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KONINKLIJKE ACADEMIE VOOR OVERZEESE WETENSCHAPPEN

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(1)

BULLETIN DES SEANCES

48 ( 3 )

KONINKLIJKE ACADEMIE

VOOR OVERZEESE WETENSCHAPPEN

Onder de Hoge Bescherming van de Koning

ACADEMIE ROYALE

DES SCIENCES D’OUTRE-MER

Sous la Haute Protection du Roi

ISSN 0001-4176

2002

(2)

D e A c a d e m ie g e e ft d e s tu d ie s u it w a a r­

v an d e w e te n s c h a p p e lijk e w a a rd e d o o r de betrokken Klasse erkend werd.

De werken die minder dan 32 blad­

zijden beslaan worden in de M ededelin­

gen der Zittingen gepubliceerd, terwijl omvangrijkere werken in de verzameling der Verhandelingen kunnen opgenomen worden.

De teksten door de Academie gepubli­

ceerd verbinden slechts de verantwoor­

delijkheid van hun auteurs.

L ’A c a d é m ie p u b lie les é tu d e s d o n t la v a le u r sc ie n tifiq u e a é té re c o n n u e p a r la Classe intéressée.

Les travaux de moins de 32 pages sont publiés dans le Bulletin des Séances, tan­

dis que les travaux plus importants peu­

vent prendre place dans la collection des Mémoires.

Les textes publiés par l ’A cadém ie n ’engagent que la responsabilité de leurs auteurs.

© Royal Academy of Overseas Sciences. All rights reserved.

Abonnement 2002 (4 nummers — 4 numéros) : 70,00 EUR

Defacqzstraat 1 bus 3 rue Defacqz 1 boîte 3

B-1000 Brussel (België) B-1000 Bruxelles (Belgique)

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MEDEDELINGEN DER ZITTINGEN BULLETIN DES SEANCES

48 ( 3 )

KONINKLIJKE ACADEMIE

VOOR OVERZEESE WETENSCHAPPEN

Onder de Hoge Bescherming van de Koning

ACADEMIE ROYALE

DES SCIENCES D’OUTRE-MER

Sous la Haute Protection du Roi

ISSN 0001-4176

2002

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COMMUNICATIONS SCIENTIFIQUES

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Classe des Sciences morales et politiques

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48 (2002-3) : 247-268

Développement et après-développement*[1]**

par

Firouzeh Na h a v a n d i***

Mo t s.-c l e s. — D éveloppem ent ; M odernisation ; Capitalism e ; A pproche radicale ; Néo-institutionnalism e ; Post-développem entalisme.

Re s u m e. — Depuis la D euxièm e Guerre mondiale, dans les pays occidentaux comm e dans ceux du T iers-M onde, la pensée du développem ent a occupé une place prépondérante au sein de la réflexion économ ique, anthropologique ou sociologique. Le développem ent et le sous-développem ent sont devenus un champ d ’étude. Le discours du développement, quant à lui, com m ande la répartition du pouvoir parm i les peuples et leur place dans la hiérarchie internationale. A ujourd’hui, ce discours — rejoint par celui de la globalisation — est de plus en plus sophistiqué et demeure comm e à ses débuts optimiste renouvelant les affirm ations sur la nécessité de m ettre fin au sous-développem ent et de com bler le fossé qui sépare les pays «développés» des «autres». M a com m unication s ’at­

tachera à aborder l’évolution de la notion de développem ent et les pourtours de ce que l’on appelle aujourd’hui, faute de mieux, l’après-développem ent.

Tr e f w o o r d e n. — Ontwikkeling ; M odernisering ; Kapitalisme ; Radicale benadering ; N eo-institutionalism e ; Postontwikkeling.

Sa m e n v a t t in g. — O ntwikkeling en postontwikkeling. — Sedert de Tweede W ereld­

oorlog heeft de ontw ikkelingsidee zowel in w esterse als in derdew ereldlanden een belang­

rijke plaats ingenom en in het economisch, antropologisch en sociologisch denken.

O ntwikkeling en onderontwikkeling zijn zelf studieterreinen geworden. Volgens het ontw ikkelingsdenken moet de macht verdeeld worden over de bevolkingen en hun plaats in de internationale hiërarchie. Vandaag wordt dit denken — bijgetreden door dit van de globalisatie — steeds gesofisticeerder, is het nog steeds optimistisch, net als bij zijn ontstaan, en blijft het de klem toon leggen op de noodzaak om een eind te m aken aan de onderontwikkeling en de kloof tussen de “ontwikkelde” landen en de “andere” te dichten.

In mijn voordracht behandel ik de evolutie van het begrip ontwikkeling en w at tegen­

woordig verstaan wordt onder w at men, bij gebrek aan beter, postontw ikkeling noemt.

* Communication présentée à la séance de la Classe des Sciences morales et politiques tenue le 20 novembre 2001. Texte reçu le 13 mars 2002.

** Les chiffres entre crochets [ ] renvoient aux notes pp. 264-267.

*** Membre de l’Académie ; chargée de cours à l’Université Libre de Bruxelles, directeur du Centre d’Etudes de la Coopération Internationale et du Développement (CECID), avenue Jeanne 44, B-1050 Bruxelles (Belgique).

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Ke y w o r d s. — D evelopment ; M odernization ; Capitalism ; Radical Approach ; Neo- Institutionalism ; Post-Developmentalism.

Su m m a r y. — D evelopm ent and Post-Development. — Since World War 11, in Western countries as well as in Third World countries, developm ent thought has occupied a large place in economic, anthropologic or sociological thinking. Developm ent and underdevel­

opm ent have become a field o f study on their own. As regards developm ent discourse, it allows pow er distribution among people o f the world and the level o f everyone in the international hierarchy. Nowadays, this discourse — and that o f globalization — is more and more complex, and still is optimistic, emphasizing the need o f eradicating underde­

velopm ent and filling the gap between “developed countries” and “others” . My paper focuses on the evolution o f developm ent concept and what is nowadays called «post- developm entalism».

*

* *

Pour un grand nombre d ’observateurs, le point IV du discours sur l ’état de l’Union du président Truman, prononcé en 1949, inaugure véritablement «l’ère du développement» ; c ’est un texte fondateur [2], La même année, le Congrès américain adoptait, sur proposition de Truman, l 'Act fo r international develop­

m ent, loi pour le développement international, les Nations Unies lançaient le

«Programme élargi d ’assistance technique» tandis que l’Organisation Euro­

péenne de Coopération Economique créait un comité des territoires d ’outre-mer.

Q uatrièm em ent, il nous faut lancer un nouveau program m e qui soit audacieux et qui mette les avantages de notre avance scientifique et de notre progrès industriel au service de l ’am élioration et de la croissance des régions sous-développées. Plus de la moitié des gens de ce monde vivent dans des conditions voisines de la misère.

Leur nourriture est insatisfaisante. Ils sont victim es de maladies. Leur pauvreté con­

stitue un handicap et une menace, tant pour eux que pour les régions les plus prospères (...).

Je crois que nous devrions mettre à la disposition des peuples pacifiques les avantages de notre réserve de connaissance technique afin de les aider à réaliser la vie meilleure à laquelle ils aspirent. Et, en collaboration avec d'autres nations, nous devrions encourager l’investissem ent de capitaux dans les régions où le développe­

m ent fait défaut... [3].

