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Les forteresses de l'âge du fer à Brisy et Alhoumont

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ARCHAEOLOGIA

BELGICA

244

Anne CAHEN-DELHA YE

LES FORTERESSES DE L' AGE DU FER

A BRISY ET ALHOUMONT

A VEC UNE CONTRIBUTION DE A. GAUTIER

BRUXELLES 1981 ' I

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LES FORTERESSES DE L' AGE DU FER A BRISY ET ALHOUMONT

(3)

ARCHAEOLOGIA BELGICA Dir. Dr. H. Roosens

Etudes et rapports édités par le Service national des Fouilles

Pare du Cinquantenaire 1 1040 Bruxelles

Studies en verslagen uitgegeven door de Nationale Dienst voor Opgravingen

Jubelpark 1 1040 Brussel

©

Service national des Fouilles D/1981/0405/13

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ARCHAEOLOGIA

BELGICA

244

Anne CAHEN-DELHA YE

LES FORTERESSES DE L' AGE DU FER

A BRISY ET ALHOUMONT

AVEC UNE CONTRIBUTION DE A. GAUTIER

BRUXELLES 1981

(5)

AVANT-PROPOS

Dans Ie cadre de l'étude de l'occupation de l'Ardenne septentrionale à l'äge du fer que nous avions entamée par l'exploration des sépultures sous tombelles, il convenait d'entreprendre des recherches sur !'habitat. Or, aucun site d'habitat ouvert n'a été découvertjusqu'à présent dans Ie groupe nord-est des tombelles qui s'étend dans les bassins de l'Ourthe orientale et de l'Our, une contrée de 35 km de long sur 18 km de large(!). Néanmoins, cette carenee pourrait être imputée à I' abondance des bois et des prés quine facilite guère la détection de tels vestiges.

Fig. 1. Cartes de situation générale des fortifications d' Alhoumont et de Brisy.

1 A. CAHEN-DELHAYE, Les tombelles de La Tène en Ardenne, Cartes archéologiques de la Belgique, 4, Bruxelles, 1975.

(6)

11

6 AVANT-PROPOS

Par contre, on connaissait quatre sites fortifiés qui par leur configuration et leur taille pouvaient être attribués à l'äge du fer. L'un, Ie Cheslé à Samrée-Bérismenil, logé dans une boude de I 'Ourthe, est protégé par une circonvallation qui isole une importante superficie de douze hectares (2). Les patientes recherches qui y furent entreprises il y a quelques années par Je Cercle Segnia de HouffaJize, ont permis gräce à la découverte de céramiques, de dater l'occupation de la forteresse du début de La Tène.

Par ailleurs, nous avons sondé en 1975 à Vielsalm-Salm-Chäteau la pJace forte du Gros-Thier qui do mine le cours de la Salm. Protégée sur deux flan es par un valium coudé de pierres précédé d'un fossé et sur les deux autres, par d'énormes falaises infranchissables, cette fortification d'un hectare et demi a été datée par Ie radiocarbone aux environs de 410 B.C., soit au début de La Tène(3).

Au sud du plateau des Tailles, l'Ourthe orientale a entamé d'est en ouest le massif schisteux ardennais. La branche orientale de eet affluent de la Meuse a creusé une vallée sinueuse, étroite et encaissée. A vee les ruisseaux qui l'alimen-tent, elle adécoupé des promontoires et des éperons dotés sur plusieurs flancs de pentes raides et de falaises qui constituent une défense naturelle. Si l'on examine la carte orographique du bassin de l'Ourthe orientale, on s'aperçoit que les deux vastes promontoires dotés des meilleures qualités stratégiques ont été choisis pour accueillir une forteresse. Il s'agit des places fortes de Brisy et d' Alhoumont, installées en bordure de la même rivière à 3,3 km de distance l'une de I' autre (fig. 1). Toutes deux sont naturellement défendues sur trois flancs par de fortes dénivel-lations, voire des a-pies qui ont permis de réduire au maximum Je disposif de défense.

2 M. MEUNIER, A. CAHEN-DELHAYE, La fortification du Cheslé de Bérismenil dans Ar -chaeologia Belgica 185, Bruxelles, 1976.

3 A. CAHEN-DELHAYE, Sondages dans la fortification de Salm-Chiiteau (Vielsalm) dans Conspectus MCMLJ(XV- Archaeologia Belgica 186, Bruxelles, 1976, pp. 44-48; 10., Une date radiocarbonede lafortification de Salm-Chiiteau dans Conspectus MCMLXXVI - Archaeologia Belgica 196, Bruxelles, 1977, p. 14.

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L'EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY

Introduetion

Le mérite de la découverte de la forteresse de Brisy revient au Cercle Segnia dont les membres avaient été attirés, il y a une vingtaine d'années, par la présence du toponyme révélateur de Chession qui désigne la rive opposée à 1' éperon (4). On suppose dès lors que Ie lieu-dit s'appliquait autrefois à l'éperon barré avant de subir un transfertau profit du chemin qui, du hameau de Brisy, menait au site. Celui-ei porte actuellement la dénomination de Derrière la Vote ouDrî l' Vote qui désigne Ie tournant de la rivière (5).

La fortification de Brisy n'avait fait l'objet d'aucune investigation archéolo-gique. Lorsqu'en 1974, une partie du site fut mise en coupe et replantée aussitöt de petits épicéas, Ie Cercle Segnia invita Ie Service national des Fouilles à y entre-prendre des recherches et se chargea à eet effet d'obtenir les nombreuses autorisa-tions exigées par le moreelkment étonnant du parcellaire(6).

L'exploration s'est déroulée en deux campagnes du 12 août au 13 septembre 1975 et du 25 juin au 8 juillet 1976 C). Elle a malheureusement été entravée par la présence de grands épicéas qui couvraient la moitié occidentale du site et qu'il ne nous a pas été permis d'abattre. A I' occasion de nos travaux, Ie relevé hypsométri-que détaillé de l'éperon a été dressé par le géomètre Jachypsométri-ques Laurent.

Le site

L'éperon est localisé à l'extrérnité méridionale de la commune de Cherain actuellement incorporée à la nouvelle entité de Gouvy. Il s'élève à 1300 m au sud du hameau de Brisy et est accessible par deux routes qui longent le pied du promontoire, l'une reliant Brisy à Cetturu tandis que l'autre mène à Bihain. Une boucle de l'Ourthe orientale borde ses flancs nord et ouest et un petit affluent qui a

4 Ardenneet Famenne, 1958, pp. 25, 62, 73-74; 1965, p. 67, note l.

5 Nous devons Ja recherche toponymique à M. Philippe Lejeune que nous remercions; voir A. CARNOY, Origines des noms des communes de Belgique, li, 1949, p. 716.

6 La place forte occupe essentieHement les parcelles 176, 174 et 175 de Ja section D. 7 A. CAHEN-DELHAYE, Eperon barré à Cherain-Brisy dans Conspectus MCMLXXV-Archaeologia Belgica 186, Bruxelles, 1976, pp. 49-51; ID., Seconde campagne defouilles dam l' éperon barré de Cherain-Brisy dans Conspectus MCMLXXVI - Archaeologia Belgica 196, Bruxelles, 1977, pp. 33-36. A I' occasion des fouilles, nous avons bénéficié de I' dïc:e matérielle des membres du Cercle Segnia que nous remercions vivement. Sur Ie terrain, nous avons été aidée pardeux archéo1ogues, Mlles Marie-C1aude Van Grunderbeek et Ariane Bau1ois ainsi que par M. Henri Gratia. Notre gratitude s'adresse enfin à I' Abbé Bihain, de Laneuville, aux families Jacqmin-Miliche et Simonis et à la Fabrique d'Eg1ise de Rettigny qui ont aimablement accordé les autorisations de fouille.

(8)

::.:::::::: fossé

.1.11,-.l.t levée

0 60m

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Fig. 2. Relevé hypsométrique de l'éperon barré de Brisy et plan de ses structures défensi-ves; tranchées ouvertes en 1~75 et 1976.

(9)

EPERON BARRE DE CHERAJN-BRISY 9

creusé une profonde vallée coule en conteebas du bord méridional. Notons en outre qu'un misseau plus important qui a créé un large vallon, se jette au milieu de la boude de l'Ourthe face à l'éperon (fig. 1). Le promontoire s'élève à une soixan-taine de mètres au-dessus de la rivière, Ie point culminant du refuge atteignant la cote de 422,50 m (fig. 2). Ses flancs présentent des pentes escarpées dont l'incli-naison excède souvent 50% et une falaise d'une dizaine de mètres à l'ouest.

