• No results found

Le paysage médiatique congolais État des lieux, enjeux et défis

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Share "Le paysage médiatique congolais État des lieux, enjeux et défis"

Copied!
169
0
0

Bezig met laden.... (Bekijk nu de volledige tekst)

Hele tekst

(1)

État des lieux, enjeux et défis

Le paysage médiatique congolais

OCTOBRE 2008

Marie-Soleil Frère

(2)

Le paysage médiatique congolais

État des lieux, enjeux et défis

Octobre 2008

Cette étude a été réalisée sous la supervision de France Coopération Internationale,

avec l’appui de la coopération britannique et de la coopération française

(3)

l’Université Libre de Bruxelles. Ses travaux portent sur les médias en Afrique francophone et leur rôle dans les processus politiques contemporains (démocratisation, élections, conflits, construction de la paix…). Elle a publié Afrique centrale. Médias et conflits. Vecteurs de guerre ou acteurs de paix (Bruxelles, Éditions Complexe, 2005), Presse et démocratie en Afrique fran- cophone (Paris, Karthala, 2000) et Médias et communications sociales au Burkina Faso (Paris, L’Harmattan, 2003). Elle a effectué de nombreuses missions en République démocratique du Congo dans le cadre de projets d’appui aux médias menés par l’Institut Panos Paris, l’APEFE (Association pour la Promotion de l’Éducation et de la Formation à l’Étranger), l’Organisation Internationale de la Francophonie, la Coopération Universitaire au Développement (Belgique).

IMMAR est un institut d’études et de conseil en médias et marketing spécialiste du Maghreb et de l’Afrique francophone. A ce titre, il a réalisé, depuis 1998, de nombreuses études sur les médias dans 25 pays de ces régions, et plus particulièrement en RDC, où une étude d’audience annuelle de portée nationale est conduite depuis 2002. Pour la présente étude, IMMAR a élaboré les outils et la méthodologie de l’analyse quantitative, réalisé la collecte des informations sur le terrain, le traitement statistique des données recueillies et l’analyse des résultats obtenus. L’équipe d’IMMAR, composée de Brahim Sail, Xavier Long, Willy Katupa et Marc Ngwanza, a également mené les entretiens semi-directifs avec différentes personnalités politiques et les principaux annonceurs.

Elle a aussi dressé les tableaux récapitulatifs figurant en annexe (annexes 3, 4 et 5).

Remerciements

Cette étude a nécessité la collaboration et la contribution d’un très grand nombre de personnes que l’auteure souhaite ici remercier. D’abord, ceux et celles qui ont accepté de participer aux entretiens semi-directifs et dont la liste figure en annexe. Ensuite, plusieurs associations, orga- nisations et institutions ont permis à l’auteure d’accéder à un certain nombre d’archives et de données chiffrées. Nous souhaitons remercier particulièrement la Haute Autorité des Médias, l’OMEC, les directions du journal Le Potentiel, de la Radio Maendeleo et de la Radio Télévision Mwangaza, ainsi que Search for Common Ground, la Fondation Hirondelle et l’Institut Panos Paris.

Des versions préalables de cette étude ont pu bénéficier de la relecture critique et des sugges- tions de personnes ressources expertes auxquelles nous voulons exprimer notre gratitude : Donat M’Baya Tshimanga, Isidore Kabongo, Pierre N’Sana et Emmanuel Kabongo Malu.

Les remarques et propositions émanant de l’équipe des commanditaires, en particulier Olivier Lechien, Mary Myers et Alan Dreanic, ont aussi permis d’enrichir le travail.

Enfin, l’auteure est également redevable aux personnes ayant contribué à la conception graphique de ce document (la maquettiste Nancy Cossin), ainsi qu’à son illustration (les photographies de Pierre Martinot, Philippe Delchambre, Mary Myers, Yves Kalikat, SFCG, Freddy Mutombo et de l’Institut Panos Paris).

Si l’auteure a tâché d’être à la hauteur de la confiance que lui ont accordée toutes ces personnes qui ont accepté de lui répondre, de lui fournir de l’information ou de lui prodiguer des conseils, elle demeure seule responsable des erreurs factuelles ou d’analyse que peut comprendre le présent document.

« Les contenus de cette étude peuvent être librement reproduits ou diffusés par tout média ou

toute institution qui le souhaiterait à condition que les références soient clairement mentionnées. »

(4)

Contexte de l’étude

Les médias de la République démocratique du Congo (RDC) jouent un rôle majeur dans l’évolu- tion politique et sociale du pays. Pour fonder une stratégie d’intervention visant à en consolider et en professionnaliser les acteurs, il importe de poser un diagnostic préalable du secteur, afin de cerner comment les médias congolais peuvent contribuer plus efficacement à la consolidation de l’État de droit et de la paix.

Le but de la présente étude est de dresser un état des lieux du secteur des médias au Congo, arrêté à la date du 31 octobre 2008. A la demande du projet franco-britannique « Médias pour la démocratie et la transparence en RDC », un groupe d’experts et une société spécialisée en études d’audience, IMMAR, ont mené à bien un vaste travail de collecte de données qualitatives et quantitatives, visant à décrire le fonctionnement des médias (écrits et audiovisuels), ainsi que les comportements de consommation des publics, dans sept villes congolaises et six localités rurales. Le présent rapport s’appuie essentiellement sur ces données, collectées en 2006, 2007 et 2008, par le biais d’une soixantaine d’entretiens semi-directifs effectués à Kinshasa et en province, et d’une étude d’audience statistique annuelle portant sur un échantillon de plus de 3 000 individus.

État des lieux

Le paysage médiatique congolais a connu un développement extraordinaire ces dernières années, passant, en moins de vingt ans, du monopole d’une poignée de médias gouvernementaux à une offre foisonnante, mais inégalement répartie. Le pays compte, en octobre 2008, 341 stations de radiodiffusion (dont une seule, Radio Okapi, émet sur l’ensemble du territoire) et plus de 600 titres de presse déclarés, pour la plupart irréguliers sur le marché. On dénombre en outre 82 chaînes de télévision, dont trois – la Radio Télévision Nationale du Congo (RTNC), Digital Congo et la Radio Télévision du Groupe L’Avenir (RTG@) – peuvent émettre par satellite à partir de Kinshasa et être rediffusées dans certaines provinces du pays.

C’est dans la ville de Kinshasa que se concentre l’activité médiatique puisque la capitale héberge 51 de ces chaînes de télévision, émettant en clair, ainsi que 41 stations de radio- diffusion en FM, les 10 quotidiens réguliers du pays, 15 périodiques et une vingtaine des journaux paraissant à l’improviste (plus de 125 journaux déclarés pour cette seule ville).

de l’étude

© IPP

(5)

Les principales publications (dont le tirage plafonne à 1 500 exemplaires) sont donc éditées à Kinshasa, tandis que la presse de province est périodique et sa parution souvent aléatoire. La diffusion pose un problème crucial vu l’absence de réseaux de transport et la faiblesse du pou- voir d’achat du lectorat potentiel. Les journaux s’expriment exclusivement en français et sont en général des initiatives privées appartenant à un seul individu.

Dans l’audiovisuel, la typologie est plus diversifiée. Le secteur communautaire et associatif est dominant dans le domaine radiophonique (avec 133 radios, dont trois seulement situées à Kinshasa), mais peu présent dans le créneau télévisuel (avec trois initiatives). Les opérateurs privés commerciaux (qui sont au nombre de 91 pour l’ensemble du pays) sont généralement mixtes, alliant radio et télévision. Ils côtoient 104 opérateurs confessionnels, liés aux Églises catholique, protestante, kimbanguiste, mais aussi, surtout à Kinshasa, aux Églises dites « du Réveil ». S’ajoutent à ce panorama les médias publics (la Radio Télévision Nationale du Congo et ses diverses antennes locales), la radio onusienne (Radio Okapi, liée à la Mission des Nations Unies au Congo (MONUC)) et les radios internationales disponibles en FM ou par le biais de décrochage sur les ondes des radios locales.

Quelques fournisseurs de reportages écrits (quatre agences de presse) et de programmes radio- phoniques ou télévisuels jouent également un rôle important d’information, en diffusant leurs propres productions ou en les mettant à disposition des médias locaux qui les relaient.