Dans le point IV, le sous-développement, comme qualificatif, apparaissait dès le premier paragraphe ainsi que toutes les idées qui investirent l’Occident, avec à sa tête les Etats-Unis, d ’une «mission salvatrice» dans les anciens pays colonisés. Cette représentation de l’Asie, de l ’Afrique et de l’Amérique latine dans leurs différences, la vision négative de «l’autre» n ’était pas nouvelle en Occident. Les termes pour qualifier «l’autre» ont été nombreux : barbare, sauvage, primitif, infidèle,... Le sous-développé succédait à cette énumération.

En outre, pour la première fois le terme était utilisé comme synonyme de

«régions économiquement arriérées» et était employé dans un discours à très grande audience [4]. De là furent construits les différents substantifs qui ont

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encore cours aujourd'hui (sous-développement, en voie de développement, etc.).

De cette catégorisation-stigmatisation naissaient en référence aux valeurs occi­

dentales un ensemble de problèmes qu’il fallait résoudre.

L’analyse de ce discours est extrêmement instructif pour la connaissance des rapports instaurés entre les pays «développés» et les pays «en voie de développe­

ment». Une situation était présentée et on procédait à sa définition d ’après les catégories et les standards occidentaux. De là découlaient «naturellement» les solutions aux problèmes mis en évidence. Le paternalisme teintait évidemment tout le texte. Il faut noter que toute l ’approche du développement, dans les années suivantes, procédera de la même manière, et ce, quelle que soit l ’idéologie.

Les théories du développement viseront à éradiquer les problèmes définis en proposant une voie pour y parvenir en accord avec la définition du sous- développement qui est proposée.

Les théories de la modernisation

Ce sont probablement les théories de la modernisation qui ont influencé de la manière la plus marquée les décisions et les politiques de développement dans le Tiers-Monde. Dans l’ensemble, elles illustrent la négligence des spécificités locales et la présentation d ’un modèle unique inspiré par l’expérience occiden­

tale.

Elles englobent un ensemble de perspectives appliquées par des non-marx- istes au Tiers-Monde, dans les années cinquante et soixante, et s ’inspirent large­

m ent des thèmes dominants de la sociologie traditionnelle et des courants en vogue à la même époque.

Toutes ces théories partent de l’idée que l ’industrialisation pourra insuffler le développement. Dans l ’ensemble, elles soutiennent l’idée de la complexification des sociétés, tant au niveau économique qu’au niveau social et culturel.

Les racines de cette vision sont à rechercher dans la conception organiciste de la société qui a guidé les positivistes qui influenceront, nettement eux-mêmes, les premières études sur le développement, dont on trouve encore de nombreuses traces dans les politiques des pays du Tiers-M onde et dans les mesures préco­

nisées par les organisations internationales (Banque mondiale, Fonds M onétaire International,...).

Les premières études sur le développement furent nettement américaines et, à cette époque, les prises de position des Etats-Unis d ’Amérique vis-à-vis du Tiers-Monde suivirent le schéma de l ’aide apportée à l’Europe d ’après-guerre.

Cette dernière constituait la consolidation de l ’hégémonie américaine sur le sys­

tème capitaliste mondial. Dans le cadre de l’expansion économique américaine, il devenait primordial de trouver des nouveaux marchés pour les produits ainsi que des nouveaux domaines d ’investissements pour le surplus des capitaux. Il était également important d ’avoir accès à des matières premières bon marché.

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Les efforts des Etats-Unis dans le sens de la décolonisation ne furent pas sans liens avec ces nécessités. Toutefois, alors que l ’Europe perçut plus de 19 m il­

liards de dollars dans le cadre du Plan Marshall, le Tiers-M onde n ’en reçut que 150 millions en 1953, en conséquence de la politique avancée par le point IV du président Truman. Cela impliquait clairement que dans les efforts de développe­

ment préconisés par les instances internationales ou désirés par les dirigeants eux-mêmes, les pays du Tiers-Monde devaient se tourner vers le capital privé.

Le cadre mondial dans lequel ces théories virent le jour était dominé par le climat de la guerre froide. Il faut donc les interpréter comme une des voies suivies pour contrer l ’avancée des Soviétiques et leur mainmise sur les pays en voie de développement. C ’est cette idée qui sous-tend le discours précité du président Truman [5], La peur du communisme a été probablement une source importante de l’intérêt pour le développement [6]. Dans ce cadre, l ’appui académique devenait précieux pour expliquer pourquoi les pays nouvellement indépendants devaient demeurer dans le camp capitaliste [7].

Cependant, c ’est surtout après la conférence de Bandung que l’attention des pays occidentaux, et particulièrem ent celle des Etats-Unis, se dirigea vers le Tiers-Monde. Selon certaines interprétations, l’aide de l ’URSS à l ’Afgha­

nistan [8] en 1954 aurait accéléré les prises de position des Etats-Unis [9]. Les théoriciens américains opéraient dans l ’orbite de l’endiguement, cherchant des alliés. La compétition avec l ’URSS exigeait que soient présentés aux «clients potentiels» des arguments pouvant contrer ceux du socialisme : ce furent la modernisation et l’appartenance au «monde libre». A cette époque, chaque camp s’attachait à gagner les esprits et les populations nouvellement indépendantes, tout en étant convaincu qu’elles n ’avaient aucune autre alternative [10],

Le s p o i n t sc o m m u n s d e s t h é o r i e s

Pour ce courant, le sous-développement est considéré comme une étape dans l ’histoire de certaines sociétés. Celles-ci seraient en retard sur les pays consi­

dérés comme développés. La modernisation est, dans ce contexte, «une transfor­

mation totale des sociétés traditionnelles ou prémodernes en des sociétés adop­

tant les types de technologie et l’organisation sociale caractérisant les nations avancées, économiquement prospères et politiquement stables du monde occi­

dental» [11].

L’idée directrice est donc bien celle d ’un monde en transition et la dichotomie entre monde traditionnel et monde moderne [12]. Ainsi on oppose tradition à modernité, économie familiale à économie duelle et agriculture à industrie...

«Des sociétés se transforment à un rythme tellement rapide que l’on ne compte plus en siècles mais en années. Alors que les pays développés ont mis des siècles à aboutir à la situation actuelle, les pays en voie de développement sont projetés dans un processus de changement qui les touche inexorablement et que la majorité vivent comme des crises, dans la mesure où il implique une rupture

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continuelle avec le passé, une déchirure qui non seulement divise les personnes et les groupes mais pénètre dans les consciences des individus ; il est aussi le siège d ’attitudes, d ’idées, de valeurs appartenant à plusieurs stades de transi­

tion» [13].

Nombre d ’auteurs mettent l ’accent, dans un élan ethnocentrique, sur la simili­

tude des aspirations et des besoins de l ’homme comme départ de leur analyse.

W. E. Moore, qui identifie la modernisation avec la rationalisation de l’organisa­

tion de la vie sociale, insiste sur l’universalité des préférences de l ’homme qui a le choix. Ce dernier préférera la vie à la mort, la santé à la maladie, la satisfac­

tion des besoins primaires, nourriture, habitat, vêtements à leur absence... [14].

Par rapport aux critères occidentaux, largement inspirés par l ’avancée du capi­

talisme, l ’homme du Tiers-Monde est donc malheureux, pauvre, analphabète, malade, mal nourri... Il faut lui apporter les moyens d ’échapper à ces maux ! Mais d ’une certaine manière, ce n ’est pas le Tiers-M onde qu’on «sauve» par la bonne action. Les pays occidentaux se «sauvent» eux-mêmes, par le devoir d ’éclairer les autres et de les mettre sur le bon chemin. On n ’est pas très loin de l’obligation d ’évangéliser des siècles précédents.

