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L'Oppidum du "Trînchi" à Cugnon

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ARCHAEOLOGIA

BELGICA

215

A. MATTHYS

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G. HOSSEY

L'OPPIDUM DU

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BRUXELLES 1979

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ARCHAEOLOGIA BELGICA Dir. H. Roosens

Etudes et rapports édités par Ie Service national des Fouilles

Pare du Cinquantenaire 1 1040 Bruxelles

Studies en verslagen uitgegeven door de Nationale Dienst voor Opgravingen

Jubelpark 1 1040 Brussel

©

Service national des Fouilles D/1979/0405/6

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ARCHAEOLOGIA

BELGICA

215

A. MATTHYS & G. HOSSEY

L'OPPIDUM DU «TRÎNCHI» A

CVGNON

BRUXELLES

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INTRODUCTION

Le village de Cugnon, niché au ereux de la vallée de la Semois, est dominé à 1' ouest par un promontoire - << Le Fayet >> - que eeinture la rivière étalée en un large méandre, vers le nord. Cette hauteur est une langue de terre aisément aeeessible de deux eötés. Au sud, un ehemin mène vers un plateau ondulé eulrninant à plus de 320 m, qui s'étire ensuite surplus de 1650 m vers le nord, en une pente douee dévalant vers la Semois et un gué. A l'est, les flanes raides et abruptspiongent dans la rivière, interdisent l'aeeès et protègent naturellement la hauteur. A l'ouest, le relief rend l'approehe diffieile (fig. 1).

Fig. 1. Situation topographique.

Une partie de eet éperon seulement, de nature propiee à la défense, porte la fortifieation sur une superfieie de 6 Ha 25. Au sud, une dépression large d'une eentaine de mètres et à la dénivellation proehe des dix mètres, barre tout naturelle-ment l'aeeès. La tradition populaire voyait en effeten elle Ie «Trînehi>> ou fossé. Au-delà de eet obstacle naturel et parallèle à lui, une erête que limitent, de part et d' autre, des pentes raides, est eoiffée sur toute sa longueur d 'une importante levée de terre (fig. 2 et pl. I, tr. 1-5). Au nord, à la << Laide Plaee >>, à quelque 580 m de ee

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6 lNTRODUCflON

mur de barrage, c'est un étranglement du méandre de la Semois, utilement mis à profit pour y implanter un second mur, qui ferme la fortification, parfait ainsi la défense et limite I' accès par Ie nord, là ou les pentes do u ces largement établies dans les alluvions, facilitaient la montée vers la fortification. Sur Ie flanc occidental une terrasse est aménagée à l'endroit de la ropture depenteet termine Ie plateau en une dépression horizontale et forme sur tout ce cöté un chemin de ronde appuyé contre un mur de soutènement, véritable rempart au parcours eneare bien conservé sur Ie terrain (pl. I, tr. 6-8). A l'est, les roehers développent des à-pies suffisants pour rendre inutile toute proteetion supplémentaire.

Fig. 2. Le << Trînchi >>et vestiges de la levée de barrage méridionale (en pointillé). Vue vers

Ie nord.

Les site fut découvert au cours d'une prospection suivie d'une enquête auprès des habitants de Cugnon, en 1973(1). Depuis lors, trois campagnes de fouilles se

sant succédé. En 1976, les travaux permirent de dégager l'entrée méridionale, de pratiquer une coupe transversale dans Ie rempart et d'examiner les murailles

établies sur Ie pourtour occidental. En 1977, furent étudiés aussi Ie mur de barrage

septentrional ainsi que Ie front du rempart méridional. Une reconstitution et une

1 Nous tenons à remercier M. Dufour, agent technique des Eaux et Forêts pour la

localisation du site. Quelques sondages avaient été réalisés vers 1925 par M. l'abbé Wéry, curé de Cugnon.

(7)

INTRODUCfiON 7

restaura ti on vinrent achever Ie travail entrepris (2). En 1978, un sondage complé-mentaire, destiné à mieux comprendre la structure interne du rempart méridional, vint mettre un terme à la reconnaissance générale du site.

2 Nous remercions M.P. Solvay pour l'autorisation de fouilles et Ie don généreux des chênes utilisés pour la reconstitution du rempart. MM. J. Poncin et M.J. Co lette ont permis les travaux sur leurs terrains; M.R. Barthélémy et l'administration communale d'Herbeu-mont ont foumi les pierres nécessaires à la restauration.

