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Les Congolais fêtent la fin de la guerre, mais redoutent le brassage des troupes

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Sommaire

Adilio Custodio : «EUPOL appuie les réformes dans le secteur de la sécurité en RDC»...P. 2

Jean-Paul Michel : «Il ne revient pas aux Européens de décider du recensement des dissidents du CNDP au sein des FARDC»...P. 3

Nord-Kivu : la reprise de Rutshuru par les FARDC ne rassure pas les déplacés de guerre...P. 4

Sud-Kivu : à Bukavu, les soldats vivent sur le dos

de la population...P. 4

JDC Journal-école n°12 - Semaine du 2 au 8 février 2009

Les Congolais fêtent la fin de la guerre, mais redoutent le brassage des troupes

Les combattants du Congrès National pour la Défense du Peu- ple (CNDP) ont commencé leur intégration dans les rangs des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC).

Les populations du Nord-Kivu qui applaudissent la fin de la guerre redoutent cependant cette inté- gration précipitée.

P

rès d’une dizaine des camions de marque Fuso transportant des militaires, ont été visibles dans les rues de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, pendant la dernière semaine du mois de janvier 2009. Tous venus de l’Armée Natio- nale Congolaise (ANC), branche ar- mée du CNDP, principal mouvement rebelle dans la région, ces hommes, habillés en uniforme multicolore, portant des bottes en caoutchouc chantaient en kinyarwanda, attirant l’attention de la population sur leur passage. C’est le 16 janvier 2009 que le général Bosco Ntaganda, chef d’état-major des forces du CNDP, avait déclaré la fin de la guerre et le début de l’intégration de ses troupes dans les rangs des FARDC.

L’intégration effective a débuté d’abord à Mushaki, localité située à environ 40 km de Goma, dans le territoire de Masisi, et ensuite à Ru- mangabo, à plus de 30 km plus au nord du chef-lieu du Nord-Kivu, dans

le territoire de Rutshuru. Ce proces- sus qui se poursuit dans la foulée des opérations conjointes menées par les armées congolaise et rwan- daise contre les éléments des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR) et Interahamwe, suscite énormément des craintes dans la population. «Nous sommes surpris par la tournure qu’ont pris les événements. Les choses ont très vite changé : on ne parle plus de la guerre et les troupes hier ennemis circulent d’un camp à l’autre !», s’ex- clame Richard Mupikule, étudiant de son état.

L’étonnement est grand dans la population qui a longtemps souffert

des affres des guerres à répétition entre les FARDC et le CNDP dans la région. «C’est bon, c’est le soula- gement, la joie», s’exaltent commer- çants, étudiants et fonctionnaires dans la ville. Et pour le manifester, la Société civile et la Fédération des Entreprises du Congo (FEC/Nord- Kivu) ont séparément organisé des marches d’appui à la fin de la guerre au Nord-Kivu.

Inquiétudes

Mais cette joie s’amoindrie petit à petit. «C’est bon que la guerre ait pris fin, mais la précipitation avec laquel- le se déroule le brassage des trou- pes du CNDP et des FARDC n’est

Extradition de Laurent Nkunda : la voie politique privilégiée A

rrêté le 22 janvier 2008 à Gi-

senyi, au Rwanda, Laurent Nkunda est toujours gardé par les autorités de Kigali. Après l’annonce de l’arrestation du leader du Con- grès National pour la Défense du Peuple (CNDP), le gouvernement a demandé à Kigali d’extrader le général-rebelle pour qu’il soit jugé à Kinshasa.

Pendant que les armées rwan- daise et congolaise continuent la traque des éléments des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR), d’aucuns s’in- terrogent sur le sort du général Laurent Nkunda. Mieux, plus d’un Congolais se demande si le gou- vernement rwandais répondra fa- vorablement à la demandé d’extra- dition du leader du CNDP formulée par les autorités de Kinshasa.

Répondant à la demande formu- lée par les autorités congolaises, le gouvernement de Kigali, par le biais du général Rutaremara, porte- parole de l’armée rwandaise, a in- diqué «qu’il entendait réserver une suite politique et non judiciaire au problème de Nkunda». «Des dis- cussions de haut niveau ont lieu entre les autorités rwandaises et congolaises pour régler au plus vite le transfert de Nkunda qui se trouve encore au Rwanda», déclarait, de son côté, Lambert Mende, porte- parole du gouvernement congolais, au cours d’un point de presse tenu deux jours après l’arrestation du chef rebelle.

Interrogé sur le même sujet, le chef de l’Etat congolais, Joseph Kabila a, lors d’une conférence de presse animée le 31 janvier 2008, fait la déclaration suivante : «Le général déchu n’est pas un sac de haricot ou de maïs. C’est un mon- sieur qui s’appelle Laurent Nkunda.

Il y a un processus politique et di- plomatique avant tout». Rassurant que le leader du CNDP sera extra- dé, Joseph Kabila a affirmé que ce processus «est le fruit d’un accord signé entre le Rwanda et la RDC».