La majorité des écrits reflète une croyance absolue en l ’universalité du m o­

dèle occidental de développement. C ’est ainsi que de nombreuses pages sont consacrées à la description de l’évolution de ce monde et particulièrement à celle de la société américaine.

Ainsi en est-il de la première partie du livre The Progress o f Underdeveloped Areas édité par Hoselitz qui caractérise bien les premiers écrits [15].

C ’est donc la modernisation de l’Occident qui est prise en considération.

Nous sommes en présence de théories téléologiques prenant les pays capitalistes avancés comme modèles. Si l’on excepte quelques rares écrits [16], les théories de la modernisation ne tiennent pas compte de l’histoire des pays en voie de développement, en particulier de l’impact de la colonisation.

Ces sociétés sont présentées comme ayant des attributs spécifiques et en cela l ’influence de M ax Weber est grande. Le progrès et le développement viendront de l’acquisition des caractéristiques de la société moderne industrialisée [17]. La sécularisation, «principe dynamique et centre universel du complexe culturel industriel moderne» [18], semble la transformation la plus importante à opérer [19]. Les caractéristiques de la société industrielle moderne résident dans «une connaissance scientifique, une technologie et une structure économique capable d ’assurer dans une mesure toujours plus grande la domination de l ’homme sur la nature, de réaliser l ’emploi toujours croissant, en quantité et en diversité, des formes d ’énergie à potentiel élevé et de maximiser l’efficacité dans la production des biens et services, c ’est-à-dire la productivité du travail humain» [20],

Pour Germani, la société en transition doit vivre le passage de l’action prescriptive à l’action élective, l’institutionnalisation de la tradition à l ’insti­

tutionnalisation du changement et la différenciation et la spécialisation in­

stitutionnelles. N. J. Smelser [21], dans une perspective néo-Durkheimienne et

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structuro-fonctionnaliste, voit également dans le changement social du Tiers- Monde un facteur nécessaire à la croissance économique.

L’idée sous-jacente est que les structures traditionnelles sont un frein à l’ap­

plication et à la mise en œuvre des stratégies de développement car, dans ce type de société, tout changement est considéré comme anormal et constitue une vio­

lation des formes. On est dans la lignée directe de la conception du progrès au 19' siècle. Ce n’est qu’au prix de la disparition de ces barrières que le développe­

ment aura lieu. Parallèlement, ces sociétés ne possèdent pas les structures internes nécessaires à l’éclosion de l’industrialisation. L’accent est donc nette­

ment mis sur les facteurs internes qui sont présentés comme déterminants pour le développement.

Une des idées importantes des théories de la modernisation est celle des groupes porteurs de la modernité. Hoselitz développe l’hypothèse que l’innova­

tion dans l’activité économique est introduite par des déviants, des individus marginaux par rapport au reste de la société, insuffisamment socialisés et ne partageant pas les valeurs centrales de celle-ci... Ce facteur est, pour lui, une condition nécessaire mais non suffisante [22]. Ce thème est la continuité de l’idée que les entrepreneurs sont souvent des minorités qui, étant privées des canaux traditionnels de mobilité sociale, seront portées vers la modernité. L’idée de groupes porteurs de la modernité peut faire référence à des personnalités spé­

cifiques, à des caractères ou encore des élites.

Fortement teintées de considérations idéologiques, en raison de la lutte hégé­

monique que se livraient les Etats-Unis d ’Amérique et l’Union soviétique, les premières théories de la modernisation avaient comme objectif de présenter un modèle de développement qui contrerait celui du socialisme. Elles influencèrent l’aide occidentale et favorisèrent l’intervention des pays industrialisés sous forme de promotion du secteur moderne et/ou d ’exportation de technologie exigeant un capital élevé. A travers leurs recommandations, la création d ’une classe moyenne, considérée comme vecteur de la modernisation, fut très encou­

ragée dans les pays en voie de développement et les institutions susceptibles d ’intégrer les ouvriers, telles que les syndicats, furent soutenues [23]. Pour les pays du Tiers-Monde, les théories de la modernisation ont été la promesse d ’un monde meilleur, confié à une nouvelle classe dirigeante qui, tout en s ’en­

richissant, multipliait les signes d ’occidentalisation.

La conception linéaire et occidentalo-centrée était le point faible de cette approche. Les expériences européenne et américaine ne peuvent être reproduites telles quelles. Les spécificités locales, historiques et culturelles ne peuvent être négligées.

L'approche radicale

Nées approximativement à la même période que l’approche précédente, les théories radicales peuvent être considérées comme une réponse aux insuffisances

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de la première. Elles comblent probablement certaines lacunes, mais n ’accordent pas non plus une place aux spécificités culturelles et locales dans l’étude du développement.

Notons, comme pour la théorie de la modernisation, que ce courant renvoie à un nombre important de perspectives appliquées, par des néo-marxistes en général, au Tiers-Monde, à partir des années soixante. Toutes replacent leur réflexion dans le cadre des relations internationales, de l’économie-monde et toutes considèrent, au contraire des approches libérale et marxiste classique, le sous-développement comme le résultat direct de l ’expansion du capitalisme.

Si les théories de la modernisation peuvent être considérées comme celles du

«maintien de l ’ordre», en dépit de l’opposition faite entre la tradition et la moder­

nité pour encenser la seconde, les théories du sous-développement sont celles de la rupture sociale. En effet, les premières préconisaient un changement de struc­

tures et des bouleversements mais dans l ’idée d ’assurer l’évolution capitaliste des sociétés analysées et dans l ’espoir de maintenir l ’ordre mondial. Les secon­

des concluent toutes à la nécessité de la disparition de l’ordre économique mon­

dial et à la destruction des structures internes des sociétés du Tiers-Monde.

Ces théories ne doivent plus être considérées dans le cadre de la peur de l’ex­

pansion communiste, mais dans celui d ’une réflexion et d ’un recadrage des rela­

tions coloniales préexistantes. Elles ne considèrent pas le sous-développement comme un simple retard, mais comme un produit de l’histoire, un phénomène que n ’ont pas connu les pays développés actuels.

Le s p o i n t s c o m m u n s d e s t h é o r i e s

Les théories radicales se présentent tout d ’abord comme une critique des théo­

ries de la modernisation et même si certains écrits des deux approches sont con­

temporains, les premières constituent une deuxième période dans les études sur le développement [24]. L’exemple le plus élaboré se trouve chez A. G. Frank [25].

Il écrit à propos des théories de la modernisation : «Un examen critique montre que cette nouvelle sociologie du développement est infirmée par l’expérience quand elle est confrontée à la réalité, qu’elle est inadéquate sur le plan théorique, quant à ses normes scientifiques classiques, et politiquement inefficace dans son objectif présumé qui est de promouvoir le développement des pays sous- développés» [26].