Si l’offre se développe considérablement, l’étude statistique montre également que la consom- mation médiatique des Congolais s’accroît. Les taux d’équipement sont très élevés, surtout pour l’audiovisuel et les centres urbains. La radio reste le média le plus courant en RDC avec un taux d’équipement qui varie, pour les zones urbaines, de 97 % (Kinshasa) à 92 % (Goma). Dans les localités rurales, les taux d’équipement sont parfois nettement inférieurs (dans la localité de Bundu, dans la Province Orientale, il n’atteint que 64 %), mais la radio arrive toujours largement en tête par rapport aux autres médias. La télévision talonne la radio dans les grandes villes : 97 % à Kinshasa, 90 % à Lubumbashi, 92 % à Matadi, 82 % à Mbuji Mayi, 69 % à Bukavu, 65 % à Goma et 61 % à Kisangani. Elle est nettement moins présente dans les localités rurales (entre 27 % et 60 % pour les localités sondées) et se positionne en général après le téléphone mobile.

Ce dernier connaît une pénétration importante dans l’ensemble du pays : le taux d’équipement est de 72 % à Lubumbashi, 68 % à Kinshasa, 70 % à Mbuji Mayi, 68 % à Matadi, 53 % à Bukavu, 54 % à Goma et 45 % à Kisangani. Dans les localités rurales, il atteint entre 10 et 45 %. Quant aux utilisateurs d’Internet, il sont également de plus en plus nombreux : avec une croissance de plus de 35 % entre 2002 et 2007, le Web est fréquenté par plus de 230 000 internautes, dans les milieux urbains essentiellement.

Les pratiques de consommation analysées par type de média et en fonction des tranches d’âge, du sexe et du niveau d’étude des publics sondés révèlent que la presse écrite et Internet recrutent leur audience auprès des individus les plus instruits (et majoritairement de sexe masculin), alors que la consommation de la radio est généralisée dans toutes les tranches d’âge et pour les deux sexes.

Dans l’audiovisuel, la durée de consommation quotidienne est assez importante. A Kinshasa,

Lubumbashi et Matadi, c’est la télévision qui l’emporte (196 minutes par jour chez les femmes et

158 minutes chez les hommes à Kinshasa), loin devant la radio (86 minutes de consommation

(6)

quotidienne chez les femmes et 105 chez les hommes). Dans les autres villes, c’est la radio qui vient en tête. Les femmes consacrent plus de temps que les hommes à la télévision et moins de temps qu’eux à la radio. Cette dernière connaît ses pics d’audience dans les tranches matinales, vers 7h, alors que la télévision est surtout regardée le soir, particulièrement à partir de 20h.

Dans les localités rurales, la télévision et le téléphone mobile sont, systématiquement, plus utilisés par les hommes que par les femmes, ce qui n’est pas le cas de la radio.

Les radios et les télévisions les plus écoutées varient selon les villes et les moments de la jour- née, mais il est possible d’identifier quelques stations et programmes à succès. Dans le paysage radiophonique, Radio Okapi et Radio France Internationale (RFI) sont en tête à Kinshasa et Lubumbashi ; leurs tranches d’information matinales sont particulièrement appréciées. Dans les autres villes et localités rurales, Radio Okapi est souvent en tête ou précédée par une radio locale. En télévision, le public semble attiré plus par le divertissement que par l’information : les feuilletons (diffusés par Mirador TV ou Digital Congo) et les émissions sportives remportent un grand succès, alors que la RTNC, jadis en situation de monopole, ne s’impose plus guère que grâce à son journal télévisé.

Le pluralisme médiatique congolais est donc indéniable, en ce qui concerne tant le nombre et la diversité des supports, que leur statut (commercial, communautaire, public), leur affiliation ou appartenance politique, confessionnelle, idéologique, ainsi que leur implantation et rayon de diffusion. Toutefois, un suivi des contenus diffusés par ces médias permet de mesurer des lacunes en termes à la fois de qualité de l’information mise à disposition du public congolais et des possibilités réelles d’expression des différentes composantes de la population à travers les médias.

Un certain nombre de contraintes propres au contexte congolais peuvent expliquer ce paradoxe d’un pluralisme sans diversité et ce sont ces difficultés que l’étude tente d’explorer dans sa seconde partie.

Enjeux et défis

La contribution des médias congolais à la consolidation de la démocratie et de l’État de droit est entravée par une série de contraintes qui relèvent à la fois du contexte externe et de l’organisation interne des médias.

En effet, les conditions de production et l’environnement (juridique, économique, politique et professionnel) des médias influencent non seulement la qualité des contenus écrits ou audio- visuels, mais la sélection même des informations, reflétant la vocation que s’assignent les propriétaires, journalistes et animateurs. Cinq enjeux paraissent cruciaux pour l’évolution du secteur médiatique congolais.

1. La professionnalisation des acteurs du secteur des médias constitue un premier enjeu

central. Les personnels de la plupart des entreprises médiatiques congolaises évoluent dans une

situation précaire, sans contrat et bien souvent sans salaire régulier ni suffisant. Les ressources

humaines sont instables et présentent des lacunes importantes tant dans le domaine journalis-

tique qu’en ce qui concerne les aspects techniques (management, maintenance et entretien du

matériel, maîtrise des technologies).

(7)

Les dispositifs de formation des journalistes et des cadres dirigeants de médias reposent sur quelques établissements universitaires installés dans les principales villes et une pléthore d’ini- tiatives ponctuelles de courte durée parfois mal coordonnées. Ils semblent insuffisants ou mal appropriés aux besoins.

Les journalistes, dont le nombre est aujourd’hui estimé à 4 000 sur toute l’étendue du territoire, sont peu spécialisés et les plus compétents quittent le secteur pour des emplois plus stables et mieux rémunérés. Seuls se démarquent quelques médias bénéficiant d’un appui extérieur (comme Radio Okapi ou Radio Maendeleo à Bukavu) ou reposant sur une vision entrepreneuriale (comme Le Potentiel, le groupe L’Avenir, Digital Congo ou la Radio Télévision Mwangaza à Lubumbashi). Cette situation de fragilité hypothèque fortement la mission fondamentale qui revient aux journalistes congolais d’informer les citoyens de manière rigoureuse et complète.

2. La qualité des contenus est une seconde source de préoccupation. Les productions journa- listiques proposées au public congolais sont peu diversifiées, peu équilibrées, privilégiant l’in- formation (ou la communication) institutionnelle et le publi-reportage plutôt que les démarches d’investigation, de recoupement et de vérification des sources. Au-delà de la question des compétences professionnelles, ces carences découlent partiellement du manque de moyens dont disposent les médias : mal payés, les journalistes génèrent des revenus complémentaires par le biais du « coupage » qui consiste à offrir de la visibilité médiatique à un individu ou à une manifestation contre rémunération. Le mercenariat de la plume et des ondes est devenu la norme…

En outre, la faible qualité des contenus découle de la marge de manœuvre limitée du journaliste dans un contexte où les autorités publiques continuent de pratiquer une forte rétention de l’in- formation et où les médias sont souvent soumis à des intérêts politiques. Nombre de journaux, radios et télévisions sont directement liés à des personnalités politiques et jouent avant tout un rôle d’outil au service d’une carrière. Chaque ministre, chaque gouverneur de province, chaque haut fonctionnaire tente de créer ses propres médias, à Kinshasa où dans sa localité d’origine, réservant à ces derniers la primeur de l’information. Seuls les journalistes qui couvrent positive- ment son action sont alors invités à suivre ses initiatives et la mission de contrôle de l’activité de l’autorité publique par le journaliste devient délicate, voire impossible.

Quant aux contenus non journalistiques (divertissements) diffusés par les médias congolais, ils sont largement exogènes : produits à l’extérieur du pays, ils sont diffusés en violation des normes sur les droits de diffusion. Les productions locales sont, pour leur part, souvent soumises à des intérêts commerciaux sous-jacents, transgressant la réglementation existante censée protéger le public.

3. L’organisation, la réglementation et le respect des normes constituent d’ailleurs un troisième enjeu crucial pour les médias congolais. L’encadrement du secteur est assuré par trois types de mécanismes qui ont connu des évolutions sensibles ces dernières années : la régulation publique, l’autorégulation professionnelle et la défense citoyenne de la liberté de la presse.

D’une part, le cadre légal et réglementaire des médias a été étoffé durant la Transition, essen-

tiellement pour accompagner le processus électoral, mais il demeure lacunaire. Les institutions

publiques qui régissent le secteur des médias (le ministère ayant en charge l’Information et

(8)

l’instance de régulation de la communication) adoptent les textes ou veillent à leur application mais manquent de moyens légaux, humains et financiers pour intervenir de manière performante.