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VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES

Le rempart de barrage méridional

Ce rempart a une longueur de 108 m (pl. I, tr. 1-5 et pl. lil). A I' est, il est presque totalement arasé par les travaux agricoles, mais il forme encore une limite dans Ie parcellaire actuel et sa position dominante sur la ligne de crête révèle toujours les traces de son relief ancien (fig. 2). A l'orée de la forêt, vers l'ouest, som emplacement forme une enclave inculte autrefois boisée, au relief irrégulier; tandis que sous Ie couvert des arbres, il se dresse encore intact sur une longueur de 43 met y développe une hauteur de 2 m 25 à 3 m 20 pour une largeur totale proche de 15 m (fig. 3). Une large dépression dans le corps même du barrage, en un endroit difficilement accessible par voie directe et frontale, précédée d'un raidillon et cantonnée de pentes accusées, laissait présumer l'existence d'une entrée. Les fouilles l'ont confirmé.

Deux coupes transversales pratiquées dans Ie rempart révèlent sa structure interne et permettentune tentative de reconstitution des phases essentielles de sa construction (fig. 4 et 5). Dans une première période, un mur de dalles de schiste assemblées à I' argile et large de 0 m 60 sert de soutènement à une rampe faite de remblais accumulés derrière et contre lui (fig. 4, pér. 1). Ces plans inclinés permettaient aux défenseurs de monter rapidement en n'importe quel point du rempart. La stratigraphie montre clairement la succession de couches rapportées. L'ancien humus ne se reconnaît pas aisément, mais par contre, une fine couche d'incendie- restes probables d'un défrichement par Ie feu- est répandue sur Ie sol vierge (fig. 4, a). A une couchede terrepure (fig. 4, b), succèdent de fines plaquettes de schiste (fig. 4, c), probablement les déchets de taille des pierres utilisées dans Ie corps du mur, puis un paquet de terre rougeätre (fig. 4, d), dans laquelle se distinguent des strates obliques et une couchede grosses pierres, dalles de schiste et bloes de quartzite. La largeur totale de ce rempart peut être estimée à 4m25, la hauteur totale conservée ne dépasse pas 2m. Une couchede remblais récents (fig. 4, E-F, h) constitue la surface actuelle; elle provient du creusement d'un fossé limitropheet accentue quelque peu la hauteur réelle du rempart ancien à eet endroit.

Dans un second aménagement, un nouveau front est établi contreeten avant de la muraille primitive (fig. 4, pér. 2). Le profil E-F montre clairement ce second mur, large d'un mètre et posé également sur Ie sol en place. Les quelques assises conservées sur une hauteur de 0 m45 au maximum, correspondent à un mur dont Ia trace verticale visible dans le profil donne une hauteur minimale de 1 m 65, qui pourrait être portée à 2 m 08. Le second profil G-H, ne conserve plus de traces de ce mur. A son emplacement primitif correspond une assiette horizontale creusée jusque dans Je sol vierge pour y établir un troisième front (fig. 4, G-H, e). Ces

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YESTIGES ARCHÉOLOGIQUES 9

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10 VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES

Fig. 4. Coupes stratigraphiques E-F et G-H.

travaux ont non seulement fait disparaître Ie mur de barrage de la seconde période, maïs les traces d'arrachements et de destruction sont même visibles dans Ie parement du mur prirnitif. La largeur totale de la levée couvre 5 m25. Il semble bien que dans cette phase, Ie rempart ne soit pas exhaussé et élargi. Une couche oblique de grosses dalles plates (fig. 4, E-F, t), dont la longueur ne dépasse pas Ie mètre, provient sans doute de la démolition des superstructures de ce second mur et scelle ainsi Ie noyau des deux premières périodes de construction en indiquant la pente primitive des rampes, proche de 45°.