Les analyses de cette approche partent toutes des relations capitalistes inter­

nationales pour identifier leurs rôles dans le sous-développement du Tiers- M onde [27]. Les théories radicales sont aussi une critique de l’approche m arx­

iste classique et on trouve, par exemple chez Wallerstein, une remise en question de l ’utilisation abusive des étapes de développement. «Si l ’on prend les étapes successives, qui sont toutes fausses, on aboutira au concept déroutant d ’éco­

nomie dualiste comme y ont abouti de nombreux économistes libéraux s’occu­

pant des soi-disant pays en voie de développement. Les marxistes sont souvent

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tombés dans le même piège» [28]. La vision orthodoxe marxiste, selon laquelle les sociétés latino-américaines sont féodales, est remise en question, ainsi que l’idée selon laquelle le capitalisme n ’est devenu mondial qu’au 20e siècle.

Dans cette approche, le sous-développement est intimement lié à l ’échange inégal. Cette idée a été fortem ent influencée par l’œuvre de A. Emmanuel [29].

Les échanges commerciaux sont, dit-il, l’un des éléments de l’exploitation des pays en voie de développement car ils sont fondamentalement inégaux. Dans cette optique, le sous-développement est le produit de relations inégales entre économies interdépendantes caractérisées par «une situation dans laquelle les économies d ’un groupe de pays sont conditionnées par le développement ou l ’expansion des autres» [30]. La situation dans le Tiers-M onde est donc le résul­

tat de l ’exploitation néo-coloniale. «L’analyse des échanges entre pays déve­

loppés et sous-développés conduit à constater l ’inégalité de l ’échange dès lors qu’à productivité égale le travail est rémunéré à un taux plus faible à la péri­

phérie» [31]. Une cause majeure d ’appauvrissement à long terme des économies dépendantes est la destruction systématique des sols par le centre, afin d ’exploi­

ter les formes précapitalistes d ’appropriation, courantes dans la périphérie.

Selon Amin, la dépendance technologique constitue un autre aspect de l’échange inégal ; le capital central peut dom iner les industries du Tiers-M onde et en tirer des profits substantiels. Tandis que les pays développés font environ 80 % de leur commerce entre eux et seulement 20 % avec les pays sous-dévelop- pés, la proportion est inversée pour les pays sous-développés. Les sociétés pré­

capitalistes sont en dépendance commerciale vis-à-vis du centre. Pour les pays du centre, le commerce extérieur permet de réduire le coût de la force de travail, en particulier par l ’importation de produits agricoles en provenance de la périphérie obtenus dans des conditions d ’échange inégal.

Cet échange inégal est lui-même possible grâce aux mécanismes qui perm et­

tent au capitalisme des monopoles d ’assurer au centre une croissance continue des salaires, tandis que la nature des formations de la périphérie perm et de main­

tenir les rémunérations du travail à un niveau bas. Le commerce extérieur permet également de réduire le coût des matières premières grâce aux mêmes méca­

nismes d ’échange inégal.

Par ailleurs, l ’échange inégal signifie que le problème de la lutte des classes doit être envisagé à l ’échelle mondiale et que les problèmes nationaux ne peu­

vent être considérés comme des épiphénomènes qui se juxtaposent au problème essentiel de la lutte des classes [32].

Cette thèse a influencé la naissance de l ’idée d ’un développement à partir de ses propres forces et la méfiance à l’égard de tout apport extérieur, en particulier de capitaux.

Pour sortir de cette crise, le bouleversement de l’ordre politique est prôné : la rupture reste la seule solution, la déconnexion, dit Amin. A.G. Frank considère que la seule issue est une stratégie de rupture par rapport au capitalisme mon­

dial [33], Car si le sous-développement, comme le développement économique,

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est devenu au cours des siècles le produit nécessaire du processus contradictoire du développement du capitalisme, le sous-développement ne peut en aucun cas disparaître avec la progression du capitalisme. Les satellites ne peuvent se libér­

er de la structure capitaliste ; ils sont condamnés au sous-développement.

Frank s’oppose radicalement à ceux qui croient qu’il faut intégrer les struc­

tures économiques archaïques ou féodales dans la dynamique capitaliste. La stratégie de soutien de la bourgeoisie naissante ou existante pour provoquer l ’ex­

pansion capitaliste et la révolution démocratique bourgeoise est un non-sens. Il est également vain d ’attendre que les pays actuellement sous-développés passent par les mêmes stades de croissance économique que les sociétés occidentales qui ont connu un développement capitaliste classique à partir des sociétés précapi­

talistes et féodales. Si l ’Amérique du Nord ou le Japon ont pu se développer, c’est que la première n ’a pas connu une dépendance similaire à celle du Tiers- Monde d ’aujourd’hui et que le second était le seul pays qui n ’était pas encore intégré au système capitaliste mondial et donc n ’était pas sous-développé. Les matières premières ne sont pas des moteurs de développement et n ’entraînent en conséquence pas de création d ’industries ou d ’emplois. Gunder Frank propose donc une révolution socialiste. En Amérique latine, comme ailleurs, ce sont les masses populaires qui doivent prendre leur histoire en main.

Les catégories utilisées par les théoriciens radicaux offrent en dernière analyse peu de solutions aux problèmes spécifiques du Tiers-Monde. Si la lec­

ture des causes du sous-développement et de l’histoire des pays de la périphérie est enrichissante et comble une lacune des théories de la modernisation, l ’aspect pratique n ’est pas dominant. On trouve une critique pertinente des théories de la modernisation, du fonctionnalisme et de toute approche n ’intégrant pas le con­

texte socio-économique. Les radicaux font apparaître les mécanismes nationaux et internationaux d ’appropriation des surplus au profit des centres. Néanmoins, on ne voit pas comment les sphères distinctes, politique, sociale ou économique sont en relation. Selon Seers, les analyses sont erronées non seulement parce qu’elles n’épousent pas les faits, mais parce que leur nature mécanico-formelle les rend statiques et non historiques. Certains auteurs ont donc mis au point des schémas qui n ’expliquent pas la spécificité de l ’économie du développement ni la domination politique dans les pays en retard [34].

Le concept de dépendance mettant l ’accent sur le facteur international ne per­

met pas d ’illustrer les diversités internes des pays en voie de développement. Il ne donne pas la possibilité d ’expliquer comment des pays différents répondent aux mêmes contraintes extérieures.

L’approche est en définitive ethnocentrique car il n ’envisage pas de réponses apportées par les dirigeants des pays en voie de développement et gomme leur part de responsabilité. Les pays périphériques sont transformés en victimes pas­

sives de l ’extension du système capitaliste. C ’est ce que met en évidence, entre autres, Y. Lacoste, à propos de certains tiers-mondistes qui soulignent, écrit-il,

«la dépendance économique dans laquelle se trouvent les nouveaux Etats, et en

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viennent à considérer ces indépendances comme illusoires. L’Economique ne détermine pas complètement le Politique et les dirigeants savent jouer des riva­

lités qui existent entre les grandes puissances occidentales» [35].

En outre, les Etats répondent de manière diversifiée à la dépendance économique. Ces théories considèrent trop souvent la dépendance comme une structure internationale déterminante plutôt que comme un ensemble de con­

traintes parmi lesquelles il existe une marge de manœuvre et de choix.

D ’un point de vue pratique, les théories radicales remettent en cause l’aide et l’intervention préconisées par les libéraux, dénoncent l’implantation des multi­

nationales et sont très critiques par rapport à la politique am éricaine.

Evidemment, les appels au bouleversement de l ’ordre et leurs analyses rencon­

treront peu d ’échos chez les dirigeants occidentaux mais influenceront de nom­

breuses générations d ’étudiants, ainsi qu’un grand nombre de partis politiques et de groupes de pression dans le Tiers-Monde. Ainsi, si ces théories ne rencon­

treront pas nécessairement d ’échos dans la pratique du développement, leur impact symbolique ne sera pas négligeable.