D’autre part, les organisations professionnelles sont faibles et peu structurées et peinent à générer des effets structurants sur la profession (identification des journalistes et délivrance de la carte de presse, contrôle du respect du code de déontologie). L’Union Nationale de la Presse Congolaise (UNPC) est en proie à des dissensions internes importantes, alors que l’Observatoire des Médias Congolais (OMEC), instance d’autorégulation, ne parvient pas à imposer son auto- rité. Les multiples associations de journalistes sectorielles ou régionales qui voient le jour, si elles apportent un appui ponctuel à leurs membres, ne génèrent pas d’effets durables dans un secteur où prédominent l’informel et la concurrence.

Enfin, les atteintes à la liberté de la presse et aux droits des journalistes demeurent nombreuses et ce, en dépit de la multiplication des dénonciations et des initiatives de l’association Jour- naliste en danger (JED). L’année 2007 a été la plus sombre pour les journalistes depuis une quinzaine d’années : 163 atteintes à la liberté de la presse ont été recensées, dont 2 journalis- tes assassinés, 64 journalistes privés temporairement de liberté, 37 journalistes agressés, menacés ou battus, 38 chaînes de radio et de télévision dont le signal a été coupé sur décision de l’autorité publique.

Le contexte est donc marqué par une faiblesse de la norme et de nombreuses violations du droit, que ce soit par les professionnels des médias ou à leur encontre, ddans une situation de quasi impunité.

4. La viabilité et l’indépendance des entreprises médiatiques pose un quatrième défi fondamental. Les paramètres du marché ne jouent pas en faveur de la consolidation des médias congolais. Les coûts de production sont importants, vu la dépendance technologique, le caractère enclavé de la plupart des villes du pays et la déliquescence des infrastructures de base, alors même que le marché publicitaire est restreint, le consommateur congolais étant peu solvable.

Les médias ont des coûts de fonctionnement variables : de 10 000 US$ par an pour une petite station de radio communautaire de province, à 40 000 US$ par mois pour un grand quotidien comme Le Potentiel, ou 25 000 US$ par mois pour une radio télévision commerciale de province comme la RT Mwangaza à Lubumbashi. Tous ces médias ont en commun de devoir lutter au jour le jour pour leur survie, dans un contexte économique qui ne permet guère la planification ni les investissements prévisionnels.

Un marché publicitaire existe effectivement, largement dominé par les entreprises de télécom- munications et les brasseries (qui constituent 75 % de l’offre publicitaire), mais il est très iné- galement réparti entre la capitale et les provinces d’une part (Kinshasa raflant entre 80 et 90 % des marchés) et, d’autre part, entre quelques médias audiovisuels privés commerciaux de grande diffusion et la masse des autres médias, y compris la presse écrite et les médias publics.

Les médias congolais ne parviennent pas à générer suffisamment de revenus propres, ce qui les

rend tributaires de financements extérieurs émanant des milieux politiques, religieux ou de la

coopération internationale. Le nombre important de médias contribue à disperser les revenus

potentiels et à accroître la précarité de chaque entreprise. En outre, la plupart des médias ne

disposent pas d’une organisation interne suffisante en matière de gestion et d’administration, ce

qui entraîne un management aléatoire et opaque, les personnels étant maintenus dans l’igno-

rance des revenus réels de l’entreprise.

(9)

5. L’information de « service public » durable, nécessaire à la consolidation de la démo- cratie, demeure donc fragile et incertaine à moyen terme, ce qui constitue un cinquième défi.

Trois types de médias paraissent avoir pour vocation de fournir au citoyen congolais les éléments d’information utiles à son positionnement dans la société, mais chacun de ces acteurs ou grou- pes d’acteurs éprouve des difficultés pour renforcer ses prestations et inscrire son travail dans la durée.

Radio Okapi, chapeautée par la MONUC, est le média qui remplit le mieux cette mission de ser- vice public au niveau national. Elle joue un rôle précieux d’information, d’éducation citoyenne et assure la circulation de l’information entre les différentes régions de ce vaste pays. Toutefois, issue d’une volonté exogène, elle peine à trouver les modalités d’une inscription durable dans le paysage médiatique congolais. Son coût financier important (10 millions de US$ par an), la lourdeur de sa structure, fortement dépendante du soutien matériel et logistique de la MONUC, et même l’ambiguïté de son statut actuel constituent autant d’obstacles pour sa pérennisation.

Au niveau local, certaines radios communautaires fournissent une information de proximité utile aux communautés dont elles sont issues, mais elles demeurent très fragiles financièrement et dotées de compétences professionnelles insuffisantes.

Quant à l’audiovisuel public, la RTNC, il reste largement au service de la promotion de l’action gouvernementale et ses capacités techniques et humaines sont aujourd’hui limitées.

Dans un tel contexte, deux autres missions importantes des médias pour la consolidation de la démocratie sont encore peu réalisées : celle de représentation des diverses composantes de la population et celle de forum d’expression pour les citoyens désireux de participer au débat public. Fondements d’une approche médiatique de service public, ces missions sont prises en charge essentiellement par le biais de projets fortement dépendants de l’appui des bailleurs de fonds, comme ceux menés par Search for Common Ground ou InterCongo Media qui mettent de la matière à disposition des médias locaux.

6. L’appui des bailleurs de fonds au secteur des médias est donc, en définitive, un enjeu important puisqu’il permet aux médias existants de se professionnaliser et d’améliorer la qualité des contenus mis à disposition des publics congolais. L’intervention externe des bailleurs de fonds et opérateurs internationaux a joué un rôle considérable, depuis le début de la Transition congolaise, dans le renforcement des capacités des journalistes, des organisations profession- nelles et des institutions du secteur des médias.

Entre 2004 et 2008, c’est plus de 40 millions d’€ qui ont été affectés au développement du secteur des médias par des bailleurs bilatéraux (Belgique, Canada, États-Unis, France, Pays- Bas, Royaume-Uni…) et multilatéraux (PNUD, UNESCO, UNICEF, Union Européenne…). Une multitude d’opérateurs non gouvernementaux a bénéficié de ces soutiens pour mettre en œuvre des initiatives avec des partenaires médiatiques locaux, parfois au travers de programmes pluri- annuels d’envergure nationale : Institut Panos Paris, GRET (Groupe de Recherche et d’Échanges Technologiques), Search for Common Ground, Syfia International…

Agissant parfois en ordre dispersé ou de manière redondante, les bailleurs de fonds ont pris

conscience de la nécessité de la concertation et ont mis sur pied le Groupe Inter-Bailleurs pour

les Médias (GIBM) qui, s’il permet une meilleure coordination des appuis, ne peut pas mettre

fin aux divergences de stratégies des donateurs ni aux concurrences entre opérateurs.

(10)

Conclusion

En cernant les facteurs les plus importants qui infléchissent à la fois le comportement des jour- nalistes, le fonctionnement des entreprises de presse et le positionnement de l’audience en RDC, l’étude éclaire une série de paradoxes qui transparaissent au cœur des médias congolais : des médias certes pluriels, mais pas encore suffisamment pluralistes ; divers mais souvent peu ouverts à la diversité ; vivants mais rarement viables ; libres mais peu indépendants…

Dans ce contexte, les fonctions traditionnelles qu’il revient aux médias d’information de jouer dans le jeu démocratique sont largement entravées : l’information du citoyen ; la représentation des différentes catégories sociales ; le contrôle du respect des Droits de l’homme et du bon fonctionnement de l’autorité publique ; et la mise en avant, dans l’espace public, de la parole des citoyens ne sont que partiellement et ponctuellement mises en œuvre.

Toutefois, le diagnostic des principales contraintes dans lesquelles opèrent les médias congolais

permet de poser une base à l’élaboration de voies de solution et aux initiatives entreprises pour

consolider et professionnaliser ce secteur dont le rôle est central pour l’avenir de la démocratie

congolaise.

(11)

Introduction

...

12

État des lieux du paysage médiatique congolais 1. Les émetteurs d’information et de divertissement

...

14

• La presse écrite

...

14

• La radiodiffusion

...

17

• La télévision

...

26

• Les agences de presse et fournisseurs de programmes

...

31

2. Le public congolais et les médias

...

33

• Taux d’équipement et profil de l’auditoire

...

34

• Le public de la presse écrite

...

37

• L’audience des médias audiovisuels

...

40

• Internet et les technologies de l’information et de la communication

...

56

Enjeux et défis des médias congolais 1. La professionnalisation des acteurs du secteur des médias

...