Dans une troisième phase, après démolition naturelle ou volontaire du rem-part, un nouveau front du type << Pfostenschlitzmauer » est aménagé à 1 m 65 en

avant du second (pl. III et fig. 6-7). Il se compose d'une rangée de pieux (fig. 4, g) parfois calés au moyen de pierres logées dans des fosses circulaires profondes de 0 m 65 à 0 m 85, creusées à des distances régulières de 0 m 60 à 1 m. Les pieux ne se dessinaïent plus dans Ie remplissage des fosses et sans doute avaient-ils été récupérés. La plupart des trous de pieux étaient creusés à la verticale, maïs leur base n'excédait pas Om66 pour une fosse large au sommet de Om75 à Om85. Les pieux ne devaient cependant pas dépasser Ie diamètre de 0 m 40 à 0 m 50. Ils étaient engagés au x trois-quarts dans Ie mur et dépassaient donc de peu Ie front du rempart. Des murets posés sur Ie sol en place, sans fondations, et élevés en dalles de schiste remplissaient les intervalles laïssés entre les pieux; ils avaïent une épaisseur de 0 m 30 à 0 m 50 et étaient parfois ancrés dans Ie corps même du rempart au moyen de pierres longues et étroites. Un segment de mur offrait une particularité de construc-tion destinée à mieux contenir les terres accumulées derrière lui. A une hauteur de 0 m 40, les assises suivantes étaient construites avec un retrait de 0 m 09 (pl. III, entre 6-7). Cette mise en a:uvre ne devaït pas être générale, car un seul cas fut

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VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES 11

Fig. 5. Coupe E-F, à travers la levée méridionale.

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12 VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES

relevé, mais il se pourrait que les constructeurs aient appliqué cette méthode là ou c'était nécessaire et donc à des hauteurs différentes, dans les superstructures aujourd'hui disparues. Au total, 36 pieux et 31 segments de murs furent ainsi dégagés.

Fig. 7. Vue partiellede l'entrée et du front méridional, après dégagement.

Derrière ce front, Ie profil révèle la structure interne du rempart. Des couches horizontales de terre rougie mêlée à du charbon de bois, séparées entreelles par de l'argile pure ou des grosses dalles plates (fig. 4, coupe E-F, i). Ce sont, à n'en pas douter des poutres horizontales destinées à raidir la levée de terre, elles se trou-vaient derrière la muraille et ancraient, au moins dans un cas, un pieux vertical du rempart (pl. UI, n° 5). Les premières poutres horizontales sont visibles à Om35 du sol primüif, elles prennent appui sur la muraille démolie de la seconde phase, qu'elles recouvrent d'ailleurs sur toute sa largeur (fig. 4, coupe E-F, i). Blies pénètrent ainsi sur 2 m dans Ie corps du rempart et sur une hauteur de 1 m 50, on en compte huit superposées, séparées entreelles par des couches de remblais de 0 m 08 à Om 18 d'épaisseur. Une de ces poutres futdégagée derrière Ie pieu 5, elle atteintle mètre. A ce troisième front, correspond un nouvel apport de remblai sur la levée primitive, portée ainsi entre 2m 10 et 2m40 de hauteur conservée. Les rourailles des périodes précédentes sont englobées dans la nouvelle rampe d'accès. La largeur totale de ce nouveau barrage atteint 10m25. D'abord obliques, les strates

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VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES 13 du rempart tendent vers I' horizontale à l'approche du front palissadé, elles forment là les assises d'un chemin de ronde large de près de 1 m.

Fig. 8. L'entrée méridionale, après dégagement.

L'entrée, large de 6m50, est formée de quatre pieux disposés dans l'épaisseur du rempart qui, dessinent un porche de 2m50 de profandeur (pl. lil, n° 1, 4, 21,22 et fig. 7, 8). Ces pieux ont une profandeur considérable de Om80 à 1 m 10; leur parfaite symétrie et leur diamètre plus important fondent l'hypothèse d'une cons-truction plus élaborée comprenant chemin de ronde et réduit contrölant la porte (fig. 10). Une autre particularité est intéressante, la partie occidentale de l'entrée est décrochée vers I' avant et dépasse Ie front de 4m25 au total. Cette disposition particulière permet de mie u x en trevoir I' économie générale de I' entrée, point faible de toute fortification (pl. lil). Une attaque de face n'était pas possible, laporteest en effet précédée d'une pente raide assez importante, l'assaillant devait obligatoi-rement venir de I' est, soit en longeant Ie rempart lui-même, soit en adoptant une course oblique vers l'accès. Il devait bien sûr protéger ainsi son flanc droit et tenir ses armes de la main gauche, ce qui normalement était un handicap certain. Son flanc gauche ainsi découvert était pris en enfilade à partir du rempart décalé. Engagé dans le couloir d' accès, il venait se heurter à la porte sans do u te accrochée au fond de celui-ei et tombait sous le controle des défenseurs postés au-dessus de lui, dans les superstructures (fig. 9 et 10).