Le système défensif

L'éperon est barré par deux levées rectilignes précédées chacune d'un fossé jointif, soit quatre structures accolées et orientées selon un axe N .N.E-S.S.O. (pl. I). Ces retranchements sont dans un bon état de conservation; seul un chernin de halage qui rejoint la route de Bistaio a ravalé localement les structures (fig. 2). Le quadrupJe barrage présente une largeur totale de 18 à 28 m pour une longueur de 158 met ses deux extrémités rejoignent les escarpements. Néanmoins, le fossé extérieur semble s'interrompre sur quelque 70 m dans le secteur méridio-nal. IJ convient de noter qu'aucune berme oe sépare actuellement les murailles des fossés.

Les retranchements délimitent une foeteresse de plan quadrangulaire dont Ie contour épouse le bord du plateau. Comme les a x es atteignent 190 et 120 m maximum, la superficie dispooibie peut être évaluée à un hectare et demi. Le terrain incliné vers I' ouest est assez irrégulier par endroits.

L'approvisionnement en eau devait être assuré par une souree qui sourd sur Ie flanc septentrional, exactement à 23 m au oord du fossé extérieur (fig. 2).

Nous avons recoupé les quatre structures défensives au sommet du promon-toire, à 1' endroit ou leur hauteur et leur largeur sont les plus importantes (8) (fig. 3). La tranchée a révélé deux fossés taillés dans Ie banc rocheux parallèlement au elivage du schiste. Ces fossés sont munis de parois presque verticales et d'un fond horizontaL Larges de 2,80 m, ils s'enfancent de 1,20 à 1,10 m de profoorleur et sont naturellement comblés par les matérieux issus des remparts qui les flanquent: des lamelles de schiste amoncelées (fig. 3, en a) qui alteenent avec des paquets de terrè jaune peu caillouteuse (en b). Sur le fond du fossé extérieur, nous avons recueilli u oe grosse branche de bois de 0, 10 m d' épaisseur et 0, 80 m de long qui a brûlé surplace à en juger par la finecouchede terre rougie sous-jacente. Soumis à ]'analyse au radiocarbone, le bois calciné a livré la date non calibrée de 1970

±

65 B .P., soit 20

±

65 B. C. (9). Au fond de 1' autre fossé gisait un clou en fer qui pourrait avoir appartenu à une superstructure en bois .

. 8 Notons que la tranchée a été décalée de 8° de la perpendiculaire exacte, en raison de la végétation.

9 Hv 7362·. Analyse effectuée par le laboratoire de carbone 14 du Niedersächsisches

(10)

10 EPERON BARRE DE CHERAIN-BRJSY

0 5m

B

(11)

EPERON BARRE DE CHERAlN-BRISY 11

Les remparts présentent un profil en dos d'äne (fig_ 3)_ IJs ont été élevés à

I' ai de des matériaux extraits des fossés si l' on en ju ge par I' empilement désordonné les lamelles de schiste mêlées à de la terre_ Ce remblai renferme en outre quelques moellons dont la plupart apparaissent au sommet, dans la couche d'humus_ Nous n'avons pas décelé de trace de combustion ni de pieu_

La levée extérieure présente une hauteur réduite de 0,85 m pour une largeur de 8 m_ Elle est constituée de bas en haut, d'une couche haute de 0,45 m de terre mêlée à un abondant cailloutis de schiste (fig. 3, en c) que recouvre une strate de 0,20 m de lamelles de schiste mélangées à de la terre jaune et contenant quelques bloes de schiste et de quartz (en d), letout surmonté d'une couche d'humus_

La levée intérieure est plus importante puisqu'elle atteint une hauteur de I ,40 m pour une largeur de 12 m. Elle est formée d'une couchede terre brune assez compacte et peu caillouteuse, haute de 0,30m (en e) sur laquelle repose un amoncellement de lamelles de schiste de 0,95 m (en f) recouvert d'une strate

d'humus.

La dénivellation entre Ie fond des fossés et Ie sommet des remparts atteint actuellement 2 et 2,50 m respectivement maïs était certainement supérieure à l'origine.

A l'altitude la plus élevée de l'éperon, les levées et fossés s'interrompent et signalent l'accès antique à la fortification. A eet endroit, les deux extrémités des levées méridionales sont élargies et une plate-forme de 9 sur 14 m de cöté prolonge l'élargissement intérieur (pl. I). L'entrée se présente sous la forme d'un couloir

long de 27 m et large de 3 à 6 m qui n'est pas rigoureusement perpendiculaire à l'axe des retranchements car la partie interne oblique vers Ie nord (fig. 4). Notons qu'aucun chemin ne l'emprunte actuellement.

Le boisement assez dense de l'entrée a constitué un obstacle à son exploration limitée à quatre tranchées d'une surface totale de 62m2. De plus, les quelques

vestiges qui subsistaient étaient mal conservés_ Au sud-ouest, on a retrouvé une assise d'un mur rectiligne de 11 m de long et 0,50 m de large présentant un parement de moellons posés à plat (fig. 4, en d); Ie faible enfouissement et I' orientation quine s' identifie pas a vee I' axe de I' entrée pourraient laisser supposer que Ie mur est postérieur aux structures défensives.

Au nord de l'entrée sont apparus trois trous de pieu dont l'un s'ouvrait sous I' extrémité du rempart intérieur qui s 'était affaissé dans Ie passage (fig. 4). IJ s' a git de cavités ovalaires régulièrement taillées dans Ie schiste, à paroi verticale et fond plat (1°) _ Letrou as' ouvre dans I' axe même du rempart intérieur tandis que lestrous b et c sont localisés en bordure de son extrémité septentrionale; tous trois ont pu accueillir un montant de porte. Notons que Ietrou c renfermait queiques charbons

10 Dimensions des trous de pieu: a: 68 x 56 cm d'axes, prof, 27 cm, (dans la roche en

(12)

12 EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY

···-.42;., ···--....

Fig. 4. Plan de l'entrée et des tranchées qui y furent ouvertes.

de bois, des esquilles d'os incinérés de même qu'un petit tesson, éparpillés dans ie remblai. Nous avons retrouvé en outre des traces d'un petit foyer de 0,40 m de diamètre, sur Ie sol en place, à 1 m à l'est dutrou a (en e).

Pour tenter de déterrniner la largeur exacte de l'entrée en fonction de I' inter-ruption du fossé intérieur, nous avions suivi celui-ei sur plusieurs mètres. Malheu-reusement, la limite du fossé n' était pas nette; la cavité se rétrécissait jusqu' au milieu de l'entrée suggérant que le passage aurait pu être très étroit.

Un bord de vase très significatif a été recueilli dans l'entrée. 11 appartient à une marmite dénommée << Kurkurn >>, caractéristique de la phase III de La Tène ( cf.

(13)

EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY 13

En plus des remparts et des fossés, les constructeurs de la forteresse ont, à l'extérieur du site protégé, redressé Ie sommet du flanc méridional du plateau sur une longueur de 57 m (fig. 2). Cette structure située à 65 m au sud-est du rempart a été aménagée à un endroit ou la déclivité était faible et aurait permis l'accès à la fortification par Ie flanc. La coupe a montré qu'elle était constituée d'un amoncel-lement de lamelles de schiste qui atteignait une hauteur de 1 ,05 met était maintenu par un rang de gros moelloos à la rupture de pente. A la base de ce remblai, nous avons recueilli une épaisse plaque de fer.

Sur les trois au tres flan es de la forteresse, nous n' avons décelé aucune trace de structure défensive en bordure des escarpements dont l'inclinaison est cependant insuffisante pour rendre Ie site inaccessible.

Le dépotoir

A l'intérieur du fortin, nous avions découvert un bourrelet parallèle et tout proche du rempart intérieur (pl. I). Il s'agit d'une petite levée haute de 0,50 m, large de 6 m et dont la longueur atteint 9 m. En la recoupant, nous avons compris qu'elle constituait Ie rejet d'une grande fosse qui la bordait et qui avait servide dépotoir. La coupe stratigraphique de la levée a révélé un remblai de terre jaunätre mêlée de lamelles de schiste qui repose sur une lentille de terre greige assez fine et compacte, non caillouteuse.

Lafosse qui est pratiquement accolée au rempart intérieur s'étend sur 10 m de long pour 3 ,20 m maximum de large et s 'enfonce en cuvette à 0, 70 m dans Ie sol en place constitué par Ie banc schisteux. Le fond est irrégulier car des bloes particu-lièrement durs forment des crêtes parallèles de quelque 0,25 m de saillie. Le remblai comportait, sous une couche d'humus de 0,30 m d'épaisseur (fig. 5, en a) une strate de terre jaunätre assez caillouteuse et tendre, de 0,25 à 0,45 m d'épais-seur, stérile (en b). Le matériel archéologique gisait dans les couches sous-jacen

-tes: une terre brune à gris foncé, un peu caillouteuse et renfermant de gros moelloos présentait une hauteur de 0,35 à 0,45 met était localement colmatéeau sommet par des plaques de schiste posées horizontalement (en c); en dessous, une couchede terre grise ou noire, tendre et dépourvue de cailloux atteignait une hauteur maxi-mum de 0,30 m (en d). Enfin, une lentille stérile de terre jaune assez caillouteuse tapissait Ie fond et les flan es de la fosse (en e).