59

• La situation des personnels dans les médias congolais

...

59

• Les dispositifs de formation

...

64

2. La pluralité et la qualité des contenus

...

70

• La forte politisation des médias

...

71

• La confusion entre information et publi-reportage : le coupage

...

72

• Un manque de productions locales

...

75

1

2

Sommaire

Sommaire

(12)

3. L’organisation, la réglementation et le respect des normes

...

79

• Le cadre légal et institutionnel

...

80

• Les organisations professionnelles et l’autorégulation

...

89

• La situation de la liberté de la presse et les droits des journalistes

...

96

4. La viabilité et l’indépendance des entreprises médiatiques

...

100

• Les paramètres du marché

...

101

• L’organisation interne des entreprises

...

107

5. L’information de « service public » durable

...

109

• La RTNC : de la radio télévision « gouvernementale » au « service public »

...

111

• Radio Okapi : projet ponctuel ou durable ?

...

114

• Les radios de proximité : un rôle de « service public »

...

117

6. Les partenaires des médias congolais

...

121

Conclusion

...

129

Liste des acronymes

...

131

Bibliographie

...

133

Annexes 1. Liste des personnes rencontrées dans le cadre de l’étude (enquête qualitative)

...

135

2. Méthodologie de l’étude d’audience (2008)

...

137

3. Liste des journaux de RDC (par province)

...

139

4. Liste des stations de radio émettant en RDC (par province)

...

149

5. Liste des stations de télévision émettant en RDC (par province)

...

163

(13)

1 Cette étude n’est pas la première du genre : elle s’inscrit dans la continuité du travail précédemment effectué par l’Institut Facultaire des Sciences de l’Information et de la Communication (IFASIC) en 1999, par l’Institut Panos Paris en 2004 et par le Groupe de Recherche et d’Échanges Technologiques (GRET) en 2005. (Voir Bibliographie page 133) 2 Voir en annexe la liste des personnes rencontrées dans le cadre de la réalisation de cette étude (Annexe 1). Les entre- tiens ont été réalisés entre juin 2006 et octobre 2008 par Brahim Sail, Willy Katupa, Marc Ngwanza et Marie-Soleil Frère.

3 Voir en annexe la composition de l’échantillon de l’étude d’audience. (Annexe 2)

Les médias de la République démocratique du Congo (RDC) jouent un rôle majeur dans l’évolu- tion politique et sociale du pays. Pour fonder une stratégie d’intervention visant à en consolider et en professionnaliser les acteurs, il importe de poser un diagnostic du secteur, afin de cerner comment les médias congolais peuvent contribuer plus efficacement à la consolidation d’un État de droit, opérationnel et efficace, politiquement responsable et garant de la paix. En effet, le renforcement de la citoyenneté et de la capacité des Congolais à intervenir dans le débat public, ainsi que dans le contrôle effectif de l’action de leurs mandataires politiques et de l’admi- nistration publique, nécessite l’existence de médias professionnels, pluralistes, rigoureux, fiables et équilibrés.

La présente étude a été réalisée à la demande du projet franco-britannique « Médias pour la démocratie et la transparence en RDC » et vise à dresser cet état des lieux, arrêté à la date du 31 octobre 2008

1

. Elle est le résultat d’un important travail de collecte de données qualitatives et quantitatives, visant à décrire le fonctionnement des médias congolais (écrits et audiovisuels), ainsi que le comportement de leurs audiences, dans sept villes principales et six localités rurales.

Cette collecte des données, effectuée essentiellement par une chercheuse universitaire et un institut de sondage, la Société IMMAR, s’est effectuée en deux étapes, selon une triple méthodologie :

• La première étape a consisté à essayer de cerner les « émetteurs » d’information et de divertissement que sont les médias, à travers une recherche documentaire et des entre- tiens semi-directifs avec une soixantaine de personnes ressources émanant des milieux médiatiques, mais aussi associatifs, politiques et économiques

2

. Elle a permis de dresser un portrait du paysage médiatique à travers une approche qualitative ;

• La seconde étape a reposé sur une étude d’audience, une approche statistique de la

consommation des médias, portant sur un échantillon de 3 000 personnes (de 15 ans et

plus) réparties dans sept villes du Congo (Bukavu, Goma, Kinshasa, Kisangani, Lubumbashi,

Matadi et Mbuji Mayi), auxquelles s’ajoutent 900 personnes vivant en milieu rural

3

. Cette

approche quantitative, si elle ne permet pas de cerner des moyennes au niveau national,

présente néanmoins les principales caractéristiques des publics congolais et met en évi-

dence, grâce à des comparaisons avec des études similaires menées par la société IMMAR

depuis 2004, les grandes tendances qui se dessinent ces dernières années.

(14)

4 Certaines personnes ont souhaité garder l’anonymat ou ne pas assumer ouvertement certains propos. Nous avons respecté toutes les demandes de confidentialité expressément formulées.

Le présent document constitue une synthèse des résultats obtenus au terme de cette double démarche. Il n’aurait pas pu être élaboré sans la contribution active et franche des personnes ressources rencontrées et des populations sondées ; qu’elles soient ici remerciées pour leur col- laboration

4

.

La première partie de ce document présente un état des lieux du paysage médiatique congolais, décrivant d’abord la situation des médias avant de se pencher sur leurs audiences. Elle montre que l’offre médiatique a connu un développement extraordinaire en République démocratique du Congo ces dernières années et que l’accès aux médias s’est également accru dans la plupart des grandes villes du pays. Partant de ce constat, la seconde partie tâche de cerner les condi- tions (à la fois internes et externes) de fonctionnement et de production des médias congolais, afin de mettre en avant les facteurs qui influencent la qualité des contenus écrits ou audiovi- suels qui sont mis à disposition du public. Il s’agit ainsi de souligner les défis auxquels sont confrontés les médias congolais dans leur travail quotidien.

Ce travail se veut synthétique et il n’est pas possible d’y accorder une place à l’ensemble des initiatives du secteur des médias. Certains professionnels ou certains journaux, certaines radios ou télévisions pourront ne pas se reconnaître dans l’ensemble des analyses présentées. Le posi- tionnement, le fonctionnement interne, les réalisations et les difficultés de 341 stations de radio, de 82 chaînes de télévision et de centaines de publications réparties sur un territoire de plus de 2 millions de km

2

ne peuvent pas être résumés en une équation unique. De même, les comportements de consommation médiatique de plus de 60 millions de Congolais ne peuvent être déduits à partir d’un échantillon portant sur sept villes et six localités rurales. Cette étude prétend seulement cerner les facteurs les plus importants qui infléchissent à la fois le comporte- ment des journalistes, le fonctionnement des entreprises et le positionnement de l’audience.

Car identifier clairement les enjeux et les défis constitue un préalable à toute action visant à renforcer la capacité des médias congolais à jouer le rôle qui leur revient dans la consolidation de la démocratie.

Enfin, il nous importe d’insister sur le fait que les éventuelles faiblesses de ce document, les

erreurs factuelles ou d’appréciation, les idées et constats proposés, ne peuvent être imputés

qu’à l’auteur de ce rapport et non au projet « Médias pour la démocratie et la transparence en

RDC » qui en est le commanditaire.

(15)

Depuis la libéralisation du secteur, annoncée en 1990, les médias congolais se sont multipliés de manière fulgurante et le paysage médiatique est aujourd’hui marqué par un pluralisme foi- sonnant. On dénombre ainsi :

• Pour la ville de Kinshasa : 51 chaînes de télévision émettant en clair, 41 stations de radio- diffusion en FM, 10 quotidiens réguliers, 15 périodiques et une vingtaine des journaux paraissant à l’improviste (sur un ensemble de plus de 125 journaux déclarés) ;

• Sur l’ensemble du territoire national : 82 chaînes de télévision dont 3 – Radio Télévision Nationale du Congo (RTNC), Digital Congo, et Radio Télévision du Groupe l’Avenir (RTG@) – émettent par satellite à partir de Kinshasa et sont rediffusées dans certaines provinces du pays ; 341 stations de radiodiffusion (dont une seule, Radio Okapi, émet sur l’ensem- ble du territoire) et plus de 600 titres de presse déclarés, pour la plupart irréguliers sur le marché.