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14 VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES

Fig. 9. Le front méridional et l'entrée, après restauration.

Fig. 10. Reconstitution de l'entrée méridionale.

Le dispositif des entrées des deux premières pé riodes de construction n 'est pas

connu. La topographie dicte souvent I' emplacement de l'accès et il a, selon toute

vraisemblance, été toujours localisé au même endroit; dans ce cas, les travaux postérieurs I' ont alors complètement oblitéré.

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VEST!GES ARCHÉOLOGIQUES 15

Le rempart de barrage septentrional

Le rempart de barrage, au oord, est logé dans un étranglement de la Semois, au lieu-dit la << Laide place >>, nom évocateur des difficultés rencontrées à 1' époque eneare peu lointaine, ou toutes ces terres étaient cultivées (pl. I, tr. 11-13 et fig. 11-12). Il sert d'ailleurs taujours de limite cadastrale et ce röle trouve son origine dans la conservation probable de son tracé durant de longs siècles après son

abandon. Il a une longueur de 66 met est largement arasé par les travaux agricoles

d'antan; un chemin de terre Ie traverse pour rejoindre Ie gué proche.

Encore aujourd'hui, à l'ouest du rempart, là ou s'amorce la pente, le relief

primitif est moins entamé et il subsiste toujours une levée de terre ou pointent

quelques grosses pierres. Ce rempart relie des à-pies naturels protégeant ses

extrémités et s'élève, à l'ouest, devant une forte dénivellation naturelle, véritable fossé de défense ménagé dans la roche.

Cette levée de terre est contenue entre deux murs de pierres sèches et sa

largeur varie entre 3 m 30 et 3 m 50. Le front extérieur était encore haut de 0 m 80 et,

à l'intérieur, les assises peu régulières de fragments de schiste entassés présentaient encore une hauteurde Om38. Une route traverse encore aujourd'hui !'ensemble de la fortification et si, au sud, elle a emprunté un tracé moderne en détruisant ainsi

une partie du mur méridional, au nord, par contre, la topographie particulière dicte

la percée, et le chemin moderne doit se confondre avec l'accès antique. Le niveau de la route actuelle est ici bien en dessous de la surface ancienne (pl. I, tr. 13);

l'érosion et les eaux de surface ont entraîné à loisir les terres sur cette pente accusée: la nature et les hommes ont trop modifié eet endroit et il ne subsiste rien du dispositif premier de cette entrée septentrionale.

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16 VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES

Fig. 12. Le rempart de barrage septentrional après dégagement. Vue vers Ie sud.

L'enceinte occidentale

A l'ouest de la fortification, les pentes moins accusées et un flanc plus

accessible justifiaient la création d'une enceinte (pl. I, tr. 6-10 et fig. 13). Un mur,

élevé précisément à la limite du plateau, à l'endroit précis ou s'amorce la pen te, sert de soutènement aux terres accumulées derrière et contre lui, pour former ainsi une terrasse de circulation large et dominante. Ce mur, repéré dans plusieurs sondages, avait une largeur de 1 m 50 et était édifié en plaquettes de schiste et bloes de quartzite. Souvent en mauvais état, il avait parfois même complètement disparu. Cependant, gräce à l'aménagement de la rupture de pente, Ie parcours de cette enceinte s' observe aisément sur tout Ie flanc occidental. Au nord-ouest, I' enceinte ne se raccordait pas à l'extrémité du mur de barrage septentrional mais se greffait

quelque peu en deça de la levée. Cette anomalie est dictée par la topographie. 11

fallait obligatoirement continuer le barrage septentrional pour rejoindre un à-pic naturel.

Le matériet archéologique

I. Bord d'ume, terre cuite celluleuse brun-clair à surface lissée brun-foncé à noir.

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VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES 17

Fig. 13. L'enceinte occidentale (tr. 6). Vue vers l'est.