Vue de Kigali ou de Kinshasa, l’extradition du général Laurent Nkunda devrait être réglée de façon politique et diplomatique, et non ju- diciaire.

Le cas Bosco Ntanganda Au moment où tout le monde attend le dénouement de l’affaire Nkunda, des ONG locales et inter- nationales demandent au gouver- nement congolais de livrer Bosco Ntanganda à la Cour Pénale In- ternationale (CPI). Cette dernière Cour a lancé, depuis plus d’un an, un mandat contre cet ancien chef d’état-major du CNDP, aujourd’hui chef du mouvement.

«Le président Kabila devrait exécuter le mandat d’arrêt de la CPI visant Ntaganda pour crimes de guerre… Le gouvernement congo- lais devrait arrêter Bosco Ntagan- da, un ancien commandant rebelle accusé de crimes de guerre par la CPI… Kinshasa a une obligation

pas rassurante», s’inquiète Salvator Kalauka, président de la jeunesse intercommunautaire du Nord-Kivu.

Dans les camps de Mushaki et de Rumangabo, seules les troupes du CNDP sont brassées aux FARDC.

Les autres venues de différents grou- pes armés Maï-Maï, seront brassées à Nyaleke, dans le territoire de Beni.

C’est une exigence du CNDP. «C’est trop risquer de vouloir brasser des troupes non identifiées», ajoute Sal- vator Kalauka.

De nombreux rapports des ONG et des Nations unies ont, ces der- niers mois, fait part de la présence des soldats rwandais aux côtés de ceux du CNDP. Et certaines sources anonymes dans la Société civile con- firment cette présence au sein même des unités du mouvement rebelle.

«Les hommes de Laurent Nkun- da étaient encadrés et appuyés par des soldats rwandais qui étaient identifiés comme des Congolais, se confondant aux Tutsi congolais», ex- plique B.B activiste d’une organisa- tion de la Société civile. Et d’ajouter:

«Lors du brassage, ces éléments seront aussi intégrés au sein des forces gouvernementales, ce qui constitue un risque». Pour l’armée, il fallait parer au plus pressé. «Bat- tre le fer quand il est chaud», argue, sous anonymat, un officier.

Patient NDOOLE MAMBO InterCongo media/Syfia

légale d’arrêter Ntaganda, et non de lui donner une promotion», écrit Kenneth Toth, Directeur Exécutif de Human Rights Watch, dans sa let- tre datée du 1er février, adressée au chef de l’Etat congolais.

Un jour auparavant, Joseph Ka- bila s’était déjà prononcé sur le cas Bosco Ntanganda. «… La coopéra- tion entre la RDC et la CPI a tou- jours été exemplaire. Il n’y a pas un seul pays qui a coopéré avec la CPI comme notre pays. Mais, la RDC est un pays indépendant et souverain.

Le choix à faire, c’est entre la justice internationale, expéditive ou non, et la paix, la stabilité, aujourd’hui, tout de suite et maintenant. Pour moi, le choix est clair. L’option pour nous, c’est la paix, la stabilité et la sécu- rité pour notre population. C’est ça l’essentiel pour le moment. Toute autre action qui mettra en cause cette option est à écarter». En ter- mes clairs, Kinshasa ne livrera pas Bosco Ntanganda à la CPI au nom

du retour de la paix dans l’Est.

Aussitôt après le point de presse du chef de l’Etat congolais, la Mo- nuc a, dans un communiqué de presse publié le même jour, déclaré

«qu’elle ne participera à aucune opération dans l’Est du pays dans laquelle Bosco Ntanganda serait associé, étant donné qu’il est sous mandat d’arrêt international de la CPI».

Déjà, lors de la cérémonie de l’in- tégration «accélérée» des éléments du CNDP au sein des FARDC à Rumangabo, à 50 km de Goma, les représentants de la communauté internationale qui étaient présents, avaient quitté précipitamment les lieux quand Bosco Ntanganda avait pris place à la tribune d’honneur.

Comme on peut le voir, la RDC risque d’ouvrir un front diplomati- que contre la communauté interna- tionale qui réclame la tête de Bosco Ntanganda. Robert LOFOSO

et Rombaut KASONGO

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JDC Journal-école n°12 - Semaine du 2 au 8 février 2009

Journal du Citoyen

nom, le sexe, le grade, la photo, le groupe sanguin, le matricule du militaire. On y retrouve aussi la photo de la personne, le numéro de la carte avec la signature d’une autorité, le lieu où était recruté le militaire ainsi que le lieu et la date de naissance.