La presse écrite

Après une période de contrôle étatique fort

5

(Le Président Mobutu avait autorisé la publication de deux organes nationaux, Elima et Salongo, ainsi que d’un seul journal par province

6

), le début des années 1990 a été marqué par l’explosion de la presse privée à Kinshasa et, dans

Les émetteurs d’information et de divertissement 1

5 Durant la période coloniale, la presse congolaise a été dynamique et diversifiée, comprenant des titres liés aux Églises, puis aux mains de l’administration coloniale et d’entrepreneurs privés belges. A la fin des années 1950, une presse « congolaise » a vu le jour, très orientée vers la politique. L’arrivée au pouvoir de Mobutu en 1965 a entraîné une mainmise de l’État puis du parti unique MPR (Mouvement populaire de la Révolution) sur l’ensemble du secteur.

6 Ces sept titres étaient appelés « journaux de la chaîne » : Mjumbe (Lubumbashi), Jua (Bukavu), Mambenga (Mbandaka), Beto na Beto (Matadi) et Boyoma (Kisangani) s’ajoutaient à Elima et Salongo (Kinshasa). Tous les coûts de confection de ces journaux étaient pris en charge par l’État, y compris les salaires des journalistes.

État des lieux du paysage médiatique congolais

© IPP

1

(16)

une moindre mesure, en province. De 1990 à 1995, plus de six cents publications ont été enregistrées auprès du ministère compétent, mais la plupart n’ont guère dépassé les premiers numéros. La presse, essentiellement politique, se partageait alors en presse « rouge » (opposition radicale) et presse « bleue » ou « verte » (favorable au régime de Mobutu)

7

.

Après dix-huit années d’histoire politique congolaise tumultueuse, quelques-uns seulement de ces titres ont survécu ; certains restant fidèles à leur ligne éditoriale, d’autres opérant des revirements parfois spectaculaires. En août 2008, si on compte 638 publications enregistrées sur l’étendue du territoire congolais, 228 titres seulement paraissent, la plupart de manière irré- gulière

8

. Le régime juridique prévu par la loi sur la presse de 1996 est celui de la déclaration préalable : avant de lancer son titre sur le marché, un éditeur doit simplement introduire, auprès du service adéquat du ministère ayant en charge l’Information, une déclaration compor- tant le titre du journal, sa périodicité et l’identité complète du propriétaire et du directeur de publication. Certains titres enregistrés n’ont jamais connu leur première édition, alors que d’au- tres apparaissent sur le marché avant d’avoir procédé à la moindre démarche administrative.

Les publications sont essentiellement concentrées dans la ville de Kinshasa où, sur 125 titres actuel- lement recensés, une petite vingtaine paraît réguliè- rement, soit quotidiennement (Le Potentiel, Le Phare, La Référence Plus, Uhuru, La Tempête des Tropiques, Le Palmarès, L’Observateur, L’Avenir, Le Forum des As, auxquels s’ajoute le Bulletin Quotidien de l’Agence Congolaise de Presse)

9

, soit périodiquement (The Post, Le Révélateur, Numérica, La Prospérité, Demain le Congo, Africa News, Le Soft, Le Manager Grognon, L’Alerte, Pot-Pourri...).

Il n’existe aucun quotidien en dehors de la capitale.

On dénombre 65 journaux déclarés au Katanga, 19 dans la Province Orientale, 17 au Kasaï Oriental, 12 au Nord-Kivu, 8 au Sud-Kivu, 11 au Bas-Congo, 5 en Equateur, 4 au Kasaï Occidental et 1 dans le Bandundu. Il n’en existe aucun au Maniema.

Les principaux journaux privés paraissent, souvent de manière aléatoire, dans les chefs-lieux de province :

A Lubumbashi : Mukuba, Quiproquo, Fraternité et Le Lushois ;

A Bukavu : L’Etendard et Le Souverain (seuls à paraître effectivement), Karibu, Kasuku et Kivu Safari ;

A Goma : Info Plus, Le Souverain Primaire, Le Pacificateur, Jonction et Les Coulisses (publié à Béni) ;

7 Voir Emmanuel Bebe Beshelemu, Presse écrite et expérience démocratique au Congo-Zaïre, Paris, L’Harmattan, 2006.

8 Voir le tableau reprenant les principaux titres enregistrés en 2008 (Annexe 3). Les tableaux figurant en annexe ont été élaborés par Willy Katupa Nkole et Marie-Soleil Frère.

9 Les titres « historiques » sont les suivants : La Référence Plus (André Ipakala Abeiye, 1990), Le Potentiel (Modeste Mutinga, 1984), Le Palmarès (Michel Ladi Luya, 1992), Le Phare (Polydor Muboyayi Mubanga, 1983), Le Forum des As (José Nawej, 1990), Le Soft (Kin Kiey Mulumba, 1989), La Tempête des Tropiques (Alexis Mutanda, 1991).

Un vendeur à la criée à Kinshasa © M. Myers

(17)

A Kisangani : Mwangaza, Le Nationaliste, La Tshopo, La Libre Orientale et Le Thermomètre ;

A Mbuji Mayi : Congo Wetu, Lubilanji, Plume d’Or, Le Défi et Transparence ;

A Matadi : Mbwetete, Le Périscope, La Cité africaine et L’Embouchure ;

A Bandundu : Kimpangi ;

A Mbandaka : Ekanga Ngenge et Mabenga.

Les entreprises de presse écrite peinent à assurer leur survie financière. Avec de faibles tirages (1 500 exemplaires maximum pour les quotidiens de Kinshasa, certains journaux se limitant à 150 ou 200), un prix de vente élevé, inaccessible au commun des Congolais (près de 2 US$

pour un quotidien kinois), et un marché publicitaire restreint, beaucoup de journaux survivent grâce à des financements occultes, ce qui entache sérieusement leur crédibilité. Bien souvent, la presse de province ne paraît que quand elle a trouvé un « sponsor ».

Selon certains éditeurs, la multiplicité des titres reflète avant tout l’éclatement du paysage politique : « La prolifération des titres est plus due aux politiques qu’aux hommes de presse, estime l’un d’eux. Il y a toujours la conviction que l’argent est dans la politique et que c’est en se rapprochant des politiques, entre autres par la presse, qu’on peut s’enrichir. » C’est là une caractéristique congénitale de la presse écrite kinoise en particulier : sa forte politisation, beaucoup de titres étant nés dans le giron d’un parti ou d’un homme politique. « Un ministre, un journal », a-t-on coutume de dire à Kinshasa où de nouveaux titres apparaissent lorsque se forme un gouvernement, pour disparaître lorsque le ministre-promoteur perd son portefeuille.

Exception faite des quelques quotidiens et hebdomadaires réguliers de la capitale, la majorité des journaux congolais fonctionne de manière largement informelle et répond peu à l’appellation d’« entreprise » de presse. Beaucoup de titres sont animés par une seule personne, sollicitant çà et là la collaboration de pigistes lorsque sont réunis les moyens nécessaires à la parution d’un numéro. Une quinzaine de journaux seulement dispose d’un siège ; les autres sont réalisés au domicile ou sur le lieu de travail de leur propriétaire.

En dehors du circuit de la presse privée « commerciale », plusieurs publications thématiques circulent en RDC, éditées par des ONG ou des communautés religieuses

10

. Certaines sont issues de projets de coopération qui ont pour ambition l’information générale du citoyen ; elles peuvent donc être considérées comme des acteurs du paysage médiatique à part entière.

Le Journal du Citoyen (JDC) est un supplément hebdomadaire d’information (électorale d’abord, citoyenne ensuite) encarté dans huit grands journaux de Kinshasa et envoyé sous forme de pho- tocopies en province. Lancé en septembre 2005, conjointement par l’Institut Panos Paris et l’Association pour la Promotion de l’Éducation et de la Formation à l’Étranger (APEFE), sous l’égide de la Haute Autorité des Médias (HAM), il était réalisé par une équipe de 7 à 10 pigistes issus de journaux partenaires, mis à disposition du JDC par leur employeur un jour par semaine, pour une durée de trois mois. Leur passage au JDC permettait à ces journalistes de se former à divers genres journalistiques peu habituels dans la presse kinoise et à la pratique de l’information

10 Ainsi, par exemple la revue Renaître de la Conférence Episcopale du Congo, le Bulletin du CEDAC à Bukavu,

Munyaku wa Nsona du Diocèse de Mbuji Mayi, Le Facilitateur du CEFOP de Mbuji Mayi, Tekemenayi de l’Église catho-

lique et Action Ciam des Missionnaires Scheutistes à Kananga, La Forêt et Congo de la société civile de l’Equateur,

Le Signal et Le Tremplin de la société civile de Kisangani.