Ce dépotoir a livré un matériel assez abondant éparpillé uniformément dans les couches c et d: en effet , nous n' avons pas distingué de différence de nature ou de type de vestiges selon les couches et les secteurs de lafosseet des tessons jointifs furent recueillis à plusieurs mètres de distance et dans des niveaux distincts. La fosse renfermait quelques petits fragments de torchis greiges ou orange dont la plupart se sont désagrégés lors de leur prélèvement, et plusieurs morceaux de tuiles à päte tendre, orange clair, deux matériaux qui attestent la présence de construc-tions dans Ie fortin. Par ailleurs, on y a recueilli des os incinérés de porc,

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14 EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY

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EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY 15

d'ovi-caprin, de breuf et même d'un grand chien (cf. infra p. 43) tandis que plusieurs kilos de grosses scories de fer et une petite de bronze témoignent de la pratique de la métallurgie sur Ie site même. Des charbons de bois de chêne, hêtre, érable, frêne et aulne ont été soumis à !'analyse au radiocarbone qui a fourni Ia date

non calibrée de 2105

±

80 B.P., soit 155

±

80 B.C (11). Enfin, le dépotoir

contenait douze fibules ou fragmentsen bronzeet en fer, divers objets métalliques, deux aiguisoirs et trois galets de rivière auxquels s'ajoutent 7,5 kilos de céramiques assez variées façonnées tantöt à la main, tantöt au tour, soit un total de 731 tessons.

Le matériet du dépotoir Bronze (fig. 6)

1. Anneau fragmentaire. Diam. 24 mm. Deux fragments constitués d'une

fine lamelle.

2. Fibule du type de Nauheim (fig. 6, en 2). Long. préservée, 62mm. Are

brisé en deux fragments, porte-ardillon manquant, ardillon sectionné près du ressort, patine vert clair, pellicule extérieure effritée. L'arc est une lame losangique

étroite et légèrement courbée à la tête, rehaussée d'un zigzag Iongitudinal incisé;

ressort nu et bilatéral, à quatre spires réunies par une corde intérieure à I'arc. 3. Fibule incomplète. Long. préservée, 25 mm. Corps de l'arc sectionné,

ardillon et porte-ardillon manquants, pièce extrêmement corrodée, pellicule

exté-rieure effritée. Type apparenté au précédent maïs corde externe et are décoré de deux zigzags latéraux incisés.

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4 Fig. 6. Fibules en bronze recueillies dans Ie dépotoir. Ech. 2/3.

11 Identification des essences assurée par les laboratoires de l'Institut royal du Patrimoine

artistique et analyse au radiocarbone réalisée par Ie laboratoire de carbone 14 du Nieder-sächsisches Landesamt für Bodenforschung à Hanovre (Hv 7361).

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16

5

EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY

9

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Fig. 7. Fibules et matériet en fer du dépotoir. Ech. 2/3: n°5 5 à 13; 1/3: n°5 14 à 16.

(17)

EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY 17

4. Fibule. Long. 69 mm. Ressort tordu, porte-ardillon très abîmé, patine vert clair, pellicule extérieure effritée. Are filiforme de section ovalaire régulièrement cintré, ressort nu et bilatéral, à quatre spires réunies par une corde interne; ardillon rectiligne.

Fer (fig. 7)

5. Fibule (fig. 7, en 5). Long. 91 mm. Complète mais profondémentoxydée. Are filiforme de section circulaire, courbé à la tête, ressort bilatéral, nu et muni d'une corde interne, porte-ardillon assez grand, triangulaire et percé d'un ajour allongé, ardillon cintré.

6. Fibule. Long. 61 mm. Complète mais assez corrodée. Apparentée à !'exemplaire n° 5 mais plus petite, avec ressort à trois spires et corde externe.

7. Fibule. Long. préservée, 58 mm. Mauvais état de conservation: are et ardillon fragmentaires et la corde du ressort manque. Type analogue au précédent.

8. Fibule incomplète. Long. préservée, 69 mm. Are et ardillon sectionnés, porte-ardillon manquant. Apparentée à la fibule n° 5 mais ressort asymétrique.

9. Fibule. Long. 64 mm. Ardillon brisé, pièce assez corrodée. Are filiforme à peine cintré, porte-ardillon plein, ressort nu bilatéral à quatre spires et corde interne.

10. Fibule incomplète. Long. préservée, 57 mm. Are, porte-ardillon et ar-dillon brisés, pièce très oxydée. Are filiforme coudé à angle droit près du ressort, celui-ei est nu, bilatéral et muni de quatre spires avec corde interne.

11. Fibule incomplète. Long. préservée, 41 mm. Are et ardillon brisés, porte-ardillon fragmentaire, pièce très corrodée. Apparentée à la fibule n° 10, mais plus petite.

12. Fragment de fibule. Long. 14 mm. Il ne subsiste que trois spires du ressort et un fragment tordu de I'arc.

13. Fragment de fibule. Long. 23 mm. On possède trois spires du ressort et Ie départ de l'arc filiforme.

14. Ciseau de menuisier (?).Long. 104mm. Il s'agit d'une épaisse tigede

section quadrangulaire arnincie à une extrémité.

15. Couteau à soie (?).Long. 112 mm. La pièce comporte une lame triangu-laire épaisse, un peu amincie d'un cöté et une tigede section quadrangutriangu-laire.

16. Tige à extrémité courbée. Long. 156 mm. Section quadrangulaire. - Anneau ouvert aminci aux extrémités. Diam. 35 mm.

- Lame rectangulaire. Long. 51 mm.

- Deux plaques se chevauchant. Long. 77 mm. - Disque bombé. Diam. 22 mm.

- Plaques traversées par deux clous à tête quadrangulaire. Long. 54 mm. - 5 clous. Long. 96 à 40 mm. Section quadrangulaire ou arrondie, tête discoïde ou quadrangulaire.

(18)

18 EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY

74 tiges diverses de 84 à 15 mm. Trois sont coudées. Section quadrangulaire en

général.

- 9 fragments de plaques.

- 7 rubans de 15 mm de large maximum.

Pierre

- Aiguisoir ou broyeur en grès. Long. 138 mm. Forme irrégulière. Quatrefaces

lissées.

- Aiguisoir en grès. Long. 78 mm. Forme triangulaire à un cöté sectionné. Lissé

sur toutes les faces.

- Dé à jouer (?) en quartz. Cöté, 8 mm. IJ s'agit d'un cube régulier aux faces

Iisses.

Terre cuite

- Deux dés à jouer (?). Cöté, 7 et 8 mm. Cubes aux faces Iisses.

Céramique de qualité

a. Fine poterie orangée: 25 tessons (fig. 8, n° 1). Il s'agit d'une céramique

façonnée à l'aide du tour de potier, à päte fort homogène et très dure, sans

dégraissant visible. La surface parfaitement Iisse et plane est souvent lustrée; de

couleur orangée, les parois sont particulièrement fines, leur épaisseur n'excédant pas 5 mm. On ne possède pas de bord mais deux tessons jointifs sont décorés de

plusieurs rangs de fin es et légères incisions obliques et parallèles ( n° 1).

b. Fine poterie noire: 34 tessons (fig. 8, n°5 2 à 4). La céramique noire de

qualité est également tournée. La päte très homogène et durene contient

apparem-ment pas de dégraissant. La surface est bien aplanie, poreuse à l'intérieur mais Iisse

et lustrée à l'extérieur. Le noyau est gris et la surface noirätre. Plusieurs fragments

portent un décor de larges incisions qui moulurent la surface (n° 2). La plupart de

ces tessons semblent appartenir à un grand récipient à bord rentrant Un fragment

de vase qui présente un marli légèrement courbé appartient à une terrine (n° 3) et un

autre, simplement évasé, provient d'un vase pansu (n° 4).

Céramique utilitaire

c. Poterie ordinaire: 122 tessons (fig. 8, nos 5 à 13). Tantöt façonnée au tour,

tantöt montée à la main, la céramique ordinaire a une päte homogène, dure et renferme un peu de fine chamotte. La surface est bien aplanie, Iisse ou légèrement

poreuse, non lustrée. La couleur est soit grise, soit greige, sinon brune. Plusieurs

bords sont simptement évasés ou courbés vers l'intérieur. Deux fragments

appar-tiennent à des coupe et terrine ruunies d'une lèvre repliée vers l'intérieur (n°5 5 et 6).