«Parmi d’autres renseigne- ments contenues dans la puce, fi- gurent les relevés des empreintes biométriques des index de la main gauche et droite. Ce qui permet de démasquer le faussaire, puisqu’on ne trouvera jamais au monde deux personnes qui portent les mêmes empreintes sur les deux mains. En dix secondes, on peut vite remar- quer, en faisant passer la carte sur ordinateur, que le détenteur est bel Les militaires des Forces Ar-

mées de la République Démo- cratique du Congo (FARDC) dis- posent désormais d’une carte d’identité moderne. Disponible grâce à l’appui de l’Union euro- péenne qui a financé le recense- ment biométrique des militaires congolais à hauteur de 2 millions d’euros, cette carte est infalsifia- ble. Comment se présente-t-elle

? Le général Jean-Paul Michel, chef de la Mission EUSEC, éclai- re l’opinion.

L

a carte d’identité biométrique se présente comme une carte à puce, une carte bancaire. Elle a l’aspect d’une carte visa qui com- prend le nom, le post-nom, le pré-

Gros plan sur la carte d’identité biométrique des militaires de FARDC

et bien le propriétaire de la carte ou non, lorsqu’on examine les em- preintes de son doigt qu’il pose sur un boîtier relié à l’ordinateur», indi- que le chef de la mission EUSEC.

Grâce à ces données, note le Général Jean-Paul Michel, les FARDC pourront bien contrôler, par exemple, le versement de salaire à la bonne personne. Elles peuvent aussi vérifier l’identité du militaire envoyé en formation, et marquer même les périodes où il a suivi des stages ainsi que la qualification ob- tenue. Bref, la carte pourra accom- pagner le militaire tout le long de sa vie.

«Ces renseignements nous per- mettent d’avoir une bonne image de ce militaire pour des besoins

A l’affiche

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de formation, de planification de sa carrière, de son implantation, indi- que le chef de mission de l’EUSEC.

En cas de changement de grade, la base des données sera remise à jour et quand la personne se pré- sentera administrativement devant l’ordinateur, la réalité de son statut sera affichée sur l’écran».

D’une valeur de 5 à 6 euros, la carte biométrique des militaires a commencé à être distribuée aux officiers des FARDC en fin décem- bre 2008. Le premier à le recevoir, c’était le Chef d’Etat major des FARDC, le Général Etumba, ainsi que plusieurs généraux présents à Kinshasa. L’opération se poursui- vra dans tout le pays en 2009 en commençant par Kinshasa.

Mariette NGELEKWA de formation de différents besoins de la police nationale congolaise, mais également de prévoir l’organisation des centres de formation. Cela nous permettra de veiller à ce que la forma- tion sera gérée de manière adéquate par rapport aux moyens disponibles, tout en sachant qu’une réforme ne se fait pas en deux jours. Sinon, on ne parlera pas d’une réforme, mais plutôt d’une révolution.

Outre l’Unité de Police Intégrée lors de la période éléctorale, EUPOL a-t- elle formé d’autres unités ?

Nous sommes actuellement en pro- cessus de formation d’une unité spé- cialisée de police. Cette formation a démarré il y a quelques semaines et se terminera fin février 2009. Il s’agit de la Police de Recherche et d’Intervention.

C’est une unité de police judiciaire, composée des enquêteurs issus de la PNC avec une compétence de terrain.

Cette unité sera mise à la disposition de la police judiciaire et de la Police nationale congolaise pour la lutte con- tre la haute violence comme celle qui est vécue actuellement dans la ville de Kinshasa. La Police de Recherche et d’Intervention (PRI) diffère ainsi de la Police d’Intervention Rapide (PIR) – même si les noms se ressemblent ! La PIR est une unité spécialisée dans le maintien de l’ordre public. Ce sont, en fait, deux unités de la police qui re- gorgent de professionnels de police travaillant dans deux domaines diffé- rents. D’ailleurs, certains volontaires de la police de recherche sont issus de la PIR.

Rencontrez-vous des difficultés dans l’accomplissement de votre mission?

Elles sont essentiellement d’or- dre financier. En effet, les difficultés financières que connaît le pays font que les professionnels de la police, comme l’ensemble de la population, n’aient pas un revenu qui puisse leur permettre de vivre normalement. Tant que l’instabilité que connaît le pays ne soit pas vaincue et que les con- ditions sécuritaires ne favorisent pas le développement économique, le re- venu de la population ne pourra pas augmenter. Donc, la réussite de la réforme du secteur de la sécurité, et plus particulièrement de la police, est intimement liée à l’amélioration de la situation économique du pays.

Propos recueillis par Yves KALIKAT et Rombaut KASONGO

Adilio Custodio : «EUPOL appuie les réformes dans le secteur de la sécurité en RDC»

Officier supérieur de la police portugaise, le Superintendant Adi- lio Custodio dirige depuis 2005 des missions européennes de police en République démocratique du Con- go: EUPOL Kinshasa de février 2005 à juillet 2007, et la mission EUPOL RDC. Conseiller spécial de l’Union européenne dans ce pays d’accueil, il commande une mission dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité. C’est avec son concours, en coopération avec des partenai- res nationaux et internationaux, que EUPOL peaufine la réforme de la Police nationale congolaise.