(18)

citoyenne. La pige était rémunérée 50 US$ et l’éditeur était défrayé pour l’encartage du journal dans sa publication. En août 2008, le JDC tirait à plus de 18 000 exemplaires, ce qui en faisait le premier tirage de la RDC. Diffusé dans plus de 35 localités, il était le seul titre de la presse écrite congolaise à avoir une couverture nationale. Depuis septembre 2008, le JDC s’est mué en « journal- école », intégré à l’Institut Facultaire des Sciences de l’Information et de la Communication (IFASIC).

Il est désormais réalisé par des étudiants en année terminale du cursus « presse écrite », encadrés par

deux permanents. Plusieurs journaux continuent à l’encarter, désormais sans contre-partie financière, et son tirage a été réduit à 9 000 exemplaires.

Le journal Syfia Grands Lacs est, pour sa part, issu d’un projet régional portant sur la RDC, le Rwanda et le Burundi, mené par l’agence Syfia International (un réseau de neuf agences de presse situées en Europe et en Afrique francophone). La branche congolaise de Syfia, qui s’ap- pelle InterCongo Média (ICM), édite cette publication bimensuelle de 12 pages avec l’appui des branches française (IciLàbas média) et belge (InfoSud Belgique). Le journal

publie une partie des reportages et enquêtes produits par les correspondants de Syfia Grands Lacs dans les trois pays concer- nés. Il est tiré à 4 000 exemplaires et distribué gratuitement à des organisations qui peuvent le mettre à disposition de leur public (écoles, paroisses, bibliothèques, ONG, organismes locaux et auto- rités locales), dans dix des onze provinces du Congo. Il est vendu aux particuliers dans des points de vente au prix de 200 f.c. (francs congolais), un montant nettement inférieur à celui des journaux privés.

La radiodiffusion

Le paysage radiophonique a connu un développement extraordinaire depuis dix ans. Pour la seule ville de Kinshasa, on compte une quarantaine de stations qui émettent en FM. Un recen- sement effectué en 2008, avec l’appui de l’UNICEF, de la FAO et de l’UNESCO, dans le cadre de la mise en place de la Stratégie de Développement de la Radiodiffusion (SDR) du gouverne- ment, identifie plus de 378 radios (dont environ 280 émettent effectivement). Notre propre recensement en a dénombré 341

11

, quatre années après le premier relevé effectué par l’Institut Panos Paris qui identifiait 106 stations

12

.

Le JDC, journal-école à l’IFASIC

Journal Syfia Grands Lacs © M.S. Frère

11 Voir la liste des radios en annexe (Annexe 4).

12 La variation des chiffres d’une étude à l’autre est liée, d’une part, à la difficulté d’obtenir des données à jour concer- nant la situation en province ; d’autre part, à la manière de prendre en compte ou non les radios disposant d’une fréquence mais qui n’ont jamais émis, celles qui n’émettent plus temporairement, celles qui disposent d’émetteurs dans plusieurs villes différentes avec des proportions diverses de productions relayées et de production locales.

© Y. Kalikat

(19)

Provinces Natio- Radio Interna- Commu- Confession- Commer- Associa- Radios R.L. + nales Okapi tionales nautaires nelles ciales tives locales relais

Radios privées Total

Bas Congo 1 1 1 19 9 2 - 30 35

Bandundu 1 1 15 8 2 4 29 30

Equateur 1 1 1 8 2 - 4 14 18

Kasaï Oriental 2 1 1 2 17 13 - 32 38

Kasaï Occidental 1 1 0 6 10 24 - 40 45

Katanga 1 1 1 12 14 12 - 38 44

Kinshasa 2 1 4 3 19 16 - 41 41

Maniema 1 1 1 9 - 6 - 15 19

Nord Kivu 2 1 1 23 12 4 - 39 45

Prov. Orientale 1 1 1 16 10 7 2 35 39

Sud Kivu 1 1 1 20 3 5 - 28 33

TOTAL 1 (+12) 1 4 133 104 91 10 341

Le paysage radiophonique congolais se compose donc :

• d’un radiodiffuseur public, la RTNC (Radio Télévision Nationale du Congo), qui dispose de deux chaînes à Kinshasa et (théoriquement) d’une antenne dans chaque province ;

• de 133 radios communautaires, associatives, académiques et scolaires (non commerciales) ;

• de 104 radios confessionnelles (dont la plupart sont des radios dites « évangéliques » ou

« messianiques » liées à des Églises du Réveil) ;

• de 91 radios privées commerciales ;

• d’une radio de la Mission de l’Organisation des Nations Unies au Congo (MONUC), appelée Radio Okapi.

S’y ajoutent les radios internationales implantées en FM : Radio France Internationale (RFI, pré- sente dans six villes), Africa n°1, British Broadcasting Corporation (BBC) et la Radio Télévision Belge Francophone (RTBF) – disponibles en FM à Kinshasa uniquement.

La loi sur la presse de 1996 fixe des conditions pour la mise en place d’une entreprise audio- visuelle, mais ces dernières ne sont guère respectées

13

. A Kinshasa, les licences sont octroyées par le ministère des Postes, Téléphones et Télécommunications (PTT), alors que les autorisations d’émettre sont délivrées par le ministère ayant en charge l’Information

14

. En province, les moda- lités d’enregistrement des radios varient. La majorité des radios qui émettent disposent d’une

13 Pour le détail de ces conditions, voire Institut Panos Paris (éd.), Afrique Centrale. Cadres juridiques et pratiques du pluralisme radiophonique, Paris, Karthala, 2005.

14 Ce dernier s’est appelé successivement ministère de l’Information et de la Presse, ministère de l’Information, de la Presse et de la Communication nationale, avant de devenir ministère de la Communication et des Médias.

Radios

publiques Radios

ONU

(20)

autorisation de l’Agence Nationale de Renseignements (ANR) et du récépissé de la division provinciale des PTT qui octroie la fréquence.

Aucune autorisation n’est sollicitée auprès des autorités nationales pour les stations établies en province, ce qui rend complexe la tenue d’une comptabilité à jour des radios pré- sentes sur l’ensemble du territoire.

Dans les provinces, la radio demeure le média le mieux implanté, avec un grand nombre d’initiatives privées.

Les provinces les mieux desservies sont actuellement Kinshasa (41), le Kasaï Occidental (40), le Katanga (38), Le Nord-Kivu (39) et la Pro- vince orientale (35). Les provinces les moins nanties sont l’Equateur (14) et le Maniema (15).

• Les radios privées commerciales

A Kinshasa, sur la quarantaine de radios émettant en FM (dont 34 fonctionnaient effectivement au moment de l’enquête), 16 sont enregistrées comme radios privées commerciales. Parmi celles-ci, quatre disposent de relais qui leur permettent la retransmission en FM dans certaines villes de province : Raga FM, Digital Congo FM, RTG@ et Radio Liberté (principalement à l’Ouest du pays pour cette dernière)

15

. Deux stations, Top Congo et RTG@ diffusent aussi sur le net (www.topcongo.com et www.groupelavenir.cd).

Les radios de Kinshasa évoluent dans un contexte marqué par la concurrence forte de la télé- vision, la plupart des radiodiffuseurs étant couplés avec une télévision. L’évolution du paysage radiophonique kinois ces cinq dernières années est caractérisée, selon les observateurs, par une baisse de qualité des programmes. Les productions propres sont en diminution et la multiplication des stations entraîne une dispersion des ressources humaines qualifiées. La prolifération des stations rend également difficile l’organisation rationnelle et performante du marché publicitaire au profit des radios les plus sérieuses.

Quoi qu’il n’y ait pas de données publiques disponibles relatives à la composition de l’actionnariat des radios congolaises, plusieurs d’entre elles sont la propriété affichée de personnalités politiques.

• Digital Congo FM appartient à Multi Media Congo, dont les actionnaires sont Jaynet Kabila, la sœur du Président, et Nikola Vadjon ;

• RTG@ (Radio Télévision du groupe L’Avenir) appartient au député Pius Muabilu (qui possède également le quotidien L’Avenir) ;

15 Voir la cartographie établie par le GRET en 2005, actuellement en cours de mise à jour.

© IPP

(21)

• Radio Liberté appartient au sénateur Jean-Pierre Bemba ;

• Mirador FM appartient à Michel Ladi Luya (propriétaire du quotidien Le Palmarès), qui fut député durant la Transition ;

• Radio Lisanga appartient au député Roger Lumbala (ministre durant la Transition et candidat aux élections présidentielles de 2006) ;

• Radio 7 appartient au sénateur Modeste Mutinga (également pro- priétaire du quotidien Le Potentiel), ancien président de la Haute Auto- rité des Médias ;

• Radio Horizon 33 appartient au député Jean-Charles Okoto, (ancien ministre) ;

• Radio Kin Malebo appartient au sénateur Aubin Ngongo Luwowo (ancien ministre de l’information de Mobutu).