En ce qui concerne la définition même du développement, elle rejoint d ’une certaine manière celle des théoriciens de la modernisation. La croissance n ’est pas remise en cause, l’industrialisation reste le but à atteindre, seuls les moyens présentés sont différents. Le développement est considéré comme «bloqué» mais non discuté en soi. L’approche radicale postule que les changements seront plus rapides avec l ’ordre qu’elle préconise [36]. Nous avons affaire somme toute à

«un nouveau paradigme mais des présupposés anciens» [37]. Les théories radi­

cales remplacent la dichotomie moderne/traditionnel par centre/périphérie, mais nul doute que le premier terme de la dichotomie reste dans chacun des cas supérieur [38]. De même, du point de vue du savoir, il existe dans les deux approches la croyance en la supériorité de la connaissance scientifique occiden­

tale au détriment des savoirs locaux [39].

Les théories néo-institutionnalistes

Fruit de l’expérience pratique des tenants de cette approche et basée sur les années d ’observation critique du processus de développement à travers les organisations internationales entre autres, le néo-institutionnalisme met en évi­

dence des problèmes pratiques et concrets tout en déplaçant la solution du pro­

blème prioritairement dans les pays en voie de développement au niveau de l’Etat. Sans être vraiment hétérodoxe, il pose les problèmes dans une perspective différente des modèles théoriques de l’économie classique.

Ce courant est assez diversifié et on peut mettre en évidence des sensibilités différentes, par exemple, avec l’école latino-américaine représentée par la CEPAL, l’école française avec François Perroux ou encore l ’école suédoise avec Gunnar Myrdal. Il est également courant de parler de cette approche en termes

(16)

«d’économie du développement». Le champ de cette discipline est vaste. Il intè­

gre des élém ents historiques, com m e le passé colonial, des élém ents économiques, comme le dualisme et l ’intégration au commerce mondial, mais aussi une dimension sociologique et anthropologique, comme les formes de so­

lidarité et les formes de cohésion sociale [40],

Dans l ’ensemble, en opposition aux théoriciens de la modernisation et aux marxistes classiques, ce groupe de spécialistes rejettent l’idée selon laquelle la croissance économique et l’expansion du capitalisme ont réduit de manière sub­

stantielle la pauvreté dans le Tiers-Monde. Sans nier un certain changement et une amélioration du niveau de vie, de l’éducation et de la santé, pour ces théoriciens, le problème de la pauvreté demeure l ’enjeu le plus sérieux. «Le développement signifie le processus grâce auquel on s’éloigne du sous- développement, on s’éloigne de la pauvreté» [41]. Celui-ci ne peut être résolu par la croissance économique et en tout cas pas dans les conditions actuelles.

On trouve, chez ces théoriciens, une critique de l ’épistémologie positiviste et de la «prétendue neutralité» de l’analyse néoclassique, source d ’interprétations tendancieuses et servant les intérêts politiques de l ’Occident. C ’est ainsi que sont conseillées une intervention de l’Etat et l ’adoption de mesures particulières visant à enrayer les problèmes spécifiques du monde en développement.

L’analyse de Perroux ou de Myrdal est centrée sur le dualisme des structures des économies et des sociétés du Tiers-Monde, fruits de l’histoire. Cette vision explique la qualification d ’approche structuraliste qui est également souvent employée. En outre, la dépendance sur le marché mondial est un élément pri­

mordial de l’analyse.

Pour les économistes de la CEPAL, avec comme chef de file Raoul Prébish [42], l’analyse est basée sur la démonstration empirique de la détérioration des termes de l’échange touchant les produits primaires dans les pays de la périphérie. La CEPAL, chargée de promouvoir le développement de la région, se base surtout sur les évolutions en Amérique latine, même si les conclusions peu­

vent s ’étendre à tout le Tiers-Monde. Les appellations de centre et de périphérie ont été forgées par cette mouvance et elles seront plus tard reprises par les théoriciens radicaux. La détérioration des termes de l’échange est considérée comme reflétant le fait que les avances technologiques sont concentrées dans les pays industrialisés. Comme la production par ouvrier est moindre dans la périphérie et étant donné la disponibilité de la m ain-d’œuvre, ces économistes concluent à la nécessité d ’une politique d ’industrialisation spécifique. Il ne faut pas spécialiser la périphérie dans son rôle d ’exportateur de matières premières.

Ils seront, dans ce sens, les concepteurs de la politique d ’industrialisation par substitution aux importations. La CEPAL se penchera également sur d ’autres problèmes importants comme ceux de l’inflation, de l’état de l’agriculture et le manque de coordination entre les secteurs de l’économie. Même si, à long terme, la stratégie d ’industrialisation par substitution aux importations a eu, dans cer­

tains cas, comme retombée l’aggravation de la vulnérabilité envers l’extérieur,

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cette lecture a été une remise en question de certaines certitudes de l’économie classique en matière d ’échange international et dans ce sens constitue une avancée considérable. Elle a également l’avantage de présenter une vue plus complexe du développement et particulièrem ent de montrer un intérêt évident pour la pauvreté et le niveau de vie des masses.

En France, François Perroux [43] procède aussi à une critique de l’économie classique, en particulier en lui reprochant de ne pas tenir compte de l ’inégalité des acteurs. Il se penche sur les effets d ’asymétrie qui résultent de l’existence de grands monopoles, de nations plus fortes que les autres qui imposent leurs lois aux plus faibles. Perroux emploie les termes de «pays foyers» et de «pays affi­

liés», même s’il utilise également les termes centre et périphérie. Il aborde le problème des «coûts de l’homme», nourrir, soigner, instruire et libérer les hommes, qui doivent faire partie selon lui des programmes de développement des gouvernements des pays du Tiers-Monde et des grandes organisations inter­

nationales. Le développement est le fait de changements dans les institutions.

«Le développement suppose le déploiement de l’activité des hommes à l ’égard des hommes par l’échange de biens et services, et par l’échange d ’informations et de symboles».

Myrdal est, dans les années 1960, la figure de proue de la tendance suédoise.

Il prône la planification centralisée. L’idée centrale est q u ’il faut dissocier crois­

sance économique et développement. Un pays peut avoir doublé son PNB/habi­

tant sans que les indicateurs de pauvreté aient été modifiés (sous-emploi, inéga­

lité, pauvreté,...). Dans les années 1970, les critiques contre la croissance à tra­

vers l’industrialisation se multiplient et beaucoup mettront l’accent sur le manque d ’équité et la situation des pauvres. Au travers de la comparaison et de la dissociation du problème urbain et rural, les auteurs avancent q u ’une stratégie de développement industriel urbain qui néglige la majorité rurale ne peut avoir d ’incidence sur le problème de la pauvreté [44],

Tous les néo-institutionnalistes mettent l ’accent sur le rôle de l’Etat dans le processus de développement. Pour Myrdal, les institutions et les attitudes sont largement responsables du sous-développement. Beaucoup d ’Etats du Tiers- Monde sont «mous», incapables de mener des politiques de développement. Un changement à ce niveau reste donc primordial. «Pour préparer la voie du développement économique, ces pays ont besoin de réformes initiales massives de leurs structures sociales, sans ces réformes, il n ’y aura ni intégration nationale, ni développement économique» [45]. Ainsi, les réformes des struc­

tures sociales et politiques tout comme un changement d ’orientation des pays développés sont des prérequis de la planification dans le Tiers-Monde. Les tenants de cette approche prônent l’intervention de l’Etat, la croissance condi­

tionnelle, les investissements dans l’agriculture et le capital humain et la priorité à l’emploi. L’inégalité est un frein à la croissance, car les pays qui la vivent conserveront un marché intérieur limité. La réduction de celle-ci, aboutissant à une augmentation de revenus des pauvres, accroîtra la demande et procurera un

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stimulus à la production. En conséquence, la redistribution des richesses, souvent par le biais des réformes agraires ou les taxes sur les produits de luxe, les projets agricoles financés par l’Etat ou l’éducation gratuite favoriseront ce processus.