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18 VESTIGES ARCHÉOLOGIQUES

2. Fragment d'urne, terre cuite brun-foncé, la partie supérieure est soigneusement lissée, la partie inférieure est éclaboussée (fig. 14,2).

3. Re bord d 'une coupe <<en parasol» à bord rabattu, terre cuite celluleuse rouge-brique, brun-clair à l'extérieur. Datation: La Tène III (M. Meunier et A. Cahen-Delhaye, ]"a fortification du Cheslé de Bérisménil, Archaeologia Belgica 185 (1976) fig. 5, 28; La Tène III a (G. Leman-Delerive, La coupe à bords ourlés, chronologie, utilisation et répartition à l'époque de la Tène, Antiquité Classique 42 (1973) 424-425) (fig. 14,3).

4. Fusaïole, terre cuite celluleuse orangée soigneusement lissée. Haut.: 13 mm (fig. 14,4).

5. Meule, lave basaltique de l'Eifel. Partie inférieure dormante. Diam.: 35,8cm. Datation: La Tène III (G. Jacobi, Werkzeug und Gerät aus dem Oppidum van Manching (Wiesbaden 1974) 130-132; La Tène I I I -début époque romaine (J. Röder, Antike Steinbrüche in der Vordereifel,Neue Ausgrabungen in Deutschland (Berlin 1958) type 4-6, 269, fig. 1) (fig. 14,5).

6. Pointe de flèche pédonculée à ailerons, retouches bifaces couvrantes. Datation:

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OCCUPA TION ET CHRONOLOGIE

L'absence de matériel stratigraphié, la simplicité même des techniques utili-sées pour la construction de 1' enceinte occidentale et du mur de barrage septentrio-nal, ne rendent pas aisée la datation de la fortification de Cugnon. En effet, toutes les trouvailles sont de peu d'utilité pour cerner les phases de construction de la fortification, la plupart ne sont pas stratigraphiées et ne peuvent par conséquent servir qu'à fixer les périodes d'occupation du site. Des éléments de chronologie relative se dégagent cependant de la succession de trois stades de construction de la levée de terre méridionale. Une telle évolution trouve certainement son origine dans une défense toujours plus élaborée du pointleplus faible de la défense, celui du front d'accès.

Les deux premières phases de construction du barrage méridional sont d'un type simple: murs peu épais soutenant une rampe de terre. Par contre, pour le rempart de la dernière période, des points de campararaison intéressants sont possibles. J. Collis a décrit les différents types de remparts retrouvés dans les fortifications de La Tène finale(3). La levée de Cugnon semble être une version améliorée du type de Kelheim. Ce dernier est caractérisé par des pieux verticaux reliés entre eux par des murets, à 1' arrière desquels est accumulée une rampe de terre (4). Le manque de solidité de ce mur, seul à contenir la poussée des terres

entassées contre lui, a été souligné à plusieurs reprises. A Kelheim, les auteurs avancent une durée moyenne de 10 à 15 ans pour chaque phase de construction, alors qu'une trentaine d'années semble être nécessaire pour venir à bout d'une fortification en bois plus élaborée. L'ensemble du refuge de Kelheim, daté de la fin de La Tène, montre 1' évolution des trois fronts successifs de type du « Pfostens-chlitzmauer ». Chaque fois, lors de la reconstruction, le front avance, la distance

entre les pieux se retrécit et les murets intercalaires se multiplient et montrent ainsi la leçon tirée de l'expérience. A Cugnon, Ie type de Keiheim se développe et se perfectionne et si des pieux verticaux sont logés dans la masse de la levée et forment, avec des murets, un front altemé, des poutres horizontales et superposées raidissent aussi le rempart et au moins dans un cas sont ancrées dans un pieu vertical. Il semble cependant que cette technique ne fut utilisée que dans une partie de la levée (fig. 4, coupe E-F, i). La coupe suivante ne révèle pas de tels vestiges (fig. 4, coupe G-H).

3 J. CoLus, Defended Sites of the Late La Tène, in Centraland Western Europe, BAR Supplementary Series 2 (Oxford 1975) 21.