Quel rôle EUPOL joue-t-il en RDC?

C’est une mission qui, depuis deux ans, œuvre en RDC dans le cadre de la réforme de la police, mais aussi de son interface avec la justice dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité. Nous ne sommes pas ici comme une mission de gestion civile de crise de l’Union européenne pour remplacer les autorités congolaises.

Notre mission est plutôt de conseiller, d’assister et d’appuyer, dans la me- sure du possible, les autorités du pays à initier et à développer la réforme du secteur de la sécurité. Outre les réfor- mes dans le secteur de la sécurité en interaction avec la justice, notre mis- sion s’intéresse aux problèmes liés au droit international et militaire, tâchant de promouvoir les normes démocrati- ques et le principe de bonne gestion des affaires publiques…Une de nos priorités est que les autorités congo- laises, mais surtout la Société civile, soient pleinement parties prenantes dans la réforme du secteur de la sé- curité.

Depuis quand EUPOL est-elle opé- rationnelle en RDC ?

Nous sommes la deuxième version EUPOL. Il y a eu une version EUPOL Kinshasa qui s’est mise en place en février 2005. A l’époque, nous avions pour mission d’apporter un appui pour la création d’une unité de police char- gée de la protection des acteurs et des institutions de la Transition. Cette uni- té s’appelait Unité de Police Intégrée (UPI). Elle était formée par EUPOL Kinshasa et équipée par l’Union euro- péenne. Cette unité a surtout travaillé pendant les élections et quelques mois après la tenue de celles-ci. Bien

qu’elle a été formellement dissoute à la fin de la période de Transition, l’UPI continue ses activités et est bien vi- sible dans les rues de Kinshasa. Son équipement sert encore à la protec- tion de certaines institutions du pays, tel le Parlement et le Gouvernement.

Le mandat de la première version d’EUPOL s’est terminé le 30 juin 2007.

Celui d’EUPOL RDC ira jusqu’au 30 juin 2009. Son prolongement dépen- dra de la volonté des 27 pays mem- bres de l’Union européenne qui pour- ront prolonger ou non le mandat après cette date. Pour ma part, j’espère que ce mandat sera prolongé parce que la réforme des services de sécurité vient à peine de commencer.

Quel est l’apport d’EUPOL dans la réforme de la Police nationale con- golaise ?

La RDC est un pays qui dispose de plusieurs institutions policières. A mon avis, il y a trop d’institutions policières.

Une certaine rationalisation, dans le cadre de la réforme, serait une bonne idée. C’est ce qui ressort, d’ailleurs, du projet de loi qui a été soumis au gou- vernement. Certainement que ce texte sera soumis bientôt à l’appréciation de deux chambres du Parlement. Dans un premier temps, nous avons colla- boré avec d’autres partenaires inter- nationaux dont la Mission des Nations Unies au Congo (Monuc) et certains partenaires bilatéraux dans la mise en place d’un forum dénommé «Comité de suivi pour la réforme de la police»

(CSRP). Cette structure de concerta- tion et de coordination se veut un ca- dre unique dans la réforme de la police au sein duquel siègent les membres du gouvernement congolais, les auto- rités de la police nationale, ainsi que

Le superintendant Adilio Custodio prône une gestion rationnelle des institutions policières en République Démocratique du Congo.

(Photo JDC)

les représentants de la Société civile et des partenaires internationaux qui participent de façon directe (contribu- tion physique et intellectuelle) ou indi- recte (à travers des financements) à la réforme de la police congolaise. Le CSRP a un rôle fondamental, son acti- vité a commencé en février 2008. Plu- sieurs groupes de travail se sont mis en place. Le groupe «cadre législatif et réglementaire» a notamment sou- mis à la commission interministérielle un projet de loi organique pour évalua- tion. Nous avons la certitude que ce dossier donnera finalement le cadre juridique de la réforme de la police non seulement pour les partenaires internationaux, mais également pour les autorités congolaises… D’autres groupes œuvrent également sur les ressources humaines, l’organisation de la future PNC, sur la formation des forces de police ou sur la problémati- que des violences sexuelles…

Aviez-vous pensé à ce propos au recensement des éléments de la Police congolaise ?

Il sera impératif de connaître les ressources réelles dont dispose la Po- lice nationale congolaise et d’établir un outil de gestion de ressources humai- nes. Un recensement qui ne se veut pas quantitatif, mais qualitatif pour pouvoir établir un certain triage sera financé par la Délégation de la Com- mission européenne. Cette démarche nous aidera à détecter ceux qui dispo- sent de conditions matérielles pouvant leur permettre de mener la profession policière dans tous ces aspects et ceux qui ont besoin d’un perfectionnement.