Quelques radios commerciales émanent plutôt du milieu des affaires et se montrent plus plura- listes, même si la plupart ont un penchant favorable aux autorités actuelles :

• Top Congo (appartenant à Christian Lusakweno) est très ouverte aux ONG de défense des Droits de l’homme et aux groupes de toutes les tendances politiques et d’opinion ;

• Raga FM (de l’homme d’affaires d’origine indienne Versi Zahir) ;

• Jo Dacosta FM (musicale).

Les médias qui ne sont pas politiquement « positionnés » sont souvent plus diversifiés.

Certaines de ces radios reconnaissent avoir subi « l’effet Okapi » : elles tentent de copier le modèle offert par la radio onusienne quant au format des émissions ou au ton des bulletins d’information.

Dans les provinces également, les radios privées commerciales appartiennent souvent à des personnalités politiques locales, ou présentent des affinités politiques évidentes.

A Lubumbashi : Radio Mwangaza (dirigée par une ancienne journaliste de la RTNC, Rose Lukano, assez proche de la mouvance présidentielle) côtoie Nyota FM (radio du gouverneur Moïse Katumbi), Wantanshi FM (également proche du gouverneur), Radio Mosaïque (de Auguy Wemalowa) et Radio Tam-Tam Afrique (de Sefu Selemani) ;

A Mbuji Mayi : RTOP (Radio Télévision Océan Pacifique) appartient au gouverneur (Alphonse Ngoyi Kasanji) et concurrence RTDK (Radio Télévision Debout Kasaï) de Auguy Ilunga, candidat malheureux au poste de gouverneur, et KHRT (Kasaï Horizon Radio Télévision) de Joseph Mubengayi ;

A Kananga : Canal Media Broadcasting (CMB) appartient à Mutombo Bakafuasenda (ministre de la Justice, puis de la Sécurité et Défense) et concurrence Radio Télévision Amazone et Radio Full Contact ;

A Matadi : Radio Télé Matadi (RTM) appartient à Pamphile Badu wa Badu, devenu ministre de la Jeunesse, Sports, Loisirs, Culture et Arts du gouvernement provincial ;

Radio 7 à Kinshasa

© M.S. Frère

(22)

A Kisangani : RTNB (Radio Télévision Numérique Boyoma) appartient au Président de la Chambre de Commerce de la Province orientale ;

A Mbandaka : Radio Ekanga Ngenge est proche du parti UNADEC (Union Nationale des Démocrates Chrétiens) et Radio Esuk’afaya appartient au Député de l’opposition Bofassa Djema.

La campagne électorale de 2005 a fait basculer nombre de ces stations dans la propagande politique. Dans certaines localités, elles sont devenues des instruments de combat. Dans l’Equateur, Nzanga Mobutu, candidat à l’élection présidentielle, qui s’est rallié, au second tour, à l’Alliance pour la Majorité Présidentielle (AMP) de Joseph Kabila, a été retenu pendant 24h dans les locaux de la Radio Liberté de Jean-Pierre Bemba. A Lodja, dans le Kasaï, les radios de Joseph Olenghankoy (Radio Sankuru Liberté), Lambert Mende Omalanga (Radio Grand Tam- Tam) et Jean-Charles Okoto (Radio Losanganya) se sont livrées également à une véritable guerre des ondes. Cependant, la période post-électorale a montré également que, dans certaines zones, les radios les plus politisées pouvaient jouer un rôle important d’information de proximité, une fois apaisées les tensions des moments de campagne.

• Les radios confessionnelles

Les radios confessionnelle sont majoritaires à Kinshasa où on en dénombre dix-neuf. Elles sont essentiellement liées aux Églises du Réveil et appartiennent généralement à des pasteurs et des prédicateurs

16

. Cependant, comme le souligne un rapport d’expert, « certaines chaînes de radio protestantes, kimbanguistes, islamiques et des Églises du Réveil sont bien équipées et ont une force d’influence très significative sur les opinions et divers milieux de la RDC

17

. »

Deux radios confessionnelles ont joué un rôle pionnier dans le paysage radiophonique kinois : Radio Elikya (catholique : créée en 1995, elle appartient à l’archidiocèse de Kinshasa) et Radio Sango Malamu (protestante, mise sur pied en 2000). Toutes deux dépassent le cadre de l’évan- gélisation et jouent un rôle d’éducation et d’information citoyennes. Certaines stations catholi- ques de province (comme Radio Télévision Amani opérant depuis 1995 à Kisangani, ou Radio Maria, créée en 2001 à Bukavu) adoptent également cette approche.

Dans le réseau des médias catholiques, et parfois dans certains réseaux protestants et kimban- guistes, les radios sont encouragées à dépasser le registre de la foi pour apporter un message de promotion de la citoyenneté et du développement. C’est une ouverture essentielle, parce que, là où elles sont seules dans leur localité, elles constituent une référence incontournable pour les auditeurs.

Parmi les radios confessionnelles qui jouent ce rôle citoyen, on peut citer :

• Radio Tomisa (catholique) et Radio Sango Malamu (protestante) à Kikwit ;

• RTDI (Radio Télévision du Diocèse d’Idiofa) et Radio Embam (Frères Joséphites) à Idiofa ;

16 L’Institut Panos Paris distingue les « radios évangéliques » (qui annoncent l’Évangile de Jésus-Christ : essentielle- ment catholiques et protestantes) et les « radios messianiques » (qui vulgarisent le message d’un messie révélé en la personne du pasteur propriétaire de la radio) (2004, p.40).

17 Rapport du Fonds Solidarité Prioritaire, Plan Radio Afrique, mars 2008, p.10.

(23)

• Radio Télé Kintuadi (Ratelki, kimbanguiste) à Mbanza Ngungu, Kinshasa, Matadi et Boma ;

• RTDM (Radio Television Diocèsaine de Matadi) ;

• Radio Diku Dietu (de l’archidiocèse de Kananga) ;

• Radio Fraternité Buena Muntu (du Diocèse de Mbuji Mayi) ;

• Radio Boboto (catholique) à Isiro ;

• Radio Moto à Butembo, Béni et Oïcha (catholi- que) ;

• Radio Sauti Ya Injili (protestante) à Goma ;

• Radio Sauti Ya Rehema (protestante) et Radio Neno la Uzima (pentecôtiste) à Bukavu ;

• Radio Mwinda (du Diocèse de Mbandaka) ;

• Radio Canal de Vie, Radio Hosanna et RTIV (Radio Télé Inter Viens et Vois) à Lubumbashi ;

• RTIV (Radio Télé Inter Viens et Vois), RTK (Radio Tangazeni Kristu), RTEDI (Radio Télévision d’Evangélisation et de Développement Intégral), RTPH (Radio Télévision Pêcheur d’Hommes) à Kisangani.

La plupart de ces radios emploient des bénévoles, recrutés parmi les fidèles des Églises. Les radios confessionnelles sont censées être apolitiques, mais plusieurs d’entre elles n’ont pas hésité à se lancer dans la campagne électorale en 2006 pour soutenir certains candidats.

A Kinshasa, Radio Télé Puissance du Pasteur Kiziamina, Radio Télévision Armée de l’Éternel du Pasteur Sony Kafuta, Radio Télévision Message de Vie du Pasteur Kutino ou encore Canal Chemin Vérité et la Vie de Mama Olangi, supposées être au service du ministère de leur proprié- taire, ont souvent relayé des positions politiques. Cette politisation des radios religieuses, qui s’est poursuivie après le scrutin, a entraîné l’intervention de la HAM (Haute Autorité des Médias) à plusieurs reprises

18

.

• Les radios communautaires

Alors qu’il n’existe à Kinshasa que trois radios communautaires (Radio Réveil, qui a cessé d’émettre depuis 2007, Radio Tam-Tam et Radio rurale Munku qui sont des stations de proxi- mité émettant dans les quartiers périphériques), ce type de station est très fréquent en province puisqu’on en dénombre 130. La multiplication récente des radios communautaires et associati- ves constitue une avancée significative, car ces dernières offrent une alternative aux médias nationaux en fournissant une information de proximité utile à la population dans son quotidien.