4 P.R. HERMANN, Grabungen im Oppidum von Keiheim 1964 bis I972,Ausgrabungen in

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20 OCCUPATION ET CHRONOLOGIE

Les fouilles de Finsterlohr mantrent un type de front altemé identique à celui de Cugnon(5). Les similitudes ne s'arrêtent cependant pas là, on retrouve aussi, dans la structure interne de ce rempart, une rampe menant au sommet de la levée et parsemée de gros bloes de pierre, pour lui donner une meilleure cohésion et surtout endiguer quelque peu l'érosion. A Cugnon, il en était de même, comme en témoignent les gros bloes de quartzite épars roulés à la base de la pente et certains eneare in situ dans la demière couchede remblai, sous l'humus.

Les sondages effectués en avant du rempart n'ont pas permis de détecter un éventuel fossé, et les prospections aériennes répétées n'ont rien laissé entrevoir de semblable. Ce n'estd'ailleurs pas là une nécessité, les fossés trouvés à Keiheim et à Finsterlohr ne sant que des dépressions irrégulières, établies en avant du front, sans valeur défensive aucune, elles sant le résultat de l'extraction des terres et des matériaux nécessaires à la levée. A Cugnon, la dénivellation naturelle accusée en avant du mur tenait lieu de fossé, quant au x matériaux, ils furent apparamment tirés de derrière Ie barrage. L'intérieur de la fortification forme, en effet, aux abords du rempart, une dépression bien plus basse que le niveau de terres environnantes.

La datation de ce type de rempart s'appuye sur différentes fouilles récentes.

Dans Ie site éponyme de Kelheim, la levée contenait des tessons de La Tène tardive. Le même type de rempart retrouvé à Manching date également de La Tène finale, quant à la demière phase du rempart de Finsterlohr, une datation de La Tène finissante est aussi avancée (6).

Si les fouilles ont pu faire connaître la technique de fortification du camp de Cugnon et sa périodisation, les comparaisons typalogigues n'ont pu dater que la phase finale de l'occupation. La rareté des trouvailles ne permet pas de mieux définir 1' accupation maïs postule un refuge temporaire plutot qu 'un habitat perma-nent, destiné cependant à abriter une population importante. La carenee des fouilles à l'intérieur de la fortification reste évidente, cambier cette lacune postule cependant des travaux d'envergure.

Les découvertes de La Tène sant inexistantes aux environs immédiats de Cugnon. A l'ouest, à une quinzaine de k:ilomètres, la motte médiévale de <<La Ramonette >> à Bouillon, fouillée en 1977, était cependant construite sur une couche d'occupation de La TèneC). Nul doute que ces vestiges d'habitat révèlent I' accu-pation d'un éperon déjà fortifié à cette époque, maïs dont les structures auraient été effacées par !'habitat actuel.

5 H. ZüRN, Grabungen im Oppidum von Finsterlohr, Fundberichteaus

Baden-Würtem-berg 3, (1977) 244-247, fig. 18.

6 F.R. HERMANN, op. cit., 301 et Io., Grabung am inneren Wall des Oppidums von

Keiheim 1971, Archaeologisches Korrespondenzblatt 3 (1972) 295; J. CoLus, op. cit.,

109; H. ZüRN, op.cit., 260 et ss.

7 A. MATTHYS, Les fortifications médiévales de Bouillon, Archaeologia Belgica, (en

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OCCUPATION ET CHRONOLOGIE 21

Au nord-est, à une quinzaine de kilomètres aussi, on trouve le groupe

méridional des tombelles, campris entre Bertrix et Bastogne, qui se date au début du second à ge du Fer, soit vers 4 70 av. J.-C. et qui semble devoir disparaître

brutalement vers 250(8). Ou ces gens se réfugiaient-ils? Les hauts plateaux

ardennais n 'offr·ent que peu de sites aptes à être fortifiés et la descente vers le bassin de la Semois proche et ses vallées découpées en larges éperons s'imposait tout naturellement. Subsiste le problème de la chronologie de l'occupation. La fortifi-cation de Cugnon, dans sa phase finale, soit à l'extrême fin de La Tène, peu avant ou même pendant la conquête romaine, n'a pu accueillir les populations dont les tombelles si nombreuses ont été découvertes autour de Neufchàteau. Toutefois, le

« Trînchi >> de Cugnon a connu au rnains deux phases antérieures d' aménagements

qui pourraient bien refléter le souci constant de ces populations du début du second

àge du Fer de se mettre à 1' abri derrière des remparts, mais ce rapprochement entre

les populations connues par les tombelles et le camp retranché de Cugnon n'en reste pas rnains hypothétique.