Un grand tesson provient d'une bouteiJle qui présente un léger bourrelet horizontal

(19)

T

16 17 24 6) Ech. 1/3. 1 , 25) et de J'entrée (no 2 . . (nos a . du dépotoir . 8 Cérarruque F1g. ·

(20)

20 EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY

avaient une panse bombée (nos 8 et 9). Enfin, deux autres possèdent une lèvre repliée vers l'intérieur et munie d'un petit rebord épaissi en boudin qui s'apparente aux marmites de poterie commune (nos 10 et 11). La plupart des fonds sont plats (n° 12) sauf un doté d'un anneau de base saillant (n° 13).

d. Poterie commune: 550 tessons (fig. 8, nos 14 à 25). Cette demière catégo-rie largement majoritaire est une céramique façonnée sans l'aide du tour de potier. La päte présente une structure bi en particulière; légère, peu homogène et assez tendre, elle est criblée de petits trous dans la masse et contient de la chamotte. La surface poreuseet souvent craquelée a été aplanie à l'aide d'un ébauchoir donton distingue les empreintes. La eauleur est généralement grise, parfois greige. Un seul tesson est décoré d' en coches obliques faites au poinçon et disposées en arêtes de poisson (n° 14). Une vingtaine de tessons offrent une surface extérieure très rugueuse vraisemblablement obtenue par l'érosion sous l'eau de la päte crue du vase (n° 15). Quelques fragments de panse portent de légères stries parallèles verticales tracées au peigne (nos 24-25). A l'exception d'un moreeau de vase à lèvre évasée (n° 16), tous les bords appartiennent au même type de récipient. Il s'agit d'un pot de grandes dimensions à long rebord plié vers l'intérieur et pourvu d'une lèvre épaissie en boudin (nos 17 à 23). Des variantes apparaissent dans 1' angle plus ou moins prononcé que forrne le re bord et dans 1 'épaisseur de la lèvre. Le fond de ce type de récipent est plat (n° 24). Notons enfin qu'un vase a été réparé à l'aide d'une cheville en fer (n° 25).

Le matériel recueilli hors du dépotoir

- Dans l'entrée: un fragment de poterie commune à longue lèvre pliée vers l'intérieur (fig. 8, n° 26).

- Dans le fond du fossé intérieur: un clou en fer. Long. 50 mm. Tigede section quadrangulaire et tête carrée.

- A la base de la structure extérieure à la fortification: plaque quadrangulaire en fer. Long. 46 mm.

Examen du matériel

Les vestiges métalliques recueillis dans Ie dépotoir de la forteresse de Brisy camportent peu d'ustensiles et d'outils mais un nombre exceptionnel de fibules. Or, celles-ei foornissent de précieuses indications chronologiques car leur forrne qui s'est régulièrement modifiée au fil des siècles sert de fossile directeur. Une seule de ces broches (n° 2), en bronze, appartient au type de Nauheim tel que l'a défini M. J. Werner(12); une deuxième (n° 3) pourraitrentrerdans cette catégorie si 12 J. WERNER,Die Nauheimer Fibel danslahrbuch des Römisch-Germanische Ze ntra/mu-seum Mainz 2, 1955, pp. 170-171.

(21)

EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY 21

la corde du ressort n'était pas externe. Les autres fibules sant apparentées au type de Nauheim maïs en diffèrent essentieHement par leur are filiforme(13). Celui-ei

est tantöt cintré, tantöt coudé dans la partie supérieure; le ressort taujours nu et souvent bilatéral comporte généralement quatre spires maïs est parfois réduit à trois, la corde étant soit externe, soit interne. Enfin, Ie porte-ardillon est souvent percé d'un ajour et l'ardillon est rectiligne ou courbé. Dans les sépultures contem

-poraines du bassin du Rhin moyen, les fibules appartenaient aux femmes et étaient portées par paires. Les exemplaires de Nauheim connurent une airede dispersion géographique très étendue puisqu 'ils sant attestés de la Moravie à la Grande Bretagne et de l'Espagne à l'Europe septentrionale(14). En Belgique, ils

apparais-sent en Lorraine à Tontelange(15), en Famenne à Han-sur-Lesse(16) et en Hesbaye

à Marilles et Ways (17). La chronologie de cette production massive et stéréotypée a fait l'objet de plusieurs études. En 1955, M. Werner a daté précisément ces fibules entre 50 et 15 avant notre ère et le nom de Nauheim désigna dès lors la seconde moitié de la phase III de La Tène. Maïs récemment, MM. Furger-Gunti et Haffner ont démontré stimultanément, en examinant le matériel recueilli à Bäle d'une part et dans le Rhin rnayen de l'autre, que Ie type de Nauheim est apparu au début du Fr siècle avant notre ère(18 ). Quant aux dérivés filiformes qui reçoivent souvent !'appellation de Nauheim, ils auraient également été en faveur tout au long de la phase III de La Tène (19).

La céramique recueillie dans le dépotoir de la forteresse est particulièrement fragmentaireau point qu'aucun profil complet n'a pu être restitué. Elle comporte des tessons de vases montés soit à la main, soit au tour de potier et de qualité très

13 Cf. J. COLLIS, Defended sites ofthe Late La Tène dansBAR Supplementary Series 2,

1975, type 9, pp. 59, 64.

14 Op.cit., pp. 57, 59, 64.

15 P.P. BoNENFANT, Sépultures trévires à Tantelange dansAnnales del' lnstitut Archéolo-gique du Luxembourg, XCII, 1961, fig. 7, n°s 51 et 8 (= Archaeologia Belgica 57).

16 M.-E. MARIËN,Le Trou de l'Ambre auBois de Wérimont Eprave, Bruxelles, 1970, fig. 78.

17 J. etL. MERCENIER,Marilles. Découverte d'unfond decabanede l' extrêmefinale de La

Tène lil au'' Haut Tiège >> dansHesbaye-Condroz, IV, 1963, p. 58, n° 12 et p. 59; S.J. DE LAET, Prehistorische Kulturen in het Zuiden der Lage Landen, Wetteren, 1974, p. 492. 18 A. FuRGER-GUNTI, Zur Herstellungstechnik der Nauheimerfibel dansRegio Basilensis, XVIII, 1977, p. 82, note 26; A. HAFFNER, Zum Ende der Latènezeit im Mittelrheingebiet unter besonderer Berücksichtigung des Trierer Landes dansArchaeologisches Korrespon -denzblatt, 4, 1974, p. 69.

19 On trouvera des parallèles dans une tombe à char d' Armentières en Picardie datée du

début du 1er siècle avant J.-C.: M.E. MARIËN, La période de La Tène en Belgique. Le Groupe de la Haine, Bruxelles, 1961, fig. 68, n°s 1 à 4; A. DuvAL, J.-Cl. BLANCHET, Le deuxième

a

ge du Jer ou époque de La T ène en Picardie dansRevue archéologique de l' Oise,

n° 7, 1976, p. 53; voir aussi J.J. HATT, P. RouALET, La chronologie de La Tène en

(22)

'

22 EPERON BARRE DE CHERAlN-BRJSY

variabie . Toutefois, la majorité des fragments appartiennent à des récipients dont la facture peu soignée révèle leur destination utilitaire.

La forme des vases de Brisy évoque indéniablement la céramique

gallo-ro-maine précoce. Ainsi, Ie tesson n° 1 de fine poterie orangée rehaussé de plusieurs rangs de guillochis peut être rapproché tant par la eauleur que par la finesse de la paroi et le type du décor à la terra rubra et particulièrement aux vases ovoïdes taujours munis d'une longue lèvre évasée et parfois d'un anneau de base, datés des règnes d' Auguste et de Tibère(2°).

Le bord n° 2 de fine poterie noire rehaussé de légers bourrelets horizontaux trouve également des parallèles dans la céramique beige. Il rappelle les gobelets de

terra nigra de la grande nécropole trévire de Wederath située à une centaine de km

au sud-est de Brisy (21).

Dans la poterie ordinaire, on relèvera la présence d'un fragment de bouteille (n° 7) muni d'un fin bourrelet à lajonction de l'épaule et du col, qui ressemble au vase lustré de la sépulture 112 de Wederath; or celle-ci renfermait des fragments de plusieurs fibules identiques à !'exemplaire n° 3 de Brisy(22).

La présence d'un anneau de base en saillie sur la panse (n° 13) est souvent

attestée dans la céramique beige.

