UNE FOSSE MÉROVINGIENNE À OMAL
Au cours du sauvetage d'un site d'habitat néolithique en septembre 1979, nous avons découvert fortuitement une fosse mérovingienne dans le village d'Omal, une commune fusionnée à cellede Geer, au creur de la Hesbaye liégeoise (cf. supra, p. ). Lafosse gisait dans le secteur septentrional de Ia parcelle 220 r2 de la section A (lot n° 6) attenante à la rue Jules Stiernet, au Iieu-ditNeuve Ville (fig. 41, en A). En eet endroit, Ie terrain présente une pente douce, orientée vers le
Fig. 41. Carte de situation de la fosse mérovingienne (en A), des cinq célèbres tumulus romains (en B), de la villa romaine (en C) et de la nécropole mérovingienne de Sainte-Marie-Vau (enD).
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nord-ouest, au bas de laquelle coule un petit ruisseau qui traverse Ie village: Ia Fausse Geer. La commune d'Omal située parmi les riches terres loessiques a certainement été occupée intensément à l'époque romaine. Cinq tumulus s'élèvent encore le long d' une voie qui porte 1' appellation significative de route romaine (fig. 41, en B). Par ailleurs, la Société archéologique de Waremme a décelé la présence d 'une importante villa à quelque 400 m au nord-ouest de la fosse (fig. 41, en C; G. MoREAU dans Bull. Soc. d'Arch. et d'Hist. de Waremme et env., n° 9, 1978,
p. 5-6). Précisément à cöté de cette villa, au 1ieu-ditSainte-Márie-V au, s'étend une
grande nécropole mérovingienne (fig. 41, enD; G. MouREAudansArchaeologica Mediavalis, 1979, 3-4; Archéol. 1974, 89 et 1976, 83). Le cimetière établi sur un versant exposé au sud-est, a déjà livré 63 sépultures qui appartiennent à la seconde moitié du
vre
et au début duvue
siècle.Située à 70 m de la Fausse Geer qui la sépare de la nécropole deSainte-Marie-Vau, la fosse mérovingienne présentait un contour ovalaire de I ,60 sur 1,45 m d'axes et s'enfonçait en cuvette à une profandeur maximum de 0,84m sous la surface (fig. 42). Arasée au sommet, elle avait un remblai homogène et assez meuble qui renfermait quelques pierres calcaires (fig. 42, en a), des nodules de terre brûlée (en b) et d'abondants charbons de bois qui ont été soumis à !'analyse au radiocarbone. La cavité recelait encore quelques scories de fer, des os de porc (en c: une machoire), de breuf, de mouton et peut-être de chèvre (détermination de W. Van Neer), onze kilos detegulae etimbrices analogues aux prototypes romains (en d) et un demi kilo de petits fragments de torchis qui laissent supposer la présence proche d'un bátiment. Elle a livré en outre une dizaine de fragments d'une petite meule concave en grès ferrugineux assez friable dont I' épaisseur oscille de 13 à 42 mm, un clou en fer, trois perles de collier en páte de verre, une aiguiJle et un élément spiralé en bronze et une centaine de tessons céramiques tous façonnés au tour mais de facture et de formes diverses. Plusieurs d'entre eux s'apparentent étroitement à la céramique mérovingienne découverte dans )'habitat de Huy-Batta, à une quinzaine de kilomètres au sud de notre site (Arch. Belg. 148).
Des fragments de cinq vases ont une paroi mi nee de couleur orangée ou greige et une páte dure, homogène et bien lissée, souvent enduite d'une eauverte rougeá-tre (fig. 42).
I. Bord d'écuelle carénée avec lèvre évasée et páte orangée assez dure, avec eauverte rouge. Diam. 13 cm. Apparenté au type Trier A 1 (K. BöHNER, Die
f~änkischen Altertümer des Trierer Landes, 1958) et Huy-Batta, fig. 16 B 13 et 17 Al.
2. Col presque vertical: páte dure, greige, avec couverte rouge.
3. Deux fragments de vase décorés d'impressions et de quatre sillons horizontaux larges et peu profonds; les impressions sont légères, rectangulaires et réparties sans régularité sur plusieurs rangs. Páte assez dure, orangée, à noyau gris et couverte rouge. Cf. Huy-Batta, fig. 18, 11.
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eauverte rouge à l'intérieur. Diam. 16,5cm. Forme bien représentée dans les sépul tures.
5. Bol hémisphérique à re bord en baguette et dépourvu de décor; päte assez tendre, orangée, à noyau gris clair, sans couverte. Diam. 16,7 cm. Dérivé d'une sigillée de type Chenet 320 (La céramique gallo-romaine d' Argonne du N e s.,
1941).
Trois vases au moins semblent avoir été importés des officines de Mayen, dans le pays de Trèves. Leur päte très dure et homogène contient un abondant dégraissant de gravier qui rend la surface rugueuse. Leur couleur est grise ou blanchätre.
6. Cruche à embouchure trilobée, à large et courte panse et anse creusée d'une large dépression médiane. Haut. 16,7cm. Type Trier D 3 (vers 600); cf. Huy-Batta, fig. 17, 17.
7. Bord de vase pansu à lèvre évasée et concave vers l'int. Diam. 12,4cm. Type Trier D 12 (Vlle s.) et parallèle à Huy-Batta, fig. 16, Al2.
8. Bord de vase à lèvre apparantée au précédent. Diam. 15cm. 9. Fond de vase, plat.
Quelques petits fragments appartiennent à une céramique ordinaire à päte grise dégraissée à l'aide de chamotte et de grains de quartz, assez dure, homogène et à surface poreuse.
10. Bord de vase pansu à lèvre fortement évasée et élargie à l'extrémité. 11. Bord à lèvre épaissie en boudin.
12. Bord de coupe à paroi oblique et rebord épaissi et angulaire. 13. Lèvre évasée.
14. Fond de vase, plat.
15. L'aiguille en bronze est sectionnée au chas, Ia tige un peu tordue présente une patine vert clair. Elle est rehaussée de plusieurs groupes de deux à trois légères incisions annulaires reliées par un motif de zigzags également incisés. Long 8,6cm.
16. Une fine tigeen bronze enroulée en une spirale ovalaire; · sectionnée. Long. Iem.
17-19. Trois perles de collier en päte de verre opaque et bichrome dont - deux annulaires rouge-brun rehaussées d'un entrelac blanc. Haut. 0,6cm. - une tonnelliforme rouge-brun avec entrelac ocellé jaune. Haut. 0,8cm. Ces perles qui apparaissent également dans Ia nécropole de Sainte-Marie-V au sont
datées des environs de 600 (U. KoCH dans Annales du 6e Congrès de l'Assoc. Intern. pour l' Hist. du Verre, 1973, 14, Arch. Belg. 88, t. lil et VII etArch. Belg.
113, t. lil, 47-48). La céramique pourrait également appartenir à Ia transition du
vre
auvne
siècle malgré la présence des vases orangés n°S 1 et 5 qui dérivent de types plus anciens.Le contenu de la fosse qui a servide dépotoir révèle la présence proche d'un habitat mérovingien. 11 est dès Iors tentant d'établir une relation spatio-temporelle
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entre Ie dépotoir et la nécropole installée à 300 m sur la rive opposée. Notons que cette distance répond aux normes observées dans la région de Trèves.