Un texte du

vne

siècle révèle le nom antique de Cugnon qualifié de Casecon

-gidunus, c'est là à n'en pas douter Ie nom du site à l'époque gauloise(9). L'abbé

Herbecq s 'est penché a vee ardeur sur la signification du mot et de sa savante étude il faut retenir le sens de<< forteresse (dunus) ou se trouvait l'habitation (case) d'un

certain Congius >> soit eneare <<la hauteur roeheuse (case) fortifiée ( dunus)

apparte-nant à ce Congius >>. M.M. Bologne penchait pour la glose suivante:

Cassigonge-nodunum ou l'oppidum (dunum) de la boucle (gengh) à l'eau rapide (cassi). Si aucune découverte datant de l'époque romaine ne fut faite dans la fortifica-tion elle-même- sauf peut-être une meule qui pourrait d' ailleurs aussi dater de la

fin de La Tène- des tessons typiquement gallo-romains furent néanmoins

décou-verts endehors de la fortification, sur la pen te septentrionale qu' entoure la Semois. Les riches alluvions attirèrent sans doute là un petit établissement agricole selon toute vraisemblance étranger d'ailleurs au camp retranché lui-même et bien posté-rieur à lui.

Mais la fortification de Cugnon fut peut-être aussi le théàtre d'autres événe-ments au début de l'occupation romaine. L'examen des principaux éléévéne-ments de la

révolte des Gaulois, suscitée par Ambiorix, en 54 av. J.-C., complétée des

éléments topographiques relevés à Cugnon permet d' aborder le problème de la

localisation du camp de Labienus sous un angle nouveau.

8 A. CAHEN-DELHAYE, Tombelles de l'áge duFeren Ardenne, Archaeologicum Belgii

Speculum VIII (Bruxelles 1978) 12 et ss.

9 J. HALKIN et G.G. RoLAND, Recueil des chartes de l'Abbaye de Stavelot-Malmedy,

Comm, Roy. Hist. I (Bruxelles 1909) 1-4.

10 E. HERBECQ, Miettes de toponymie beige au pays de la Semois

oe

série),

Casecongidu-nus- keugnon-Cugnon (1), Le Rappel (Charleroi, 17 mai 1978); ibid., (2) (Charleroi, 18

(22)

22 OCCUPATION ET CHRONOLOGIE

Durant 1 'hiver 54-53, César organise ses quartiers. En raison de la mauvaise récolte et des difficultés de ravitaillement, il divise son armée en sept groupes répartis auprès des différentes cités. C'est ainsi que T. Labienus et une légion sont

envoyés «in Remis... in confinio Treverorum >> (Bello gal!. V, 24), chez les

Rèmes, au~ confins des Trévires. César décrit ce camp comme très bi en fortifié à la

fois par la nature du lieu et par la main de l'homme « ..• et loci natura et manu

munitissimis castris ... >> (Bello gal!. V, 57). Labienus est en pro ie au x incursions

joumalières d 'lndutiomar et de ses troupes, mais ayant fait entrer secrètement dans son camp les cavaliers qui lui manquaient, Labienus fait ouvrir subitement les deux

portes << ... duatus portis ... >> et envoie sa cavalerie à la poursuite de l'ennemi.

Indutiomar est rattrapé, au milieu d'un gué proche << .. .in ipso fluminis vado ... ,, , il

est aussitöt tué et décapité, et sa tête est rapportée en triomphe au camp (Bello gal!.

V, 57).