Enfin, la forme de vase la plus courante à Brisy (n°5 17 à 23 et 26) est sans

conteste la marmite à ouverture rétrécie du type de Haltem (23 ), aussi appelée

<< Kurkurn ,, qui apparaît dans de nombreux sites d'habitat et plus rarement dans les

sépultures. Ancêtres du dolium romain, ces récipients utilitaires à päte peu homo-gène et légère et dotés d'un long rebord plié vers l'intérieuret d'une lèvre en boudin furent abondants en Angleterre tout comme en Allemagne ou ils sont attestés depuis la phase III de La Tène jusqu'au règne de Claude(24). En Belgique, on les retrouve en Lorraine à Heinsch(25), en Famenne à Han-sur-Lesse ou ils sont

20 Il s'agit des types 340 et 341 de E. GosE, Gefässtypen der römische Keramik im

Rheinland, 3" éd., 1976, pl. 26, p. 30.

21 IJs proviennent des sépultures 5 506 et 315: A. HAFFNER, Das keltisch-römische

Gräberfeld van Wederath-Belginum, Mayence, vol. 2, 1974, pl. 151, n° 20; vol. I, 1971,

pl. 77, n° 13.

22 Ibid., vol. I, pl. 25, n° 14.

23 S. LOESCHCKE, Keramische Funde in Haltem dans Mitt. Altertums-Kommission für

Westfalen, 5, I 909, pp. 240-241.

24 B. CuNLJFFE, T. RowLEY éd., Oppida in Barbarian Europe dans BAR Supplementary

Series II, 1976, p. 229, fig. 15, n° 2; D.W. HARDING éd., Hillforts, Later Prehistorie

Earthworks in Britain and lreland, Londres-New York-San Francisco, 1976, p. 389, fig. 19, n° 4; E. GosE, op.cit., p. 31, type 355.

25 J. NüËL, Une sépulture de La Tène à Stockem (commune de Heinsch) dans Bulletin

trimestriet de l'lnstitut Archéologique du Luxembourg, XLIX, 1973, fig. 4, n° 4.

!

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11

I

EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY 23

associés aux fibules de Nauheim et à Rochefort(26), en Condroz à Saint-Gérard (27) et en Hesbaye à Namur, Tongres, Marilles et Liberchies(28).

Notons encore que le décor en arêtes de poisson (n° 14) est également attesté dans la céramique beige des camps romains d'époque augustéenne et tibérien-ne(29).

Synthèse

Le choix du site de Brisy témoigne d'une bonne connaissance de la région. En effet, ce promontoire logé dans une boucle de l'Ourthe présentait une défense naturelle avantageuse sur trois flancs. Néanmoins, aucun d' entre eux n 'est inacces-sible comme l'indique notamment Ie chemin de halage qui emprunte le flanc septentrionaL Aussiest-il permis de croire que Ie sommet de l'éperon était alors protégé par une palissade en bois dont nous n'avons cependant pas décelé de trace ou par d'épaisses haies d'arbustes épineux.

Le promontoire offrait aux accupants 1' avantage de passéder une souree située en bordure du plateau. La superficie de la place forte qui atteint un hectare et demi devait être suffisante pour accueillir une communauté qui aurait pu subsister gräce à la pratique de l'agriculture et de l'élevage.

Les structures défensives qui furent élevées à Brisy n' ont pas requis un très grand effort des constructeurs; la technique est particulièrement simple puisqu 'elle a consisté à empiler sans ordre les matériaux extraits du fossé contigu. Ce type de construction est bi en connu par Ie célèbre oppidum de Fécamp sur la Seine qui lui a donné son nom et que les Anglais appellent <<dump rampart >>. Les levées sont assez peu élevées, les bätisseurs ayant préféré construire deux remparts de hauteur modeste plutot qu'un seul de dimensions importantes. Aussi, ces retranchements ne pouvaient constituer une défense valable que s'ils étaient surmontés d'une palissade axiale installée au sommet et flanquée d'un chemin de ronde qui n'ont apparemment pas laissé de trace. L'absence de tout vestige d'incendie dans les levées laisse supposer que la forteresse n'a pas connu de vicissitude particulière.

26 M.E. MARIËN, op. cit. (Eprave), fig. 72; L. PIRNAY, J. et P. LAUSBERG, A. CAHEN-DELHA YE, Sauvetage d' un « marchet » à Roehefort dans Conspectus MCMLXXVIJ

-Archaeologia Belgica 206, Bruxelles, 1978, fig. 24, pp. 44-47.

27 (A. RossE), Les sépultures gauloises des Mazy à Saint-Gérard dans Annales de la

Société Archéologique de Namur, 57, 1975, pp. 41-43, fig. 4.

28 Ibid. p. 50; W. V ANVINCKENROYE, Galla-Romeins aardewerk van Tongeren, Tongres,

i 967, type 26, pp. 25-26, pl. 5; J. etL. MERCENIER, loc. cit., p. 58, 0° 5 etp. 56; R. BRULET,

Fossés d' époque augustéenne à Liberchies dans Documents et Rapports de la Société royale d'Archéologie et de Patéontologie de Charleroi, LIV, 1969, fig. 5, n°5 5-6. 29 Ce décor apparaît sous forme d'incisions à Brisy maïs il est peint sur les parallèles du pays de Trèves: E. GosE, op.cit., p. 29, pl. 25, n°5

(24)

24 EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY

Actuellement, il n'y a pas de berme entre les levées et les fossés mais il est plausible qu'elles furent jadis aménagées pour faciliter la défense.

Dans nos régions, les éperons protohistoriques protégésparun double barrage sont fréquents. En Ardenne, on citerales forteresses du Tî Chateau à Hotton, en bordure de l'Ourthe, et du plateau des "Cinkes » à Olloy-sur-Viroin (3°). Nousen connaissons deux en Lorraine: La Dent de Chien à Buzenol et Le Gros Cron à Bellefontaine(31). Mais seule, la fortification de La Cour du Chestia à Presgaux,

sur l'Eau Noire, possède un double retranchement jointif(32).

Une seule entrée a été décelée au sommet de l'éperon, ce qui n'exclut pas la présence d'une poterne qui aurait pu être ensevelie lors de l'affaissement des murailles.' Le passage se présentait sous la forme d'un couloir étroit prolongé par l'élargissement du rempart intérieur tout comme dans certaines forteresses proto-historiques d' Angleterre. Les quelques sondages que nous y avons pratiqués laissent penser que les structures qui en assuraient la proteetion n'étaient guère complexes.

Le nombre réduit de vestiges matériels découverts dans la fortification laisse supposer une accupation de durée assez brève. Les scories recueillies dans le dépotoir révèlent qu'on a pratiqué la fonte du métal à Brisy tandis que les rares fragments de torchis et de tuiles témoignent de la présence de quelques construc-tions. Enfin, les ossements calcinés nous renseignent sur la composition du cheptel: porcs, breufs et ovi-caprins constituaient l'alimentation carnée des occu

-pants.

Les résultats de l'analyse au radiocarbone des bois prélevés dans le fond du fossé et dans le dépotoir, 20

±

65 B. C. et 155

±

80 B. C. , correspondent parfaite-ment à la datation du matériel archéologique. En effet, !'ensemble des vestiges recueillis dans la forteresse situe 1' occupation au cours du 1 er siècle avant notre ère.

Les fibules du dépotoir sont attestées pendant toute cette période mais la céramique très proche de la poterie gallo-romaine précoce rnilite en faveur d'une datation dans la seconde moitié du siècle. D' autre part, la nature de 1 'habitat doit correspondre à une période troublée telle la fin de La Tène qui fut marquée par la conquête romaine et les bouleversements qui s'ensuivirent. Toutes les données chronologiques

révè-30 L. DIERICK,Hottonpréhistorique dansArdenne etFamenne, XII, 1972, pp. 10-11; J.M.

DoYEN, Olloy-sur-Viroin (Nr) :fortification del' éige dufer dans L' Archéologie en Wallo-nie. Catalogue d' exposition, 1980, pp. 67-68; Y. GRAFF, << Oppida" et<< Castella" au pays des Belges dans Celticum, VI, 1963, fig. 8 et 12.

31 A. CAHEN-DELHAYE, Le refuge protohistorique du Gros Cron à Bellefontaine dans Conspectus MCMLXXVIII- Archaeologia Belgica 213, Bruxelles, 1979, pp. 72-76.