Le développement ne viendra pas par un processus d ’évolution naturelle. Pour Perroux, il n ’est pas le résultat d ’une évolution spontanée, il n ’est pas au bout d ’un consensus sur l’intérêt commun, il ne se réduit pas à la réalisation de modè­

les conçus par les experts, ne se contente pas d ’une pure et simple invitation morale à satisfaire les besoins de l’homme. Bien que certains éléments con­

courent à sa promotion, il ne peut être que le fruit d ’une entreprise résolue con­

vergence de contraintes de réalité et de contraintes de vérité. Le progrès est une tâche, pas une fatalité [46], Le développement, dans l’optique néo-institution- naliste, nécessite des politiques étatiques radicales pour sortir du cercle vicieux du sous-développement. Une intégration économique des pays du Tiers-Monde à l ’économie mondiale par l’entremise de la solidarité et des programmes d ’aide et de coopération sont des solutions incontournables. Toutefois, l’aide devrait être orientée vers l’augmentation de la production de denrées alimentaires, vers l’implantation d ’installations sanitaires et non pas essentiellement vers des pro­

jets industriels.

Tout en étant, sans aucun doute, critique de la pensée dominante — les néo- institutionnalistes se basent sur l’expérience coloniale et la pensée sociale [47]

— , le développement économique demeure dans cette approche une question d ’accumulation du capital et de progrès technique. L’intégration au marché m on­

dial reste un but à atteindre. Selon Cardoso, la pensée de la CEPAL, par exem­

ple, constitue «l’originalité d’une copie» [48]. En effet, ni le discours de la CEPAL, ni la vision du développement de Perroux ou de Myrdal ne constituent un véritable bouleversement. Les catégories fondamentales de la pensée capita­

liste restent inchangées. Les propositions de la CEPAL ou de Myrdal sont assi­

milées à Y establishment du développement et émanent d ’organes officiels. Il y a innovation dans la mesure où le développement est envisagé comme indépendant de la croissance mais en dernière analyse, il y est toujours assujetti.

Les théories post-développementalistes ou l ’après-développement

Jusque dans les années soixante-dix, l’enjeu principal des discussions portant sur le Tiers-Monde fut la nature du développement. Nous avons pu voir, dans la première partie de cet article, à quel point c ’était une conception occidentale du développement, englobant les catégories de base du capitalisme, qui a dominé depuis la Deuxième Guerre mondiale. Même ceux qui critiquaient les stratégies capitalistes le faisaient dans la perspective d ’une nécessité du développement [49]. Il y avait en ce sens une adhésion unanime à une notion construite à l’intérieur d ’une histoire et d ’une culture particulières. Le dévelop­

pement avait atteint le stade d ’une «croyance sociale, une sorte de certitude

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collective dont les modalités sont discutables ou dont on peut douter en privé, mais dont il est inconvenant de discuter publiquement le bien fondé» [50].

L e c o n t e x t e d e l a n a i s s a n c e d u p o s t-d é v e l o p p e m e n t a l i s m e

Depuis la Deuxième Guerre mondiale, les efforts consentis et la diversité des actions déployées pour enrayer le «sous-développement» ont été nombreux.

Toutefois, en dépit de cet intérêt constant pour le développement du Tiers-Monde et de l’accent mis sur la nécessité, voire le devoir de combler le fossé qui séparait les deux entités, la tendance n ’a pas été à la convergence mais à l’éloignement.

Les problèmes essentiels définis par la problématique du développement n ’ont pas été résolus. Nombre de pays se trouvent aujourd’hui dans des situations plus dramatiques qu’à la sortie des décolonisations. Tous les rapports du PNUD l’at­

testent ainsi que les différentes études émanant des organisations internationales et non gouvernementales.

En matière de développement, les années 1980 furent considérées comme

«une décennie perdue» [51]. La lourdeur de la dette et de son remboursement et les conséquences des ajustements structurels, ensemble de mesures économiques prises pour assainir l’économie des pays endettés et appauvris du Tiers-Monde, enrayèrent les rouages du système. La préoccupation essentielle devint alors la résolution de la crise de la dette et le développement, un problème marginal.

Selon les World Development Indicators de la Banque Mondiale (1999), dans les pays les plus pauvres, le PNB p e r capita diminua de 10 à 15 % entre 1980 et

1987.

Face à ces constats d'échec et dans un cadre international de la fin du monde bipolaire [52], un nouvel élément vint alors sous-tendre la réflexion du développement : la culture. Après la mise en évidence de nombreux éléments susceptibles d ’avoir faussé le cours du développement, comme la négligence des besoins essentiels, la non-prise en compte des femmes, le dernier quart de notre siècle se caractérise par «la prise en compte de la dimension culturelle du développement» (...) Dénoncer le caractère techno-économique des dispositifs voués au développement, tout en élargissant l’empire du développement aux faits de culture ignorés et méprisés ju sq u ’ici, telle est, pour l’essentiel, l’am bi­

tion des clercs de l ’H u m a n ité; telle est l’utopie raisonnée de Y Eminence des forums internationaux» [53].

L’impérieuse nécessité d ’une réconciliation avec la culture apparaît dans tous les discours du développement et en particulier dans celui des organisations internationales. Si le développement n’a pas eu lieu, serait-ce qu’il y eut négli­

gence de ce facteur essentiel ? Cette «découverte» s ’inscrit dans le désenchante­

ment du développement et au-delà dans la dénonciation d ’un économisme et d ’un ethnocentrisme qui caractérisent l’approche du développement jusque-là. Il faut réconcilier le développement avec ses milieux socioculturels. Ce constat procède à des degrés divers d ’une «désoccidentalisation» de la pensée ou tout au

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moins d ’un questionnement sur les schèmes universels, en particulier du progrès, qui prévalurent. On postule encore une fois un autre développement. La prise en compte de la culture ne signifie pas que les éléments culturels étaient absents des théories de la modernisation ou des théories radicales. Il s’agit de dénoncer le primat économique dans le processus du développement.

Les théories de la m odernisation, le marxisme et les théories de la dépendance ont en comm un l’économicism e, le centrisme et la téléologie : l’économ icism e, car la croissance économ ique est le noyau du changem ent social ; la téléologie, dans la mesure ou l’hypothèse de base est le développem ent orienté vers un but ; le cen­

trisme, car le développem ent (ou le sous-développem ent) est conduit vers là où il est le plus avancé, le monde de la métropole.

En cela, ces théories sont les variations d ’un m êm e thème. Ceci tém oigne de la puissance et de la complexité du développementalism e comm e paradigm e [54].