Au sein du CSRP, il y existe aussi un groupe de formation qui a la charge d’établir, non seulement le curriculum

Focus

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Journal du Citoyen

ensemble, à résoudre les problèmes qui se posaient. Sur le terrain, nous avons reçu un accueil globalement positif, en particulier, chez les soldats qui ont bien compris l’intérêt, pour eux, de se faire recenser et d’avoir un vrai statut de mi- litaire. Nous sommes allés sur tous les lieux d’implantation où il y a des forces armées, ce qui a représenté 120 postes en RDC. C’est quelque chose de phé- noménal, car ça fait des milliers et des milliers de kilomètres !

Etes-vous désormais fixé sur l’effec- tif des éléments des FARDC à travers le pays ?

Nous avons clôturé officiellement le recensement le 29 décembre 2008. Au premier recensement (été 2007 – été 2008), il y a eu des absences dues aux cas de maladie, mais également d’in- disponibilité de certains militaires qui étaient en stage à l’étranger. Ce n’est pas parce qu’ils n’étaient pas sur place au pays qu’il ne fallait pas les recenser!

On est donc repassé une deuxième fois (octobre à décembre 2008) mais uni- quement dans les villes où nous avons invité les retardataires à se déplacer pour se faire recenser. Quant aux dis- sidents du CNDP et aux milices Maï- maï, il ne revient pas aux européens de décider de leur recensement ou de leur brassage au sein des FARDC. C’est une décision, bien sûr, politique. Il appartient plutôt aux autorités congolaises, au plus haut niveau, de pouvoir décider. Dans le cadre de notre politique d’appui à la réforme du secteur de sécurité, nous assisterons les autorités du pays s’il y a un recensement complémentaire ou un enregistrement biométrique en particu- lier pour les troupes du CNDP et tous les groupes armés qui restent encore dans l’Est du pays. L’aspect technique passe après la décision politique.

Propos recueillies par Mariette NGELEKWA

Quel sort réserver aux criminels de guerre ?

Jean-Paul Michel : «Il ne revient pas aux Européens de décider du recensement des dissidents du CNDP au sein des FARDC»

Le général Jean-Paul Michel a servi dans l’armée française pen- dant 38 ans, dont une dizaine d’an- nées en Afrique. Il commande, pour le moment, la mission EUSEC, à la tête d’une équipe d’experts civils et militaires de 12 pays européens en RDC.

Pouvez-vous éclairer l’opinion sur l’EUSEC ?

C’est une mission de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense (PESD) qui a pour objectif de porter as- sistance et conseil auprès des Forces Armées de la République Démocrati- que du Congo (FARDC). Notre appui se concrétise de deux façons. Il s’agit, en premier lieu, de fournir une assistance et des conseils directement aux respon- sables militaires qui sont à Kinshasa, mais aussi dans quatre autres villes du pays : Goma, Bukavu, Bunia et Kisan- gani. L’autre mode d’action consiste à mettre en application ces conseils en créant, en réalisant, en suivant et en accompagnant des projets divers pour la mise en œuvre de la réforme des FARDC.

Quel est l’apport d’EUSEC dans la ré- forme des FARDC ?

Présente en RDC depuis 2005, la mission EUSEC a commencé petit à pe- tit à mettre en place une politique de ré- forme ainsi que bien d’autres projets en accord avec les autorités congolaises.

Nous avons ainsi apporté notre aide pour toutes les opérations d’intégration des éléments armés au sein des FAR- DC en 2006. Dans la première phase, la principale, on a aidé à la constitution des brigades intégrées. Par la suite, il y a eu un projet expérimental appelé «chaîne de paiement», opération consistant à

la mise en place des structures d’une chaîne financière pour aider le com- mandement militaire à gérer tous les aspects administratifs, en particulier les salaires, les fonds des ménages, etc. En 2007, nous avons entrepris le recense- ment des militaires, car nous nous som- mes aperçus que, pour bien réformer une armée, il fallait d’abord la connaître quantitativement, mais aussi qualitative- ment. Par exemple, savoir de combien d’hommes l’armée est composée, iden- tifier l’âge de chacun, sa qualification, etc. Nous avons, plus tard, amorcé la phase de modernisation de l’adminis- tration avec des projets informatiques et des projets de formation. Nous formons actuellement des informaticiens et, avec le concours des autorités congo- laises, nous sommes en train de créer une école d’administration. Car, dans une armée, le premier système, c’est le système humain. Une armée n’est per- formante que par la qualité de ses hom- mes. Il faut donc gérer ces hommes. Et pour ce faire, il est nécessaire de dis- poser de bons gestionnaires. D’où, la nécessité de disposer d’une école où ils apprendront à gérer. C’est ce que nous sommes entrain de faire. Grâce à l’ap- pui de la Grande Bretagne, nous avons commencé à réhabiliter un bâtiment. Au mois d’avril prochain, nous allons pou- voir redémarrer des stages, des cours, dans les domaines administratifs et des ressources humaines.

EUSEC a été active dans le recense- ment des militaires Congolais. Com- ment cette opération s’est-elle con- crètement déroulée ?