11 faut sans doute croire avec César que Labienus est cantonné chez les Rèmes, et Cugnon est situé à peu de distance de ceux-ci, mais en territoire trévire, soit dans les limites de 1' ancien diocèse de Trèves qui ont servi à fixer, par conjecture, celles de ces peuplades gauloises. Mais ces frontières étaient-elles bien précises à cette

époque et le mot <<in confinio ,, , repris par César, ne désigne-t-il pas plutot une

partie de territoire contesté commun en quelque sorte aux deux peuplades, comme

le pense avec raison sans doute M.P. Congar(11)?. L'hiver suivant, en 53,

Labienus hiverne d'ailleurs, aux dires de César, chez les Trévires, toujours avec une seule légion. L' importance de ces camps fix es plaide pour une identité parfaite

avec le camp de l'année précédente (Bello galt. V, 7). Ladescription du camp de

Labienus, établi dans un site naturellement bien protégé et aménagé, est courante chez César, mais la mention de deux portes et surtout d'un gué tout proche, accessible à la cavalerie, semble plus particulière et cadre tout à fait avec la disposition reconnue à Cugnon. La superficie de 6 hectares et 25 ares mesurée à Cugnon convient tout à fait pour une légion dont l'effectif à l'époque de César peut

atteindre 4.200 hommes y compris les bagages(12).

Trop souvent les auteurs ont recherché, sur la carte, un endroit possible pour y placer le camp de Labienus, sans tenir compte des vestiges matériels nécessaire-ment apparents dans une fortification, et si les emplacenécessaire-ments théoriques sont nombreux, les sites effectivement fortifiés dans cette région sont eux plus rares. Tels sont les éléments à verser au dossier, mais il reste qu'il relèvent de l'hy-pothèse.

Vers 645/647, les textes situent Cugnon dans le domaine royal mérovingien,

avec Orgeo comme centre(13). C'est dans ces terres que Sigebert 111 octroie

11 P. CoNGAR, Labienus-Indutiomar, Annales Sedanaises d' histoire et d' archéologie,

Bull. soc. des Amis du vieux Sedan 11 (s.d.) 3-4.

12 G. RoussEL, La guerre des Gaules (Paris 1963) 239.

13 R.

(23)

OCCUPATION ET CHRONOLOGLE 23

Cugnon et ses alentours à Remacle pour y fonder une abbaye. Les limites de cette donation sont très précises et toutes mesurées , , . . . à partir de la fortification elle-même ... que la Semois entoure comme d'une ceinture ... .in loco qui dicitur Casecongidunus quem Sesamiris fluvius cingere videtur. .. >>. Si la localisation

topographique ne laisse aucun do u te et si I 'identification de la forteresse des textes avec Ie refuge du << Trînchi » est claire, les traces d'une accupation mérovingienne font défaut. Il n'est cependant pas exclu qu'elle servit au moins en partie de refuge pour les populations de la région dont Ie texte du VIF siècle fait explicitement mention. Il faut rappel er à ce propos I' existence à 3 km de là, d' une fortification, le

<< Chäteau des Fées >> de Bertrix, aussi occupée à l'époque mérovingienne(14 ).

Après cette mention du haut moyen äge, Ie site de hauteur semble avoir été définitivement abandonné et livré à l'exploitation agricole dont la ferme de Tibau-roche, citée depuis Ie XIVe siècle, est Ie témoignage encore vivant aujourd'hui. Le gué restera d'importance et une forteresse: tour et basse-cour, ceintes de fossés,

s'élèvera, sans doute dès Ie Xllle siècle, dans la vallée elle-même, à proximité immédiate de la voie d'eau(15). L'ensemble formera Ie noyau d'une petite sei -gneurie accrochée au gué dont elle tire ressources et raison d'exister: perennité de fortifications en en même lieu privilégié, illustration du souci constant, à travers les

siècles et avec des moyens différents, de contröler ce passage obligé (16 ).

14 A. MATTHYS et G. HossEY, Le «Ciuîteau des Fées» à Bertrix, refuge romain et médiéval, Archaeologia Belgica 146 (Bruxelles 1973) 32.

15 G. HossEY et A. MATTHYS, Laforteresse médiévale de Cugnon, Archaeologia Belgica 212 (Bruxelles 1979).

16 Ce n'est qu'en 1931 qu'un chemin carrossable relia directement Dohan et Cugnon (Communication M.A. Dufrêne, instituteur e.r. de et à Dohan).

(24)

TABLE DES MATIERES

Introduetion ... . 5

Vestiges aréhéologiques ... . 8

Le rempart de barrage méridional ... .... . 8

Le rempart de barrage septentrional ... . 8 ~· L'enceinte occidentale ... . Le matériel archéologique ... . 16

~~

16 Occupation et chronologie ... . 19

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Imprimé en Belgique par la S.A. lmprimerie Erasmus, Gand

(25)

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