L e p o s t-d é v e l o p p e m e n t a l i s m e

Parallèlement à la vision de la nécessité de prendre en compte le facteur cul­

turel, particulièrem ent caractéristique des organisations internationales, s’est mise en place une critique radicale du concept de développement qui se greffe d ’une certaine manière sur la critique de la globalisation et l ’apparition des courants défendant le local. Les tenants de cette approche sont en majorité issus des milieux universitaires tant occidentaux que du Tiers-Monde. Ils procèdent à une lecture de l ’histoire des idées en Occident, à une étude de la genèse de la modernité et à une relecture épistémologique. Tout en démontant les mécanismes par lesquels a eu lieu l’acceptation du progrès, certains auteurs comme Arturo Escobar vont mettre en évidence la résistance culturelle à l’impérialisme cul­

turel. D ’autres, comme M. Edwards, critiquent la conception du développement comme transfert unilatéral de connaissances du monde «développé» vers le monde «sous-développé», tout en remettant en cause la concentration du pouvoir dans les mains des experts qui découle de la vision classique du développement et de la dévalorisation des savoirs populaires [55]. En Belgique, nos collègues Michael Singleton ou René Devisch procèdent à ce type d ’analyse dans leurs travaux sur les universités africaines.

Cette approche constitue non seulement un regard nouveau sur le Tiers- Monde, à travers l’analyse des relations de pouvoir et des rapports de dom ina­

tion entre les sociétés, mais aussi une interrogation fondamentale de l ’entreprise des sciences sociales. Les racines ou les référents sont multiples : Polanyi, Louis Dumont, Edward Saïd, M ichel Foucault, Gilles Deleuze,...

Le sp o i n t s c o m m u n s d e s t h é o r i e s

Le post-développementalisme met un accent particulier sur l ’analyse du dis­

cours sur le développement et la représentation de l ’autre. Cette approche insiste

(21)

sur la reconnaissance de l ’importance du discours et de la dynamique du pouvoir pour toute étude de la culture. L’analyse porte sur la manière dont le Tiers- M onde comme entité a été produit par le discours et les pratiques de développe­

ment, depuis leur naissance, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Comme l’a écrit M ichel Foucault, ce type d ’analyse permet d ’échapper à sa familiarité et de mettre en évidence le contexte théorique et pratique de sa production.

Considérer le développement comme un discours produit historiquement permet de voir comment certains pays en sont arrivés à être considérés et à se considé­

rer presque du jour au lendemain comme sous-développés. Il perm et de mettre en évidence que le développement est devenu un problème et comment chacun s’est embarqué dans cette aventure.

L’idée de départ est que la représentation de l’Asie, l ’Amérique latine et l’Afrique comme sous-développée est dans la continuité d ’une tradition occi­

dentale de définir l’autre. Cette étiquette ne remplacerait donc que la multitude des termes qui ont été utilisés jusque-là. De l ’étiquetage, la pensée et le discours du développement vont déceler pour ces pays des besoins et des problèmes. Le Tiers-M onde deviendra ainsi ignorant, analphabète, traditionaliste, pauvre, pas­

sif, fataliste... Il est évident que ce sont des attributs qui peuvent avoir leur ju sti­

fication dans une comparaison ; toutefois, dans l ’étiquetage, ils deviennent un problème alors q u ’ils ne l ’étaient pas nécessairement jusque-là. Ce qui importe, c ’est que ce processus découle lui-même d ’une autoreprésentation positive, va­

lorisant l’éducation à l ’occidentale, la modernité, la technologie,... et d ’une sur­

évaluation de ses propres standards, comme universellement souhaitables. Dans cette conception nous avons donc une remise en question de l ’universalisme des approches traditionnelles du développement. On trouve également une critique portant sur la négligence, voire le gommage du passé des peuples du Tiers- Monde et de leur présentation comme a-historiques.

L’explication réside dans le fait que le discours du développement est tenu dans des conditions d’inégalité de pouvoir. Les auteurs de cette tendance m on­

trent qu’il crée un appareil efficace de production de connaissances et d ’exerci­

ce du pouvoir sur le Tiers-Monde. «L’Orient est une carrière» disait Disraeli dans Tancred, le développement montrant les post-développementalistes en est égale­

ment une.

En rupture totale avec les approches traditionnelles du développement, qu’elles soient de la modernisation, radicales, néo-institutionnalistes ou encore issues de la prise en compte du facteur culturel dans les organisations interna­

tionales qui ont un point commun, la croyance au développement, vers la fin des années quatre-vingt et dans les années quatre-vingt-dix, les post-développemen- talistes présentent le point commun de mettre en question la notion même de développement et le fait q u ’elle ait acquis le statut de certitude dans l’imaginaire social et soit devenue universellement souhaitable.

Certaines analyses s’appliquent à m ontrer com m ent le développement, dès sa naissance, a fonctionné comme une croyance au sens durkheimien du terme. Les

(22)

tenants de cette approche, dont Escobar est peut-être l ’auteur le plus représen­

tatif, mais qui regroupe un très grand nombre de chercheurs, du Tiers-Monde inclus, postulent la fin du développement, c ’est-à-dire la fin de l ’hégémonie de la pensée du développement et de la proclamation de sa toute-puissance.

Le développement est mort, l ’ère du développement a pris fin et les titres des écrits sont assez caractéristiques : Il était une fo is le développement [56], En­

countering Development, The M aking and Unmaking o f the Third World [57]...

«L’idée même du développement apparaît comme une ruine dans le paysage intellectuel. Désillusions et déceptions, échecs et crimes ont été les compagnons constants du développement et ils racontent la même histoire : cela n ’a pas marché» [58].

On trouve chez les théoriciens de cette approche une lecture fondamentale­

ment différente de la pauvreté, clef de voûte des théories du développement.

Pour M ajid Rahnéma [59] ou Wolfgang Sachs [60], la pauvreté passive, au sens moderne du terme, apparut lorsque l’expansion de l’économie du marché cassa les liens communautaires et priva des millions de personnes de l’accès à la terre et aux autres ressources. Avec l’apparition du capitalisme, la paupérisation était inévitable. Toutefois, même si la pauvreté a toujours existé, c ’est sa forme et sa gestion qui diffèrent avec le capitalisme. Il suffit de se référer au foisonnement des sociétés philanthropiques au 19e siècle. A cette période, le pauvre devient l’assisté et le Tiers-M onde suivra dans cette optique. Ainsi, cette modernisation de la pauvreté est non seulement une rupture des liens vernaculaires, mais l’im­

position de nouveaux systèmes de contrôle. Le pauvre devient un problème social. Le traitement de la pauvreté ouvre de nouveaux domaines pour la société.

Dans ce sens, l’histoire du développement est, d ’une certaine manière, la con­

tinuation de l’histoire du social [61],

Le post-développementalisme débusque et dénonce l ’ethnocentrisme arrogant des «développeurs». Le développement en sortira aussi mal en point que l ’orien­

talisme chez Edward Saïd, dégageant même une sorte d ’écœurement. En raison de l ’approche caractéristique de mise en cause de la pensée du développement et de la lecture de l ’évolution de la pensée occidentale, les tenants de cette vision prôneront le recours à une anthropologie fondamentale, à l’anthropologie de la modernité (Escobar), la promotion des méthodologies alternatives, telle la recherche participative (Edwards) revalorisant les savoirs locaux, et la décons­

truction des discours dominants.