Notre mission d’assistance a été ac- tive, bien sûr, mais dans le cadre d’une opération menée par les FARDC. Le re- censement n’est pas l’œuvre d’EUSEC

Micro baladeur

Libre expression

A coeur ouvert

«Que justice soit faite»

Avant de leur réserver le sort qu’ils méritent, il faut projeter les images de ces guerres afin que la CPI sèche les larmes des milliers de personnes qui continuent de pleurer, de souffrir, de se poser la question de savoir pourquoi cela n’arrive qu’à eux. Ces personnes sans foi ont ra-

la loi. Ces criminels sont responsa- bles des massacres de civils, des viols et du déplacement forcé de cer- tains Congolais. Avec un tel casier judiciaire, la justice doit se pencher sur leur sort 

«Ils doivent subir la rigueur de la loi»

La guerre a pris fin dans la pro- vince du Nord-Kivu et dans les environs. Mais, le désastre laisse des séquelles indélebiles auprès des victimes. Quel sort réservé aux auteurs des crimes. Les Kinois réa- gissent.

«Une armée n’est performante que par la qualité de ses hommes», reconnaît

le général Jean-Paul Michel.

(Photo JDC)

3

Pour avoir marché contre la loi de notre pays, les criminels de guerre doivent subir toute la rigueur de la loi. Ils doivent être arrêtés et jugés.

L’Etat doit venir en aide aux victimes de ces guerres. Au cas contraire, el- les chercheront à se venger un jour.

Un enfant qui a soit perdu ses pa- rents pendant la guerre restera trau-

matisé toute sa vie. Ce traumatisme peut le pousser à la vengeance. Je pense que le sort réservé aux crimi- nels de guerre est scellé par la jus- tice qui doit dire le droit 

«Si la RDC se veut un Etat de droit, elle doit juger les criminels de guerre»

Nul n’est au-dessus de la loi.

Si la RDC se veut un Etat de droit, elle doit traduire en justice tous les criminels de guerre au niveau de la CPI ou les juger sur place au pays.

Ces personnes sans cœurs sont à la base du taux élevé de criminalité élevée en RDC. Elles ne sont pas di- gnes de rester en liberté 

Propos recueillis à Kinshasa par Bybysh LUBUYA vagé des villages entiers au vu et su

des autorités du pays. C’est curieux de voir que la plupart de ces crimi- nels de guerre ont été nommés à des postes politiques ou circulent libre- ment sans être inquiétés. Que justice soit faite 

«Les criminels de guerre doivent être traduits en justice»

Les criminels de guerre doivent être traduits en justice. Ceux qui commettent ou envisagent de com- mettre les mêmes horreurs doivent se rendre compte que la loi existe. Il appartient aux pouvoirs publics d’es- ter en justice et démontrer ainsi que tous les citoyens sont égaux devant

André Emene , 35 ans, cambiste, Kinshasa Suzanne Tshitita, 23 ans,

ménagère, Lemba

Omer Musangu, 47 ans, électricien, Matete

Cynthia Kabola, 21 ans, étudiante, Limete tout seul. C’est d’abord les FARDC.

EUSEC était là dans sa mission de con- seil, d’assistance et de soutien. Con- cernant l’appui informatique, il fallait développer un logiciel susceptible de re- censer tous les militaires et de recueillir leurs données. Nous avons ensuite fourni un appui logistique et financier en finançant notamment le transport du per- sonnel et du matériel, car nous sommes dans un pays immense où les difficultés de communication par la voie terrestre sont connues. Il était donc nécessaire de se déplacer surtout avec des avions, des groupes électrogènes, des ordina- teurs… C’est compliqué et c’est coû- teux ! C’est pour cela que l’Union euro- péenne a aidé, en partie, les FARDC à faire déplacer les équipes, composées d’une quinzaine des Congolais et de deux européens. Sur place, on a veillé à faciliter les équipes mixtes à travailler

JDC Journal-école n°12 - Semaine du 2 au 8 février 2009

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JDC Journal-école n°12 - Semaine du 2 au 8 février 2009

Journal du Citoyen

La reprise de Rutshuru par l’ar- mée congolaise, le 22 janvier 2009, donne à certains déplacés l’espoir de rentrer chez eux. Mais les incer- titudes et les craintes persistent à Kiwanja, où un village de huttes s’est établi à l’ombre du camp de la Monuc. Reportage par un journa- liste qui retrouve la ville qu’il a dû lui-même fuir il y a trois mois.

A

Kiwanja, près de Rutshuru, au Nord- Kivu, le quartier général de la Monuc est comme englouti par des centaines de huttes couvertes de bâches blanches, construites serrées les unes contre les autres. Début novembre 2008, après de violents combats entre les Maï-Maï et le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Laurent Nkunda, des milliers d’habitants de Rutshuru et des environs se sont réfugiés soit à l’hôpital, soit ici, juste à côté de la base du contin- gent indien de la Monuc, dont ils atten- daient aide et – surtout – protection.

