNLA) d’Holden Roberto et l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (UNITA) de Jonas Savimbi, tous deux soutenus par les Etats-Unis, l’Afrique du Sud et le Zaïre de Mobutu30.

En janvier 1975, le Portugal mit en place un gouvernement provisoire où étaient représentés l’ancienne puissance coloniale et les trois principaux mouvements indépendantistes. Durant cette période de transition d’un an, l’armée portugaise devait se charger de maintenir l’ordre jusqu’à la proclamation de l’indépendance de l’Angola prévue le 11 novembre 197531.

Conscients de la popularité du MPLA à travers le pays, les Etats-Unis décidèrent de neutraliser le principal mouvement indépendantiste angolais d’orientation marxiste afin de l’empêcher d’accéder au pouvoir. En plus des instructeurs et des armes fournis au FNLA et à

27Maneca Santos, « ‘A historia o absolverá’, afirma Maneca Santos sobre Fidel Castro », Voice of America, 28 novembre 2016. https://www.voaportugues.com/a/a-historia-o-absolvera-manecas-santos-fidel-castro/

3614138.html (site consulté le 26 avril 2018).

28Alvaro Lidgero Andrade, « Iva Cabral : ‘Como africana tenho respeito e admiraçao por Fidel Castro’ », Voice of America, 27 novembre 2016.https://www.voaportugues.com/a/iva-cabral-fidel-castro-admiracao-e-

respeito/3613601.html (site consulté le 1er avril 2018).

29Fidel Castro Ruz, « Discurso pronunciado por Fidel Castro Ruz, Presidente de la República de Cuba, en el acto de conmemoración del centenario de la Protesta de Baraguá, Municipio ‘Julio Antonio Mella’, Santiago de Cuba

», República de Cuba, 15 mars 1978. http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1978/esp/f150378e.html (site consulté le 29 avril 2018) ; Vilma Thomas Ramírez, « Cuba en Etiopía : Aniversario 40 de una hazaña internacionalista », Cubadebate, 18 mars 2018.

30Ethiopian News Agency, « President Mulatu, PM Hailmariam Express Condolences Over Death of Castro », 26 novembre 2016. http://www.ena.gov.et/en/index.php/politics/item/2340-president-mulatu-pm-hailemariam- express-condolences-over-death-of-castro (site consulté le 1er avril 2018).

31Jorge Risquet Valdés, « Las profundas raíces del internacionalismo de los cubanos », op. cit.

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l’UNITA, Washington put compter sur la collaboration de l’Afrique du Sud de l’Apartheid. En mars 1975, suivant les instructions du secrétaire d’Etat Henry Kissinger, Mobutu dépêcha ses troupes en Angola et lança une attaque depuis le Nord avec le FNLA. De son côté, Pretoria soutenait une offensive depuis le Sud avec l’UNITA. Le but était de s’emparer de Luanda avant le 11 novembre32

Face à cette agression internationale et la complicité passive des forces portugaises censées garantir l’ordre, le MPLA offrit une résistance farouche à la coalition dirigée par les Etats-Unis et sollicita en urgence l’aide de Cuba. Dès le mois de septembre, le MPLA reprit le contrôle de 12 des 16 provinces du pays y compris l’ensemble de l’espace côtier. En octobre 1975, 500 instructeurs cubains arrivèrent en Angola avec des armes en quantité suffisante pour former 40 unités de bataillon et de batterie. Quatre centres d’instruction furent ouverts à travers le pays afin d’entraîner les troupes33.

Le 14 octobre 1975, l’Afrique du Sud, première puissance militaire du continent grâce au soutien des pays occidentaux, décida d’envahir l’Angola avec ses troupes régulières. Le 4 novembre 1975, répondant à l’appel du MPLA, Fidel Castro lança l’Opération Carlota, du nom d’une esclave noire cubaine qui avait mené une révolte contre l’oppression coloniale au XIXe siècle. Assumant le risque d’affaiblir sa propre sécurité nationale, La Havane dépêcha ses troupes les plus aguerries et son armement le plus moderne pour préserver l’intégrité territoriale de l’Angola, et empêcher le régime raciste de Pretoria d’installer à la tête du pays un gouvernement fantoche. En l’espace de quelques semaines, 35 000 internationalistes cubains arrivèrent en Angola pour apporter leur concours militaire à la nation agressée par le régime raciste de Pretoria et le Zaïre, sur ordre de Washington34.

Le 10 novembre 1975, l’armée sud-africaine atteignit Kifangondo, à 20 kilomètres de Luanda et lança une attaque d’envergure afin de s’emparer la capitale. Les Forces armées populaires de libération de l’Angola (FAPLA), soutenues par les instructeurs cubains, offrirent une résistance farouche qui permit de préserver la ville35. L’attaque contre l’enclave de Cabinda, riche en ressources minérales, fut également repoussée par les internationalistes cubains et les Angolais36. Le 11 novembre 1975, depuis Luanda, Agostino Neto put proclamer l’indépendance de l’Angola, et exprima sa gratitude à Fidel Castro, saluant « la solidarité extraordinaire du peuple cubain37»

Pour la première fois de leur histoire, les forces de l’Apartheid furent contraintes à battre en retraite face aux troupes noires cubaines et de quitter le territoire souverain de l’Angola le 27 mars 1976. Le régime suprématiste de l’Apartheid venait de subir sa première déroute, ébréchant ainsi le mythe de l’invincibilité de l’armée blanche de Pretoria38.

L’intervention de Cuba fut une décision de Fidel Castro. Elle se fit contre la volonté de l’Union soviétique qui était favorable à un processus de détente avec les Etats-Unis. Karen N.

32Jorge Risquet Valdés, « Las profundas raíces del internacionalismo de los cubanos », op. cit.