32 R. BRULET, La fortification << protohistorique" de Presgaux dans Documents et rap-ports de la Société royale d' Archéologie et de Paléontologie de Charleroi, LVII,

(25)

EPERON BARRE DE CHERAIN-BRISY 25

Jent que la fortification n'a connu qu'une seule période d'occupation contempo-raine de la constructiono Notons cependant que plusieurs sites de hauteur voisins furent fortifiés à des époques ultérieures mais leur superficie réduite devait per-meure une défense plus efficace (33)

0

33 11 s'agit du Vieux Cháteau àMont-Sommerain qui aété occupé au Bas-Empire romain et

au haut moyen äge et du Vieux Chàteau à Houffalize, également habité sous la domination

romaine: Jo MERTENS, Ro BRULET,Le «Vieux Chdteau» de Sommerain à Mont dansRevue

des Archéologues et des Historiens d'Art de Louvain, VII, 1974, ppo 30-58; Mo MEUNIER,

Le '' vieux-chdteau » d' Houffalize 0 Petite contribution à l' étude de la défense del' Ardenne

(26)

11

I

LA FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT

Introduetion

Lorsqu'elle fut signalée au milieu du siècle dernier par G.F. Prat, la forteresse d' Alhoumont fut attribuée aux Romains (34). Son existence fut en suite rappelée par

V. Gauchez en 1882, puis, iocidemment par Y. Graffen 1963(35 ). Elle fut néan-moins redécouverte fortuitement en 1975 par un membre du Cercle Segnia, M. Yves Mathurin.

Aucune trace de la place forten' est conservée dans la toponymie: Ie lieu porte en effet I' appellation de Blancs Bois qui évoque la végétation qui le recouvrait. Actuellement encore, il est entièrement boisé, principalement de grands épicéas. En janvier 1976, le Cercle Segnia nous proposa d'explorer la fortification d' Alhoumont qui n 'avait fait jusqu' aiors 1' ob jet d' aucune investigation archéolo-gique. Ses membres se chargèrent d'obtenir l'autorisation de fouille auprès de I' Administration communale de Houffalize(36). Eosuite MM. Meunier et Alié,

secrétaire et président du Cercle, dressèrent Ie levé hypsométrique détaillé du site. Le Service national des Fouilles a consacré à I'exploration de la place forte trois campagnes, soit au total près de trois mois de recherches au cours desquels vingt-quatre tranchées furent ouvertes (pl. lil). Ainsi, du 12 août au 14 septembre 1976, nous avons centré nosrecherches sur I' examen des différents remparts, puis du 5 août au 2 septembre 1977, nous avons étudié les trois entrées dont I' explora-tion fut achevée du 13 au 31 août 1979(37).

34 G .F. PRAT, A propos de la création de la Société Archéologique d' Arlon dansAnnales de

l'lnstitut Archéologique du Luxembourg, IT, 1849-1850, 1850-1851, p. 129 s.v.

Houffa-lize.

35 V. GAUCHEZ, Topographie des voies romaines de la Gaule-Belgique dans Annales de

l'Académie d'Archéologie de Belgique,

xxxvm,

3• série, 1882, p. 257; Y. GRAFF, loc.

cit., p. 168.

36 Nous remercions vivement Ie Cercle Segnia de sa collaboration aussi effective

qu'effi-cace et Ie Bourgmestre de Houffalize, M. Matburin qui nous a aimablement accordé I' autorisation de fouille et, en 1977, a mis six chömeurs au travail pour la réalisation de nos recherches. Enfin, nous avons bénéficié sur Ie chantier du concours de Mlle Marie-Claude Van Grunderbeek et de M. Henri Gratia.

37 Voir les rapports préliminaires: A. CAHEN-DELHAYE, Fortification à

Tavigny-Alhou-mont dans Conspectus MCMLXXVI- Archaeologia Belgica 196, Bruxelles, 1977, pp.

28-32; ID., Poursuite des fouilles dans la fortification de Tavigny-Alhoumont dans

Conspectus MXMLXXVII-Archaeologia Belgica 206, Bruxelles, 1978, pp. 40-41; ID.,

L' entrée intérieure de la fortification de Tavigny dans Conspectus MCMLXXIX

(27)

FORTIFJCA Tl ON DE TA VIGNY -ALHOUMONT 27

La pénurie de main d'reuvre a malheureusement limité nos travaux à l'inté-rieur de la fortification à deux tranchées et quelques sondages qui restèrent stériles.

Notons aussi que l'implantation des arbres a commandé cellede plusieurs

tran-chées.

Le site

A 1 km à l'est de la ville de Houffalize qu'elle domine, la fortification d' Alhoumont appartient à la commune de Tavigny, rattachée aujourd'hui à la nouvelle entité municipale. Elle occupe la parcelle cadastrale 558 de la section C dont les contours ne correspondent pas à ceux de la forteresse. On y accède

TAVIGNY

Fig. 9. Relevé hypsométrique de la fortification d' Alhoumont et plan des structures défensives.

(28)

28 FORTIFICA TION DE TA VIGNY -ALHOUMONT

actuellement par le hameau d' Alhoumont au nord duquel on emprunte des chemins de campagne, puis des coupe-feu; l'un d' eux longe le rempart septentrional tandis

qu'un autre traverse les remparts orientaux.

Le fortindomine le confluent de l'Ourthe orientale et du misseau de Cowan qui ont creusé une profonde vallée (fig. 1). Ces cours d'eau ont ménagé un large

éperon qui culmine à une centaine de mètres au-dessus de l'eau (fig. 9). Doté sur

trois flancs de pentes escarpées qui atteignent 60% et d'a-pics infranchissables, ce promontoire possède des qualités stratégiques particulièrement favorables. Ainsi, bordé au nord par l'Ourthe, à l'ouest et au sud par son affluent, Ie site n'est accessible que par Ie flanc oriental. Aussi, ce cöté a été barré par plusieurs retranchements qui isolent une surface disponible que 1' on peut es timer à trois hectares et demi. La forme de l'aire intérieure qui est essentiellement commandée par l'extrémité du plateau pourrait être inscrite dans un ovale dont les axes atteignent 210 et 150 m. Le site présente un pendage vers le sud assez prononcé puisqu'il oscille de 7 à 13 %, l'altitude étant comprise entre414 et439 m (pl. II). Le re lief est accidenté par un affleurement tronconique naturel qui s 'élève à 2,50 m dans la partie la plus élevée du site et par une crête roeheuse de 100 m de long située près de son flanc occidental et qui n'a curieusement pas été utilisée comme limite

de la fortification (38).

Le système défensif

La fortification d' Alhoumont est protégée par trois retranchements dont la

longueur totale atteint 828 m (pl. II). Deux remparts au tracé légèrement arqué,

longs de 270 et 240 m barrent les flan es est et sud-est. Leur hauteur et leur largeur

décroissent progressivement vers Ie sud ou le terrain est nettement incliné. Les

deux levées sont distantes de 4 m au sud et de 78 m au nord ou elles enserrent un petit valium coudé de 128 m de long, vraisemblablement destiné à défendre l'entrée intérieure. Enfin, les fouilles ont révélé la présence d'un petit fossé accolé au flanc est d'uil tronçon de la levée extérieure.

Les autres cötés du fortin que les pentes raides rendent pourtant difficiles

d' accès, ont également été renforcés. Le retranchement intérieur du flanc oriental a

été prolongé au nord jusqu'à la crête roeheuse par une levée de 78 m de long et de hauteur décroissante vers l'ouest. Par ailleurs, le sommet de la pente occidentale a été redressé sur une longueur de quelque 112 m. Enfin, nous avons décelé quelques traces d'aménagement au sud-ouest, sur une longueur de 75 m environ, dans la

pen te même de 1' éperon (pl. II). Seulle sommet des abrupts réellement

infranchis-sables n'a pas été doté de structure défensive.

38 Pour être complet, il convient de signaler la présence de buit larges cuvettes alignées dans Ie secteur oriental de la place forte que I' on doit aux bombes de la seconde guerre mondiale qui ont heureusement manqué leur but.

(29)

FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT 29

Nous avons découvert trois entrées gräce aux dépressions qui entamaient localement chaque levée. Aucune n'est empruntée par un chemin, sentier ou coupe-feu actuel. Les trois passages présentent la particularité de s'aligner selon un axe rectiligne et sont situés dans Ie secteur Ie plus élevé de la fortification. Une dénivellation de 6 m entre I'entrée extérieure et l'entrée intérieure constitue une petite cöte qui répondait peut-être à un souci stratégique. Par ailleurs, la largeur des entrées décroît de I' extérieur vers I 'intérieur. Il convient de signalerenfin que nous n' avons pas retrouvé de trace de I' ancien chemin qui devait re lier les trois accès. Les retranchements

Nous avons recoupé chaque levée de part en part en ouvrant une ou plusieurs tranchées perpendiculaires qui en ont révélé la structure (pl. lil). Le travail a été effectué à la main par pelages successifs. Maïs à Alhoumont, comme à Brisy, la nature schisteuse du sol s'est avérée peu propice à l'observation stratigraphique. Notons à eet égard que l'empreinte des pieux n'apparaissait qu'au niveau du sol en place.