Comme le souligne un rapport du ministère français des Affaires étrangères, le principal mérite de ces radios de province « est d’avoir désenclavé des coins très reculés du pays et de se poser en acteurs et partenaires du développement économique et social

19

. »

© S. Bailly

Radio Moto à Béni

18 Voir Marie-Soleil Frère, « Médias et élections en RDC », in Filip Reyntjens et Stefan Marysse (éd.), L’Afrique des Grands Lacs. Annuaire 2006-2007, Paris, L’Harmattan, 2007.

19 Rapport FSP Plan Radio Afrique, p.8.

(24)

Quelques radios communautaires sont souvent citées en exemple :

• Radio Phoenix Université (2000), Radio Zénith (1994), Radio Communautaire du Katanga (RCK) à Lubumbashi ;

• Radio Maendeleo à Bukavu (créée en 1993, elle demeure la mieux structurée des radios communautaires congolaises et constitue une référence pour toute la région.

C’est une des rares radios communautaires congolaises qui diffusent en ondes courtes et sur le net) ;

• Radio Colombe à Goma ;

• Radio Communautaire Mwangaza et OPED FM (Organisation pour la protection de l’en- vironnement et le développement) à Kisangani ;

• Radio Candip

20

et Canal Révélation (Bunia), qui sont liées l’une à l’ISP (Institut Supérieur Pédagogique) et l’autre au CIEP (Centre d’Information et d’Éducation permanente) ;

• Radio Sauti Ya Mkaaji à Kasongo (de la COOPADEM : Coopérative paysanne de production agricole et artisanale pour le développement du Maniema) ;

• RTC/Maniema et Gunda FM à Kindu ;

• Radio Mont Carmel à Mbuji Mayi ;

• Radio Concorde, Amen FM et Bandundu FM à Bandundu ;

• Les quatre radios rurales implantées par l’Organisation Internationale de la Franco- phonie (OIF) dans le Bandundu (à Idiofa, Kindandu, Mbankana et Bonga Yassa).

Les radios communautaires (que l’on différencie parfois à peine des radios confessionnelles, car nombre d’entre elles ont des statuts peu clairs et reçoivent l’appui de communautés religieuses) sont qualifiées, en général, d’« associatives ». Elles sont largement dominantes dans tous les recensements, mais il faut toutefois relativiser ce constat à deux égards :

• D’une part, beaucoup de radios se déclarant « communautaires » ou « associatives » ne le sont pas dans les faits : ni dans l’organisation interne (elles appartiennent à des individus et non à des collectivités), ni dans le financement (elles s’ouvrent à la publicité commer- ciale), ni en ce qui concerne les programmes (elles ne fonctionnent pas grâce à la partici- pation de la communauté). Par exemple, Radio Iriba, à Bukavu, se proclame communau- taire, mais elle appartient à l’ancien gouverneur de la province, Célestin Cibalonza, et fait parfois de la publicité commerciale ;

• D’autre part, le caractère « communautaire » de certaines radios ne les empêche pas d’en- trer dans le débat politique. Beaucoup d’entre elles subissent des pressions importantes des autorités locales qui les considèrent comme leur porte-voix et les forcent à soutenir leur action.

Durant la période électorale, si certaines radios communautaires se sont engagées politique- ment, d’autres ont démontré une réelle capacité à se préserver des influences. Dans quatre

20 Première radio communautaire du Congo, la radio du Centre d’animation et de diffusion pédagogique de l’Institut

Supérieur Pédagogique de Bunia a été créée en 1975 et a fonctionné avec un appui considérable de la coopération

belge jusqu’en 1990. Centrée au départ sur des préoccupations pédagogiques et scolaires, elle a élargi son action aux

thématiques de développement. Elle a beaucoup souffert de la guerre dans la région.

(25)

provinces (Sud-Kivu, Province Orientale, Kasaï Oriental et Katanga), plusieurs d’entre elles ont réuni leurs efforts et leurs capacités pour se mettre en synergie autour de quatre radios phares, couvrant ensemble les scrutins. Un journaliste de Kisangani remarquait : « Dans les villes de province qui ont beaucoup souffert de la guerre, comme à Kisangani ou à Bukavu, les médias se sont comportés de manière beaucoup plus responsable. Ici, les gens ont connu la guerre et l’im- plication des médias dans la guerre : à Kisangani, pendant la guerre des 6 jours, ils ont assisté à la guerre médiatique entre la RTNC qui était aux mains des Rwandais et la radio Liberté qui était maîtrisée par les Ougandais. Les radios veulent maintenant contribuer à la paix… C’est dans les provinces où il n’y a pas eu de guerre, comme le Katanga, Kinshasa ou le Kasaï, que les médias se sont plus déchaînés pendant les élections

21

. »

• La radio publique : la RTNC radio

La RTNC (Radio Télévision Nationale du Congo) est un opérateur public dont le statut repose sur une ordonnance de 1981

22

. Lointaine héritière de la Radio Congo Belge, créée en 1949 et léguée aux autorités congolaises à l’indépendance, la RTNC (anciennement appelée « Voix du Zaïre ») a constitué durant trois décennies le fleuron de la propagande mobutiste.

Selon l’ordonnance-loi de 1981, la RTNC a pour mission :

• d’exploiter le service public de radiodiffusion et de télévision ;

• d’informer, de former et d’éduquer les masses…

Disposant d’une imposante rédaction centrale à Kinshasa et d’une antenne (de production et de diffu- sion) dans chaque chef lieu de province, la RTNC compte un personnel de plus de 2 300 agents dont un bon millier basé dans la capitale. Elle émet en cinq langues : français, kikongo, swahili, tshiluba et lingala.

En ce qui concerne la radio, la RTNC dispose de deux fréquences à Kinshasa sur lesquelles émettent la radio nationale et la FM locale (RTNC2). Dans l’imposante Cité de la Voix du Zaïre, construite avec l’appui de la coopération française et inaugurée en 1978, la radio disposait de dix-sept studios : seuls trois fonctionnent encore aujourd’hui.

L’entreprise audiovisuelle publique traverse une crise profonde, sa situation ne cessant de se dégrader depuis plus de vingt ans

23

. Selon Isidore Kabongo, directeur des programmes de la radio, auteur d’un audit de la RTNC réalisé en 2005 à la demande de Journaliste en Danger (JED), « L’État ne se préoccupe de la RTNC que pour sa propagande. Il n’y a pas de politique de l’audiovisuel public, pas de plan de développement pour la RTNC, pas même de projet

24

. »

21 Jean-Pierre Lifoli, Radio Mwangaza de Kisangani, entretien personnel, mai 2006.

22 L’Ordonnance n° 81-050 du 2 avril 1981 portant création et statuts d’un établissement public dénommé Office zaïrois de radiodiffusion et de télévision (OZRT). Le changement de dénomination de l’office n’a jamais été légale- ment entériné.

23 Voir Georges Tshionza Mata, Les Médias au Zaïre : S’aligner ou périr, Paris, L’Harmattan, 1996, p.23-32.

24 Isidore Kabongo, entretien personnel, Kinshasa, 15 août 2008.

© P. Delchambre

RNTC

Referenties

GERELATEERDE DOCUMENTEN

Néanmoins, le système léopoldien ne change pas fondamentalement. Si Wahis se plaint de ne pas recevoir du Gouvernement de Bruxelles des appréciations sur les mesures prises lors

La perspective comparative privilégiée a été menée en termes de configurations et a systématiquement pris en compte les parcours individuels des journalistes ivoiriens et

Dans cette évocation des symboles nocifs au Rwanda, les différents rapports d’experts loin de régler la question de la misère, de la gouvernance, de la paix et de la sécurité

Il est à la fois une extraor- dinaire évocation, une interrogation sur la complexité du fait révo- lutionnaire et une œuvre dont le lyrisme la hisse aux côtés des grands

En effet, la route des caravanes tracée par Stanley à partir de l’estuaire du fleuve Congo (aux environs de l’actuelle ville de Matadi), débouchait sur le Pool

Mais les choses se présenteront d'une manière bien différente si notre voyageur, quittant le fleuve et les chemins de fer, pénètre dans l'intérieur, s'enfonce dans la grande forêt

• L’industrie manufacturière, c’est connu, est l’apanage de la petite et moyenne entreprise, segment primordial dans la création des emplois(lutte contre le

Journée d’étude avec Deborah Brautigam (American University), Paul Fortin (ancien PDG Gécamines), Stefaan Marysse (Université d’Anvers) et Yenga Mabolia (Ministère des mines de