33Jorge Risquet Valdés, « Las profundas raíces del internacionalismo de los cubanos », op. cit.

34Fidel Castro Ruz, « Discurso pronunciado por Fidel Castro Ruz, Presidente de la República de Cuba, en el acto de masa efectuado en Mandela Park, Kingston, Jamaica, el día 30 de julio de 1998 », República de Cuba, 30 juillet 1998.http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1998/esp/f300798e.html (site consulté le 1er abril 2018).

35Jorge Risquet Valdés, « Las profundas raíces del internacionalismo de los cubanos », op. cit.

36Fidel Castro Ruz, “Discurso pronunciado por el Comandante en Jefe Fidel Castro Ruz, Primer Secretario del Comité Central del Partido Comunista de Cuba y Primer Ministro del Gobierno Revolucionario, en la Clausura del Primer Congreso del Partido Comunista de Cuba, Celebrado en el Teatro ‘Carlos Marx’”, République de Cuba, 22 décembre 1975. http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1975/esp/f221275e.html (site consulté le 28 mars 2018)..

37Jihan El Tahri, « Cuba, une odysée africaine », op. cit.

38Piero Gleijeses, Misiones en conflicto: La Habana, Washington y Africa 1959-1976, La Havane, Editorial de Ciencias Sociales, 2002, p.

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Broutens, Directeur du département des Affaires étrangères du Politburo soviétique, reconnut que Moscou fut mis devant le fait accompli : « L’envoi de troupes cubaines en Afrique nous a pris complètement au dépourvu. Nous n’étions au courant de rien. […] Ça nous a fait un choc.

Nous étions mécontents parce que les Cubains agissaient sans nous avoir consultés39 ».

L’intervention militaire de La Havane illustra l’indépendance totale de la politique étrangère du gouvernement cubain vis-à-vis de l’allié soviétique.

Fidel Castro expliqua les raisons de l’engagement de Cuba en Afrique :

« Certains impérialistes se demandent pourquoi nous aidons les Angolais. Ils se demandent quels sont nos intérêts là-bas. Ils ont l’habitude de penser que lorsqu’un pays agit, c’est parce qu’il convoite du pétrole, du cuivre ou des diamants ou toutes autres ressources naturelles. Nous ne recherchons aucun intérêt matériel et il est logique que les impérialistes ne comprennent pas cela. […]. Nous sommes en train d’accomplir un devoir internationaliste élémentaire quand nous apportons notre concours au peuple d’Angola […] Nous appliquons simplement une politique basée sur des principes. […]. Nous n’allons pas rester les bras croisés quand nous voyons qu’un peuple africain, un peuple frère, est brutalement attaqué par l’Afrique du Sud40».

Washington envisagea même de lancer une attaque aérienne contre Cuba, en guise de représailles. « Si nous décidons d’utiliser la force militaire, nous devons obtenir une victoire.

Il ne peut pas y avoir de demi-mesures », déclara Henry Kissinger au Général George Brow de l’Etat-major le 24 mars 1976. Lors de sa rencontre avec le Président Gérald Ford, Kissinger se fit plus précis : « Je crois que nous allons devoir écraser Castro. Mais nous ne pourrons probablement pas agir avant les élections [présidentielles de 1976] ». « Je suis d’accord », répondit le Président Ford. Kissinger souhaitait à tout prix protéger le régime d’Apartheid :

« Si les Cubains détruisent la Rhodésie, la Namibie sera la prochaine sur la liste et ensuite il y aura l’Afrique du Sud. S’ils réalisent un mouvement vers la Namibie ou la Rhodésie, je serais d’avis de les pulvériser ». Secrètement élaboré par le Groupe d’actions spéciales de Washington, le plan prévoyait des bombardements stratégiques, de miner les ports et une mise en quarantaine de Cuba . Néanmoins, Kissinger ne put contenir son admiration envers Fidel Castro. Selon lui, « il était le révolutionnaire le plus authentique de l’époque41».

Après la défaite infligée par les Cubains et les Angolais, l’Afrique du Sud et les Etats- Unis augmentèrent leur aide à l’UNITA de Jonas Savimbi, plongeant le pays dans une guerre civile qui durerait jusqu’en 2002. De son côté, Luanda et La Havane apportèrent leur soutien aux révolutionnaires de l’Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (SWAPO) de Namibie, alors protectorat sud-africain, et aux militants de l’African National Congress (ANC) de Nelson Mandela qui menaient une lutte contre l’Apartheid, en leur offrant une base arrière en Angola.

En 1978, l’aviation sud-africaine lança un raid aérien meurtrier contre le camp de réfugiés de la SWAPO à Cassinga, tuant près de 700 personnes dont plus de 150 femmes et près de 300 enfants42.

39Jihan El Tahri, « Cuba, une odysée africaine », op. cit

40Fidel Castro Ruz, “Discurso pronunciado por el Comandante en Jefe Fidel Castro Ruz, Primer Secretario del Comité Central del Partido Comunista de Cuba y Primer Ministro del Gobierno Revolucionario, en la Clausura del Primer Congreso del Partido Comunista de Cuba, Celebrado en el Teatro ‘Carlos Marx’”, République de Cuba, 22 décembre 1975. http://www.cuba.cu/gobierno/discursos/1975/esp/f221275e.html (site consulté le 28 mars 2018).

41The National Security Archive, « Kissinger Considered Attack on Cuba Following Angola Incursion”, 1er octobre 2014, George Washington University. http://www2.gwu.edu/~nsarchiv/NSAEBB/NSAEBB487/ (site consulté le 21 février 2015).

42Henry Kissinger, Years of Renewal, New York, 1999, p.785 in Piero Gleijeses, “Carta a Obama”, Cubadebate, 3 février 2014.

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