Accolé au flanc est de la levée extérieure, lefossé, actuellement comblé, a été recoupé à trois reprises (pl. lil). Il devait prendre son départ entre 20 et 36 m de I' extrémité septentrionale du rem part. Le fossé présente un profil tantöt en cuvette, tantöt en V à fond arrondi; il s 'enfonce à une profondeur de 0, 90 à 1 , 10 m dans Ie sol en place et sa largeur oscille de 2,50 m à 3,40 m (pl. IV, coupes A-B et C-D). Son remblai a livré un tesson de vase façonné sans l'aide du tour et quelques fragments d'os animaux brûlés.

Le rempart extérieur ne présente qu'une hauteur maximum de 0,90m au sommet du plateau pour une largeur de 7 à 14 m. Sa hauteur décroît progressive-ment vers Ie sud pour neplus dépasser Ie niveau du sol de l'intérieur de la forteresse dans sa moitié méridionale. Le retranchement est à eet endroit formé d'un paquet de terre qui en accentuant notabiement la raideur de la pente, constitue un barrage muni d'une bonne potentialité défensive. Le corps de la levée est formé de terre bri,Ine ou jaune, assez dure et contenant de gros moelloos dans la partie septentrio-nale. Lorsqu'il est flanqué du fossé, il présente une strate de lamelles de schiste empilées sans ordre, haute de 0,55 m (pl. IV, A-B, en a et fig. lOB) qui repose sur de la terre brune mêlée à quelques lamelles de schiste (en b) ; dans sa moitié méridionale, cette strate pierreuse (pl. IV, C-D, en c) est couverte d'une assise de moelloos posés en oblique (end). Au nord, nous avons mis au jour deux grands trous de pieu cylindriques alignés selon l'axe du rempart, qui révèlent la présence d'une palissade (fig. IOA). Distants de 2,30m, leur diamètre atteignait 0,70 à 0,80m et leur profondeur, 0,30 à 0,40m dans Ie sol en place.

Le petit vallum intermédiaire, au tracé coudé, s'élève à 1,50m maximum au-dessus du sol et sa largeur oscille de 8 à 14 m. Une seule tranchée l'a recoupé entièrement mais quelques autres ont permis d'en explorer Ie centre. Ces coupes

(30)

30 FORTIFICA TION DE TA VIGNY -ALHOUMONT

ont montré une simple levée de terre jaune et compacte avec un noyau assez caillouteux, de 0,45 m d'épaisseur à la base et parfois quelques moellans de schiste au sommet (pl. IV, E-F, fig. IOC). Nous avons reconnu trois trous de pieu cylindriques alignés dans l'axe du rempart, de dimensions nettement plus réduites que ceux du valium extérieur. Distants de 1,50 m et d'un diamètre de 0,26 à

0,28 m, ils s'enfonçaient à une profandeur de 0,10 à 0,14m dans Ie sol en place.

Fig. 10. Vues des tranchées ouvertes au travers des levées extérieure (A et B), intermé-diaire (C) et intérieure (D).

(31)

I

FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT 31

L'absence d'autres trous de pieu laisse supposerque tous les montants n'étaient pas plantés dans le sol vierge.

Le rempart intérieur est le plus massif des trois retranchements avec une largeur de 6 à 18 m pour une hauteur maximum de 2,40 m au sommet du plateau. 11 barre non seulement l'accès oriental mais circonscrit aussi les flancs nord et nord-ouest de la forteresse. Nous l'avons exploré par quatre tranchées qui ont montré des variantes de structure d'un tronçon à l'autre.

Le tronçon oriental recoupé à 6 m au nord de l'entrée, à l'endroit ou il était le plus large et leplus élevé, a révélé une stratigraphie complexe (fig. lOD). A eet endroit, le rempart possède un noyau haut de 1 ,50 m de très gros moellons de schiste mêlés à quelques bloes de quartz et de grès entassés sans ordre, dépourvus de terre entre les interstices (pl. IV, G-H, en a); cependant, à 0,60 m au nord de notre tranchée, ce noyau est remplacé par une terre caillouteuse. Au centre de l'amoncellement de bloes, on distinguait cinq assises d'un muret de moelloos de grandes dimensions empilés à sec sur Ie sol en place et offrant un parement sommaire à l'est (coupe G-H, en b). La partie occidentale du noyau repose surune épaisse couche de terre brûlée et de bois qui ont calciné sur place et dont la disposition ne montre aucun ordre (en c). Large de 2,70 m, cette couche atteint une épaisseur de 0,10 m maximum. L'analyse des bois en laboratoire a révélé qu'il s'agissait d'érable(39). A 0,60m au-dessus de la couche calcinée, un muret de

pierres sèches a été édifié sur un remblai (en d). 11 en subsiste cinq assises qui présentent un parement irrégulier vers l'ouest. D'autre part, à l'est du noyau de pierres, un petit fossé au profil en cuvette, de 0,50 m de profandeur et 1,80 m de large, est comblé d 'une terre jaune très compacte et renfermant un fin cailloutis (en e). Celle-ci apparaît également sur le noyau de pierres qu 'elle recouvre en formant un dos d'äne. Enfin, le rempart est coiffé d'une ultime recharge de terre brune contenant de nombreuses lamelles de schiste et quelques moellons sur les flan es (en f). A l'ouest du rempart, un trou de pieu de 0,60 m de profandeur traversait cette strate (eng). A 1' est, un petit muret s' élève au-dessus du fossé (en h). 11 est formé de moellons de schiste liés à laterreet présente un parement assez frustevers l'est.

Au cours de l'exploration de l'entrée, nous avons pu observer une nette différence de structure dans Ie rempart à 2 m au nord du passage. Le noyau de moelloos est plus réduit et mêlé à de la terre jaune tandis que la couche de terre jaune compacte est plus importante car sa hauteur atteint 1,30 m.

A 87 m au sud de l'entrée, le retranchement intérieur n'offre qu'une hauteur de 0,50 m au-dessus du niveau intérieur du fortin. Sa fonction défensive consiste essentieHement à raidir le sommet de la déclivité naturelle. Nous y avons retrouvé, au creur, un mur de gros moelloos posés à sec large de 1,05 metdontil subsistait deux assises présentant un double parement (pl. IV, coupe_K-L, en I). Cette 39 ldentification assurée par les laboratoires de l'Institut royal du Patrimoine artistique (D.I. 77/1405).

(32)

32 FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT

structure est également recouverte d'un noyau de moellons mélangés cette fois à des lamelles de schiste, de 4 m de large et 1,30 m de haut (en m). Le sommet est couronné d'une recharge de 0,50 m de terre jaune-greige, assez meuble et renfer-mant un fin cailloutis (en n).

Le tronçon septentrional est large de 12 m pour une hauteur de 1,50 m à I' emplacement de la coupe (pl. lil); ses dimensions diminuent progressivement vers la crête rocheuse. La levée possède, comme dans son parcours oriental un noyau de gros moellons de schiste empilés sans ordre, mais contrebuté au sud par un muret dontil subsiste cinq assises en léger retrait les unes sur les autres (pl. IV, coupe I-J, en i). Ce noyau est flanqué d'un amas de terre jaune très compacte et

®

a

~

b

\

+-- ENTREE

0 2m

(33)

FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT 33

dépourvue de cailloux (en j). Il est enfin recouvert d'une terre jaune-brun qui contient de grandes lamelles et de petits moellans (enk).

Le tronçon occidental qui rejoint le bas de la crête roeheuse ne forme pas de bourrelet mais redresse le sommet de la pente. Il est constitué d'une masse de terre pierreu se maintenue par un muret dontil ne subsiste qu' une ou de u x assises de gros moellons. Comme la plupart d'entre eux affleurent, il est aisé de suivre le tracé exact de ce tronçon.

Enfin, nous avons relevé latrace d'un dispositif méridional installé dans la pente même. Il s'agit d'un muret rectiligne de 1 m de haut maximum et 75 m de long (pl. II).

Les accès

Nous avons exploré les trois entrées, sans doute principales, de la forteresse comblées par l'éboulement des remparts.

L 'entrée extérieure qui coupe le premier barrage oriental était vraisembla-blement bordée de petits pieux (fig. 11). Nous n'avons retrouvé que deux petits trous cylindriques qui flanquaient le nord du passage (en a et b). Distantes de 1,80 m, les cavités présentaient un diamètre de 0,32 à 0,34 met s'enfonçaient de 0,07 à 0,27 m dans le sol en place. Parallèlement, le fossé extérieur qui s'inter-rompt sur une longueur de 5,40 m permet d'évaluer la largeurdupassage à 5 m.