On préconise essentiellement un changement de grille de lecture, le démem­

brement du discours classique du développement, ce qui pose évidemment le problème de l ’autocritique de l’Occident et de ses limites.

On peut déceler l’impact du post-modernisme sur cette approche à travers l ’accent mis d ’une part sur la fragmentation et les différences et d ’autre part sur l ’analyse discursive [62]. Dans ce sens, les critiques émises à l ’encontre du post­

modernisme s ’appliqueraient aussi au post-développementalisme. En effet, en insistant sur la diversité et la relativité culturelle on pourrait tom ber inexorable­

(23)

ment dans le travers contraire à celui du discours globalisant universaliste, c ’est- à-dire que l’on négligerait alors l’éventualité de l’existence des problèmes com ­ muns et de là de solutions communes [63],

Le post-modernisme rejette l’universalité des Lumières, le primat d ’une rai­

son unique, en un mot, l’image du progrès qui a orienté le monde dès le 18e siè­

cle. Le post-développementalisme partage en partie ces idées, lorsqu’il procède à la critique des conceptions linéaires, téléologiques, ethnocentriques et déter­

ministes des théories classiques du développement.

Les critiques des implications de cette lecture ont été nombreuses. Si l’analyse du discours et la déconstruction peuvent être enrichissantes pour la com préhen­

sion de l’échec d ’un certain nombre d ’actions dans le Tiers-Monde, et ce, à tra­

vers une meilleure compréhension des objectifs idéologiques du monde occi­

dental, l ’opposition entre l’Occident et le reste du monde qui inverse les respon­

sabilités et les qualifications au détriment du premier est aussi généralisante que les approches précédentes.

Pour d ’autres, l’hybridité des identités locales, dans laquelle tradition et modernité se mêlent, n ’est pas prise en considération. D 'aucuns évoqueront même l’ethnochauvinisme [64]. De même, le renversement de l’antagonisme entre savoir scientifique occidental et savoirs locaux au profit des derniers peut être discutable [66],

Le danger du post-développementalisme serait donc d ’être aussi globalisant que les approches qu’il critique. Le point faible demeure encore le fait que la déconstruction n ’est pas vraiment suivie de construction, le post-développemen­

talisme reste un projet à l ’état d ’ébauche.

NOTES

[1] Cet article est une version abrégée et rem aniée de textes parus dans F. Nahavandi, Stigmate. Introduction à l'étude des pays dits en voie de développement, Bruxelles, Bruylant, 2001.

[2] Voir, entre autres, la traduction com plète de ce point et son analyse détaillée et com m entée dans Rist, Le développement, histoire d ’une croyance occidentale (Paris, Presses de Sciences Po, 1996, pp. 116-132) ; Arturo Escobar, Encountering D evelopm ent (Princeton, Princeton Univ. Press, 1995, p. 4.) ouvre, quant à lui, son livre avec ce discours.

[3] Truman, 1949, Public Papers o f the Presidents o f U nited States, Harry S. Truman, W ashington DC, G overnment Office, 1963.

[4] Voir Peter Praxmarer, Development. On the Sociogenesis, Political Usage and Theoritical Possibilities o f a Concept (Thèse 383, Institut U niversitaire des Hautes Etudes Internationales, Université de Genève, 1984), cité par Rist (1996, 121).

[5] Voir à ce sujet, G. Ohlin, “The Evolution o f Aid Doctrine” , in J. Bhagwati &

R. S. Eckans (eds.). Foreign Aid, H armondsworth, Penguin, 1970, pp. 21-62 ; D. Harrison, The Sociology o f M odernization & D evelopm ent (London and New York, Routledge, 1988).

(24)

[6] En tém oigne au fil des tem ps, l’insistance des Etats-Unis pour les réformes agraires par exemple. Les adm inistrations successives am éricaines ont, par crainte des répercussions des révolutions chinoise et cubaine entre autres, favorisé et soutenu les réformes agraires. L’exemple iranien est assez évocateur.

[7] Voir D. H ulme et M. Turner, Sociology and D evelopm ent : Theories, Policies and Practices (London, H arvester W heastsheaf, 1990).

[8] Voir P. Gentelle, “L’A fghanistan et l ’aide internationale de 1950 à 1978 : espace m odem isable, société rétive”, in Revue Tiers-Monde, 20, n° 80, 1979, pp. 863-869.

A propos de l’aide de l’URSS à l’A fghanistan et les liens historiques voir égale­

ment, F. Nahavandi, L ’A sie du Sud-Ouest, Afghanistan, Iran, Pakistan (Paris, L’Harmattan, 1991) ou encore Q.V.S. Bach, Soviet Economic Assistance to the Less D eveloped Countries (Oxford, Clarendon Press, 1987).

[9] Voir G. Zeylstra, A id o r D evelopm ent ? (Leyden, A. W. Sijthoff, 1977).

[10] Voir aussi A. Fontaine, Histoire de la guerre fro id e (Paris, 1976).

[11] W . E. M oore, Social Change (New Jersey, Prentice Hall, 1963, p. 93).

[12] Voir pour une critique de l’approche dichotomique du Tiers-M onde, H. Brookfield, Interdependent D evelopm ent (London, M ethuen, 1975).

[13] Voir à ce sujet, G. Germani, The Sociology o f Modernization, Studies on its Historical and Theoretical Aspects with Special Regard to Latin Am erican Case (New Brunsw ick and London, 1981) et Politique, société et modernisation (Gembloux, Ed. Duculot, 1972, traduction française, chapitre 2).

[14] World M odernization : The Lim its o f Convergence (New York, Oxford, Elsevier, 1979).

[15] Chicago (Chicago Univ. Press, 1952). Voir en particulier dans ce livre A lexander Gerschenkron, “Economic Backwardness in Historical Perspective” (pp. 3-29), Robert K. Lamb, “Political Elites and the Process o f Economic Developm ent”

(pp. 30-53), ou O scar Handlin, “International M igration A nd the A cquisition o f New Skills” (pp. 54-59).

[16] M. J. Herskovits, “The Problems o f Adapting Societies to New Tasks” , in The progress o f Underdeveloped A reas (op. cit., pp. 89-112).

[17] Il faut noter que la majorité des tenants de cette approche sont en accord avec la théorie de la convergence selon laquelle toutes les sociétés industrielles, quel que soit leur régime politique, tendent vers des formes d ’organisations sociales simi­

laires. Voir, entre autres, pour la convergence R. A ron, D ix-huit leçons sur la société industrielle (Paris, Gallimard, NRF, 1962).

[18] G. Germani, Politique, société et m odernisation (op. cit., p. 62). On trouve dans cet ouvrage un schém a synoptique des deux types idéaux : société traditionnelle et société industrielle, qui reprend un très large nombre de facteurs (pp. 131 à 142).

[19] Voir, par exemple, égalem ent W.E. Moore, op. cit.

[20] Idem, pp. 62-63.

[21] “Industrialization and the Development o f Industrial Societies”, in Tom Bum s (éd.), Industrial man, H armondsworth, Penguin Books, 1969, pp. 43-68.

[22] B. Hoselitz, Sociological Aspects o f Economic Growth (New York, Free Press, 1960).

[23] Voir à ce sujet J. Laite, “The Sociology o f D evelopm ent”, in P. F. Leeson &

M. M. M inogue (eds.), Perspectives on D evelopm ent, Contemporary Issues to Developm ent Studies, M anchester Univ. Press, 1988, pp. 160-193.

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