Aujourd’hui, presque trois mois plus tard, près de 2000 ménages vivent en- core dans ce camp de déplacés, dans des conditions de logement déplora- bles. Mais le retrait du CNDP, dont le chef Laurent Nkunda est en résidence surveillée au Rwanda, la reprise de la région par l’armée officielle, le 22 janvier 2009, leur laissent entrevoir un retour chez eux.

A quelques mètres des huttes, l’en- trée de l’aérodrome a est devenu un marché où femmes, vieux et enfants vendent des bananes, des avocats, des mangues, de la farine, du maïs, du sa- von, de l’huile végétale… De chaque côté de l’artère principale, des cases ont été transformées en débits de boissons traditionnelles. Certaines femmes de Kiwanja passent ici des journées entiè- res à vendre leurs marchandises. «Je m’installe parce que, dans mon quartier, je ne gagne pas beaucoup d’argent.

Par contre ici, je peux facilement vendre pour 10 dollars par jour», explique Bi Jeanne, du quartier Buzito, assise der- rière son étalage.

Parmi les femmes, certaines sont traumatisées par les violences sexuel- les qu’elles ont subies et qu’elles n’ac- ceptent de raconter qu’anonymement.

Comme B. M., la quarantaine, originaire du groupement de Bukoma : «Je suis seule. Mon mari a épousé une autre

La reprise de Rutshuru par les FARDC ne rassure pas les déplacés de guerre

femme depuis que j’ai été violée par un homme armé dans la brousse où je me cachais. Ce bandit avait tiré sur ma fillette et comme mon mari avait pris la fuite, il n’a eu aucun mal à me prendre de force». Lorsqu’on lui demande qui est le père de l’enfant qu’elle porte dans ses bras, B. M. montre sa gêne: «J’étais enceinte avant d’être violée. Mon mari le sait bien, mais par crainte que je sois contaminée par le VIH/sida, il ne veut tout simplement plus de moi. Pourtant, j’ai été examinée et je suis séronéga- tive».

Des traces profondes

M. E. aussi a été victime de violen- ces lors de la guerre entre le CNDP de Laurent Nkunda et les forces gouverne- mentales : «J’étais aux champs quand la guerre a commencé. Je venais d’y passer trois jours. Trois hommes armés sont arrivés et m’ont violée. Je me suis fait soigner dans une structure de santé

pour des troubles gynécologiques, mais je traîne encore les séquelles de ce viol».

Dans ce contexte de violence, la po- pulation locale n’a eu d’autres choix que de quitter maisons et villages pour trou- ver refuge aux alentours de la base de la Monuc. «La vie n’était plus possible là-bas. La seule présence d’un militaire du CNDP suffisait à installer la pani- que. Tout le monde se terrait dans sa case», raconte M. Bazibaza, président du camp.

Ces expériences traumatisantes expliquent la méfiance qui continue de régner parmi ces déplacés. Certes, la reprise de Rutshuru par les forces gou- vernementales fait naître un espoir de retour, précise le chef du camp. Mais, la peur n’a pas disparu. La région reste fortement militarisée, avec la présence de l’armée congolaise, des troupes rwandaises et de quelques éléments du CNDP. Seul l’uniforme change : ce sont toujours des hommes en armes.

Le 27 janvier 2009, M. Bazibaza a annoncé que la décision de retour aux villages d’origine des déplacés avait été prise. «Tout le monde est d’accord pour rentrer, mais nous avons besoin de l’aide des ONG pour faciliter le rapa- triement», a-t-il ajouté. Ce n’est pas en- core fait. En attendant, depuis quelques jours, les femmes du camp bénéficient d’une formation en coupe et couture, à l’initiative de la capitaine Alame, char- gée de la communication publique à la Monuc : «Cette initiative a pour but de permettre à ces femmes de se prendre en charge quand elles seront de retour chez elles»,indique-t-elle. Mais comme rien n’est sûr, une ONG française a mal- gré tout construit des latrines aux alen- tours du camp et assuré l’approvision- nement régulier en eau.

Paul DURAND InterCongo media/Syfia

Congo profond

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Nord-Kivu

Pigistes (provinces)

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Dessin Patou BOMENGA Lay-out et mise en page

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Le «JDC» est envoyé en provinces avec l’appui logistique de la MONUC

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L

a défaillance du gouvernement con- golais s’affirme encore une fois du fait de ne pas toujours être capable d’amé- liorer sensiblement les conditions de vie des militaires, particulièrement des hom- mes des troupes et de leurs dépendants, notamment par le manque de logement approprié, de nourriture et de solde dé- cente». C’est un extrait du contenu d’un mémorandum de la Société civile du Sud-Kivu adressée au président de la République.