L'entrée intermédiaire ménageait l'accès au centre du tronçon oriental du petit vallum coudé. Elle était nettement délimitée par quatre pieux disposés en carré (fig. 12). Distants de 2,50 à 2,80 m, les quatre grands trous étaient destinés à accueillir des montants de porte. Munis de paroi oblique ou verticale, ils sant soigneusement taillés dans la roche à une profandeur de 0,40 à 0,62 m. Leur diamètre atteint 0,60 à 0,80 m, les cavités sud et est étant un peu plus grandes que les deux autres. Leur remblai montrait nettement latrace cylindrique du pieu: une terre jaune et meuble mêlée à un fin cailloutis (fig. 12, en hachuré) se distinguait de la terre grise, plus caillouteuse et compacte qui calait le pieu dans le trou. Il révèle que les montants de porte avaient un diamètre de base campris entre 0,39 à 0,44 m.

Enfin, i1 convient de noter la présence d'une rigole rectiligne enfoncée de quelques centimètres dans la tête de roche et qui unit les trous sud et ouest. Ce vestige suggère la présence d'un dispositif qui reliait la base des deux montants.

L'entrée intérieure s'ouvre au nord du second barrage oriental, à l'endroit le plus élevé du fortin. Elle a livré des traces de diverses structures qui témoignent de plusieurs phases d'aménagement (fig. 13). L'une d'elles laisse croire que l'entrée a été percée après la première phase de construction de la muraille: il subsiste en effet dans la moitié méridionale du passage deux assises d'un muret de pierres sèches perpendiculaire à 1' entrée et qui se prolongeait sous le creur du rempart (fig. 13, en a). Le muret formé de gros moellans présente un parement oriental tout comme dans le creur de la levée recoupée à quelques mètres au nord. L'entrée recèle

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34 FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT

- ENTREE

0 lm

Fig. 12. Plan de l'entrée intermédiaire.

· également, sur le sol en place, une couchede terre caillouteuse brûlée sur laquelle gisent des restes de branches et poutres calcinées et qui se prolonge sous le rempart (en b). Ces restes d'un foyer intense farment une strate de 0,13 m d'épaisseur maximum recouverte d'une couchede 0,28 m d'épaisseur de pierres rubéfiées et altérées comme si elles étaient tombées dans le foyer incandescent. Le niveau d'incendie doit être contemporain du muret perpendiculaire à l'entrée car il s'in-terrompt au pied de celui-ci. Quant aux bois calcinés, l'examen en laboratoire a

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FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT 35

permis de reconnaître du chêne et du tilleul(40). Soumises par ailleurs à l'analyse

au radiocarbone, les braises ont fourni les dates non calibrées de 2580

±

65 B .P.,

soit630 ± 65 B.C. et2480 ± 55 B.P., soit530 ± 55 B.C. (41). Au coursdes phases

ultérieures, la couche d'incendie a été recoupée par lestrous de pieu qui délimitent l'entrée.

Au centre et dans Ie secteur oriental du passage, six grandes dalles de schiste gisent sur le sol en place, peut-être en guise depavement (fig. 13, c). Un muret de pierres sèches maintenait l'extrémité septentrionale du rempart, plus élevée que l'autre et menacée d'affaissement par la pente du terrain (end). II repose sur un remblai de terre brune et compacte, non caillouteuse mais contenant quelques moellons, dont la hauteur est comprise entre 0,35 et 0,50 m. I1 en subsiste une à six assises de moeBons de schiste sommairement équarris, de 0,05 à 0,15 m d'épais-seur, avec parement vers le passage. Nous avons suivi ce mur de soutènement sur une longueur de 8,40 m.

Treize trous de pieu de dimensions variées et appartenant à plusieurs phases de

construction bordent 1' entrée qui devait se présenter sous forme de couloir. Ils ont pu accueillir des montants de porte ou des poteaux d'une palissade de soutènement. Trois paires de pieu au contour arrondi et au fond plat délirnitent un passage large de 1 ,80 m à 1 'est à 2,20 m à l' ouest. Notons que les pieux de la bordure septentrio

-nale de l'entrée furent plus souvent remplacés que ceux du flanc sud. Lorsqu'on entre dans Ie fortin, on rencontre une première paire de grands trous dont le diamètre atteint 0,80 met la profondeur, 0,48 et 0,70 m dans le sol en place (fig. 13, e et f). Leur remblai est une terre jaune ou brune, caillouteuse. Ils ont été remplacés par deux pieux nettement plus minces puisqu'ils ont laissé un trou de 0,37 m de diamètre, de même profondeur et parfairement cylindrique (g et h).

Cette paire est logée au centre du trou primitif et présente un remblai bien particulier: une terre greige, tendre et renfermant un fin cailloutis. En outre, au nord, le pieu a été remplacé une seconde fois si 1' on en ju ge parIetrou qui recoupe Ie plus grand (i). De 0,65 m de diamètre, il s' enfonce à 0,36 m de profondeur et renfermait cinq moellons dressés destinés à caler le pieu. Celui-ei est antérieur au muret de soutènement qui Ie surplombe partiellement. A 2, 70 m de la première paire, la seconde offre un diamètre de 1,60 et 0,72 m, s'enfonce à 0,55 et 0,58 m dans le sol en place et était comblée de moellons éboulés (en j et k). Le pieu nord, antérieur au muret de soutènement qui Ie recouvre, était flanqué à l'est de trois trous cylindriques dotés d'un remblai distinct. D'un diamètre de 0,45 m, deux d'entre eux n'atteignent que 0,10 et 0,13 m de profondeur (1 et m) et sont recoupés par un trou soigneusement taillé, parfaitement cylindrique, de 0,67 m de profon-deur et remblayé de la même terre greige et tendre que les trous g et h auxquels il

4 0 Cf. note 39 (D.I. 78/1478).

41 Datations réalisées par Ie laboratoire du Niedersächsisches Landesarut für Bodenfor-schung à Hanovre (Hv 8442 et 8235).

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36 FORTIFICATION DE TAVIGNY-ALHOUMONT

ENTREE ~

CJ

Fig. 13. Plan de l'entrée intérieure.

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FORTIFICATION DE TA VIGN)' -ALHOUMONT 37

s'apparente aussi par les dimensions (n). A moins de 1 m de la précédente, la troisième paire devait accueillir les poteaux les plus forts si I' on en ju ge par le diamètre de leur trou qui atteint 1 ,80 m et 1,10 m pour une profondeur de 0, 7 5 et 0,40m (o et p). Munis de paroi régulière, lestrous recelaient un amas de gros moelloos imbriqués les uns dans les autres. Le pieu septentrional qui s'ouvre à l'extrémité du muret de soutènement est vraisemblablement contemporain de celui-ci, sinon postérieur.

La fouille de l'entrée intérieure a livré quelques os d'animaux brûlés, un élément en fer et surtout un. bord de marmite du type « Kurkurn >> ou « Haltem er

Kochtopf >>, recueilli près de la base du muret de soutènement ( cf. infra).

Endehors des structures défensives, nous n'avons pas décelé dans la fortifi-cation d' Alhoumont, la présence de relief d'origine anthropique. Nos sondages à l'intérieur des remparts furent très insuffisants, surtout si l'on considère l'impor-tance de la superficie. Aussi peut-on estimer que l'exploration qui nécessitera d'importants travaux, reste à faire.

Le matériel

Les vestiges recueillis au cours des fouilles sont extrêmement réduits: quel-ques os d'animaux, des galets de rivière qui ont pu servir de polissoir et quelquel-ques rares petits morceaux de torchis qui ont pu appartenir à des constructions élevées à l'intérieur des murs. Le seul élément métallique est une lameen fer recourbée en demi cylindre long de 90 mm et large de 10 à 12 mm. Enfin, quelques tessons appartiennent à une céramique façonnée sans 1' ai de du tour.

1. (pl.

m,

1) Fragment de marmite du type de Haltem à long bord plié vers l'intérieur et muni d'une lèvre épaissie en boudin. Päte légère, criblée de petits trous dans la masse, tendre, avec chamotte. Surface poreuseet couleur grise. Ce tesson fournit une donnée chronologique précise: il est identique à la cérarnique du dépotoirde Brisy datée du premier siècle avant notre ère (cf. supra, pp. 20, 22-23).

2. (pl.

m,

2) Bord vertical à lèvre épaissie vers l'extérieur. Päte tendre, homo-gène, se clivant dans l'épaisseur, sans chamotte. Surface noire, sommairement aplanie, poreuse.

Synthèse

Le site des Blancs Bois à Alhoumont a été choisi pour ses qualités

stratégi-ques. Ce promontoire élevé qui domine la rivière possède trois versants naturelle-ment protégés par de fortes pentes et des abrupts. 11 convient toutefois de remarquer !'absence de point d'eau, tant à l'intérieur des murs que sur les flancs, qui devait obliger les occupants à s'approvisionner à la rivière.

L'éperon d' Alhoumont diffère de celui de Brisy par l'importance de sa

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