Pour les responsables de la Société civile, on ne peut rien attendre d’un mi- litaire au front, dont le moral est au ni- veau le plus bas. Dans le lot des condi- tions difficiles, leurs femmes et enfants ne sont pas mieux lotis. «Ils font le petit commerce, d’autres ramassent tout ce qui leur tombe sous la main…», s’apitoie un agent de douane.

Aux frontières Ruzizi 1er et 2ème me- nant vers le Rwanda voisin, les femmes des militaires accompagnées de leurs enfants vont s’y approvisionner en divers produits vivriers (mangues, sandwiches, tomates, farine) qu’elles revendent à Bu- kavu le soir, après la fermeture officielle des marchés. «C’est pour éviter les taxes», raconte Masinde, femme d’un militaire du camp Saïo en pleine ville de Bukavu. «Les policiers ne s’en prennent pas à nous parce que nous vivons dans les mêmes conditions qu’eux», s’expli- que-t-elle.

Conditions de vie misérables D’autres femmes qui viennent de la commune de Bagira, une de trois com- munes de Bukavu, préparent le «Kindin- gi» ou «Kanyanga» ou «Lotoko», alcool local à base de maïs fermenté, mais prohibé. Ces vendeuses proviennent précisément des camps militaires PM au quartier C et du camp Musique au quar-

A Bukavu, les soldats vivent sur le dos de la population

tier D, «Nous n’y pouvons rien», déclare Micheline Nkarha, femme de policier.

«C’est grâce à cette boisson que mon mari mange à son retour de son dur boulot, les enfants aussi. Ils sont scolarisés et habillés grâce à cela». Et de renchérir en des termes pathétiques :

«Voudriez-vous nous voir faire la prosti- tution pour les besoins élémentaires qui nous sont privés et ridiculiser jusqu’à la lie nos maris? N’est-ce pas déjà suffi- sant ce qu’ils endurent?»

«On se sert des cordes pour accéder à l’étage»

A Bagira, les militaires vivent dans des maisons en étage délabrées datant de l’époque coloniale. Les escaliers ont déjà servi de bois de chauffe. «On se sert désormais d’une corde, comme des parachutistes pour accéder à l’étage», raconte Marie-José Ilunga, un enfant de militaire. «Le matin on se débrouille pour faire tout descendre par les garçons qui sont plus agiles et éviter ainsi de mon- ter chaque fois. Regarde la maison, elle n’a plus de fenêtre», rigole la maman de Marie-José. La promiscuité est le lot des familles de militaires. «Nous vivons comme des chiens !» s’exclame-t-elle.

Si les femmes se débrouillent tant bien que mal, ce n’est pas toujours le cas pour leurs maris. B.M. du quartier Nguba, proche du camp Saïo, ne mâche pas les mots : «Ce sont eux qui de nuit nous raflent nos portables, dévalisent et créent l’insécurité». Il fait une kyrielle de répertoire. Il évoque aussi le conflit né il y a quelques mois entre plus de 4.000 militaires et leurs dépendants de la 14ème brigade, provenant du Nord-Kivu, qui étaient basés dans le territoire de Kaba- re. Un milieu pauvre où la population a subi la loi de ces militaires laissés aban- donnés à eux-mêmes. Des villages de

Kabare ont été pillés au grand dam de la population. Passant des nuits dans des baraques de fortune avec leurs femmes et enfants, aussi bien à Kabare qu’à l’aé- roport de Bukavu et partout où ils sont casés, ils se plaignent de la vie qu’ils mènent et accusent leurs supérieurs d’être bien logés et de se construire des villas.

Soutien de la population D’autres tracasseries des militaires sont répertoriées par des habitants des territoires. A Walungu, Mwenga, Idjwi, Kalehe, Uvira, des barrières illicites sont érigées ici et là pendant les jours des marchés par des militaires qui exigent à chaque passant entre 100 et 500 Fc, ou des vivres. A ces tracasseries s’ajoutent des travaux forcés auxquels la popu- lation est assujettie depuis longtemps.

La Société civile du Sud-Kivu dénonce même l’accès des militaires dans les carrés miniers pour leur survie.

D’autres militaires préfèrent carré- ment entrer dans un autre corps, notam- ment à la police spéciale de roulage, dont les agents vivent quotidiennement sur le dos des conducteurs des véhicules. «Le militaires et policiers sont jaloux de ces agents, car ils mènent une vie au dessus de leur salaire après leur racket de la journée», affirme Pius Mbale, chauffeur de taxi bus. En octobre 2008, la Société civile a lancé une opération dénommée 570 Fc par ménage pour soutenir les FARDC, ainsi qu’une collecte des vivres et non vivres pour assister les familles des soldats du Nord et du Sud-Kivu. En attendant, ce sont les femmes et enfants des militaires qui font vivre leurs maris et pères. Révolté, un des enfants a posé la question de savoir jusqu’à quand ce changement de rôle.

Baudry ALUMA InterCongo media/Syfia

Sud-Kivu

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